La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2024 | FRANCE | N°22/04309

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-1, 25 juin 2024, 22/04309


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Chambre civile 1-1





ARRÊT N°





CONTRADICTOIRE

Code nac : 63B





DU 25 JUIN 2024





N° RG 22/04309

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJFY





AFFAIRE :



S.A.S. CFI ONE

C/

S.A.S. GMH NOTAIRES







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mars 2022 par le Tribunal Judiciaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 20/08082>


Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :





à :



-Me Marie-Sophie DELAVENNE-TISSIER,



-Me Valérie TOUTAIN DE HAUTECLOCQUE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Chambre civile 1-1

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 63B

DU 25 JUIN 2024

N° RG 22/04309

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJFY

AFFAIRE :

S.A.S. CFI ONE

C/

S.A.S. GMH NOTAIRES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 31 Mars 2022 par le Tribunal Judiciaire de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 20/08082

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Marie-Sophie DELAVENNE-TISSIER,

-Me Valérie TOUTAIN DE HAUTECLOCQUE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. CFI ONE

prise en la personne de son représentant légal, M. [Y] [F], président de ladite société, domicilié au siège social

N° SIRET : 799 259 213

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Marie-Sophie DELAVENNE-TISSIER, avocat - barreau de VERSAILLES, vestiaire : 502

APPELANTE

****************

S.A.S. GMH NOTAIRES

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

N° SIRET : 432 869 923

[Adresse 2]

[Localité 6]

représentée par Me Valérie TOUTAIN DE HAUTECLOCQUE, avocat - barreau de PARIS, vestiaire : D0848 - N° du dossier 220.687

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Avril 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente chargée du rapport et Madame Pascale CARIOU, Conseiller.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Pascale CARIOU, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

Par acte sous seing privé du 11 juin 2015, M. [P] et M. [D] ont vendu à la société CFI One, marchand de biens, un ' appartement lot de copropriété situé [Adresse 1] à [Localité 7] au prix de 96 000 euros comprenant les lots l et 29, le lot 1, identifié comme un local dans le règlement de copropriété, étant désigné en ces termes : ' au rez-de-chaussée, accès à partir de la porte de gauche dans le couloir de l'entrée consistant un en local comprenant une entrée avec placard, une pièces (sic) et une salle d'eau avec WC.

Par acte authentique adressé le 23 octobre 2015 par M. [C], notaire à [Localité 5] (Puy-de-Dôme), avec la participation de M. [X], notaire, exerçant au sein de la société GMH Notaires à [Localité 6] (Hauts-de-Seine), cette vente était confirmée, le bien vendu étant ainsi désigné :

' Sur la commune de [Adresse 8].

Dans un immeuble pierre et briques un toit d'ardoise avec zinc et aluminium, composé

d'appartements, comprenant :

- au rez-de-chaussée : loge et quatre pièces

- cinq étages de six pièces chacun

- sixième étage de six petites pièces et débarras [...]

LOT NUMERO UN (1)

Au rez-de-chaussée, accès à partir de la porte gauche dans le couloir de l'entrée, consistant en un local comprenant : une entrée avec placard, une pièce et une salle d'eau avec WC [...] ''.

La déclaration d'intention d'aliéner (Cerfa n° 10072*02) renseignée par M. [C], notaire, le 23 octobre 2015, précisait que le bien cédé était à usage d'habitation.

Par arrêté du garde des Sceaux, ministre de la justice, du 14 mars 2017, la démission de M. [C], notaire, et son remplacement par la SELARL [H] -[G]-[M] ont été acceptés, Mmes [Z] épouse [H] et [G] épouse [M] étant alors nommées notaires associés et prêtant serment devant le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand, devenu tribunal judiciaire, le 11 avril 2017.

Expliquant avoir découvert à l'occasion de sa revente que le bien acquis qui ne pouvait être qualifié de logement décent au sens de l'article 4 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, n'était pas à usage d'habitation faute pour sa superficie d'atteindre les seuils fixés par l'article L 111-6-1 du code de la construction et de l'habitation, la société CFI One a, par acte d'huissier de justice du 22 octobre 2020, fait assigner la société GMH Notaires et la SELARL [H]-[G]-[M] devant le tribunal judiciaire de Nanterre sur le fondement de l'article 1240 du code civil en responsabilité civile professionnelle pour manquement à leur obligation de conseil.

Par un jugement contradictoire rendu le 31 mars 2022, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- Rejeté l'intégralité des demandes de la SAS CFI One ;

- Rejeté les demandes de la SAS CFI One et de la SAS GMH Notaires au titre des frais irrépétibles ;

- Condamné la SAS CFI One à payer à la Selarl [H] -[G]-[M] la somme de deux mille euros (2 000 €) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamné la société CFI One à supporter les entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- Rappelé que, conformément à l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire du jugement en toutes ses dispositions est de droit.

La société CFI One a interjeté appel de ce jugement le 30 juin 2022 à l'encontre de la société GMH Notaires.

Par d'uniques conclusions notifiées le 27 septembre 2022, la société CFI One demande à la cour de :

Vu l'article 4 du code civil,

Vu les articles 3, 232 et 263 du code de procédure civile,

- Annuler ou Infirmer le jugement du 31 mars 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre sous le numéro RG 20/08082 sur les seuls chefs de demandes de ce jugement ci-après visés :

*Rejet des demandes de la SAS CFI One à l'encontre de la société SAS GMH Notaires ;

*Rejet des demandes de la SAS CFI One à l'encontre de la société SAS GMH Notaires au titre des frais irrépétibles,

*Condamnation de la SAS CFI One à supporter les dépens ;

*L'exécution provisoire ;

Et statuant à nouveau,

Vu l'article 1240 du code civil,

- Dire la SAS CFI One recevable et bien fondée en ses demandes ;

- Dire que la SAS GMH Notaires engage sa responsabilité sur le fondement de l'article 1240 du code civil et est tenu d'indemniser des préjudices supportés par la SAS CFI One ;

- Condamner la SAS GMH Notaires à payer à la SAS CFI One une somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice financier,

Subsidiairement,

- Ordonner une expertise pour procéder au chiffrage du préjudice lié à la perte de chance subie par la SAS CFI One ;

Et donc en conséquence,

- Ordonner une expertise ;

- Désigner tel expert qu'il plaira à la cour avec mission de :

*Se rendre sur place

*Dire si le bien est vendable en l'état du fait de ses caractéristiques d'inhabitabilité ;

*Evaluer le préjudice financier subi par la SAS CFI One du fait de l'acquisition du bien sis [Adresse 1] du fait de la perte de chance résidant dans l'écart entre le prix payé et celui qui aurait été dû et en conséquence :

*Déterminer la valeur du bien, au jour de la vente, avec l'interdiction de l'usage d'habitation ;

*Déterminer la valeur du bien, au jour des présentes, dans l'hypothèse où celui-ci aurait été à usage d'habitation et la différence avec le prix actuel d'un bien non habitable ;

*Dire que la consignation des frais d'expertise sera mise à la charge de la SAS GMH Notaires;

En tout état de cause

- Condamner la SAS GMH Notaires à payer à la SAS CFI One une somme de 7 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- La Condamner en tous les dépens.

Par d'uniques conclusions notifiées le 13 décembre 2022, la société GMH Notaires demande à la cour de :

- Déclarer la SCP GMH Notaires recevable et bien fondée en ses conclusions.

Vu l'article 9 du code de procédure civile,

- Juger que la cour ne peut suppléer la carence du demandeur dans la démonstration de la preuve.

- Rejeter la demande de la société CFI One en annulation du jugement du 31 mars 2022.

Vu l'article 564 du code de procédure civile,

- Déclarer la société CFI One irrecevable en sa demande d'expertise.

Vu l'article 1240 du code civil,

- Juger que la société CFI One ne justifie pas de l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice, susceptible d'engager la responsabilité du notaire.

- La débouter de l'ensemble de ses demandes.

A tout le moins,

- Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté la SAS CFI One de ses demandes.

- Condamner la société CFI One au paiement d'une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamner la même aux entiers dépens d'instance, dont distraction au profit de Me Valérie Toutain de Hauteclocque, en application de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été ordonnée le 7 mars 2024.

SUR CE, LA COUR,

Sur les limites de l'appel et à titre liminaire,

Le jugement en ce qu'il rejette les demandes de la société CFI One dirigées contre la selarl [H]-[G]-[M], en ce qu'il condamne la société CFI One à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, n'est pas querellé.

Ces dispositions sont dès lors devenues irrévocables.

La société CFI One poursuit l'annulation ou l'infirmation du jugement en ce qu'il rejette ses demandes dirigées contre la société GMH Notaires. Elle demande à la suite la condamnation de la société GMH Notaires à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice financier et, subsidiairement, la désignation d'un expert pour procéder au chiffrage du préjudice lié à la perte de chance subie en raison de la faute du notaire.

A titre principal, outre sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, et au titre des dépens, la société GMH Notaires ne poursuit ni la confirmation, ni l'annulation, ni l'infirmation du jugement. Elle demande le rejet de la demande d'annulation du jugement, l'irrecevabilité, sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile, de la demande d'expertise judiciaire de la société CFI One, le rejet de l'ensemble des demandes adverses. A la suite 'à tout le moins' la confirmation du jugement attaqué.

Sur la faute du notaire

Après avoir rappelé le droit positif applicable en matière de responsabilité des notaires, le tribunal a retenu qu'en l'espèce, le notaire n'ayant pas souscrit d'obligation contractuelle à l'égard de son client, le fondement juridique applicable était l'article 1240 du code civil. Il a souligné que le notaire était tenu d'un devoir de conseil en raison de sa qualité d'officier public au sens de l'article 1er de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945, consubstantiel à l'exercice de ses missions légales, et qu'il lui revenait de rapporter la preuve de l'exécution de cette obligation de conseil. Il a également observé que la société CFI One devait rapporter tant la preuve de la faute du notaire, que celle du préjudice allégué et du lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Le tribunal a considéré que la discordance dans la désignation du bien acheté par la société CFI One dans le compromis de vente du 11 juin 2015, l'acte authentique dressé le 23 octobre 2015, le règlement de copropriété et l'état descriptif de division aurait dû conduire le notaire à alerter la société CFI One, partie à l'acte, à l'informer sur les conséquences de la qualification exacte de la destination du local vendu. Il a relevé que la société GMH Notaires ne rapportait pas la preuve du respect de son devoir de conseil. Il a encore souligné que la déclaration d'intention d'aliéner du 23 octobre 2015, rédigée par M. [C], notaire, connue de la société GMH Notaires, entretenait encore l'illusion de la société CFI One en précisant que le bien était à usage d'habitation sans être occupé. Il constatait que ce n'était que le 21 septembre 2020, par courriel, que la société GMH Notaires informait sa cliente, la société CFI One, que le bien vendu ne pouvait ni être vendu, ni être mis à disposition à usage d'habitation, mais uniquement comme simple local.

Par voie de conséquence, le tribunal a retenu que la société GMH Notaires avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité délictuelle.

' Moyens des parties

La société GMH Notaires poursuit l'infirmation du jugement qui retient l'existence d'une faute de sa part.

Selon elle, il apparaît très clairement à la lecture de l'acte authentique de vente que la désignation du bien était seulement 'un local au rez-de-chaussée' et rien d'autre, en tous cas, il n'était nullement indiqué que sa destination était l'habitation.

Elle souligne que la société CFI One, professionnelle de l'immobilier, avait reçu du notaire préalablement à l'acte de vente, le projet de compromis, qui mentionnait expressément que la transaction portait sur 'un local' non sur un studio, un appartement à usage d'habitation. Elle en déduit que la société CFI One avait tout loisir et tout le temps pour comprendre la portée de son engagement.

Elle indique que cette désignation dans l'acte authentique était conforme tant au règlement de copropriété qu'à l'état descriptif de division et que, de ce fait, elle ne pouvait de sa propre initiative modifier la description du bien.

Elle soutient que la qualité de professionnel de l'immobilier de la société CFI One rend peu crédible ses doléances contre elle, en sa qualité de notaire. Le peu de sérieux de ses demandes est corroboré, selon elle, par le fait que cette société n'a pas cherché à obtenir la nullité de la vente. Il s'ensuit, d'après elle, que la société CFI One avait parfaitement conscience de l'usage auquel était destiné le bien acquis et aucune faute n'est caractérisée contre le notaire.

La société CFI One poursuit la confirmation du jugement en ce qu'il retient la faute du notaire qui n'a pas respecté son devoir d'information.

' Appréciation de la cour

C'est par d'exacts motifs, adoptés par cette cour, que le tribunal a retenu la faute du notaire.

En effet, tenu d'un devoir d'information, peu important la qualité de professionnel de l'immobilier de son client, le notaire qui avait connaissance de l'acte sous seing privé du 11 juin 2015, de la déclaration d'aliéner renseignée par M. [C], notaire, du 23 octobre 2015 mentionnant que le bien cédé était à usage d'habitation, du règlement de copropriété, de l'état descriptif de division, ne le mentionnant pas, constatant donc nécessairement la discordance de ces documents relativement à la destination du bien à acquérir par la société CFI One, aurait effectivement dû alerter son client sur les conséquences de la qualification exacte de la destination du local vendu (par exemple, 1re Civ., 7 novembre 2000, pourvoi n° 96-21.732, Bulletin civil 2000, I, n° 282).

Or, il est patent que la société GMH Notaires ne répond pas sur ces points si ce n'est pour indiquer que la société CFI One étant marchand de bien, elle savait nécessairement quel était l'objet de la transaction et que l'envoi préalablement à la signature de l'acte authentique du projet suffisait à satisfaire aux exigences légales.

Cependant, ainsi qu'il l'a été indiqué et que la jurisprudence constante le rappelle (par exemple 1re Civ., 11 juillet 2018, pourvoi n° 17-21.587 ; 1re Civ., 19 mai 1999, pourvoi n° 96-22.892, Bull. 1999, I, n° 166) le notaire n'est pas dispensé de son devoir de conseil par les compétences personnelles de son client, en considération desquelles il est seulement possible, le cas échéant, d'estimer que celui-ci a commis une faute ayant contribué à la production de son préjudice.

Il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il retient l'existence d'une faute du notaire.

' Sur le préjudice

Le tribunal a retenu que la faute de la société GMH Notaires avait causé à la société CFI One un préjudice résidant dans la privation du choix entre acquérir à moindre prix ou renoncer à la cession voire dans la diminution de la plus-value escomptée en cas de revente. Il a relevé que les voies de réalisation de cette option étant par hypothèse incertaines, le préjudice certain n'est ainsi ni un gain manqué ni une perte subie, mais une perte de chance, qui s'entend comme la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, de contracter dans des conditions plus favorable, ou d'abandonner son projet. Selon le tribunal, elle suppose établie la preuve du sérieux de la chance perdue et son indemnisation, qui implique un calcul de probabilité de survenance de l'événement irrémédiablement impossible, ne pouvant être égale au montant de la chance réalisée.

Le tribunal a constaté que la société CFI One ne produisait aucun élément permettant de déterminer la valeur du bien s'il avait été effectivement à usage d'habitation ce qui ne lui permettait pas de calculer l'assiette de cette perte de chance qui résidait dans l'écart entre le prix payé et celui qui aurait dû l'être, à l'achat et en cas de revente, au regard de l'exacte désignation du bien, rien ne démontrant d'ailleurs que sa valeur ait été effectivement déterminée en considération de sa destination postulée. Il en déduisait que la décote alléguée, tenant à la différence entre le prix de revente annoncée par la société CFI One sans le moindre élément probant, était indéterminée et indéterminable.

Par voie de conséquence, le préjudice allégué n'étant pas justifié, il a débouté la société CFI One de sa demande.

' Moyens des parties

La société CFI One poursuit l'infirmation du jugement de ce chef.

Elle affirme, sans fournir aucun élément de preuve à l'appui, avoir subi un préjudice financier important, la dévalorisation de son bien, l'impossibilité de le vendre comme un logement à usage d'habitation et se retrouve dans l'obligation de le vendre à vil prix.

Elle prétend, sans verser aucun élément de preuve aux débats, qu'elle aurait pu vendre le studio de 12 m² pour un prix de 170 000 euros dans ce quartier ; que ce local non habitable a subi une décote de 50 000 euros ; qu'elle ne peut pas espérer le vendre plus de 120 000 euros de sorte que son préjudice, né de la perte de chance d'acquérir un autre local, propre à l'habitation, s'établit à 50 000 euros.

A titre subsidiaire, si la cour devait s'estimer insuffisamment éclairée, elle sollicite la désignation d'un expert judiciaire pour évaluer le préjudice financier subi.

La société GMH Notaires sollicite la confirmation du jugement de ce chef. Elle fait en outre valoir que la demande d'expertise constitue une demande nouvelle, au sens de l'article 564 du code de procédure civile, dès lors irrecevable à hauteur d'appel.

' Appréciation de la cour

C'est par d'exacts motifs, pertinents et circonstanciés, que cette cour adopte que les premiers juges ont estimé que le préjudice allégué par la société CFI One n'était pas justifié.

A hauteur d'appel, la société CFI One ne produit strictement aucun élément de preuve de nature à justifier sa prétention. Or, il lui était loisible de justifier que le projet qu'elle envisageait était bien d'acheter, puis de revendre un local destiné à l'habitation, que le prix de ce local ne correspondait pas à celui du marché pour un local non destiné à l'habitation, que le manque à gagner était quantifiable par la production d'une expertise amiable, d'attestations d'agences immobilières, le relevé des transactions effectuées dans le quartier, contemporaines, à la transaction litigieuse...

La société CFI One n'a donc tenu aucun compte des motifs pertinents et circonstanciés des premiers juges.

Contrairement à ce que soutient la société GMH Notaires, une demande d'expertise présentée nouvellement à hauteur d'appel n'est pas irrecevable par application des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile. En effet, une telle demande constitue le complément de la demande de la société CFI One tendant à la condamnation de la société GMH Notaires à lui verser des sommes en réparation de son préjudice financier. La demande d'expertise est donc destinée à justifier le bien fondé de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice financier. Conformément aux dispositions de l'article 566 du code de procédure civile, cette demande est de ce fait recevable.

Cependant, le caractère légitime d'une demande d'expertise et l'absence de carence du demandeur dans l'administration de la preuve se déduisent du constat que, en particulier, les allégations à l'appui de celle-ci sont étayées par des éléments précis et qu'elle présente un certain intérêt. En l'espèce, l'absence d'élément produit devant la cour conduit cette dernière à rejeter la demande d'expertise judiciaire qui, en tout état de cause, ne peut être ordonnée pour suppléer la carence probatoire du demandeur.

Cette demande injustifiée sera dès lors rejetée.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

La société CFI One, partie perdante, supportera les dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. Par voie de conséquence, sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

L'équité ne commande pas d'allouer des sommes à la société GMH Notaires sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant pat arrêt contradictoire et mis à disposition,

Dans les limites de l'appel,

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

DÉCLARE recevable la société CFI One en sa demande d'expertise ;

Au fond, la REJETTE ;

CONDAMNE la société CFI One aux dépens d'appel ;

DIT qu'ils seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-1
Numéro d'arrêt : 22/04309
Date de la décision : 25/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-25;22.04309 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award