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04/07/2024 | FRANCE | N°23/00465

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ch.protection sociale 4-7, 04 juillet 2024, 23/00465


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E



Ch.protection sociale 4-7



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 04 JUILLET 2024



N° RG 23/00465 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VV27



AFFAIRE :



CPAM BOUCHES DU RHONE SECTEUR JURIDICTIONS







C/

S.A.S. [5]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Janvier 2023 par le Pole social du TJ de PONTOISE

N° RG : 22/00154





Copies exécutoires délivrée

s à :



Me Catherine LEGRANDGERARD



Me Nathalie VIARD-GAUDIN





Copies certifiées conformes délivrées à :



CPAM BOUCHES DU RHONE



S.A.S. [5]







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATRE JUILLET ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89E

Ch.protection sociale 4-7

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 JUILLET 2024

N° RG 23/00465 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VV27

AFFAIRE :

CPAM BOUCHES DU RHONE SECTEUR JURIDICTIONS

C/

S.A.S. [5]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Janvier 2023 par le Pole social du TJ de PONTOISE

N° RG : 22/00154

Copies exécutoires délivrées à :

Me Catherine LEGRANDGERARD

Me Nathalie VIARD-GAUDIN

Copies certifiées conformes délivrées à :

CPAM BOUCHES DU RHONE

S.A.S. [5]

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

CPAM BOUCHES DU RHONE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par Me Catherine LEGRANDGERARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 391

APPELANTE

****************

S.A.S. [5] prise en la personne de son représentant légal

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2] / FRANCE

représentée par Me Nathalie VIARD-GAUDIN, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1486 substitué par Me Charles ROUSSELOT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P525

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère,

Madame Laëtitia DARDELET, conseillère, faisant fonction de présidente,

Madame Laure TOUTENU, conseillère,

Greffière, lors des débats : Madame Juliette DUPONT,

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 19 août 2021, la société [5] (la société) a déclaré, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse), un accident survenu le 17 août 2021 au préjudice d'une de ses salariées, Mme [K] [B] (la victime), agent de service, qui, en nettoyant une chambre, est montée sur une marche de l'échelle du lit pour raccrocher un rideau, a perdu l'équilibre et est tombée en arrière sur le dos et la tête.

Le certificat médical initial du 17 août 2021 fait état de 'dorsalgie, cervicalgie, céphalées, douleurs poignet et pouce gauche, douleurs de l'épaule droite'.

Par courrier du 18 août 2021, la société a fait part de ses réserves sur la matérialité de l'accident et sur l'existence d'une cause étrangère, et la caisse a adressé des questionnaires à la victime et à la société.

Le 16 novembre 2021, la caisse a pris en charge l'accident déclaré au titre de la législation relative aux risques professionnels. Par la suite, la caisse a fixé la date de guérison au 31 décembre 2021.

Contestant la décision de prise en charge de la caisse, la société a saisi la commission de recours amiable de la caisse, laquelle a rejeté son recours dans sa séance du 26 avril 2022.

La société a alors saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise qui, par jugement contradictoire en date du 16 janvier 2023 (22/00154), retenant que la caisse n'avait pas mis à la disposition de la société les certificats médicaux de prolongation qui relèvent des 'divers certificats médicaux' devant figurer au dossier soumis à la consultation de l'employeur, a :

- dit le recours de la société recevable et bien fondé ;

- infirmé la décision de la commission médicale de recours amiable rendu le 26 avril 2022 ayant maintenu la décision de prise en charge de l'accident dont a été victime la salariée le 17 août 2021 au titre du risque professionnel ;

- jugé inopposable à la société la décision de la caisse rendue le 16 novembre 2021 prenant en charge, au titre du risque professionnel, l'accident dont a été victime la salariée le 17 août 2021 ;

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- condamné la caisse aux dépens ;

- rappelé que la décision du tribunal est exécutoire de droit à titre provisoire.

Par déclaration du 13 février 2023, la caisse a relevé appel de cette décision et les parties ont été convoquées à l'audience du 21 mai 2024.

Par conclusions écrites, déposées et soutenues auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour :

- de la recevoir en ses conclusions ;

- d'infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal judiciaire de Pontoise du 16 janvier 2023;

- de confirmer qu'elle n'a pas méconnu le principe du contradictoire à l'égard de la société à l'occasion de la phase de consultation du dossier d'accident du travail de la victime ;

- de déclarer opposable à la société la décision de prise en charge du 16 novembre 2021 de l'accident du travail du 17 août 2021 dont a été victime la salariée ;

- de constater que le jugement rendu le 16 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Pontoise n'est pas assorti de l'exécution provisoire dans les conditions de l'article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale ;

- de débouter la société de l'ensemble de ses autres demandes, fins et conclusions.

La caisse estime que le dossier proposé à la consultation de la société à la fin de la période d'instruction était complet et que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas à être transmis puisqu'ils ne permettent pas à la caisse de rendre sa décision sur le caractère professionnel de l'accident mais seulement d'indemniser la victime une fois décidé le caractère professionnel de l'accident.

Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour de juger inopposable à son égard la décision de la caisse rendue le 16 novembre 2021 prenant en charge, au titre du risque professionnel, l'accident dont a été victime la salariée le 17 août 2021, en raison du non-respect du principe du contradictoire.

La société expose que l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale énumère les différents documents devant figurer au dossier et notamment les divers certificats médicaux ; que le texte ne distingue pas selon le type de certificats, le texte ne se limitant pas au certificat médical initial mais aussi aux certificats médicaux de prolongation.

Par une note en délibéré autorisée par la cour au vu d'une jurisprudence récente sur le sujet, la caisse précise que par deux décisions du 16 mai 2024, la Cour de cassation conclut qu'aucun manquement au respect du principe du contradictoire ne peut résulter de ce que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas été mis à la disposition de l'employeur qui a eu communication de la déclaration de maladie professionnelle, du certificat médical initial, des colloques médicaux-administratifs et des questionnaires salariés et employeurs, venant d'ailleurs confirmer la position adoptée par plusieurs cours d'appels et notamment par la Cour d'appel de Versailles.

De son coté, la société affirme que le texte n'exclut pas formellement les certificats médicaux de prolongation et que le texte n'offre à la caisse aucun pouvoir d'appréciation sur les certificats qui doivent être soumis à la consultation dès lors que les certificats médicaux de prolongation ont été transmis avant la décision de prise en charge, et pas seulement les éléments susceptibles de faire grief.

Elle ajoute que les certificats médicaux de prolongation donnent la possibilité à l'employeur de vérifier l'exactitude des allégations du salarié et de comprendre l'ampleur de l'accident, mais offrent aussi des informations cruciales susceptibles de remettre directement en cause la décision de prise en charge, révélant l'existence d'une aggravation, de complication ou l'existence d'autres pathologies antérieures.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l'article R. 441-8 II du code de la sécurité sociale, à l'issue de ses investigations et au plus tard soixante-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial, la caisse met le dossier mentionné à l'article R. 441-14 à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur. Ceux-ci disposent d'un délai de dix jours francs pour le consulter et faire connaître leurs observations, qui sont annexées au dossier. Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l'employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d'observations. La caisse informe la victime ou ses représentants et l'employeur des dates d'ouverture et de clôture de la période au cours de laquelle ils peuvent consulter le dossier ainsi que de celle au cours de laquelle ils peuvent formuler des observations, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information et au plus tard dix jours francs avant le début de la période de consultation.

Aux termes de l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, le dossier mentionné aux articles R. 441-8 et R. 461-9 constitué par la caisse primaire comprend :

1°) la déclaration d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;

2°) les divers certificats médicaux détenus par la caisse ;

3°) les constats faits par la caisse primaire ;

4°) les informations communiquées à la caisse par la victime ou ses représentants ainsi que par l'employeur ;

5°) les éléments communiqués par la caisse régionale ou, le cas échéant, tout autre organisme.

Afin d'assurer une complète information de l'employeur, dans le respect du secret médical dû à la victime, le dossier présenté par la caisse à la consultation de celui-ci doit contenir les éléments recueillis, susceptibles de lui faire grief, sur la base desquels se prononce la caisse pour la reconnaissance du caractère professionnel d'une maladie ou d'un accident.

Il en résulte que ne figurent pas parmi ces éléments les certificats ou les avis de prolongation de soins ou arrêts de travail, délivrés après le certificat médical initial, qui ne portent pas sur le lien entre l'affection, ou la lésion, et l'activité professionnelle (2e Civ., 16 mai 2024, n° 22-22.413, FS-B).

En l'espèce, la caisse a produit un historique de consultation décrivant les pièces constitutives du dossier laissé à la consultation de l'employeur : les deux questionnaires de la victime et de l'employeur, le certificat médical initial, le courrier de réserves de l'employeur, la déclaration d'accident du travail et le rapport de l'agent enquêteur.

Les réserves de la société portaient sur le défaut de preuve de la matérialité de l'accident et sur l'existence d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte.

Les certificats médicaux de prolongation ne pouvaient apporter un éclairage sur la date de la survenance de l'accident.

En outre ces certificats ont été produits dans le cadre de la procédure contentieuse et ne font que reprendre les éléments du certificat médical initial. Ils n'auraient apporté aucun éclairage supplémentaire sur la prise en charge de l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

Il s'ensuit que la société a pu prendre connaissance, dans les délais prévus à l'article R. 441-8 susvisé, des pièces constitutives du dossier dont la caisse s'est servie pour prendre sa décision en toute connaissance de cause et aucun manquement au respect du principe du contradictoire ne peut résulter de ce que les certificats médicaux de prolongation n'ont pas été mis à la disposition de l'employeur.

En conséquence, la décision de prise en charge par la caisse de l'accident subi par la victime doit être déclarée opposable à la société et le jugement sera infirmé.

***

La caisse relève que l'exécution provisoire ne pouvait pas être constatée par le tribunal au visa de l'article 514 du code de procédure civile.

Aux termes de l'article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale, le tribunal peut ordonner l'exécution par provision de toutes ses décisions.

Il en résulte que le juge ne peut constater l'exécution provisoire de plein droit au regard de l'article 514 du code de procédure civile mais qu'il peut seulement la prononcer.

Néanmoins, l'instance étant au stade de l'appel, cette demande est devenue sans objet.

La société, qui succombe à l'instance, est condamnée aux dépens éventuellement exposés tant devant le tribunal judiciaire de Pontoise qu'en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise du 16 janvier 2023 (RG 22/00154) sauf en ce qu'il a dit le recours de la société [5] recevable ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare opposable à la société [5] la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône en date du 16 novembre 2021 prenant en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, l'accident dont Mme [B] a été victime le 17 août 2021 ;

Dit sans objet la demande de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône relative à l'exécution provisoire du jugement ;

Condamne la société [5] aux dépens exposés tant devant le tribunal judiciaire de Pontoise qu'en cause d'appel ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Laëtitia DARDELET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.

La greffière La conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ch.protection sociale 4-7
Numéro d'arrêt : 23/00465
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.00465 ?
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