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04/07/2024 | FRANCE | N°23/07798

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 04 juillet 2024, 23/07798


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 56B



Chambre civile 1-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JUILLET 2024



N° RG 23/07798 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WGJ7



AFFAIRE :



S.A.S.U. HEERO CONSULTING





C/

[P] [H]





S.E.L.A.R.L. BCM



...



Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Octobre 2023 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° RG : 2023R00936


r>Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.07.2024

à :



Me Nadia CHEHAT, avocat au barreau de VERSAILLES - (88)(x2)



Me Charles-Edouard FORGAR, avocat au barreau de PARIS(P0205)





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FR...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 56B

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2024

N° RG 23/07798 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WGJ7

AFFAIRE :

S.A.S.U. HEERO CONSULTING

C/

[P] [H]

S.E.L.A.R.L. BCM

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Octobre 2023 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° RG : 2023R00936

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.07.2024

à :

Me Nadia CHEHAT, avocat au barreau de VERSAILLES - (88)(x2)

Me Charles-Edouard FORGAR, avocat au barreau de PARIS(P0205)

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S.U. HEERO CONSULTING

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 892 787 516 (Rcs Nanterre)

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Nadia CHEHAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 88

Ayant pour avocat plaidant Me Claire CHAPALAIN, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

Monsieur [P] [H]

Entrepreneur individuel, exerçant sous le numéro SIREN : 813 357 167

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Charles-Edouard FORGAR de la SELARL LARGO AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0205

Ayant pour avocat plaidant Me Daniel BENAÏM, du barreau de Paris

INTIME

****************

S.E.L.A.R.L. BCM

administrateur judiciaire, prise en la personne de Me [D] [N],

[Adresse 4]

[Localité 7]

S.A.S. ALLIANCE

Mandataire judiciaire, prise en la personne de [X] [M]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentant : Me Nadia CHEHAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 88

Ayant pour avocat plaidant : Me Claire CHAPALAIN, du barreau de PARIS

PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 Mai 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Thomas VASSEUR, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère,

Madame Marina IGELMAN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

Le 20 mars 2023, la société Heero Consulting et M. [H] ont conclu un contrat de prestation de services, en application duquel ce dernier a émis plusieurs factures, demeurées impayées.

Par acte du 29 août 2023, M. [H] a fait assigner la société Heero Consulting en référé-provision.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 24 octobre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a :

condamné la société Heero Consulting au paiement d'une provision d'un montant de 18.300 euros, augmentée des intérêts au taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points, à compter de la date d'exigibilité de chaque facture ;

condamné la société Heero Consulting au paiement d'une provision d'un montant de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement prévue par les articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce ;

condamné la société Heero Consulting aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue au greffe le 20 novembre 2023, la société Heero Consulting a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de dispositif.

Par jugement du 23 novembre 2023, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Heero, en désignant la société Alliance en qualité de mandataire judiciaire et la société BCM en qualité d'administrateur judiciaire.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 22 avril 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, la société Heero Consulting, la société BCM en qualité d'administrateur judiciaire et la société Alliance en qualité de mandataire judiciaire demandent à la cour, au visa des articles 63, 68, 329, 554, 700 du code de procédure civile, L. 622-22 du code de commerce, 1353 du code civil, de :

'- déclarer la selarl BCM et la sas Alliance recevables en la forme, en leur intervention principale volontaire, par application des articles 63 et 68 du code de procédure civile,

- déclarer la selarl BCM et la sas Alliance recevables comme n'ayant été ni parties ni représentées en première instance, par application de l'article 554 du même code,

- déclarer la selarl BCM et la sas Alliance bien fondées comme ayant un intérêt à faire juger l'infirmation de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 24 octobre 2023,

et statuant sur la demande :

à titre principal,

- constater l'irrecevabilité de la demande en paiement de M. [H] en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites,

à titre subsidiaire,

- constater l'incompétence du tribunal de commerce de Nanterre, au profit du tribunal de commerce de Marseille en application de la clause attributive de juridiction prévue au contrat,

à titre infiniment subsidiaire et en tout état de cause,

- constater l'existence de contestations sérieuses aux demandes en paiement des factures de M. [H],

par conséquent,

- infirmer l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 24 octobre 2023 en ce qu'elle a :

- condamné la société Heero Consulting au paiement d'une provision d'un montant de 18 300 euros, augmentée des intérêts au taux de refinancement de la BCE majoré de 10 points, à compter de la date d'exigibilité de chaque facture ;

- condamné la société Heero Consulting au paiement d'une provision d'un montant de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement prévue par les articles L. 441-10 et D. 441-5 du code de commerce ;

- condamné la société Heero Consulting aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- ordonner la restitution des fonds saisis le 10 novembre 2023, d'un montant de 3 344,75 euros, au profit de la société Heero Consulting,

- dire qu'il n'y a pas lieu à référé,

- débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes,

- condamner M. [H] à payer à la selarl BCM et la sas Alliance la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner M. [H] aux entiers dépens.'

Les appelants indiquent que l'instance en référé qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle n'est pas concernée par l'article L. 622-22 du code de commerce prévoyant l'interruption des instances en cours, seule une instance en cours devant le juge du fond étant soumise à ces dispositions. Ils indiquent que la demande en référé doit dès lors être déclarée irrecevable, la créance devant être soumise à la procédure normale de vérification des créances.

S'agissant de la contestation de M. [H] portant sur la recevabilité des conclusions des appelants, ils rappellent que l'intervenant volontaire dispose lui-même d'un délai d'un mois à compter de son intervention volontaire pour remettre ses conclusions et ils ajoutent que l'irrecevabilité des conclusions ne saurait au demeurant faire obstacle au principe d'ordre public de l'arrêt des poursuites résultant du jugement d'ouverture de redressement judiciaire.

À titre subsidiaire, les appelants développent les raisons pour lesquelles le tribunal de commerce de Nanterre était incompétent pour statuer, en raison de la clause attributive de juridiction bénéfice des tribunaux de Marseille. À titre encore plus subsidiaire, les appelants exposent les contestations qu'ils qualifient de sérieuses, formées à l'encontre de la demande de provision.

Dans ses dernières conclusions déposées le 18 avril 2024, auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [H] demande à la cour, au visa des articles 42, 872, 873, 910-4 du code de procédure civile, 1103 et 1353 du code civil, de :

'- déclarer irrecevables les demandes de la société Heero Consulting tendant à la constatation

de l'irrecevabilité de la demande en paiement de M. [P] [H] et à sa condamnation au remboursement de la somme de 3 344,75 euros ;

- confirmer l'ordonnance de référé du 24 octobre 2023 en son intégralité ;

- débouter la société Heero Consulting de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner la société Heero Consulting aux entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme

de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.'

L'intimée expose que les nouvelles prétentions de l'appelante, tendant à la constatation de l'irrecevabilité de la demande en paiement et à la condamnation au remboursement des sommes saisies avant que l'appel n'ait été interjeté, n'ont pas été présentées dans les premières conclusions et sont donc irrecevables en application de l'article 910-4 du code de procédure civile.

S'agissant de la compétence territoriale du juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, M. [H] expose que les clauses attributives de compétence territoriale sont inopposables en matière de référé. S'agissant de la demande de provision, M. [H] indique que les factures qu'il a émises sont précises et il détaille l'ensemble des travaux qu'il a effectués, correspondant à ces factures.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Dès lors qu'une procédure collective est ouverte à l'égard de la société faisant l'objet de la demande de condamnation au versement d'une provision, seul le juge-commissaire a le pouvoir de vérifier la créance susceptible de justifier cette demande.

En effet, l'instance en cours, telle que visée par l'article L. 622-22 du code de commerce et qui est interrompue jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance, est celle qui tend à obtenir, de la juridiction saisie au principal, une décision définitive sur le montant et l'existence de cette créance. Tel n'est pas le cas de l'instance en référé qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle, de sorte que la créance faisant l'objet d'une telle instance doit être soumise à la procédure de vérification des créances et à la décision du juge-commissaire (Com., 6 octobre 2009, Bull. n° 123, pourvoi n° 08-12.416).

Ainsi, quand bien la procédure collective n'aurait été ouverte qu'au cours de l'instance d'appel après une décision du premier juge allouant une provision, la cour d'appel doit infirmer l'ordonnance et déclarer la demande irrecevable (Com., 19 septembre 2018, Bull. n° 100, pourvoi n° 17-13.210).

Enfin, il résulte de l'article 369 du code de procédure civile que l'interruption d'instance par l'effet de l'ouverture d'une procédure collective se produit de plein droit et la règle de l'arrêt des poursuites individuelles consécutives à l'ouverture d'une procédure collective étant d'ordre public, elle constitue une fin de non-recevoir pouvant être proposée en tout état de cause et, si elle n'est pas invoquée par une partie, le juge est tenu de la relever d'office (Com., 8 mars 2023, pourvoi n° 21-20.738 ; Com., 12 janvier 2010, pourvoi n° 08-19.645).

Les procédures collectives produisant cet effet sont le jugement d'ouverture d'une procédure de sauvegarde (article L. 622-21 du code de commerce), le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire (article L. 631-14) et le jugement d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire (article L. 641-3).

Dès lors, la fin de non-recevoir soulevée par M. [H], tenant à ce que l'irrecevabilité de la demande de provision n'a pas été soulevée dans les premières conclusions de la société Heero Consulting, est inopérante ; elle est au surplus mal fondée car ces premières conclusions n'ont été prises qu'au nom de la société Heero Consulting, sans les organes de la procédure collective, qui ne sont eux-mêmes intervenus à l'instance que dans un second temps, et qui ont soulevé l'irrecevabilité des demandes adverses dès leurs premières conclusions.

Compte-tenu de l'irrecevabilité des demandes de M. [H], il n'y a pas lieu de statuer sur l'application de la clause attributive de compétence ou sur le bien-fondé de la demande de provision.

Il n'y a pas non plus lieu de statuer sur la demande, formulée par les appelants, tendant à la restitution des fonds saisis, dès lors que l'arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution et constitue le titre exécutoire ouvrant droit à cette restitution (Civ. 2ème, 7 avril 2011, pourvoi n° 10-18.691 ; Civ., 2ème, 10 juillet 2008, pourvoi n° 07-16.802).

PAR CES MOTIFS

Constate l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Heero par un jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 23 novembre 2023 ;

Vu l'évolution du litige,

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Déclare irrecevable la demande de provision formée par M. [H] ;

Rejette l'ensemble des autres demandes formées par M. [H], au titre de l'indemnité de recouvrement ou de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [H] aux dépens de première instance et d'appel ;

Rejette les demandes de chacune des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Thomas VASSEUR, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 23/07798
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 11/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.07798 ?
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