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20/06/2024 | FRANCE | N°23/02009

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-6, 20 juin 2024, 23/02009


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 30B



Chambre civile 1-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 20 JUIN 2024



N° RG 23/02009 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VYHF



AFFAIRE :



S.C.I. ELLIPSE



C/



S.A.R.L. MADE IN EUROPE EXPRESS



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mars 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VERSAILLES

N° RG : RG 20/0566



Expéditions exécutoires

Exp

éditions

Copies

délivrées le : 20.06.2024

à :



Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Elisa FREDJ, avocat au barreau de VERSAILLES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT JUIN DEUX ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

Chambre civile 1-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 JUIN 2024

N° RG 23/02009 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VYHF

AFFAIRE :

S.C.I. ELLIPSE

C/

S.A.R.L. MADE IN EUROPE EXPRESS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mars 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VERSAILLES

N° RG : RG 20/0566

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 20.06.2024

à :

Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Elisa FREDJ, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.C.I. ELLIPSE

N° Siret : 422 013 813 (RCS Pontoise)

[Adresse 2]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 26077 - Représentant : Me Florence BARRUE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1558

APPELANTE

****************

S.A.R.L. MADE IN EUROPE EXPRESS

N° Siret : 483 990 925 (RCS Versailles)

[Adresse 3]

[Localité 4]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Elisa FREDJ, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 603 - N° du dossier E0001DR9

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mai 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Fabienne PAGES, Présidente et Madame Caroline DERYCKERE, Conseillère chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Présidente,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseillère,

Madame Florence MICHON, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

Aux termes d'un acte sous seing privé du 7 septembre 2000, la SCI Ellipse a donné à bail à la société Made in Europe Express, des locaux situés au premier étage d'un immeuble dépendant du Parc des activités des Bellevues situé [Adresse 1] (95), d'une superficie de 156 m², à usage exclusif de bureaux, pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2000, moyennant un loyer annuel de 154.440 francs.

Arrivé à échéance le 30 septembre 2009, le bail s'est poursuivi par tacite prolongation.

Par avenant régularisé le 2 janvier 2018, les parties ont convenu de réduire la surface louée de 156 m² à 127 m².

Puis, le 16 mars 2020, la société Made in Europe Express a donné congé à la SCI Ellipse pour le 30 septembre 2020.

Entre-temps, au motif de diverses contestations relatives à leur mode de calcul, la société Made in Europe Express avait cessé, à compter de l'année 2014, de s'acquitter d'une partie de ses charges (taxes foncières, eau, électricité, etc.). 

Par acte introductif d'instance du 3 novembre 2020, la SCI Ellipse a fait assigner la société Made in Europe Express devant le tribunal judiciaire de Versailles en paiement des charges éludées, à hauteur de 30 037,70 euros. 

Par jugement contradictoire rendu le 2 mars 2023, le tribunal judiciaire de Versailles a : 

déclaré irrecevable comme prescrite la demande en paiement de la SCI Ellipse portant sur le montant de la taxe foncière 2014 

condamné la société Made in Europe Express à payer à la SCI Ellipse les sommes de :

5 266,41 euros au titre des taxes foncières 2015 à 2019

2 552,22 euros TTC au titre des charges d'eau, gaz et électricité restant dues au 30 septembre 2020 

156,37 euros au titre de la majoration forfaitaire contractuelle 

condamné la SCI Ellipse à restituer à la société Made in Europe Express le montant du dépôt de garantie versé, à hauteur de 9 130,47 euros 

ordonné la compensation des créances réciproques

dit qu'il appartiendra aux parties de faire leurs comptes

rejeté les demandes de dommages et intérêts pour résistance abusive formées par la SCI Ellipse et la société Made in Europe Express 

dit que chaque partie restera tenue des frais irrépétibles qu'elle a exposés 

condamné la société Made in Europe Express aux dépens de l'instance avec droit de recouvrement au profit de Maître Mélina Pedroletti 

rappelé que l'exécution provisoire de la décision est de droit. 

Le 27 mars 2023, la S.C.I. Ellipse a relevé appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe le 26 juin 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la bailleresse, appelante, demande à la cour de :

la recevoir en son appel et la déclarer bien fondée 

débouter la société Made in Europe Express de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de la SCI Ellipse 

En conséquence, 

réformer le jugement entrepris en [toutes ses dispositions]

Statuant à nouveau, 

condamner la société Made in Europe Express à payer à la SCI Ellipse la somme de 36 211,51 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2020, date de la mise en demeure et ce jusqu'à parfait paiement, somme se détaillant comme suit :

26 470,51 euros au titre des factures de charges de 2017 a' 2020 

2 647,05 euros au titre de la majoration forfaitaire prévue par l'article G 

6 449,05 euros au titre des factures de charges relatives a' la taxe foncière de 2014 à 2019 

644,90 euros au titre de la majoration forfaitaire prévue à l'article G. 

ordonner que cette somme soit compensée avec la somme de 9 130,47 euros correspondant au dépôt de garantie 

condamner la société Made in Europe Express à payer à la société SCI Ellipse la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive 

la condamner à payer à la SCI Ellipse la somme de 6000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile 

la condamner aux entiers dépend dont le montant sera recouvré par Maître Mélina Pedroletti, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. 

Au soutien de ses demandes, la SCI Ellipse fait valoir : 

que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal judiciaire de Versailles, la facture n°0051 sur la taxe foncière 2014 n'est pas prescrite dès lors que la société Made in Europe Express a reconnu la créance de la société Ellipse, ce qui a eu pour effet d'interrompre la prescription, conformément à l'article 2240 du code civil ; qu'en tout état de cause, ce n'est pas la date d'émission de la facture qui doit être prise en compte comme point de départ du délai de prescription mais celle du 15 octobre 2020 à laquelle a été constitué un avoir ; 

que, contrairement à ce que prétend la société Made in Europe Express, la clé de répartition des charges dues lui a été communiquée ; qu'elle est bien débitrice des charges relatives à la taxe foncière ;

que la société Made in Europe Express est également débitrice de sommes dues au titre de ses charges d'eau, de gaz et d'électricité des années 2017 à 2020 ; que le tribunal judiciaire de Versailles a appliqué la clé de répartition de ces charges en se fondant sur le même calcul que la taxe foncière, or ce sont deux types de charges différents dont les modalités de calcul diffèrent ; qu'en se fondant sur la bonne clé de répartition concernant les charges relatives à l'eau, au gaz et à l'électricité, soit 32,42% avant 2018 diminué à 26,39% à partir de 2018, il convient de condamner la SCI Ellipse au paiement de la somme de 26 470,51 euros ;

que la majoration à hauteur de 10% des sommes dues appliquée par la SCI Ellipse n'est pas excessive.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 25 septembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Made in Europe Express, intimée, demande à la cour de :

Sur l'appel principal :

juger la SCI Ellipse mal fondée en son appel 

la débouter de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions à son encontre 

En conséquence, 

confirmer le jugement [dont appel] en ce qu'il a :

déclaré irrecevable comme prescrite la demande en paiement de la SCI Ellipse au titre de la facture n°0051 à l'échéance du 8 novembre 2014

condamné la société Made in Europe Express à payer à la SCI Ellipse les sommes de :

5 266,51 euros au titre des taxes foncières pour les années 2015 à 2019

2 552, 22 euros TTC au titre des charges d'eau, gaz et électricité restant dues au 30 septembre 2020 

condamné la SCI Ellipse à restituer à la SARL Made in Europe Express le montant du dépôt de garantie versé, à hauteur de 9 130,47 euros

ordonné la compensation des créances réciproques

dit qu'il appartiendra aux parties de faire leurs comptes

rejeté la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive formée par la SCI Ellipse 

Sur l'appel incident :

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

réduit la majoration forfaitaire contractuelle à hauteur de 2% des sommes dues et condamné la SARL Made in Europe Express à payer la somme de 156,37 euros (7.818,63 x2%) à ce titre 

débouté la SARL Made in Europe Express de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive 

débouté la SARL Made in Europe Express de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

Et statuant à nouveau :

débouter la SCI Ellipse de sa demande en paiement de la pénalité de 10% sur le fondement de l'article G du contrat de bail à l'encontre de la SARL Made in Europe Express

juger que l'article G du contrat de bail s'analyse en une clause pénale et comminatoire 

dire qu'aucune majoration forfaitaire contractuelle, quand bien même serait-elle réduite, n'est due à la SCI Ellipse par la SARL Made in Europe Express 

condamner la SCI Ellipse à payer à la SARL Made in Europe Express la somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016 

En tout état de cause, 

condamner la SCI Ellipse au paiement de la somme de 7000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile 

condamner la SCI Ellipse aux entiers dépens dont le montant sera recouvré par Maître Alisa Fredj, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. 

Au soutien de ses demandes, la SARL Made in Europe Express fait valoir : 

sur la prescription: que le point de départ du délai de prescription est bien le 3 novembre 2015, et non le 15 octobre 2020 car la prescription de l'action en paiement d'une facture se calcule à compter de la date d'émission de la facture ; que l'attitude de la SARL Made in Europe Express n'est, en aucun cas, dilatoire ; 

que s'agissant des charges sollicitées, la SARL Made in Europe Express n'a jamais obtenu de justificatifs des sommes réclamées par la SCI Ellipse, malgré les multiples demandes, ni d'explications sur la clé de répartition des charges, en observant que les pourcentages de surface occupée appliqués par la SCI Ellipse à hauteur de 32,42% avant 2018 diminué à 26,39% à partir de 2018 ne correspondent pas à la surface louée dans le bâtiment; qu'il convient, donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Ellipse de sa demande en paiement d'un montant de 36 211,51 euros, et condamné la SARL Made in Europe Express à payer les sommes de 5266,41 euros au titre des taxes foncières de 2015 à 2019 et 2552,22 euros TTC au titre des charges d'eau, de gaz et d'électricité restant dues au 30 septembre 2020 ;

qu'en revanche, s'agissant de la pénalité au titre de l'article G du contrat de bail, son application lui semble injustifiée, même réduite de 10% à 2%, dès lors que la SCI Ellipse est la cause de la survenance de son préjudice, à raison de son refus de fournir les explications et justifications sollicitées et de son obstination à facturer des montants non-conformes aux stipulations contractuelles ; qu'en tout état de cause, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, le dommage résultant du retard dans le paiement est suffisamment réparé par la condamnation aux intérêts au taux légal ; 

que la société Made in Europe Express n'a pas fait preuve de résistance abusive dès lors qu'elle a fait légitimement usage de son droit résultant de la loi et de la jurisprudence d'obtenir le détail des sommes réclamées par son bailleur ; qu'en revanche, la SCI Ellipse, elle, a fait preuve de mauvaise foi et de déloyauté de sorte qu'il convient de la condamner au paiement de la somme de 5000 euros de dommages et intérêts sur le fondement des articles 1134 et 1147 du code civil dans leur rédaction antérieure au 1er octobre 2016. 

La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 avril 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 15 mai 2024 et le prononcé de l'arrêt au 20 juin 2024, par mise à disposition au greffe de la cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond par conséquent aux moyens que pour autant qu'ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions. Il convient de rappeler également s'agissant des prétentions énoncées au dispositif saisissant la cour, que les « dire » et « juger » qui constituent des rappels des moyens invoqués à l'appui des demandes, ne conférant pas -hormis les cas prévus par la loi- de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile, mais, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces points.

Le tribunal a à bons droits fait connaître qu'il appliquerait les textes du code civil dans leur rédaction antérieure à celle qui résulte de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable aux contrats conclus après le 1er octobre 2016, ce qui n'est pas contesté par les parties.

Sur la prescription

La bailleresse ayant demandé le paiement des taxes foncières impayées pour la première fois par son assignation du 3 novembre 2020, la société Made in Europe Express a soulevé la prescription de la taxe foncière correspondant à l'année 2014.

Pour faire droit à cette fin de non-recevoir, le tribunal a retenu que cette taxe foncière était exigible depuis le 15 octobre 2014, et constatée dans une facture n°51 émise le 9 octobre 2014, soit plus de 5 années avant l'introduction de la demande en paiement en application de l'article 2224 du code civil.

Cette dette ayant toujours été contestée par le preneur, il n'est démontré, contrairement à l'affirmation de l'appelante, aucune reconnaissance claire et non-équivoque par le débiteur du droit de son bailleur contre lequel il prescrit, et celui-ci-ne peut pas se prévaloir d'une imputation unilatérale d'un avoir émis le 15 octobre 2020 comme acte interruptif de prescription au demeurant survenu alors que son droit à récupérer cette charge sur son locataire était déjà éteint par l'effet de la prescription.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré prescrite la demande portant sur la taxe foncière 2014.

Sur la clé de répartition des charges

Le bail prévoit une répartition des charges au prorata de la superficie des locaux loués dans l'immeuble concerné. Le bail portant exclusivement sur l'occupation de locaux à usage de bureaux d'une surface de 156 m² réduite à compter de janvier 2018 à 127 m², la cour approuve le tribunal d'avoir appliqué une clé de répartition calculée sur la superficie totale de l'ensemble immobilier dont dépendent les locaux loués, dans la limite de la surface des locaux objets du contrat, sans tenir compte des entrepôts qui ne sont pas mentionnés au bail.

Les parties s'étant accordées sur une surface totale de cet ensemble immobilier de 4 991 m², les charges ne peuvent être imputées à la société Made in Europe Express qu'à raison de 3,13% jusqu'à décembre 2017 inclus et de 2,54% à partir de janvier 2018. Il n'existe aucune justification intelligible permettant d'utiliser une clé de répartition différente selon le type de charge, le contrat liant les parties ne faisant aucune distinction à cet égard, et ne se référant qu'aux « lieux loués » concernant les taxes notamment foncières correspondant « aux biens immobiliers objet des présentes », et au « prorata des surfaces occupées » pour les consommations de fluides.

Le bailleur ne voulait tenir compte pour les charges d'eau électricité et gaz que du prorata de la surface occupée de bureaux qu'il chiffre à 641 m² sans d'ailleurs en justifier, mais le pourcentage de charges qu'il revendique pouvoir appliquer à la société Made in Europe Express soit de 32,42% jusqu'à décembre 2017 et 26,39% à partir de janvier 2018 appliqué aux surfaces occupées par cette société en vertu du contrat de bail, ne permet pas de retrouver les superficies de 156m² puis 127 m² couvertes par le bail. C'est donc à bons droits que la société locataire a contesté cette clé et la méthode retenue par le tribunal sera validée.

Sur la demande au titre des taxes foncières 2015 à 2019

La société locataire ne conteste plus devoir participer au prorata des surfaces occupées à ce type de charge qui est expressément prévue par la bail, les parties ne s'opposant plus que sur l'éventuelle prescription du montant dû au titre de l'année 2014, à laquelle il est répondu ci-dessus.

Par conséquent le jugement doit être confirmé en ce qu'il a fixé le montant dû au titre des taxes foncières 2015 à 2019 à la somme de 5 266,41 euros.

Sur la demande au titre des charges courantes

Le litige a pris naissance en raison de l'absence de justification par le bailleur de ses factures de charges acquittées et des justificatifs de paiement, qui ont finalement été produits devant le tribunal, et du désaccord des parties sur la clé de répartition applicable permettant de calculer le montant susceptible d'être récupéré sur la société Made in Europe Express.

Au vu des charges justifiées et en application de la clé de répartition validée ci-dessus, c'est bien la somme de 2 552,22 euros TTC qui doit être retenue au titre des charges d'eau, gaz et électricité restant dues au 30 septembre 2020, le jugement étant confirmé de ce chef.

Sur la majoration forfaitaire contractuelle

Les parties s'accordent sur la qualification de clause pénale de la clause du bail prévoyant qu'en cas de non-paiement à son échéance exacte de toute somme au titre des loyers et accessoires et après un délai de 15 jours, le montant de chaque échéance impayée sera majoré forfaitairement de 10%.

La bailleresse soutient que s'agissant de sommes qu'elle a avancées pour le compte de son locataire, le montant ressortant de cette majoration n'est pas excessif.

La société Made in Europe Express estime que seule la bailleresse est responsable de la genèse du litige et que le retard de paiement est déjà suffisamment réparé par les intérêts au taux légal, ce qui doit l'exonérer totalement de cette majoration.

Le premier juge constatant que les demandes d'explication adressées au bailleur sont restées vaines et que les montants facturés n'étaient pas conformes aux stipulations contractuelles a jugé que malgré l'abstention de paiement des charges par le locataire pendant plusieurs années, la pénalité calculée à hauteur de 10% était manifestement excessive et devait plus justement être réduite à 2%.

La société Made in Europe ne peut pas être exonérée totalement de cette indemnité contractuelle qui s'ajoute aux intérêts moratoires car elle a délibérément cessé de payer sa part des taxes foncières à partir de l'année 2014 alors qu'elles étaient manifestement dues et qu'elle pouvait à minima se prévaloir des accords ayant émergé de leurs discussions en 2003, et que son refus de paiement lui a même permis de prescrire contre son bailleur le terme de 2014. Ses contestations relatives aux montants facturés au titre des autres charges étaient en revanche fondées. Par conséquent la cour approuve le premier juge d'avoir modéré la clause pénale manifestement excessive à hauteur de 10% à 2%. Le jugement sera également confirmé de ce chef.

Sur le dépôt de garantie

Les parties n'ont pas exprimé d'opposition à la restitution du dépôt de garantie dont le montant n'est pas contesté, et sa compensation avec les sommes restant dues par la locataire.

Sur les demandes croisées de dommages et intérêts pour résistance abusive

Les parties réitèrent leurs demandes indemnitaires que le tribunal a rejetées au constat des torts réciproques. L'issue de cette affaire confirme qu'aucune des parties n'est en mesure de caractériser une résistance abusive de son adversaire à raison de sa propre faute à l'origine du litige.

Il convient par conséquent de confirmer la décision déférée en toutes ses dispositions.

La SCI Ellipse succombant en son recours supportera les dépens d'appel, mais aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque au stade de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI Ellipse aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l'article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Présidente et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-6
Numéro d'arrêt : 23/02009
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.02009 ?
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