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03/07/2024 | FRANCE | N°22/02140

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-4, 03 juillet 2024, 22/02140


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



Chambre sociale 4-4



ARRÊT N°



CONTRADICTOIRE



DU 03 JUILLET 2024



N° RG 22/02140

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJP7



AFFAIRE :



Société IMC TELECOM



C/



[T] [Y]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : I

N° RG : F 20/01858

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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Gaston GONZALEZ



Me Philippe BERRY



Copie numérique adressée à:



FRANCE TRAVAIL







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TROIS JUILLET DEUX MILLE VI...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

Chambre sociale 4-4

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 03 JUILLET 2024

N° RG 22/02140

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJP7

AFFAIRE :

Société IMC TELECOM

C/

[T] [Y]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : I

N° RG : F 20/01858

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Gaston GONZALEZ

Me Philippe BERRY

Copie numérique adressée à:

FRANCE TRAVAIL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TROIS JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société IMC TELECOM

N° SIRET: 490 957 628

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Gaston GONZALEZ de l'AARPI GONZALEZ AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire: E0543 substitué à l'audience par Me Thibaud GUERIN, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur [T] [Y]

né le 26 février 1999 à [Localité 7]

de nationalité française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Philippe BERRY de la SELARL CABINET PHILIPPE BERRY, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R158 substitué à l'audience par Me Vincenza ARNAO, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 2 Mai 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Président,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [Y] a été engagé par la société IMC Telecom, en qualité d'employé polyvalent pour réaliser la pose de compteurs électriques Linky sur les chantiers sur le secteur de [Localité 5] et [Localité 6] par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er mars 2018.

Cette société est spécialisée dans l'installation, le montage et le câblage de tous réseaux de téléphonie ou d'informatique. L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de dix salariés. Elle applique la convention collective nationale du bâtiment de la région parisienne.

Le 2 décembre 2019, le salarié a déclaré un sinistre avec le véhicule de service, endommagé sur le côté lorsqu'il l'a récupéré sur une place de parking.

Par lettre du 20 janvier 2020, l'employeur a notifié au salarié un avertissement pour avoir quitté son travail sans avoir terminé les rendez-vous prévus et pour ne pas s'être présenté chez des clients, tout en n'étant pas joignable au téléphone.

Le 12 mai 2020, le salarié a déclaré un sinistre après avoir heurté une borne de béton avec le véhicule professionnel.

Par lettre du 22 juin 2020, l'employeur a demandé au salarié de justifier des déplacements effectués avec le véhicule de service le dimanche 21 juin 2020,le salarié répondant qu'il avait dormi chez son amie pour aller ensuite le lendemain au travail.

Le 24 juin 2020, l'employeur a notifié au salarié une mise à pied conservatoire pour avoir sciemment dissimulé d'importants dégâts causés sur le véhicule de service et continué à circuler, occasionnant des dégâts supplémentaires.

Par lettre du 28 août 2020, le conseil du salarié a sollicité le paiement des salaires depuis la mise à pied qualifiée d'abusive, indiquant que cette mise à pied n'a pas été assortie d'une procédure disciplinaire pour qu'il soit statué sur les faits, qu'il conteste.

Le 15 octobre 2020, M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de résiliation judiciaire du contrat de travail et en paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Par jugement du 22 juin 2022, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section industrie) a :

- prononcé la résolution [ie. résiliation] judiciaire du contrat de travail de M. [Y]

- condamné la société IMC Telecom à un rappel de salaire de 37 973,30 euros et aux congés afférents soit 3 797,33 euros

- condamné la société IMC Telecom à une indemnité de licenciement de 1 632 euros

- condamné la société IMC Telecom au paiement du préavis de 3 200 euros

- condamné la société IMC Telecom à des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 8 000 euros

- condamné la société à payer à M. [Y], au titre de l'article 700 du code de procédure civile de 3 000 euros (sic)

- mis les dépens à la charge de la société IMC Telecom

- dit n'y avoir pas lieu à exécution provisoire ni exécution forcée sous réserves des dispositions de l'article R 1454-14 et 1454-15 du code du travail

- fixé le point de départ des intérêts légaux pour les salaires à partir du 28 août 2020, pour l'indemnité die licenciement à partir de la saisine, pour les dommages et intérêts à partir du prononcé du jugement soit le 22 juin 2020

- ordonné la capitalisation des intérêts.

Par déclaration adressée au greffe le 6 juillet 2022, la société a interjeté appel de ce jugement.

Par lettre du 18 août 2022, le conseil de prud'hommes a informé les parties qu'à la suite de la saisine de la cour, il était dessaisi de la demande de rectification d'erreur matérielle du salarié reçue par requête du 8 juillet 2022.

Une ordonnance de clôture a été prononcée le 2 avril 2024, en vue d'une audience de plaidoiries le 2 mai 2024.

Par ordonnance du 30 avril 2024, le président de la chambre 4-4 de la cour d'appel de Versailles a dit n'y avoir lieu à révocation de l'ordonnance de clôture pour accueillir ses conclusions signifiées par l'appelante le 10 avril 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société IMC Telecom demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris sur les dispositions suivantes en ce qu'il a :

- condamné la société IMC Telecom à un rappel de salaire de 37 973,30 euros et aux congés afférents soit 3 797,33 euros.

- condamné la société IMC Telecom à une indemnité de licenciement de 1632 euros.

- condamné la société IMC Telecom au paiement du préavis de 3200 euros.

- condamné la société IMC Telecom à des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de 8000 euros.

- condamné la société à payer à M. [Y] au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3000 euros.

- mis les dépens à la charge de la société IMCTelecom

- ordonné la capitalisation des intérêts.

Statuant à nouveau,

- débouter M. [Y] de l'ensemble de ses moyens et prétentions;

- condamner la société IMC Telecom à régler une indemnité à hauteur de 4800 euros TTC à M. [Y] ;

- réserver les dépens.

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 27 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [Y] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu le 22 juin 2022 par le Conseil de prud'hommes de Nanterre en toutes ses dispositions ;

- rectifier le jugement en complétant le dispositif de la mention relative à la condamnation de la Société IMC Telecom à la remise des documents de fin de contrat conformes sous astreinte de 20 euros par jour et par document,

Y ajoutant,

- condamner la Société IMC Telecom au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC,

En toutes hypothèses,

- condamner la Société IMC Telecom aux entiers dépens.

MOTIFS

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

L'employeur soutient que la mise à pied prononcée à titre conservatoire le 24 juin 2020 était parfaitement justifiée par les dommages survenus le 22 juin 2020 sur le véhicule de service mis à la disposition du salarié, lesquels se sont ajoutés à d'autres dommages plus anciens, et qu'il apparaissait téméraire d'engager immédiatement la procédure de rupture du contrat de travail dans l'attente de ces éléments, le salarié étant d'une particulière mauvaise foi en essayant de tirer profit de la situation chaotique de la société IMC Telecom. Il fait valoir que le licenciement verbal, intervenu le 24 juin 2020, malgré son irrégularité, entraîne la rupture du contrat de travail et fixe le point de départ du préavis.

Le salarié réplique que l'employeur ne fonde pas sa demande d'infirmation du jugement sur la critique de la motivation de cette décision qui retient les manquements de la société IMC Telecom pour prononcer la résiliation judiciaire, et que les manquements de l'employeur à son égard n'ont pas été contestés en première instance ni en appel.

Le salarié expose ensuite ne pas avoir reçu de convocation à un entretien préalable à une procédure disciplinaire ni perçu son salaire et reçu son bulletin de paie du mois de juillet 2020, et qu'en l'absence de nouvelles de la part de son employeur, il l'a interrogé le 28 août 2020 par l'intermédiaire de son conseil pour contester la régularité de la mise à pied conservatoire. Il explique avoir alors reçu des bulletins de paye non conformes et que, sans nouvelle de l'employeur en septembre 2020, il a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation judiciaire.

**

L'article L.1232-6 du code du travail dispose que lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception. Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

Le licenciement ne peut résulter que d'un acte de l'employeur par lequel il manifeste sa volonté de mettre fin de façon irrévocable au contrat de travail.

Toutefois, malgré son irrégularité, le licenciement verbal ou la rupture de fait a pour effet de rompre le contrat de travail. (Soc., 12 mars 1992, n° 90-44.174).

Ont été considérés comme constitutifs d'un licenciement verbal ou de fait la remise du certificat de travail avant que le salarié n'ait reçu sa lettre motivée de licenciement (Soc., 19 mars 2008, no 06-46.145; Soc., 16 septembre 2009, pourvoi n° 07-45.613), ou encore l'envoi du dernier bulletin de salaire et le reçu pour solde de tout compte (Soc., 2 avril 2003, pourvoi n° 01-40.665, publié; Soc., 30 nov. 2010, n° 08-45.279).

Par ailleurs, la mise à pied prononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure de licenciement engagée dans le même temps a un caractère conservatoire (Soc., 18 mars 2009, pourvoi n° 07-44.185, Bull. 2009, V, p. 81).

Enfin, en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur (Soc., 11 janvier 2007, pourvoi n° 05-40.626, publié, Soc., 4 septembre 2019, pourvoi n° 18-10.541).

Le contrat de travail peut être rompu à l'initiative du salarié en raison de faits qu'il reproche à son employeur et il appartient au juge, saisi par le salarié d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail d'apprécier s'il établit à l'encontre de l'employeur des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail et justifier cette mesure ; dans ce cas, la résiliation judiciaire du contrat de travail, prononcée aux torts de l'employeur, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; au cas contraire, le juge qui estime que les manquements reprochés à l'employeur ne sont pas établis ou ne justifient pas la rupture du contrat doit débouter le salarié de sa demande.

A titre préalable, le salarié reproche à l'employeur de n'avoir pas formé, dans ses conclusions notifiées le 5 octobre 2022 de demande d'infirmation du jugement qui retient les manquements de la société qui ont conduit au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat, et il soutient que l'employeur ne formule aucun moyen en fait et en droit pour expliquer qu'il a laissé le salarié sans activité à la suite de la mise à pied à titre conservatoire du mois de juin 2020 en le privant de salaire.

Cependant, la cour relève d'abord que l'employeur n'a pas formé de demande d'infirmation du jugement qui a prononcé la 'résiliation judiciaire' du contrat de travail, sauf à solliciter l'infirmation du jugement qui l'a condamné au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sorte qu'implicitement l'employeur a formé une demande d'infirmation du prononcé de la résiliation judiciaire.

Ensuite, si l'employeur développe dans ses conclusions du 29 mars 2024 des moyens relatifs à la validité de la mise à pied conservatoire et à l'existence d'un licenciement verbal, c'est à juste titre que le salarié soutient que l'employeur ne conteste pas les manquements invoqués par le salarié et ne s'explique pas sur la suite donnée à la mise à pied conservatoire.

Dès lors, il n'est pas contesté que l'employeur n'a engagé aucune procédure de licenciement après avoir notifié au salarié une mise à pied conservatoire ' dans l'attente d'une décision que nous prendrons rapidement', invoquant au contraire lui-même l'existence d'un licenciement verbal à la date du 24 juin 2020.

La question de savoir si la mise à pied conservatoire était justifiée, ce dont se prévaut l'employeur, ne se pose donc pas puisqu'elle n'a pas été suivie d'effet, s'agissant d'une mesure provisoire de dispense de travail dans l'attente du prononcé d'une sanction ou de l'engagement d'une procédure de licenciement, lesquelles n'ont jamais étémises en oeuvre par l'employeur.

En effet, l'employeur ne peut se prévaloir d'un licenciement verbal en invoquant aucun acte au dossier par lequel il a manifesté sa volonté de mettre fin de façon irrévocable au contrat de travail.

Interpellé à la fin du mois d'août sur la situation du salarié et l'absence de suite donnée à la mise à pied conservatoire, l'employeur a tenté de régulariser la situation en adressant au salarié ses bulletins de paye de juillet et août 2020, sans d'ailleurs mentionner que le contrat de travail était rompu, mais en retenant des heures d'absences pour l'intégralité du mois de juillet 2020, et positionnant d'office le salarié en congés payés pour tout le mois d'août 2020, l'employeur ne donnant ensuite plus de nouvelles au salarié à compter de septembre 2020, et ne le rémunérant pas, d'où la saisine de ce dernier en résiliation judiciaire du contrat de travail.

Dans ces conditions, et cela n'est pas discuté par l'employeur, le salarié s'est retrouvé sans salaire en juillet 2020 puis, à compter de septembre 2020, sans travail et sans explication, cette situation constituant des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a accueilli la demande de résiliation judiciaire, laquelle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du jugement de première instance.

En effet, l'employeur se prévaut uniquement de ce que la rupture est consécutive au licenciement verbal intervenu le 24 juin 2020, date de notification de la mise à pied conservatoire mais cette mise à pied n'a pas été suivie d'effet comme indiqué précédemment, et ne vaut pas rupture, d'autant plus que l'employeur a ensuite adressé au salarié des bulletins de paye pour les mois de juillet et août 2020 et n'a pas réagi à l'interpellation du salarié du 28 août 2020 sur sa situation, l'employeur n'invoquant pas avoir notifié une rupture du contrat après à l'envoi des bulletins de paye.

En conséquence, la prise d'effet de la résiliation judiciaire du contrat de travail ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, dès lors qu'à cette date le contrat de travail n'a pas été rompu et que le salarié était toujours au service de son employeur, lequel ne conteste pas que le salarié n'était pas employé par une autre société du 24 juin 2020 au 22 juin 2022. En effet, l'employeur se borne à soutenir que le versement de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse implique l'absence de rappel de salaire, le salarié ne pouvant pas considérer qu'il était encore employé de la société IMC Telecom.

Il conviendra en conséquence de confirmer le jugement qui a condamné l'employeur à un rappel de salaire, entre le 1er juillet 2020 et le 22 juin 2022, date du prononcé du jugement.

La cour fixe ce rappel de salaire à la somme de 37 973,30 euros bruts, outre 3 797 euros bruts de congés payés afférents.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

Il conviendra de confirmer le jugement qui a condamné l'employeur à verser au salarié les sommes de 1 632 euros d'indemnité légale de licenciement de 3 200 euros d'indemnité compensatrice de préavis, dont le calcul n'est pas utilement contesté par l'employeur.

Les dispositions des articles L. 1235-3 et L. 1235-3-1 du code du travail, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié et qui prévoient que, dans les cas de licenciements nuls, le barème ainsi institué n'est pas applicable, permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi. Le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur est également assuré par l'application, d'office par le juge, des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail.

Le salarié a acquis une ancienneté de quatre années complètes au moment de la rupture dans la société employant habituellement plus de onze salariés. Le montant maximal de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre trois et cinq mois de salaire. Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail sont ainsi de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'OIT (Soc., 11 mai 2022, pourvoi n° 21-14.490, publié), les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne n'étant pas d'effet direct en droit interne (Soc., 11 mai 2022, pourvoi n° 21-15.247, publié).

Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié (1 600 euros bruts), de son âge (23 ans), de son ancienneté, de ce qu'il ne justifie pas de sa formation, son expérience, de sa situation professionnelle et ses revenus depuis le 22 juin 2022 , il y a lieu, par voie d'infirmation, de condamner l'employeur à payer à M. [Y] la somme de 4 800 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, dans sa version applicable à l'espèce, il convient d'office d'ordonner le remboursement par l'employeur aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du présent arrêt dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage.

Sur les intérêts

Par voie de confirmation du jugement, les créances salariales de rappel de salaire porteront intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 août 2020, à compter de la date de la réception par l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation et d'orientation pour les indemnités de rupture, et à compter du jugement pour l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les intérêts échus des capitaux porteront eux- mêmes intérêts au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite.

Sur la remise des documents

Ajoutant au jugement qui a omis de l'indiquer dans son dispositif, il convient d'ordonner à l'employeur de remettre au salarié un certificat de travail, une attestation France Travail, un solde de tous comptes et les bulletins de salaire conformes à la présente décision, sans qu'il soit en revanche nécessaire d'assortir cette mesure d'une astreinte.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il y a lieu de confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

L'employeur, qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel et à verser au salarié la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sa demande à ce titre étant rejetée.

PAR CES MOTIFS:

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

CONFIRME le jugement, mais seulement en ce qu'il prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [Y], en ce qu'il condamne la société IMC Telecom à verser à M. [Y] les sommes de 37 973 euros de rappel de salaire outre 3 797.33 euros de congés payés afférents, de 1 632 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 3 200 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a mis les dépens à la charge de la société IMC Telecom et l'a déboutée de sa demande à ce titre, en ce qu'il détermine le sort des intérêts légaux pour les salaires et ordonne la capitalisation des intérêts,

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que la résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date du jugement qui l'a prononcée,

CONDAMNE la société IMC Telecom à payer à la somme de 4 800 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ORDONNE le remboursement par la société IMC Telecom aux organismes concernés des indemnités de chômage versées au salarié du jour de la rupture, date du jugement, au jour du présent arrêt, dans la limite de deux mois d'indemnités de chômage,

ORDONNE à la société IMC Telecom de remettre à M. [Y] un certificat de travail, une attestation France Travail, un sol de tous comptes et les bulletins de salaire conformes à la présente décision, sans qu'il soit en revanche nécessaire d'assortir cette mesure d'une astreinte,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société IMC Telecom à payer à M. [Y] la somme de 1 000 euros au titre

de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société IMC Telecom aux dépens d'appel.

. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Dorothée Marcinek, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-4
Numéro d'arrêt : 22/02140
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;22.02140 ?
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