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18/06/2024 | FRANCE | N°22/07093

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-2, 18 juin 2024, 22/07093


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51H



Chambre civile 1-2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 18 JUIN 2024



N° RG 22/07093 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VREH



AFFAIRE :



M. [J] [C] épouse [L]

...



C/



E.P.I.C. OPH HABITAT DROUAIS





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Octobre 2022 par le Tribunal de proximité de DREUX



N° RG : 1122000064



Expéditions exéc

utoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 18/06/24

à :



Me Magali VERTEL



Me Sabrina DOURLEN



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51H

Chambre civile 1-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 18 JUIN 2024

N° RG 22/07093 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VREH

AFFAIRE :

M. [J] [C] épouse [L]

...

C/

E.P.I.C. OPH HABITAT DROUAIS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Octobre 2022 par le Tribunal de proximité de DREUX

N° RG : 1122000064

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 18/06/24

à :

Me Magali VERTEL

Me Sabrina DOURLEN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [J] [C] épouse [L]

née le 10 Juillet 1980 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Maître Magali VERTEL, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : T54

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/01263 du 02/02/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

Monsieur [K] [L]

né le 26 Octobre 1983 à [Localité 6] (algérie)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Maître Magali VERTEL, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : T54

APPELANTS

****************

E.P.I.C. OPH HABITAT DROUAIS

Ayant son siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Sabrina DOURLEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 453

Représentant : Maître Stéphanie PASQUET de la SELARL DALLE PASQUET AVOCATS ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000010

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Janvier 2024, Monsieur Philippe JAVELAS, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 7 janvier 2015, la société OPH Habitat Drouais a donné en location à M. et Mme [L] un logement sis [Adresse 3], au sein de la résidence 'Le Sirocco' à [Localité 2].

Par acte de commissaire de justice délivré le 17 février 2022, M. et Mme [L] ont assigné la société OPH Habitat Drouais devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Dreux aux fins de, après avoir constaté l'indécence du logement, la condamner au paiement, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, des sommes suivantes :

- 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance,

- 322, 43 euros en restitution du dépôt de garantie,

- 25 471, 97 euros en restitution de loyers,

- 515, 89 euros d'indemnités de préavis.

Par jugement contradictoire du 25 octobre 2022, le tribunal de proximité de Dreux a :

- débouté M. et Mme [L] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamné solidairement M. et Mme [L] à verser à la société OPH Habitat Drouais la somme de 328, 07 euros au titre du solde locatif, déduction déjà faite du dépôt de garantie, acquis au bailleur,

- condamné solidairement M. et Mme [L] à verser à la société OPH Habitat Drouais la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement M. et Mme [L] aux entiers dépens,

- rappelé que le jugement est de plein droit exécutoire par provision.

Par déclaration reçue au greffe en date du 28 novembre 2022, M. et Mme [L] ont relevé appel de ce jugement.

Aux termes de leurs conclusions signifiées le 13 décembre 2023, M. et Mme [L], appelants, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 25 octobre 2022,

- dire et juger que le logement situé [Adresse 3], au sein de la résidence 'Le Sirocco' à [Localité 2] est indécent,

- ordonner à la société OPH Habitat Drouais la restitution du dépôt de garantie à Mme [L] d'un montant de 322,43 euros,

- condamner la société OPH Habitat Drouais à payer à Mme [L] la somme totale de 8 866,82 euros à Mme [L] au titre du préjudice de jouissance,

- condamner la société OPH Habitat Drouais à payer à Mme [L] l'indemnité de préavis de 515,89 euros,

- désigner tel expert qu'il plaira avec pour mission de :

*à partir des déclarations des victimes, au besoin de ses proches et de tout sachant, et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités de traitement, en précisant le cas échéant, les durées exactes d'hospitalisation et, pour chaque période d'hospitalisation, le nom de l'établissement, les services concernés et la nature des soins,

* recueillir les doléances des quatre locataires et au besoin de leurs proches et les transcrire fidèlement, l'interroger sur les conditions d'apparition des lésions, l'importance, la répétition et la durée des douleurs, la gêne fonctionnelle subie et leurs conséquences,

Dans le respect du code de déontologie médicale,

- décrire au besoin l'état antérieur des quatre locataires mais uniquement s'il est susceptible d'avoir une incidence directe sur les lésions ou leurs séquelles,

- procéder contradictoirement à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et

des doléances exprimées par les locataires,

A l'issue de cet examen et, au besoin après avoir recueilli l'avis d'un sapiteur d'une autre spécialité, analyser dans un exposé précis et synthétique des faits subis par les locataires en précisant au besoin l'incidence d'un état antérieur,

a) Consolidation

- fixer la date de consolidation et, en l'absence de consolidation, dire à quelle date il conviendra de revoir les locataires ; préciser dans ce cas les dommages prévisibles pour l'évaluation d'une éventuelle provision,

b) Préjudices patrimoniaux

La réalité des lésions initiales

La réalité de l'état séquellaire

L'imputabilité certaine des séquelles aux lésions initiales dont se plaint notamment la :

b-1) Pertes de gains professionnels actuels

- indiquer les périodes pendant lesquelles les locataires ont été, du fait de son déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité d'exercer totalement ou partiellement son activité professionnelle,

b-2) Assistance par tierce personne

- indiquer le cas échéant si l'assistance ou la présence constante ou occasionnelle d'une aide humaine (étrangère ou non à la famille) a été et/ou est nécessaire pour accomplir les actes de la vie quotidienne, décrire précisément les besoins en tierce personne, préciser la nature de l'aide à prodiguer et sa durée quotidienne,

b-3) Frais de logement et/ou de véhicule adapté

- donner son avis sur d'éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, aux locataires d'adapter son logement et/ ou son véhicule à son handicap,

b-4) Dépenses de santé futures

- décrire les soins futurs et les aides techniques compensatoires au handicap des locataires (prothèses, appareillages spécifiques, véhicule) en précisant la fréquence de leur renouvellement,

b-5) Pertes de gains professionnels futurs

- indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne l'obligation pour les locataires de cesser totalement ou partiellement son activité professionnelle, d'adapter celle-ci ou de changer d'activité professionnelle,

b-6) Incidence professionnelle

- indiquer si le déficit fonctionnel permanent entraîne d'autres répercussions sur leur activité professionnelle actuelle ou future (obligation de formation pour un reclassement professionnel, pénibilité accrue dans son activité, « dévalorisation » sur le marché du travail, etc.),

- dire notamment si les douleurs permanentes ou chroniques sont susceptibles de générer des arrêts de travail réguliers et répétés,

b-7) Préjudice scolaire, universitaire ou de formation

Si les locataires sont en cours d'études,

- dire si en raison des lésions consécutives au fait traumatique, ils ont subi une de formation, les obligeant, le cas échéant, à se réorienter ou à renoncer à certaines formations,

- préciser si les locataires n'ont jamais pu être scolarisés ou s'ils l'ont été en milieu adapté ou de façon partielle.

c. Préjudices extrapatrimoniaux

c-1) Déficit fonctionnel temporaire,

- indiquer les périodes pendant lesquelles les locataires ont été, du fait de leur déficit fonctionnel temporaire, dans l'incapacité totale ou partielle de poursuivre les activités personnelles habituelles,

En cas d'incapacité partielle, préciser le taux et la durée,

c-2) Souffrances endurées :

- décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales découlant de blessures subies pendant la maladie traumatique (avant consolidation),

- les évaluer distinctement dans une échelle de 1 à 7,

c-3) Déficit fonctionnel permanent

- indiquer si, après la consolidation, les locataires subissent un déficit fonctionnel permanent,

- évaluer l'altération permanente d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles

mentales ou psychiques en en chiffrant le taux,

- dire si des douleurs permanentes existent et comment elles ont été prises en compte dans le taux retenu,

Au cas où elles ne l'auraient pas été compte tenu du barème médico-légal utilisé,

- majorer ledit taux en considération de l'impact de ces douleurs sur les fonctions physiologiques, sensorielles, mentales et psychiques des locataires,

- écrire les conséquences de ces altérations permanentes et de ces douleurs sur la qualité de vie des locataires,

Dans l'hypothèse d'un état antérieur préciser en quoi l'accident a eu une incidence sur cet état antérieur et décrire les conséquences,

c-4) Préjudice esthétique temporaire et /ou définitif,

- décrire et donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique, en distinguant éventuellement le préjudice temporaire et définitif,

- évaluer distinctement les préjudices temporaire et définitif de 1 à 7,

c-5) Préjudice d'agrément

- indiquer si les locataires sont empêchés en tout ou partie de se livrer à des activités spécifiques de sport ou de loisir,

c-6) Préjudice sexuel

- indiquer s'il a existé ou s'il existera un préjudice sexuel (atteinte organique ou fonctionnelle, perte ou diminution de la libido, perte du plaisir, perte de fertilité ou autres troubles...)

c-7) Préjudice d'établissement

- dire si les locataires ont subi une perte d'espoir ou de chance de normalement réaliser un projet de vie familial,

c-8) Préjudices permanents exceptionnels

- dire si les locataires ont subi des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques directement liés aux handicaps permanents,

- dire si l'état des locataires est susceptible de modifications en aggravation,

- établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission,

- dire que l'expert pourra s'adjoindre tout spécialiste de son choix, à charge pour lui d'en informer préalablement le magistrat chargé du contrôle des expertises,

- dire que l'expert devra communiquer un pré rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits,

- dire que l'expert, après avoir répondu aux dires des parties devra transmettre aux

représentants de ces dernières et à la juridiction qui a procédé à sa désignation, son rapport définitif,

- condamner la société OPH Habitat Drouais au paiement d'une indemnité provisionnelle d'un montant de 1 500 euros pour Mme [L] en son nom personnel et la somme de 4 500 euros en tant que représentante légale de ses trois enfants, à valoir sur l'indemnisation définitive à venir,

- dire que le jugement à intervenir sera commun à la CPAM de Chartres,

- débouter la société OPH Habitat Drouais de sa demande de paiement de l'arriéré de charges d'un montant de 323,86 euros,

- condamner la société OPH Habitat Drouais au paiement de la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile qui sera recouvrée selon les dispositions de l'article

37 de la loi du 10 juillet 1991 en cause d'appel,

- infirmer le jugement déféré en ce que M. et Mme [L] ont été condamnés à payer la somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles en première instance,

- la condamner aux entiers dépens,

- rappeler que l'exécution provisoire est de droit.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 23 mai 2023, l'établissement public OPH Habitat Drouais demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- débouter M. et Mme [L] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- confirmer le jugement entrepris en date du 25 octobre 2022 en l'ensemble de ses dispositions,

- condamner M. et Mme [L], in solidum, à verser à la société OPH Habitat Drouais la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. et Mme [L], in solidum, aux entiers dépens,

La clôture de l'instruction a été prononcée le 11 janvier 2024.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I) Sur le préjudice de jouissance des époux [L]

Moyens des parties

Mme [L] fait grief au premier de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnisation de son préjudice de jouissance, en raison du fait que l'indécence du logement et le préjudice de jouissance en résultant dont elle entendait se prévaloir n'étaient point démontrés.

Poursuivant l'infirmation du jugement déféré, elle sollicite devant la cour la condamnation de son ancien bailleur à lui payer une indemnité de 8 866, 82 euros, correspondant à la moitié des loyers acquittés sur la période du 7 janvier 2017 au 9 août 2021.

Au soutien de ses prétentions, Mme [L] expose à la cour que, contrairement à ce qui a été retenu par le premier juge, la preuve de l'indécence du logement et du préjudice qui en est résulté pour elle et sa famille est parfaitement rapportée par :

- un rapport d'une société d'assurance établi à la suite d'un dégât des eaux,

- le compte rendu d'une conseillère en environnement, dressé le 26 février 2021,

- un compte rendu de visite de la maison de l'habitat du 2 juin 2021.

Le bailleur rétorque que l'indécence du logement n'est pas démontrée par les pièces produites par Mme [L], que le rapport de la conseillère en environnement n'a pas valeur d'expertise, que le logement litigieux bénéficie d'une ventilation naturelle, que le rapport de la maison de l'habitat, même s'il préconise des améliorations, ne permet pas de constater l'indécence du logement, que l'état des lieux de sortie confirme l'absence d'indécence du logement, que les époux [L] n'ont assigné que pour obtenir un logement plus spacieux, qu'ils ont au reste obtenu, et ont refusé une proposition de relogement au seul motif que le logement proposé était revêtu de parquet.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risque manifeste pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation.

En outre, l'article 1719 du Code civil oblige le bailleur à faire jouir paisiblement le preneur pendant toute la durée du bail. Le manquement du bailleur à ces obligations peut être sanctionné, si le preneur démontre l'existence d'un trouble de jouissance, par sa condamnation au paiement de dommages et intérêts, évalués en fonction de la gravité, de l'intensité et de la durée du trouble.

En matière contractuelle, il appartient à celui qui se prévaut d'un manquement de son cocontractant à ses obligations d'en rapporter la preuve. Il appartient donc aulocataire qui se prévaut d'un manquement du bailleur à son obligation d'entretien oude jouissance paisible d'en rapporter la preuve.

L'obligation du bailleur ne cesse qu'en cas de force majeure (3e Civ., 29 avril 2009, pourvoi n°8-12.261 ; 3e Civ., 16 mars 2023, pourvoi n° 22-10.013).

La garantie du bailleur peut néanmoins être écartée en cas de faute du locataire : celle-ci exonère le bailleur de son obligation de garantie ou peut emporter partage de responsabilité entre les deux parties.

Si est en jeu l'obligation de délivrance, notamment d'un logement décent, il n'est pas nécessaire

pour le preneur de demander à son bailleur une remise en état pour être indemnisé des troubles subis depuis l'origine (3 Civ, 14 octobre 2009, no 08-17.750)

Au cas d'espèce, Mme [L], qui invoque un manquement du bailleur à son obligation de lui délivrer un logement décent, produit aux fins de démontrer l'existence de ce manquement :

- un rapport de la société d'assurance Macif qui indique que selon les déclarations recueillies sur place, un dégât des eaux a été constaté dans l'appartement des époux [L], le 1er janvier 2020, qui a entraîné l'apparition d'auréoles, aux plafonds des deux chambres, des dégradations sur les revêtements muraux des deux chambres, et sur une armoire se trouvant dans la chambre des parents, et est imputable, l'oph ayant indiqué à la société d'assurance que le complexe d'étanchéité de la toiture terrasse de l'immeuble avait fait l'objet d'une réparation au mois d'août 2020, à une infiltration d'eau en provenance de la toiture-terrasse de l'immeuble,

- un rapport d'une conseillère en environnement, établi le 21 février 2021 à la demande d'un pédiatre, qui conclut à la ' présence de nombreuses zones avec moisissures' et ' une contamination fongique importante avec la présence de moisissures allergisantes voire pathogènes', tout en expliquant que ces moisissures sont imputables à l'humidité et nécessitent, outre un nettoyage complet des moisissures, la pose d'un système de ventilation mécanique. Le rapport relève que le logement est entretenu, propre, avec de bonnes pratiques (aération, entretien, nettoyage des moisssures) par les occupants,

- un courrier du 29 juin 2021 adressé à l'office HLM par l'agence régionale de santé et lui demandant de procéder au nettoyage des moisissures et à la pose d'un système de ventilation mécanique dans le logement,

- un rapport de la maison de l'habitat du 13 juillet 2021 dont il ressort les infractions au règlement sanitaire départemental d'Eure-et-Loir suivantes :

* le tablier de la baignoire n'est pas fixé,

* développement de moisissures et écaillement de la peinture sur les murs au droit des points froids dans l'entrée, le séjour, les chambres et la cuisine, générés par une condensation excessive,

* le logement fonctionne en ventilation par balayage , à tirage naturel. Pour que cette ventilation fonctionne, il est nécessaire que les entrées d'air frais soient situées dans les pièces principales, que les extractions d'air vicié soient situées dans les pièces de service et que les portes du logement soit détalonnées. Or il a été constaté que les portes du logement ne sont pas détalonnées n'améliorant pas la circulation de l'air et qu'une grille d'entrée d'air frais a été placée dans les WC. Le rapport préconise l'installation d'un système complet de ventilation mécanique contrôlée,

- l'état des lieux de sortie accompagné de photographies faisant apparaître notamment la présence de moisissures dans l'un des murs de la chambre 1, des moisissures sous les fenêtres du séjour et des deux chambres.

L'analyse des pièces produites par Mme [L] permet de constater que le logement litigieux ne correspondait pas aux normes de la décence, dès lors qu'il renfermait une humidité anormale due à la condensation, présentait des moisissures sur les murs et à la cueillie des plafonds et était insuffisamment ventilé en raison du défaut de détalonnage des portes.

Par ailleurs, aucune faute de Mme [L], de nature à exonérer le bailleur de sa responsabilité, la conseillère en environnement ayant relevé les bonnes pratiques - aération - des occupants, n'est caractérisée au vu des pièces produites.

Le bailleur est donc tenu de réparer le préjudice subi par Mme [L], dont l'état de santé et celui de ses enfants, qui souffrent d'asthme et d'allergie, a été aggravé par l'humidité affectant les lieux loués.

Pour autant, les prétentions indemnitaires de Mme [L] apparaissent quelque peu excessives au regard de l'intensité du trouble telle qu'elle résulte de l'analyse des pièces produites.

C'est pourquoi l'établissement public bailleur sera condamné à payer à Mme [L] une indemnité de 3 000 euros en réparation de son trouble de jouissance, Mme [L] étant déboutée du surplus de ses demandes.

Mme [L] ayant quitté les lieux et relevant dans ses écritures que son état de santé s'est depuis lors notablement amélioré, elle sera également déboutée de sa demande d'expertise, ainsi que de sa demande indemnitaire provisionnelle.

II) Sur les sommes restant dues par Mme [L]

Moyens des parties

Mme [L] sollicite le remboursement, outre du dépôt de garantie de 322, 43 euros, du loyer acquitté durant la période du 4 août au 23 septembre 2021, représentant la somme de 515,89 euros, en alléguant qu'aucun préavis n'est dû en considération de l'indécence du logement.

L'établissement public bailleur conclut à la confirmation du jugement dont appel en ce qu'il a condamné les époux [L] à payer une somme de 328, 07 euros, correspondant au solde locatif, après déduction du dépôt de garantie, du coût des réparations des dégradations locatives et de l'ultime régularisation de charges favorable aux locataires.

Réponse de la cour

Le bailleur produit un décompte dont il ressort qu'il a facturé une somme de 411, 63 euros pour travaux de réparation, cette somme tenant compte d'un coefficient de vétusté en raison de la durée d'occupation du logement, et déduit de cette somme le dépôt de garantie d'un montant de 322 euros et l'ultime régularisation de charges faisant apparaître un solde en sa défaveur de 85,42 euros.

Au vu des pièces justificatives fournies, concernant notamment le détail des réparations locatives facturées aux locataires, c'est à bon droit que le premier juge a condamné solidairement les époux [L] à payer à leur bailleur la somme de 328, 07 euros.

Cependant, Mme [L] fait, par ailleurs, valoir qu'elle était en droit de ne pas respecter le délai de préavis avant de quitter les lieux compte tenu de l'insalubrité et du risque pour sa sécurité et celle de sa famille.

Cette dispense de préavis doit être appréciée au cas par cas et admise lorsque, comme dans le cas présent, le logement est affecté de sérieux désordres de nature à nuire à la santé de ses occupants.

Par suite, le bailleur social sera condamné à payer à Mme [L] une somme de de 515, 89 euros correspondant au préavis qui a commencé à courir le 4 août 2021 et s'est achevé le 23 septembre 2021, date de la restitution des lieux par Mme [L].

III) Sur les demandes accessoires

Le bailleur intimé, qui succombe, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.

Il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent arrêt qui ne peut faire l'objet que d'un pourvoi non suspensif.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions à l'exception de celle ayant condamné solidairement M. [K] [L] et Mme [J] [L], née [C], à payer à l'établissement public OPH Habitat Drouais une somme de 328, 07 euros ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés

Condamne l'établissement public OPH Habitat Drouais à payer à Mme [J] [L], née [C], les sommes suivantes :

- 3 000 euros,

- 515, 89 euros,

Ordonne la compensation entre les créances respectives des parties ;

Déboute Mme [J] [L], née [C], du surplus de ses demandes indemnitaires, ainsi que de ses autres demandes ;

Déboute l'établissement public OPH Habitat Drouais de ses demandes ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, déboute Mme [J] [L], née [C], de sa demande en paiement ;

Condamne l'établissement public OPH Habitat Drouais aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Anne-Sophie COURSEAUX, Faisant fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-2
Numéro d'arrêt : 22/07093
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.07093 ?
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