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20/06/2024 | FRANCE | N°22/03666

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 20 juin 2024, 22/03666


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 20 JUIN 2024



N° RG 22/03666

N° Portalis DBV3-V-B7G-VSID



AFFAIRE :



[E] [O]





C/

[K] [S] [Y]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : E

N° RG : F 20/00098

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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELARL MARIE PORTHE AVOCAT



la SELARL REDLINK



Me Isabelle TOUSSAINT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 JUIN 2024

N° RG 22/03666

N° Portalis DBV3-V-B7G-VSID

AFFAIRE :

[E] [O]

C/

[K] [S] [Y]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de RAMBOUILLET

N° Section : E

N° RG : F 20/00098

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELARL MARIE PORTHE AVOCAT

la SELARL REDLINK

Me Isabelle TOUSSAINT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [E] [O]

né le 11 Juillet 1970 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6] / FRANCE

Représentant : Me Marie PORTHÉ de la SELARL MARIE PORTHE AVOCAT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de NICE, vestiaire : 723

APPELANT

****************

Monsieur [K] [S] [Y]

né le 30 Août 1960 à [Localité 8] (PAYS-BAS)

de nationalité Néerlandaise

[Adresse 10]

[Localité 5]

Représentant : Me Déborah FALLIK MAYMARD de la SELARL REDLINK, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J044

S.A CLEVELAND-CLIFFS STEEL HOLDING CORPORATION

[Adresse 7]

[Localité 3] (ETATS-UNIS)

Représentant : Me Isabelle TOUSSAINT, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 249 - Substitué par Me Nathalie DAUPHIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

S.A AK STEEL INTERNATIONAL B.V.

N° SIRET : 902 057 066

[Adresse 1]

[Localité 4] (PAYS-BAS)

Représentant : Me Isabelle TOUSSAINT, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 249 - Substitué par Me Nathalie DAUPHIN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Mai 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE

M. [E] [O] a été engagé par la société Ak Steel Sarl suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 26 octobre 2009 en qualité de responsable commercial France, position III B, coefficient 180, avec le statut de cadre dirigeant.

L'unique actionnaire d'Ak Steel Sarl était la société Ak Steel international B.V., filiale d'Ak Steel Holding corporation, devenue Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

Le 16 mai 2012, M. [O] a été nommé co-gérant de la société Ak Steel Sarl avec M. [Y].

M. [Y] a été nommé directeur d'Ak Steel international B.V. à compter du 1er avril 2017.

M. [O] a été promu directeur général et responsable du développement des produits et du service client en 2017.

Par lettre du 18 février 2020, M. [O] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 2 mars 2020.

A compter du 20 février 2020, le salarié a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie.

Par lettre du 6 mars 2020, l'employeur a licencié le salarié pour faute simple.

Contestant son licenciement, le 17 septembre 2020 M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Rambouillet afin de voir dire que son licenciement est nul et d'obtenir la condamnation de M. [Y] à lui payer des dommages et intérêts pour harcèlement moral et des sociétés Ak Steel corporation et Ak Steel international B.V., venant aux droits de la société Ak Steel Sarl, au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul, sans cause réelle et sérieuse, et de diverses sommes au titre de l'exécution et la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 28 novembre 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- rejeté la demande de mise hors de cause des sociétés Ak Steel international B.V. et Ak Steel corporation,

- dit et jugé pour partie seulement recevable les demandes formulées par M. [O] à l'encontre de la société Ak Steel international B.V. venant aux droits de la société Ak Steel Sarl,

- dire et jugé que le statut de cadre dirigeant de M. [O] est applicable,

- dire et jugé que M. [O] n'a pas été victime de harcèlement moral de la part de son ancien employeur,

- dire et jugé que M. [O] n'a pas été victime de harcèlement moral de la part de M. [Y],

- dire et jugé que le licenciement de M. [O] est dénué de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, condamné la société Ak Steel international B.V. à verser à M. [O] la somme de 75 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit avoir lieu à application des intérêts légaux de droit à compter du jour du jugement, sans capitalisation,

- ordonné la remise par la société Ak Steel international B.V. de l'attestation Pôle emploi et du dernier bulletin de salaire rectifiés,

- dit et jugé que le licenciement de M. [O] n'a pas respecté la procédure de licenciement,

- en conséquence, condamné la société Ak Steel international B.V. à verser à M. [O] la somme de 1 000 euros à ce titre,

- condamné la société Ak Steel international B.V. à verser à M. [O] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [O] de l'intégralité de ses autres demandes,

- débouté M. [Y] de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la société Ak Steel international B.V. aux entiers dépens,

- dit que, hors les sujets pour lesquelles elle est de droit, l'exécution provisoire n'a pas être ordonnée pour le surplus.

Le 15 décembre 2022, M. [O] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 15 avril 2024, M. [O] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de ses demandes tendant à voir :

- déclarer inopposable le statut de cadre dirigeant et juger qu'il est soumis aux dispositions légales de la durée du travail,

- reconnaître le harcèlement moral qu'il a subi de la part de M. [Y] et de la part de son employeur lequel a également violé son obligation de sécurité,

- déclarer le licenciement nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse et abusif et vexatoire, - condamner Monsieur [K] [S] [Y] au paiement de la somme de 100 000 euros au titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- condamner à titre principal les sociétés Cleveland - Cliffs Steel holding corporation, anciennement dénommée Ak Steel holding corporation et Ak Steel international B.V. (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) conjointement et solidairement et à titre subsidiaire la seule société Ak Steel international B.V. (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) au paiement des sommes suivantes: * heures supplémentaires : 158 081,80 euros,

* congés payés afférents : 15 808,18 euros,

* contrepartie obligatoire en repos : 37 070,46 euros,

* dommages et intérêts pour travail dissimulé : 122 091,23 euros,

* contrepartie temps de déplacement : 2 870,72 euros,

* dommages et intérêts pour harcèlement moral : 100 000 euros,

* dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité : 25 000 euros,

* indemnité conventionnelle de licenciement, solde : 11 694,27 euros,

* indemnité pour licenciement nul 250 000 euros,

* dommages et intérêts licenciement abusif et vexatoire : 50 000 euros,

- infirmer le jugement en ce qu'il a limité les condamnations de la société Ak Steel international B.V. au paiement des sommes suivantes :

* 75 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 000 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

* 2 500 euros au titre des frais irrépétibles,

- infirmer le jugement en ce qu'il :

- n'a pas condamné les sociétés défenderesses au paiement des intérêts de retard au taux légal à compter de la demande en justice avec capitalisation,

- n'a pas ordonné la publication de la décision dans la presse et à l'entrée des locaux des sociétés défenderesses,

- n'a pas condamné respectivement au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile M. [Y] et les sociétés Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation, anciennement dénommée Ak Steel Holding corporation et Ak Steel international B.V (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) conjointement et solidairement, ou subsidiairement la seule société Ak Steel international B.V. (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl), ni aux entiers dépens,

- et statuant à nouveau, déclarer inopposable le statut de cadre dirigeant et juger M. [O] soumis aux dispositions légales de la durée du travail, avec toutes conséquences de droit,

- juger que M. [O] a été victime de harcèlement moral de la part de M. [Y] et de la part de son employeur, lequel a également violé son obligation de sécurité,

- juger le licenciement nul et abusif et, subsidiairement dénué de cause réelle et sérieuse et abusif, - en conséquence, condamner M. [Y] pour harcèlement moral et au paiement de la somme de 100 000 euros au titre de dommages et intérêts,

- condamner au paiement des sommes suivantes à titre principal, les sociétés Cleveland-Cliffs Steel holding Corporation (anciennement dénommée Ak Steel Holding corporation) et Ak Steel international B.V. (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) conjointement et solidairement,

- à titre subsidiaire, condamner la seule société Ak Steel international B.V (venant aux droits de la société Ak Steel) :

* heures supplémentaires : 158 081,80 euros,

* congés payés afférents : 15 808,18 euros,

* contrepartie obligatoire en repos : 37 070,46 euros,

* contrepartie temps de déplacement : 2 870,72 euros,

* dommages et intérêts pour travail dissimulé : 122 091,23 euros,

* indemnité conventionnelle de licenciement, solde : 27 347,15 euros,

* indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement : 13 428,37 euros,

* indemnité pour licenciement nul, et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse : 250 000 euros, * dommages et intérêts licenciement abusif : 50 000 euros,

* dommages et intérêts pour harcèlement moral : 100 000 euros,

* dommages et intérêts pour violation de l'obligation de sécurité : 25 000 euros,

- confirmer le jugement pour le surplus et y ajoutant:

- condamner les sociétés qui succombent à la remise des documents sociaux rectifiés suivants sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision

- condamner les sociétés qui succombent au paiement des intérêts de retard au taux légal, à compter de la saisine prud'homale pour les créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances indemnitaires, avec capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner M. [Y] au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner au paiement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, et à supporter les entiers dépens :

* à titre principal, les sociétés Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation, (anciennement dénommée Ak Steel Holding corporation) et Ak Steel international B.V (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) conjointement et solidairement,

* à titre subsidiaire, la seule société Ak Steel international B.V. (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl),

- débouter les sociétés Cleveland ' Cliffs Steel Holding corporation (anciennement dénommée Ak Steel Holding corporation) et Ak Steel international B.V (venant aux droits de la société Ak Steel Sarl) de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

- débouter M. [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 3 avril 2024, les sociétés Ak Steel international B.V. et Cleveland-Cliffs Steel holding corporation demandent à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- rejeté la demande de mise hors de cause de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding Corporation,

- jugé que le licenciement de M. [O] est dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Ak Steel international B.V. à verser à M. [O] la somme de 75 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit n'y avoir lieu à application des intérêts légaux de droit à compter du jour du jugement, sans capitalisation,

- ordonné la remise par la société Ak Steel international B.V. de l'attestation pôle emploi et du dernier bulletin de salaire rectifiés,

- dit et jugé que le licenciement de M. [O] n'a pas respecté la procédure de licenciement,

- condamné la société Ak Steel international B.V. à verser à M. [O] la somme de 1 000 euros à ce titre,

- condamné la société Ak Steel international à verser à M. [O] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Ak Steel international B.V. de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la société Ak Steel international B.V. aux entiers dépens,

- et statuant à nouveau :

- mettre hors de cause la société Cleveland-Cliffs Steel holding corporation,

- juger que le licenciement de M. [O] pour faute est bien fondé,

- juger que la procédure de licenciement de M. [O] est régulière,

- en conséquence, débouter M. [O] de ses demandes indemnitaires au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes,

- subsidiairement, si par impossible, la cour estimait le licenciement de M. [O] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- limiter la condamnation de la société Ak Steel international B.V. au paiement de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse conformément au barème issu de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017,

- confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que le statut de cadre dirigeant est applicable,

- dit et jugé que M. [O] n'a pas été victime de harcèlement moral de la part de son ancien employeur,

- dit et jugé que M. [O] n'a pas été victime de harcèlement moral de la part de M. [Y],

- débouté M. [O] de l'intégralité de ses autres demandes,

- subsidiairement, si par impossible la cour devait juger que le statut de cadre dirigeant n'est pas applicable,

- juger que M. [O] ne présente pas à l'appui de sa demande de paiement d'heures supplémentaires des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur d'y répondre utilement,

- débouter M. [O] de ses demandes de rappel au titre des heures supplémentaires et congés payés y afférent, contrepartie obligatoire en repos et contrepartie au temps de déplacement,

- débouter M. [O] de sa demande de dommages et intérêt pour travail dissimulé,

- débouter M. [O] de l'intégralité de ses demandes,

- si, par impossible, la cour estimait le licenciement de M. [O] nul, ramener à de plus justes proportions la demande de dommages et intérêts,

- débouter M. [O] du surplus de ses demandes,

- en tout état de cause, condamner M. [O] à leur payer la somme de 3 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] au paiement des entiers dépens de l'instance.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 24 avril 2024, M. [Y] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que M. [O] n'était pas victime de harcèlement moral,

- confirmer le jugement en ce qu'il a jugé qu'il n'était pas l'auteur d'actes de harcèlement moral,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [O] de ses demandes indemnitaires dirigées à son encontre,

- à titre reconventionnel, infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et condamner M. [O] à lui verser la somme de 1 euro à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande formulée au titre de l'article 700 et condamner M. [O] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 25 avril 2024.

MOTIVATION

Sur le statut de cadre dirigeant et ses conséquences

Le salarié fait valoir qu'il ne faisait pas partie des cadres les mieux classés et les mieux rémunérés, qu'il n'a jamais eu d'autonomie décisionnelle, qu'il ne participait pas à la détermination de la politique générale de la société, ni à la prise de décision stratégique, ni à la prise de décisions administratives.

Les sociétés Cleveland - Cliffs Steel holding corporation et Ak Steel international B.V. indiquent que le salarié bénéficiait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps, qu'il avait toute latitude pour élaborer et mettre en oeuvre la politique commerciale de l'entreprise, puis qu'il avait en charge la gestion courante de la société en qualité de directeur général, qu'il percevait une rémunération élevée et qu'il participait à la direction de la société.

Aux termes de l'article L. 3111-2 du code du travail, 'les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres II et III.

Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement.'

Seuls relèvent de la catégorie des cadres dirigeants les cadres participant à la direction de l'entreprise.

En l'espèce, sur l'organisation de l'emploi du temps, il ressort du contrat de travail de responsable commercial du salarié qu'il bénéficiait d'une grande liberté dans l'organisation de son emploi du temps, les bulletins de salaire du salarié mentionnant qu'il est 'cadre sans référence horaire' et ne faisant pas référence à un forfait jour contrairement aux allégations du salarié. Dans les faits, le salarié était en charge d'élaborer et de mettre en oeuvre la politique commerciale de l'entreprise, de gérer le suivi de la clientèle, puis de mettre en place une politique de développement des produits de la société, ayant été promu en 2017 directeur général et responsable du développement des produits et du service client. Il en résulte qu'il bénéficiait effectivement d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps.

Sur le pouvoir de décision, il résulte de l'organigramme, de la fiche de poste et des justificatifs de pouvoir versés aux débats, que le salarié était responsable commercial puis directeur général de la filiale française rattachée à la société Ak Steel international. A ce titre, il avait le pouvoir de proposer de nouvelles activités commerciales, de prendre des décisions pour atteindre les objectifs budgétaires de la société française, de recruter, licencier, proposer des augmentations salariales pour les effectifs de la société française, de donner des orientations au comité qualité de la société Ak Steel international, de donner des orientations au responsable du merchandising des matériaux pour s'assurer de la qualité des matériaux achetés, qu'ainsi, il était en charge de la gestion courante de la société française et disposait du pouvoir de signer des contrats de prestations de service, de signer des contrats de location longue durée pour des véhicules de société, de signer des contrats de location pour du matériel, de signer les contrats de travail. Il s'en déduit que le salarié avait un pouvoir de décision largement autonome au sein de la société.

Sur le niveau de rémunération, le salarié était classé III B, coefficient 180, au niveau le plus élevé par rapport aux autres salariés de la société, toutefois, la qualité de cadre dirigeant ne requiert pas qu'il se situe au niveau hiérarchique le plus élevé de la classification conventionnelle. Il percevait en 2019 une rémunération annuelle brute de 120 585 euros, outre un bonus de 30 098 euros, soit deux fois supérieure au minimum à celle des autres salariés de la société, la rémunération du dirigeant d'une filiale ne pouvant être comparée à la rémunération de dirigeants de la société holding du groupe. Le fait que le salarié ait perçu des allocations d'aide au retour à l'emploi de Pôle emploi, alors qu'il cumulait un contrat de travail et un mandat social, n'implique pas qu'il n'avait pas le statut de cadre dirigeant, les dirigeants justifiant d'un contrat de travail pouvant bénéficier de l'assurance chômage sous certaines conditions. Ainsi, le salarié percevait une rémunération parmi les plus élevées de l'entreprise.

En outre, le salarié participait à la direction de l'entreprise puisqu'il était responsable de la politique commerciale de la société avant d'en devenir le directeur général et donc de diriger cette filiale dans sa gestion courante. Le fait que la société française soit rattachée à une société du groupe et que le salarié soit en lien avec une société du groupe lui adressant des consignes et directives ne contredit pas le fait qu'il était effectivement à la tête de la filiale française dans sa gestion courante et qu'il participait à la direction de l'entreprise.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le salarié bénéficiait du statut de cadre dirigeant. Il doit, par conséquent, être débouté de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires, congés payés afférents, contrepartie obligatoire en repos, n'étant pas soumis aux dispositions relatives à la durée du travail en tant que cadre dirigeant. Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ces points.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

En l'espèce, le salarié ne rapporte pas la preuve de l'élément matériel du travail dissimulé, en vertu de son statut de cadre dirigeant non soumis aux dispositions relatives à la durée du travail, ses bulletins de paie mentionnant 'cadre sans référence horaire'.

Le jugement du conseil de prud'hommes doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur la contrepartie temps de déplacement

Le salarié indique avoir consacré 47 jours à ses déplacements entre [Localité 9], les Pays-Bas et l'Allemagne entre 2017 et 2020 sans contrepartie financière. Il ajoute qu'il visitait régulièrement les autres filiales, partenaires et clients du groupe notamment en Italie, Angleterre, Suisse, Espagne et dans différentes régions de France, ces temps excédant la durée habituelle de trajet entre le domicile et le lieu de mission. Il sollicite une indemnisation en application de la convention collective propre aux ouvriers et ETAM et de l'accord région parisienne relatives aux grands déplacements en l'absence de dispositions applicables de la convention propre aux cadres.

Les sociétés intimées font valoir que les dispositions invoquées ne concernent pas les cadres, que l'accord national relatif aux conditions de déplacement ne concerne que les employés et agents de maîtrise et n'est pas étendu. Elles rappellent que le salarié, en tant que cadre dirigeant, n'était pas soumis à la réglementation relative à la durée du travail de sorte que la durée de ces déplacements, pour la plupart effectués à des horaires normaux de travail en journée, ne saurait faire l'objet d'aucune indemnisation. Au surplus, elles relèvent que le salarié ne distingue pas les déplacements effectués dans le cadre de son contrat de travail et ceux effectués dans le cadre de son mandat social.

En l'espèce, le salarié produit des extraits d'agenda et des justificatifs de voyage en train Thalys. Cependant, le salarié ne distingue pas les trajets effectués dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail de ceux effectués dans le cadre de son mandat social.

Par conséquent, la demande étant injustifiée, le jugement du conseil de prud'hommes doit être confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de contrepartie temps de déplacement.

Sur l'obligation de sécurité

Le salarié sollicite des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Il fait valoir que l'employeur n'a mis en oeuvre qu'une enquête interne, limitée à l'audition des deux intéressés, alors que M. [Y] a reconnu divers événements et qu'aucune mesure n'a été prise pour qu'il modifie son attitude ou pour aider le salarié, cette enquête étant insuffisante.

Les sociétés intimées font valoir que le salarié en sa qualité de cadre dirigeant n'était pas soumis aux dispositions légales et réglementaires relatives à la durée du travail, que le salarié ne rapporte pas d'éléments suffisamment précis permettant de démontrer les horaires réellement accomplis. Elles ajoutent qu'après communication de difficultés de communication par le salarié, il lui a été proposé une réunion, puis qu'après un courrier mentionnant des griefs par le salarié, une enquête interne a été diligentée qui a conclu à l'absence de tout harcèlement moral.

Ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser.

L'employeur justifie que le 3 juillet 2019 un entretien a été proposé au salarié qui avait exprimé une tension dans la communication avec M. [Y], entretien qui a été tenu le 9 septembre 2019 en présence d'une consultante en ressources humaines et qui a donné lieu à un compte-rendu.

L'employeur justifie également qu'une enquête interne a été menée après un courrier du salarié du 16 septembre 2019 adressé à la direction faisant état de griefs et alertant sur des agissements de harcèlement de la part de M. [Y], produisant une attestation de Mme [Z] du 19 juillet 2021, directrice juridique groupe, dans laquelle elle relate avoir tenu des entretiens approfondis avec le salarié et avec M. [Y] et avoir analysé ces éléments avec Mme [D], directrice générale en charge des ressources humaines au sein de Ak Steel corporation, concluant à l'absence de violation de la politique du groupe. Il ne ressort pas des déclarations de M. [Y] qu'il ait reconnu des agissements de harcèlement moral contrairement aux allégations des sociétés intimées.

Au vu de ces éléments, l'employeur justifie avoir respecté son obligation de sécurité notamment en diligentant une enquête interne à réception de l'alerte du salarié dénonçant des faits de harcèlement moral de la part de M. [Y], cette enquête ayant été menée avec sérieux et ses conclusions ayant été appréciées par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction. Le jugement du conseil de prud'hommes doit, par conséquent, être confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, 'aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à la mise en 'uvre de l'article L.1152-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié invoque les faits suivants :

des tensions, notamment de valeurs, liées à un statut artificiel de dirigeant,

des propos déplacés ou désobligeants de M. [Y],

un traitement inégalitaire,

une critique infondée et mensongère par M. [Y] des solutions informatiques préconisées,

des critiques infondées et destabilisantes lors de l'entretien d'évaluation,

l'obstruction et des critiques publiques infondées par M. [Y] à son égard,

une politique de rémunération anormale imposée par M. [Y],

des critiques injustifiées et réitérées de M. [Y] sur la gestion de l'équipe,

l'immixtion cautionnée par M. [Y] dans la gestion de la société française,

le pillage non explicité de la société française anéantissant les années de travail de sa part,

l'éviction constante de salariés créant un climat d'angoisse sur la pérennité de son poste,

la rencontre du 4 juillet 2019 et les pressions pour tenter d'obtenir son départ à l'amiable.

Sur les tensions de valeur, liées à un statut artificiel de dirigeant 1), le salarié affirme que sa situation, sous contrôle et surveillance de M. [Y] ne correspondait pas à son statut de cadre dirigeant et co-gérant, que nommé directeur en avril 2017, M. [Y] a profité de ses fonctions pour faire pression sur lui et l'humilier. Le salarié produit à l'appui de ce fait, une seule pièce, un article relatif à la promotion de M. [Y] au 1er avril 2017. Toutefois, cette promotion et le fait que le salarié bénéficiait effectivement d'un statut de cadre dirigeant à la tête de la politique commerciale puis à la direction générale de la filiale Ak Steel France ne matérialisent pas ce fait 1) qui doit donc être écarté.

Sur des propos déplacés ou désobligeants de M. [Y], le salarié fait état de deux réflexions l'une au cours d'une réunion où ce dernier lui aurait dit 'tu n'est pas censé être en vacances, pourquoi tu n'es pas à la plage', l'autre au sujet d'un programme de formation développé par le salarié et rebaptisé par M. [Y] 'le Fer Pur pour les Nuls', ces propos étant du registre de l'humour, qui peut être subjectif, mais sans connotation déplacée ou désobligeante en eux-mêmes. Ce fait 2) ne peut donc être retenu.

Sur un traitement inégalitaire 3), le salarié se plaint d'avoir essuyé un refus à une demande de visite d'usine sur une aciérie en Allemagne alors qu'une telle formation avait été organisée en 2012, puis que suite à une demande d'autres filiales, trois salariés de l'équipe française uniquement avaient été autorisés à y participer. Il ressort des pièces produites que trois personnes de l'équipe française ont été autorisées à faire une visite d'usine le 21 novembre 2017, de même que trois personnes de l'équipe allemande et quatre personnes des Pays-Bas, M. [Y] ayant souhaité limité ces visites aux personnes occupant des postes spécifiques principalement techniques. Aucun traitement inégalitaire n'étant matérialisé, ce fait 3) doit donc être écarté.

Sur une critique par M. [Y] des solutions informatiques préconisées 4), le salarié produit un seul courriel du 12 janvier 2018 de ce dernier, ne souhaitant pas investir dans un logiciel de gestion de relation client de type 'CRM' comme proposé par le salarié, les raisons de ce refus étant développées par M. [Y], mentionnant l'existence d'un module complémentaire pour le logiciel du groupe Navision, bien que le groupe ne l'ait pas utilisé jusqu'à présent. Ce positionnement argumenté et professionnel de M. [Y] ne revêt pas de caractère infondé et mensonger et ce fait 4) ne peut être retenu.

Sur des critiques infondées et destabilisantes lors de l'entretien d'évaluation 5), le salarié produit des éléments relatifs à l'entretien d'évaluation tenu le 15 janvier 2018 avec M. [Y], ce dernier l'évaluant globalement à 3/5 reconnaissant qu'il 'atteignait toutes les exigences et attentes', le salarié discutant toutefois l'évaluation retenue, celle-ci lui semblant non corrélée aux commentaires globalement très favorables. Cependant, il ne ressort pas de ces échanges des critiques infondées et destabilisantes, l'employeur ayant agi dans le cadre de son pouvoir de direction, ce fait 5) n'est donc pas matérialisé et doit être écarté.

Sur l'obstruction et des critiques publiques infondées par M. [Y] à son égard 6), le salarié indique que lors d'une réunion le 16 janvier 2018, M. [Y] lui a demandé de se dessaisir d'un client important, le dossier [NO], sous-traitant de la société Schneider Electric alors que ce dernier lui avait écrit pour lui demander de gérer ce contrat et produit un courriel du 6 décembre 2017 de M. [F] de Schneider Electric. Il présente également l'ancienne répartition géographique des zones de vente par filiale et la nouvelle répartition présentée le 18 janvier 2018 montrant que la société française passait de 27 pays à seulement 4 pays.

Sur une politique de rémunération anormale imposée par M. [Y] 7), le salarié présente le fait que le 17 décembre 2018 ce dernier a refusé aux membres de son équipe le bénéfice de la prime Macron à hauteur de 1 000 euros par personne tel qu'il l'avait proposé.

Sur des critiques injustifiées et réitérées de M. [Y] sur la gestion de l'équipe 8), le salarié produit un courriel de M. [Y] sur une nouvelle organisation territoriale, notamment les envois hors europe, traités par la société Ak Steel international, son courrier du 16 septembre 2019 dans lequel il déplore la difficulté d'obtenir un résultant net de 10% en l'absence de facturation d'activités développées par les filiales, lesquels ne font pas mention de critiques de M. [Y] mais d'une nouvelle organisation de la répartition territoriale et de la facturation. Il présente cependant un courriel du 17 juin 2019 adressé à Mme [C], avec un ton critique: 'Pourquoi [R] devrait-elle visiter Electrolloy ' (...) pas étonnant que l'équipe française soit si occupée.'

Sur l'immixtion cautionnée par M. [Y] dans la gestion de la société française 9), le salarié produit un courriel du 26 juin 2019 dans lequel il dénonce auprès de M. [Y] des immiscions de la directrice de la filiale italienne Mme [J] dans les affaires de la société française et déplore son absence de réaction, ainsi qu'un courriel de Mme [J] du 4 octobre 2019, cette dernière critiquant le budget prévisionnel de la filiale française.

Sur le pillage non explicité de la société française anéantissant les années de travail de sa part 10), le salarié produit un échange de courriel avec M. [Y] au sujet du transfert de 750 000 euros de la filiale française à la société Ak Steel international B.V, il indique que la filiale française a déménagé en février 2021 de ses locaux de 260 m2 situées à [Localité 11] vers des locaux situés à la Défense de 35m2, il ajoute que suite à une opération de fusion absorption, la société française a été radiée fin 2021 et produit la publication au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales à ce sujet.

Sur l'éviction constante de salariés créant un climat d'angoisse sur la pérennité de son poste 11), le salarié mentionne le départ de responsables du groupe qui n'ont pas été remplacés notamment en Espagne, au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays-Bas. Il ajoute que sur les cinq personnes promues en mars 2017 lors de la mise en place d'une nouvelle organisation, seules deux personnes sont toujours actives, les trois autres personnes ayant quitté la société suite à un burn-out, un infarctus ainsi que lui-même.

Sur la rencontre du 4 juillet 2019 et les pressions pour tenter d'obtenir son départ à l'amiable 12), le salarié indique que M. [Y] ne s'est pas remis en cause le 4 juillet 2019 puis que lors de l'entretien du 9 septembre 2019, il s'est vu imposer la présence de Mme [NF], consultante en ressources humaines, sans en être averti. Il ajoute qu'une rupture amiable lui a été proposée ce dont il ne justifie pas.

Ainsi, le salarié présente des faits 6), 7), 8), 9), 10), 11), 12) qui, pris dans leur ensemble, laissent présumer l'existence d'un harcèlement à son encontre de la part de M. [Y], directeur de la société mère, Ak Steel international B. V..

Sur le fait 6), la réunion du 16 janvier 2018 durant laquelle M. [Y] a demandé au salarié de se dessaisir du client [NO], sous-traitant de la société Schneider Electric, M. [Y] et les sociétés intimées font valoir que ce client est italien et que les ventes auraient toujours dû être comptabilisées par la société italienne afin de respecter la réglementation fiscale en matière de prix de transfert groupe, qu'il s'agit d'un élément relevant de la politique et de la stratégie commerciale du groupe. En outre, les intimés précisent que M. [B] directeur des ventes pour Ak Steel international B.V. avait appris lors d'une réunion avec Schneider Electric en France que M. [H] les avaient contactés pour qu'ils demandent à être facturés à partir de la France, M. [Y] produisant un courriel du 5 mai 2021 en ce sens.

Sur le redécoupage des territoires gérés par chaque filiale, les sociétés intimées font valoir que la société française s'est vue affecter deux pays peu industrialisés Monaco et Luxembourg en raison de la langue parlée.

Il s'en déduit que les décisions de l'employeur sont justifiées par des éléments de politique et de stratégie étrangers à tout harcèlement.

Sur le fait 7), les intimés relèvent à juste titre que la prime Macron était facultative et qu'en vertu de son pouvoir de direction, ladite prime a été refusée, M. [Y] expliquant de manière courtoise et justifiée les raisons de son refus, les salariés de l'équipe française recevant régulièrement des bonus. Par conséquent, le refus, formulé en termes professionnel et courtois d'allouer une prime exceptionnelle aux salariés français procède d'une décision de l'employeur étrangère à tout harcèlement.

Sur le fait 8), le courriel du 17 juin 2019 adressé à Mme [C], M. [Y] précise qu'il a été adressé par erreur à Mme [C] au lieu de Mme [J], ce qui ressort en effet des termes du courriel, qu'il met en exergue une divergence d'opinion sur la politique du groupe. Il s'en déduit que ce courriel a été envoyé par erreur à un autre destinataire et qu'il traduit en réalité une divergence sur la façon d'organiser le travail entre M. [Y] et le salarié. Ce fait est donc étranger à tout harcèlement.

Sur l'immixtion de Mme [J] cautionnée par M. [Y] dans la gestion de la société française 9), les sociétés intimées font valoir que le groupe avait mis en place un projet de développement aérospatial, avait recruté M. [T], spécialiste de nationalité italienne, avait mis en place un groupe de travail présidé par Mme [J] dans le cadre du salon du Bourget et que la filiale italienne avait permis de renforcer le projet. Il s'en déduit que les décisions de l'employeur sont étrangères à tout fait de harcèlement moral.

Sur le fait 10), les intimés exposent que le transfert de trésorerie résulte d'une décision des services financiers du groupe, que le déménagement dans des locaux plus petits était en cohérence avec les pratiques dans le secteur de la défense et provenait d'une décision de la politique du groupe. Par conséquent, les décisions de l'employeur sont étrangères à tout fait de harcèlement. La radiation de la société française fin 2021 est largement postérieure au licenciement du salarié et résulte principalement de choix de restructuration du groupe et ne saurait constituer un agissement de harcèlement moral.

Sur le départ de responsables, les intimés font valoir, à juste titre, que deux salariés de la filiale espagnole ont été licenciés pour motif économique, que deux salariés de la filiale néerlandaise ont rompu leur contrat d'un commun accord avec l'employeur, que les autres salariés ont quitté la société avant la nomination de M. [Y] en tant que directeur et qu'aucun des salariés cités ne faisaient partie de la société française employant le salarié. Par conséquent, cet élément de contexte est étranger à tout agissement de harcèlement à l'encontre du salarié.

Sur le fait 12), M. [Y] précise qu'il avait proposé la présence d'une consultante en ressources humaines pour la réunion du 4 juillet 2019, et qu'il avait souhaité restaurer le dialogue avec le salarié qui s'était plaint de difficultés de communication. Il s'en déduit que le salarié n'a pas été averti de la présence de la consultante le 9 septembre 2019, ce fait est avéré.

Ainsi, le seul fait que le salarié n'ait pas été averti de la présence d'une consultante lors de l'entretien du 9 septembre 2019 n'est pas constitutif de harcèlement moral de la part de M. [Y] à l'encontre du salarié, s'agissant d'un fait isolé.

Le jugement du conseil de prud'hommes doit, par conséquent, être confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Sur la responsabilité de M. [Y]

Le préposé dispose d'une immunité civile s'il n'a pas excédé les limites de sa mission.

En l'espèce, M. [Y] a agi dans les limites de ses fonctions de directeur général de la société. Il n'a pas outrepassé ces limites ou effectué un abus de fonction.

Au surplus, M. [Y] n'a pas commis d'agissements de harcèlement moral à l'encontre du salarié.

Par conséquent, M. [O] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts à l'encontre de M. [Y] pour harcèlement moral. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la validité du licenciement et ses conséquences

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est libellée comme suit :

«[...] Nous sommes au regret de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour faute en raison des faits suivants :

Nous vous rappelons que vous avez été engagé par contrat à durée indéterminée, à compter du 26 octobre 2009, en qualité de Responsable Commercial France, Statut cadre dirigeant, position III B, coefficient 180, conformément à la convention collective nationale des Ingénieurs et Cadres de la Métallurgie.

Vous vous êtes ainsi expressément engagé, notamment aux termes de l'article 1-2 de votre contrat de travail, d' « exercer [vos] fonctions sous le contrôle et la surveillance de Monsieur [X] [G] ou de toute autre personne désignée par elle à cet effet. »

Vous êtes chargé "d'élaborer et de mettre en 'uvre la politique commerciale de l'entreprise" et à ce titre, vous vous êtes engagé à gérer " le suivi de la clientèle", "à mettre en place une politique de développement des produits de la Société".

Vous occupez donc un poste clé au sein de la structure, ce qui nécessite non seulement une relation fondée sur la confiance, l'échange, le travail en équipe, le respect, mais aussi une loyauté Indéfectible (visée expressément dans l'article 6 de votre contrat de travail).

Il va sans dire que vous devez également avoir une attitude exemplaire.

Or, nous regrettons depuis plusieurs mois que, de par vos agissements et votre comportement, vous commettez des manquements répétés et inadmissibles dans l'exercice de vos missions de Responsable commercial France :

- en prenant délibérément des décisions de nature à porter préjudice aux intérêts commerciaux de l'entreprise et du Groupe, déstabilisant ainsi les salariés placés sous votre responsabilité (1/),

- en faisant preuve d'une attitude négative, inadmissible et persistante qui porte préjudice à la société (2/).

1/ Nous déplorons vos décisions incompréhensibles, dénuées de bon sens, contrevenant à vos obligations contractuelles essentielles, à commencer par celles visant « à mettre en place une politique de développement » des produits de l'entreprise.

En effet, par votre stratégie et vos décisions, vous freinez le développement de la société, ce qui est de nature à porter préjudice à l'intérêt de l'entreprise et à sa compétitivité. A titre d'exemple, par mail du 9 décembre 2019, vous vous êtes opposé à ce que Madame [R] [C], Business Development Manager, se rende au Maroc pour y rencontrer la Responsable Marketing du développement du pôle aéronautique. Pourtant, cette dernière se proposait d'accueillir notre société durant 2 jours et d'organiser des rendez-vous avec les principaux acteurs (SAFRAN, FigeacAero, UTC).

Par cette décision, vous avez privé notre société d'une opportunité d'étendre ses relations commerciales.

Pour justifier votre refus :

- vous avez invoqué un prétendu risque de terrorisme « dans ce pays où les femmes y seraient moins bien accueillies » ('),

- et vous avez indiqué que Madame [C] devait rester à vos côtés pour le bouclage du budget d'AK STEEL.

Votre décision est injustifiable car il s'agissait d'un déplacement limité dans la zone aéroportuaire de Casablanca, de sorte qu'il n'y avait aucun risque pour la sécurité de Madame [C]. Celle-ci n'aurait en aucun cas été isolée et, qui plus est, elle aurait pu être accompagnée par un collègue de sexe masculin... ce que vous n'avez même pas suggéré.

Ceci témoigne :

- non seulement d'une absence de vision à long terme du développement commercial de notre société et de son rayonnement international,

- mais surtout que vous privilégiez votre intérêt personnel et celui d'AK STEEL France, au détriment de celui du Groupe AK STEEL INTERNATIONAL, ce qui est préjudiciable pour l'intérêt de l'entreprise.

Qui plus est, il s'agit d'un manquement répété, pour lequel nous n'avons eu de cesse de vous alerter notamment lors de l'entretien annuel d'évaluation (appraisal) du 15 janvier 2018.

Pourtant, et de manière constante, vous avez ainsi fait fi de ces recommandations.

Dans le même sens, vous avez toujours refusé tout accompagnement pour améliorer votre communication vis-à-vis de vos collègues et homologues étrangers du Groupe, pour qui vous avez toujours montré une attitude de défiance. Votre refus à faire déplacer Madame [C] au Maroc, suggestion formulée par votre homologue italienne, Madame [U] [J], en est une bonne illustration.

Votre réticence affichée à toute initiative ou suggestion provenant de vos collègues étrangers, recherchant juste une synergie de Groupe, est : non seulement de nature à perturber voire à déstabiliser les salariés placés sous votre responsabilité (salariés en copie des échanges de mail avec le Groupe), mais surtout à décrédibiliser, par ces dissonances, l'ensemble de la Direction de la société et du Groupe.

Ce défaut d'implication dans les projets transverses du Groupe traduit un manque de professionnalisme évident.

2/ Cette situation est d'autant plus inadmissible qu'elle persiste depuis plusieurs malgré nos alertes.

Pour mémoire, vous nous avez indiqué par mail du 16 mai 2019, souhaiter accorder un bonus à une seule salariée, Madame [MM] [M] pour ses performances sur les premiers mois de l'année 2019.

Comme il vous l'a été répondu le lendemain, l'octroi d'une prime ne pouvait être accepté sur une si courte période et devait, a minima, se comparer avec les résultats de ces salaries.

Sans notre intervention, vous auriez octroyé une prime discrétionnaire, totalement prohibée et contraire au principe de l'égalité de traitement entre salariés.

Une telle décision et totalement contraire à la politique du Groupe. Elle est également Inconséquente et aurait pu créer des tensions entre salariés, et, in fine, générer un climat délétère au sein de l'entreprise et du Groupe.

3/ Vos difficultés constantes à communiquer avec vos interlocuteurs du Groupe (Mr. [P] [L] Madame [U] [J], Monsieur [A] [B] Monsieur [I] [W], Monsieur [N] [MW]), évoquées ci-dessus, ne résultent que d'un laxisme caractérisé.

Nous déplorons que vous ayez pris le parti de mener vos missions de Responsable Commercial France, en limitant toute interférence avec le Groupe, et plus grave, en faisant preuve d'insubordination vis-à-vis de votre supérieur hiérarchique visé expressément sur votre contrat de travail, Monsieur [V] [Y].

Pour pallier ces difficultés relationnelles avec votre hiérarchie, nous vous avons alors proposé d'être accompagné par une consultante indépendante en ressources humaines, Madame [MD] [NF], notamment lors de notre réunion à [Localité 8] (Pays-Bas) le 4 juillet 2019.

Vous avez une nouvelle fois rejeté notre proposition.

4/ Ce défaut d'implication au niveau du Groupe et cette gestion très personnelle de votre activité est préjudiciable aux intérêts financiers du Groupe, comme en témoigne l'élaboration du budget.

En faisant preuve d'une insubordination caractérisée, vous avez une nouvelle fois ignoré les préconisations du Groupe et avez présenté un budget revu à la baisse sans raison valable (de plusieurs centaines de milliers d'euros) contraire à nos chiffrages !

5/ L'enquête menée sur vos allégations infondées, à l'encontre de Monsieur [Y], concernant de prétendus faits de harcèlement n'ont malheureusement fait que confirmer votre attitude négative vis-à-vis de la société, en dépit, là encore, de nos efforts pour vous accompagner et vous remotiver.

Nous tenons à vous rappeler que sur la base de vos dénonciations et commentaires contenus notamment dans votre courrier du 16 septembre 2019, nous avons décidé de diligenter une enquête interne pendant plusieurs mois en toute objectivité.

Au terme de cette enquête, il ressort que les faits reprochés et ainsi dénoncés n'étaient pas avérés.

Aucun fait de harcèlement n'a pu être corroboré.

Cette enquête a simplement conclu à une animosité de votre part envers Monsieur [V] [Y].

Si vous êtes parfaitement libre d'avoir une opinion négative sur votre supérieur hiérarchique, Monsieur [Y], il est intolérable que vous le critiquiez ouvertement et sans raison devant les autres collaborateurs, et que vous remettiez en cause de façon constante et non constructive chacune de ses décisions et actions concertées avec l'ensemble du Groupe.

Nous tenons à vous rappeler que lors de cette enquête, et ce dans un souci d'apaisement, nous avons proposé un accompagnement, proposition que vous n'avez pas suivie.

Votre comportement de plus en plus négatif vis-à-vis de la société et du Groupe, en dépit de nos efforts réitérés d'accompagnement et d'apaisement, nous ont donc conduit à envisager une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'à votre licenciement pour faute.

Compte tenu de tout ce qui précède, vous ne pouvez ignorer que cette situation porte directement préjudice au bon fonctionnement de la société et à son image.

Nous estimons d'ailleurs avoir été particulièrement patients à votre égard.

Votre absence lors de notre entretien du 2 mars dernier ne nous a pas permis de modifier notre appréciation au sujet des faits qui vous sont reprochés.

Dans ces conditions, votre maintien dans les effectifs s'avère impossible.

Toutefois, après réflexion, et afin de ne pas préjudicier à votre employabilité, nous avons en revanche décidé de ne pas procéder au licenciement pour faute grave que nous nous apprêtions à prononcer.

C'est pourquoi nous avons décidé, par la présente, de vous notifier votre licenciement pour faute simple. [...]. »

En application de l'article L. 1152-2 du code du travail, le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis ; le licenciement est nul de plein droit.

En l'espèce, il résulte des termes de la lettre de licenciement en son grief 5) que l'employeur tient rigueur au salarié d'avoir fait état de 'prétendus faits de harcèlement [qui] n'ont malheureusement fait que confirmer [son] attitude négative vis à vis de la société', l'employeur reprochant ainsi au salarié d'avoir relaté ces faits à l'encontre de M. [Y] alors que les faits n'étaient pas avérés.

Il s'en déduit, en l'absence de mauvaise foi, que le salarié a été licencié notamment pour avoir relaté des faits de harcèlement moral. Son licenciement est donc nul de plein droit.

Sur le solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement

Il sera retenu le salaire de référence calculé sur les douze derniers mois précédant l'arrêt de travail pour maladie, incluant la prime annuelle liée à l'activité, sans heures supplémentaires, le salarié étant soumis au statut de cadre dirigeant, soit un salaire mensuel brut de 15 936,79 euros.

L'indemnité conventionnelle de licenciement doit être fixée comme suit :

15 936,79 /5 X 7 ans +15 936,79 X3/5X3,58 ans = 56 543,73 euros.

Il reste dû un solde à M. [O] de 56 543,73 - 44 849,46 = 11 694,27 euros.

Sur l'indemnité pour licenciement nul

Aux termes de l'article L. 1235-3-1 2° du code du travail, l'article L. 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

En l'espèce, le salarié ne demande pas sa réintégration. Il justifie d'une ancienneté de plus de dix ans et est âgé de 49 ans au moment du licenciement. Il justifie être admis au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi le 17 juillet 2020 et percevoir des allocations jusqu'en février 2021 ainsi que de nombreuses recherches d'emploi.

Sur la base d'un salaire mensuel de 15 936,79 euros par mois, il lui sera alloué à M. [O] une indemnité de 160 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul.

Par conséquent, le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a condamné Ak Steel international B.V. à payer à M. [O] la somme de 75 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'a débouté de sa demande de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement et la société Ak Steel international B.V. , venant aux droits de la société Ak Steel Sarl, doit être condamnée à payer à M. [O] les sommes suivantes :

11 694,27 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,

160 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul.

Sur les circonstances brutales et vexatoires de la rupture

Le salarié ne caractérise pas de circonstances brutales ou vexatoires de la rupture. Il doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la procédure de licenciement

Le salarié indique qu'il a été licencié par courriel du 6 mars 2020 puis par courrier au mépris du formalisme prévu à l'article L. 1232-6 du code du travail.

Les sociétés intimées font valoir que la notification du licenciement est intervenue le même jour que le courriel, le courrier étant envoyé depuis les Etats-Unis, que le salarié ne rapporte la preuve d'aucun préjudice.

En l'espèce et en tout état de cause, le salarié n'invoque, ni ne caractérise de préjudice en lien direct avec le manquement procédural invoqué. Par conséquent, le jugement attaqué sera infirmé en ce qu'il a condamné Ak Steel international B.V. à payer à M. [O] la somme de 1 000 euros pour non-respect de la procédure de licenciement et M. [O] sera débouté de sa demande à ce titre.

Sur la demande de condamnation conjointe et solidaire à l'encontre de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation

Le contrat de travail du salarié a été conclu avec la société Ak Steel Sarl, aux droits de laquelle vient la société Ak Steel international B.V. suite à une fusion.

En outre, aucune immixtion permanente de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation dans la gestion économique et sociale de la société Ak Steel Sarl n'est caractérisée, la société Ak Steel Sarl bénéficiant d'une autonomie dans la gestion courante de la société. Par conséquent, la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation n'a pas la qualité de co-employeur.

Au vu de ces éléments, M. [O] doit être débouté de sa demande de condamnation conjointe et solidaire à l'encontre de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation, cette dernière n'ayant ni la qualité d'employeur, ni la qualité de co-employeur du salarié.

Sur la demande de mise hors de cause de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation

La société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation sera mise hors de cause, celle-ci n'ayant pas la qualité d'employeur ou de co-employeur du salarié, aucune condamnation n'étant retenue à son encontre. Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur la remise de documents

Il convient d'ordonner la remise par Ak Steel international B.V. à M. [O] des documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [O] de sa demande d'astreinte.

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par Ak Steel international B.V. aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à M. [O] du jour du licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Il n'y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme sollicité pour les créances salariales.

La capitalisation des intérêts échus au moins pour une année entière sera ordonnée.

Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive

Quoique non fondée, la procédure engagée par le salarié à l'encontre de M. [Y] n'est pas abusive. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Ak Steel international B.V. succombant à la présente instance en supportera les dépens d'appel. Elle devra également régler une somme de 1 500 euros à M. [O] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [Y] en cause d'appel, au profit de la société Ak Steel international B.V. en cause d'appel et au profit de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- débouté M. [E] [O] de ses demandes en paiement d'heures supplémentaires et congés payés afférents, contrepartie obligatoire en repos, indemnité pour travail dissimulé, contrepartie temps de déplacement,

- débouté M. [E] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

- débouté M. [E] [O] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- débouté M. [E] [O] de sa demande d'astreinte,

- débouté M. [E] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire,

- débouté M. [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné la société Ak Steel international B.V à verser à M. [E] [O] la somme de

2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Ak Steel international B.V aux entiers dépens,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Déboute M. [E] [O] de ses demandes à l'encontre de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation,

Met hors de cause la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation,

Dit que le licenciement de M. [E] [O] est nul,

Condamne Ak Steel international B.V. à payer à M. [E] [O] les sommes suivantes :

11 694,27 euros à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement,

160 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul.

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus au moins pour une année entière,

Déboute M. [E] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

Ordonne la remise par Ak Steel international B.V. à M. [E] [O] des documents sociaux rectifiés conformes à la présente décision,

Ordonne le remboursement par Ak Steel international B.V. à l'organisme Pôle emploi devenu France Travail concerné des indemnités de chômage versées à M. [E] [O] dans la limite de six mois d'indemnités,

Condamne Ak Steel international B.V. aux dépens d'appel,

Condamne Ak Steel international B.V. à payer à M. [E] [O] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de M. [Y] en cause d'appel au profit de la société Ak Steel international B.V.en cause d'appel et au profit de la société Cleveland-Cliffs Steel Holding corporation,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/03666
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.03666 ?
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