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17/06/2024 | FRANCE | N°22/00313

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-3, 17 juin 2024, 22/00313


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-3



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 JUIN 2024



N° RG 22/00313 -

N° Portalis DBV3-V-B7G-U7KX



AFFAIRE :



[T], [B] [H]



C/



S.A.S. PSA RETAIL FRANCE devenue société STELLANTIS & YOU FRANCE SAS









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISS

Y

N° Section : C

N° RG : F 20/00049



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Virginie RIBEIRO



Me Kheir AFFANE







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT JUIN DEUX ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-3

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 JUIN 2024

N° RG 22/00313 -

N° Portalis DBV3-V-B7G-U7KX

AFFAIRE :

[T], [B] [H]

C/

S.A.S. PSA RETAIL FRANCE devenue société STELLANTIS & YOU FRANCE SAS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : C

N° RG : F 20/00049

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Virginie RIBEIRO

Me Kheir AFFANE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [T], [B] [H]

né le 17 Août 1964 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Virginie RIBEIRO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1066

APPELANT

****************

S.A.S. PSA RETAIL FRANCE devenue société STELLANTIS & YOU FRANCE SAS

N° SIRET : 302 475 041

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me Kheir AFFANE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0253

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 30 Avril 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laurence SINQUIN, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence SINQUIN, Président,

Mme Florence SCHARRE, Conseiller,

Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

FAITS ET PROCÉDURE

La société par actions simplifiée PSA Retail France a été immatriculée au RCS de Versailles sous le n° 302 475 041. Elle est issue de la fusion entre la société commercial Citroën et la Société Commerciale Automobile intervenue en juin 2017. Elle a fait l'objet d'une modification de sa dénomination sociale pour devenir Stellantis & You France SAS en mars 2024.

Elle emploie plus de 4 000 salariés.

M. [H] a été engagé par la société Citroën en qualité de peintre par contrat à durée indéterminée à compter du 19 février 2001, avec une rémunération mensuelle brute de 13 500 francs. Il a connu une évolution de carrière en qualité de conseiller commercial réceptionnaire après-vente, à compter de mai 2012 avec un salaire mensuel brut moyen de 3428,77 euros.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des services de l'automobile.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 8 novembre 2019, la société Citroën a notifié à M. [H] une journée de mise à pied.

Par requête introductive du 26 février 2020, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy afin de voir condamner la société PSA Retail France pour harcèlement moral et exécution déloyale du contrat de travail. L'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 20/00049.

M. [H] a été placé en arrêt maladie à compter du 11 septembre 2019 qui s'est prolongé jusqu'au 7 janvier 2021. Il a été déclaré inapte à son poste de travail par avis du 15 décembre 2020 du médecin du travail, portant la mention suivante : « L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. »

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 18 décembre 2020, la société a convoqué M. [H] à un entretien préalable à un licenciement, prévu le 30 décembre 2020 , entretien auquel le salarié ne s'est pas rendu.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 janvier 2021, la société a notifié à M. [H] son licenciement pour inaptitude en ces termes :

« Monsieur,

Par l'avis unique rendu le 15/12/2020 par le médecin du travail, vous avez été déclaré inapte à une reprise d'activité sur votre poste de Réceptionnaire.

En conséquence, vous ne pouvez plus occuper le poste sur lequel vous étiez normalement affecté.

Conformément à l'article L1220-2-1 du Code du travail, et comme nous vous en avons déjà fait part lors de l'entretien préalable, l'avis du médecin du travail mentionne expressément que « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi » ce qui dispense l'entreprise de toute recherche de reclassement.

Conformément à l'article L. 1232-2 et suivants du Code du travail, nous vous avons convoqué le 30/12/2020 à 11h00 à un entretien préalable ayant pour objet la rupture de votre contrat de travail pour inaptitude médicale constatée par le médecin du travail.

Vous ne vous êtes pas rendu à cet entretien au cours duquel devaient être évoqués les éléments portant sur la rupture envisagée de votre contrat de travail.

Le délai légal de réflexion prévu par les articles L. 1232-6 et suivants du code du travail étant écoulé, nous vous notifions votre licenciement pour inaptitude physique.

Conformément aux dispositions de l'article L. 1226-4 du Code du travail, votre licenciement prendra effet à la date de première présentation de ce courrier et vous cesserez de faire partie de notre personnel à cette date.

Le bénéfice des couvertures « prévoyance incapacité, invalidité, décès » et « garantie complémentaire de remboursement des frais de santé » peut être conservé à titre gratuit, pendant une durée déterminée, dans les conditions définies par l'article L 911-8 du code de la sécurité sociale.

Nous vous ferons parvenir dans les meilleurs délais votre certificat de travail, votre solde de tout compte, ainsi que votre attestation Pôle Emploi.

Nous vous prions d'agréer, Monsieur, l'expression de nos salutations distinguées. »

Par requête introductive du 26 février 2020, M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy d'une demande au titre du harcèlement moral et de nullité de son licenciement.

Par jugement du 2 décembre 2021, auquel renvoie la cour pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Poissy a :

- prononcé la jonction du dossier RG numéro 21/81 avec le dossier RG numéro 20/49 ;

- débouté M. [H] de l'ensemble de ses demandes.

- débouté la Sas Psa Retail France de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- condamné M. [H] aux dépens y compris ceux afférents aux actes et procédure d'exécution éventuels.

M. [H] a interjeté appel de ce jugement par déclaration d'appel au greffe du 2 février 2022.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 20 mars 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 19 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, M. [H] demande à la cour de : - infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Poissy en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a prononcé la jonction de l'instance enregistrée sous le numéro de RG 20/00049 avec l'instance enregistrée sous le numéro de RG 21/00081 et en ce qu'il a débouté la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée la société Psa Retail France SAS de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer ledit jugement en ce qu'il a prononcé la jonction de l'instance enregistrée sous le numéro de RG 20/00049 avec l'instance enregistrée sous le numéro de RG 21/00081 et en ce qu'il a débouté la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

statuant à nouveau

à titre principal,

- annuler le licenciement de M. [H] ;

- condamner en conséquence la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à lui payer la somme de 150.000,00 euros nets de CSG/CRDS à titre d'indemnité pour licenciement nul ;

à titre subsidiaire,

- requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la Société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à lui payer la somme de 150.000,00 euros nets de CSG/CRDS à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

en tout état de cause ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [H] la somme de 6.857,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 685,75 euros à titre d'indemnité compensatrice des congés payés afférents ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France à payer à M. [T] [H] la somme de 7.000,00 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et financier causé par la remise tardive des documents de fin de contrat et paiement tardif du solde de tout compte ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [T] [H] la somme de 15.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour les préjudices moral et de santé subis pendant l'exécution du contrat de travail à titre principal du fait du harcèlement moral, subsidiairement du fait de l'exécution déloyale du contrat de travail de la part de l'employeur et du fait du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat ;

- annuler la mise à pied disciplinaire en date du 8 novembre 2019 ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [H] la somme de 10.000,00 euros de dommages et intérêts pour les préjudices moral et de santé causés par la mise à pied disciplinaire injustifiée ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [H] un rappel de salaire au titre de la mise à pied injustifiée de 140 euros bruts et 14 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice des congés payés afférents ;

- débouter la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes ;

- ordonner la délivrance d'une attestation destinée à Pôle emploi, d'un certificat de travail et d'un reçu pour solde de tout compte ainsi que d'un bulletin de paie afférent au solde de tout compte conforme à la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document à compter du prononcé de la décision ;

- assortir les condamnations des intérêts au taux légal à compter du jugement s'agissant de sommes à caractère indemnitaire et à compter de la réception par la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS de la convocation devant le Bureau de conciliation et d'orientation pour les demandes salariales ;

- ordonner la capitalisation des intérêts pour les sommes dues pour plus d'une année entière ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [H] la somme de 3.200,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant le conseil de prud'hommes ;

y ajoutant

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement dénommée Psa Retail France SAS à payer à M. [H] la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour d'appel ;

- condamner la société Stellantis & You France SAS anciennement nommée Psa Retail France SAS aux dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 19 mars 2024, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Stellantis & you France demande à la cour de :

- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,

en tout état de cause,

- débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes,

à titre reconventionnel

- condamner M. [H] à payer à la société Psa Retail France la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la demande de jonction des instances référencées 20/00049 et 21/00081

M. [H] sollicite la jonction des deux procédures engagées auprès du conseil de prud'hommes. La société ne s'y oppose pas en ce qu'elle demande la confirmation du jugement qui a ordonné la jonction des deux procédures.

Au vu de l'accord des parties et de la nature des procédures en cause, il convient de confirmer le jugement sur ce point.

Sur la demande au titre du harcèlement moral

En application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Lorsque survient un litige relatif à des faits de harcèlement au sens de l'article L 1152 - 1 du code du travail, le salarié établit, conformément à l'article L 1154 - 1 du code du travail, des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

M. [H] fait valoir qu'il travaillait sur le site de [Localité 6] depuis 2015 et qu'en octobre 2017, il a été affecté au site des Ulis, administrativement rattaché à l'établissement de [Localité 6], et qu'en janvier 2018, M. [V] [D] est arrivé en qualité de directeur de l'établissement de [Localité 6] . Le salarié prétend avoir connu à compter de cette date, une dégradation de ses conditions de travail l'ayant conduit à une détérioration de son état de santé jusqu'à son placement en arrêt travail à compter du 11 septembre 2019 pendant plus d'un an jusqu'à son départ de l'entreprise.

À l'appui de sa demande au titre du harcèlement moral, il indique en premier lieu avoir alerté en vain son employeur sur la détérioration de ses conditions de travail et produit à ce titre des échanges de mail du 22 au 24 octobre 2019 et un courrier de son avocat du 29 octobre 2019.

Alors qu'il avait dans le cadre de son travail d'excellents résultats au point de bénéficier d'une place de meilleur vendeur et d'un voyage au Maroc en récompense en octobre 2019 et de disposer d'un salaire parmi les plus élevés au sein du service après-vente, il indique avoir fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire injustifié le 8 novembre 2019. Il transmet un document de présentation du challenge et du raid au Maroc, ses bulletins de salaire et son entretien d'évaluation annuelle 2018 faisant état de compétences en termes de satisfaction client et une attestation de Mme [W], cliente faisant part des qualités de professionnalisme de compétences et d'amabilité du salarié. Il communique aussi deux courriers de son avocat des 22 novembres 2019 et 10 janvier 2020, visant à contester la sanction disciplinaire.

Afin de justifier de la dégradation de ses conditions de travail, il communique l'attestation de M. [U] [P] qui évoque la pression et la compétition instaurée par M. [D] entre lui et M. [H] ; les propos méprisants ou humiliants de ce supérieur à l'égard de M. [H] parlant de bouc émissaire et d'une volonté de « l'annuler en tant que personne». Plus généralement, le témoin décrit de la part de M. [D] des méthodes de management éprouvantes à l'égard des salariés.

Cette attestation est complétée par des échanges de mails intervenus sur la période de juillet, août et septembre 2019, révélateurs de la pression exercée par la hiérarchie et par des méthodes de management que le salarié qualifie de brutales, épuisantes et humiliantes. Il transmet également un échange de mail avec M. [S] et Madame [N] du 24 août 2020 au 1er septembre 2020, révélant les difficultés du salarié à obtenir une visite médicale de reprise et un mail du 8 août 2020 opposant un refus au salarié de satisfaire un rendez-vous médical important.

Pour justifier de la dégradation de son état de santé, M. [H] produit les renouvellements d'arrêt travail pendant un an et l'avis d'inaptitude du 15 décembre 2020, le certificat du docteur [M] du 5 octobre 2020 faisant état d'un syndrome dépressif. Il précise enfin qu'étant en arrêt maladie, il n'a pas pu se rendre à l'entretien préalable et que la lettre de licenciement lui a été transmise à une mauvaise adresse.

Ces faits pris dans leur ensemble laissent présumer l'existence d'une situation de harcèlement moral à l'égard de M. [H] et il appartient à l'employeur de justifier que ces agissements s'expliquent par des circonstances étrangères à toute situation de harcèlement moral.

La société conteste toute situation de harcèlement moral. Elle considère que le reproche fait par M. [H] n'avoir pas accédé à sa demande de rendez-vous médical ne peut lui être opposé, dans la mesure où le salarié n'a justifié ni d'une situation d'urgence, ni d'une situation médicale particulière qui l'aurait empêcher d'organiser cette visite de façon anticipée sur des congés ou après ses heures de travail. Elle considère que la gestion du service ne lui avait pas permis d'accéder à la demande du salarié sans que cela constitue un agissement de harcèlement.

Elle considère en outre que le salarié manifeste de la mauvaise foi puisqu'il a dénoncé une dégradation de ses conditions de travail seulement après la notification de la convocation à entretien préalable du 23 septembre 2019 dont il a demandé le report. Elle considère que les griefs invoqués par le salarié sont imprécis et évasifs et elle estime qu'il a invoqué un harcèlement moral pour échapper au pouvoir disciplinaire.

Elle indique que M. [H] était en situation d'insuffisance professionnelle depuis 2016 et transmet les entretiens d'évaluation 2015, 2016, 2018 : En 2015, il n'atteignait que 60 % de ses objectifs et en 2018 sa performance était médiocre à 40 %. Elle ajoute que cette insuffisance professionnelle a nécessité que soit mis en place un suivi de son activité par M. [D]. Elle précise que le challenge et le raid au Maroc ne le concernent pas à titre individuel.

La société estime que le salarié fait une lecture erronée des faits en raison de son incurie et de sa résistance au changement et leur applique une interprétation alors que les faits se sont déroulés dans un contexte normal de relations de travail. Ainsi, s'agissant du tutoiement adopté par M. [D] à l'égard de M. [H] la société affirme que cela est le cas dans toute l'équipe sans que cela ait un caractère vexatoire. S'agissant des mails, elle les analyse en les décorélant du harcèlement en soulignant, que tous les mails visant à accroître la performance des équipes de commerçants sont adressés à l'ensemble des salariés et non personnellement à M. [H], que la vigilance de M. [D] à l'égard des clients insatisfait n'a pas pour finalité d'être persécutif mais simplement de préserver la clientèle, que le mail dans lequel M. [D] s'interroge de savoir si M. [H] est en vacances, ne relève pas de l'ironie puisque le salarié était bien en congés fin juillet 2019, que le message adressé par M. [R] le 9 septembre 2019 n'a comme seul objectif d'améliorer les chiffres et les performances de vente collectif.

Concernant les éléments médicaux, l'employeur fait le constat de ce que les certificats soit n'apportent aucun élément sur la pathologie du salarié, soit préconisent un suivi psychiatrique mais ne permettent pas d'attribuer la dégradation de son état de santé à ses conditions de travail. Il précise qu'aucune maladie professionnelle n'a été retenue et que l'inaptitude a été par ailleurs constatée par le médecin du travail sans examen du poste de travail.

L'employeur conteste enfin l'attestation de M. [P] en considérant que le salarié attribue à Monsieur [D] des prétendus actes de perversion au travail ou des propos dégradants sans néanmoins en préciser la teneur, la nature et la date. Elle ajoute que ce témoignage démontre la difficulté du salarié à s'adapter au changement, à accepter la compétition entre les commerciaux et de se soumettre à des objectifs de rentabilité. La société verse aux débats l' attestation de M. [J], responsable après-vente dans laquelle il fait valoir que ces deux salariés n'étaient pas à la hauteur des objectifs fixés par la marque et indique qu'il devait gérer l'insatisfaction de leurs clients. Il ajoute que pendant cette période avec M. [D], à l'égard de M. [H], ils ont tenté de lui « apporter les outils leur permettant un retour à la performance» et qu'à aucun moment M. [D] n'a eu de propos désobligeants ou dégradants, les plans d'action étant présentés collectivement.

L'employeur considérant que les prétentions du salarié ne sont corroborées par aucun élément matériel sollicite la confirmation du jugement prud'homal.

Au vu de l'ensemble de ces éléments la cour constate que les éléments objectifs transmis par l'employeur au vu de ceux communiqués par le salarié visent à établir que la réaction de M. [H] dans le présent conflit trouve en réalité son origine dans une insuffisance professionnelle ou une difficulté d'adaptation auquel le salarié n'a pas su faire face. Deux éléments objectifs sont produit à ce titre, l'attestation de Monsieur [J] et les entretiens d'évaluation. Il ressort de ces éléments que contrairement aux affirmations du salarié, il n'était pas un des meilleurs vendeurs et si l'équipe a bénéficié d'une gratification par un voyage au Maroc, rien n'indique qu'elle soit liée aux performances de M. [H]. Les entretiens d'évaluation et notamment le dernier de 2018 confirment les difficultés rencontrées par le salarié pour atteindre ses objectifs puisque cette année-là, il n'atteint que 40 % des objectifs fixés. La seule attestation a contrario est celle d'une cliente satisfaite qui ne suffit pas à contredire des éléments produits par l'employeur sur les compétences du salarié.

Ce sont ces difficultés qui apparaissent à l'origine de la dégradation de la situation du salarié. M. [J] lui-même reconnaît avoir dû mettre en place avec M. [D] à l'égard de ce salarié « des outils » pour qu'il parvienne à atteindre les exigences de performance. Le témoignage de M. [P], qui confirme la compétition instaurée entre les commerciaux, et l'ensemble des mails produits par le salarié attestent de cette méthode de management. Toutefois, la hiérarchie adresse les mails généralement à l'ensemble de l'équipe des commerciaux du service après-vente et les injonctions concernant les performances s'opèrent au vu des résultats nominatifs effectués par l'ensemble des membres de l'équipe. Les seuls messages adressés nominativement à M. [H] sont ceux du 8 et 9 juillet 2019 et ne sont ni des propos méprisants ni humiliants ni de nature à mettre en cause l'intelligence du salarié ou de l'annuler en tant que personne tels que le souligne M. [P] dans son attestation. Si ce dernier fait état d'une situation de M. [H] comme bouc émissaire, aucun élément ne vient le confirmer. Les messages concernant le suivi des plaintes des clients n'ont pas le caractère excessif que leur impute le salarié et il n'apparaît pas anormal que la hiérarchie rappelle à un membre de service après-vente de contacter un client faisant part d'une insatisfaction. Ni les trois points d'interrogation, ni le questionnement sur un congé du salarié ne suffisent à considérer qu'il s'agit là de propos dévalorisants ou désobligeants propres à caractériser une situation de harcèlement.

Ni la sanction d'avertissement du 7 juillet 2018 qui n'a pas été contestée, ni l'échange de mail refusant au salarié une absence de rendez-vous médical ne peuvent être assimilés à des agissements de harcèlement moral.

Concernant la demande de rendez-vous médical, la société invoquant justement les exigences de service légitimant ce refus. Le mail laconique du salarié sur ce point ne permet pas de comprendre l'urgence invoquée, pour quelle raison M. [H] n'a pas sollicité une demi-journée de congé ou les motifs qui le conduisent à considérer que la position de la société soit vexatoire.

Si les éléments médicaux produits par le salarié démontrent incontestablement une dégradation de l'état de santé du salarié par un syndrome anxiodépressif en septembre 2019 s'aggravant vers un état dépressif caractérisé et sévère en octobre 2020 pour atteindre un diagnostic d'inaptitude, aucun élément ne permet de rattacher cette évolution à des faits de harcèlement moral.

Ainsi, les éléments pris dans leur ensemble ne permettent pas de conclure que M. [H] a été victime d'une situation de harcèlement moral et la demande de nullité du licenciement sera rejetée.

Toutefois, si aucune situation de harcèlement moral n'est justifiée en l'espèce, ces mêmes éléments établissent que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.

En application de l'article L. 4121-1 du code du travail, il appartient à l'employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés. Il s'agit notamment pour lui de prévenir les risques professionnels, d'informer et de former les salariés sur ces risques, et de mettre en place une organisation et des moyens adaptés à la situation de travail. La violation de cette obligation peut conduire l'employeur à indemniser le préjudice qui en est résulté pour le salarié. En outre, peut être considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude dès lors qu'il est démontré que l'inaptitude était consécutive un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée.

Il est constant au vu des pièces et témoignages transmis par le salarié que le management du service par la mise en compétition de commerciaux généraient une pression importantes sur les équipes. Il apparaît que l'employeur a été informé par le salarié par un mail du 22 octobre 2019 que ces conditions de travail mettant à mal son état de santé. Il y a indique que depuis deux ans, ses conditions de travail étaient devenues très difficiles. S'adressant au manager des ressources humaines, M. [X] [S], il décrit son angoisse de perdre son emploi, des conditions de travail de plus en plus anxiogènes, une pression de plus en plus forte, le choc vécu à la suite de l'entretien du 6 septembre 2019 avec M. [D] et l'arrêt travail consécutif à cet entretien, le 11 septembre 2019. Dans ce même message, il sollicite l'aide de son employeur pour qu'il soit remédié à cette situation et demande l'adresse du CSE. La seule réponse faite par l'employeur à ce moment-là sera : « nous vous attendons comme prévu le 6 novembre pour aborder les sujets en lien avec cette convocation ». Les coordonnées du CSE ne lui ont jamais été transmises.

Bien avant cela, il ressort des mails transmis par le salarié que, sur la période du mois de juillet au mois de septembre 2019, les difficultés à l'égard de M. [H] pour faire face aux exigences de compétitivité étaient déjà connues de M. [D]. D'ailleurs, dans son attestation, M. [J] précise qu'avec M. [D] ils avaient décidé de lui « apporter les outils » lui permettant « un retour à la performance», preuve qu'ils étaient informés de ses difficultés. En outre, le mal-être de M. [H] décrit par M. [P] dans son attestation était perceptible au sein de l'équipe puisque ce collègue indique : « Le matin lorsque je le voyais il avait le regard vide, il ne dormait plus et lorsqu'il arrivait le jour des résultats c'était la boule au ventre ».

Or avant et après le 22 octobre 2019, l'employeur n'a pris aucune disposition pour prévenir la dégradation de l'état de santé du salarié. Bien plus, l'employeur a entretenu entre le 24 août et le 1er septembre 2020, un contentieux pour l'organisation de la visite de reprise contraignant M. [H] à obtenir un certificat de prolongation d'arrêt de travail.

Les éléments médicaux fournis permettent de constater une dégradation de l'état de santé du salarié puisque le premier arrêt débute avec la mention d'un syndrome anxiodépressif en septembre 2019, s'aggravant vers un état dépressif caractérisé et sévère en octobre 2020, pour atteindre un diagnostic d'inaptitude. Dès le 5 octobre 2020, le docteur [M] relèvera les propos de son patient qui lie son syndrome dépressif à des soucis professionnels et le Docteur [I] préconise un changement d'environnement de travail, l'avis d'inaptitude concluant à une inaptitude avec impossibilité de reclassement.

En ne prenant aucune disposition de nature à prévenir la dégradation de l'état de santé du salarié manifestement en difficulté et en souffrance, en maintenant les exigences professionnelles et les pressions à l'encontre de ce salarié, la société a manqué à son obligation lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés. Les éléments de l'espèce permettant de démontrer que l'inaptitude de M. [H] est consécutive à ce manquement préalable de l'employeur et son licenciement sera considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes indemnitaires

Sur l'indemnisation du préjudice lié au manquement à l'obligation de sécurité

En application des dispositions susvisées compte tenu du fait que la cour a reconnu le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, le salarié bien fondé à solliciter réparation du préjudice distinct de celui lié à la rupture du contrat de travail. Au regard des conséquences dommageables sur son état de santé et de l'impact sur sa situation personnelle et professionnelle et de lui allouer la somme de 15'000 euros en réparation de son préjudice.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

En application des dispositions de l'article L 1234 ' 45 du code du travail, des dispositions de l'article 4.10 de la convention collective applicable et au regard du salaire moyen non contesté il y a lieu de faire droit à la demande du salarié concernant l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents soit la somme de 6857,54 euros et 685,75 euros. En effet, le moyen selon lequel le salarié n'aurait pas été en capacité d'exercer son préavis en raison de son inaptitude est inopérant dès lors que les manquements de l'employeur sont à l'origine de cette inaptitude.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [H] sollicite la somme de 150'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en considérant que les dispositions de l'article L 1235 ' 3 du code du travail qui fixe à trois mois montant minimum pour un salarié bénéficiant de deux ans d'ancienneté dans une entreprise de plus de 11 salariés et qui fixe une indemnité maximale ne seraient pas satisfaisantes.

Il indique à la Cour qu'il est nécessaire de résister à deux arrêts de la Cour de cassation ayant validé ces dispositions sur le fondement à la fois, de l'article 10 de la convention numéro 158 de l'OIT et l'article 24 de la charte sociale européenne, ainsi que la décision du Conseil d'État pris en référé, le 7 décembre 2017 et la décision du conseil constitutionnel du 21 mars 2018, l'ensemble de ces décisions ayant validé les dispositions de l'article L 1235 ' 3 du code du travail.

Néanmoins, malgré la critique émise sur chacune de ces décisions, le salarié ne justifie pas d'une autre source de droit susceptible de fonder sa demande.

La décision rendue par le Comité européen des droits sociaux à l'encontre de la Finlande de l'Italie n'a pas directement autorité en France.

Par ailleurs les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la Convention n°158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) tandis que les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers (Soc., 11 mai 2022, n°21-14490), de sorte qu'il n'y a pas lieu d'écarter le barème prévu par ce texte.

Ainsi, au vu de l'ensemble des éléments versés aux débats concernant la situation de M. [H], compte tenu du fait que le salarié a 19 ans d'ancienneté, qu'il est âgé de 56 ans, des conditions et capacités de retour à l'emploi et que la société occupait habituellement plus de onze salariés au moment du licenciement, la Cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer à 51000 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l'article L.1235-3 du code du travail.

Sur la remise tardive des documents de fin de contrat

M. [H] prétend qu'avec un licenciement intervenu le 7 janvier 2021, il a reçu tardivement, le 25 février 2021, son certificat de travail, le reçu du solde de tout compte et l'attestation destinée à Pôle emploi ainsi que le dernier bulletin de salaire et qu'il s'est trouvé contraint de relancer la société le 1er février pour les obtenir. Il déclare qu'outre le paiement tardif des sommes relatives au solde de tout compte, cette situation a eu pour effet de retarder son inscription à Pôle emploi et sollicite la somme de 7000 euros en réparation du préjudice subi.

La société conteste cette demande en considération de l'absence de préjudice et du fait que le salarié a pu régulièrement faire valoir ses droits à compter du 7 avril 2021 en raison du délai de carence concernant tous les demandeurs d'emploi.

Si le salarié justifie avoir été destinataire des documents de fin de contrat le 24 février 2021, il ne transmet aucun élément démontrant l'existence d'un préjudice et son montant.

Sur l'annulation de la sanction de mise à pied disciplinaire du 8 novembre 2019

L'article L 1332-2 du code de travail dispose qu'une sanction disciplinaire ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Toutefois l'inobservation du délai entre l'entretien préalable et l'envoi de la lettre de licenciement ne conduit pas à l'annulation de la sanction mais constitue une irrégularité de forme qui ne peut être réparée que par l'allocation d'une indemnité fixée en fonction du préjudice subi par le salarié.

M. [H] a fait l'objet d'une convocation à entretien préalable le 8 octobre 2019 et en raison du report de cet entretien, il s'est tenu le 6 novembre 2019. La lettre prononçant la sanction est datée du 8 novembre 2019 mais elle a été transmise au salarié le 8 novembre 2019. La cour constate ainsi que le délai de deux jours ouvrables n'a pas été respecté et ouvre droit pour le salarié a une indemnisation de son préjudice.

Sur la demande de nullité tirée du règlement intérieur, il y a lieu de rappeler qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail et si ce règlement est opposable au salarié. Une mise à pied prévue par le règlement intérieur n'est licite que si ce règlement précise sa durée maximale. Aux termes de l'article L. 1231-4 du code du travail, le règlement intérieur n'entre en vigueur qu'un mois après l'accomplissement des formalités d'affichage et de dépôt au greffe du conseil de prud'hommes du ressort de l'entreprise ou de l'établissement. Il incombe à l'employeur de démontrer l'accomplissement de ces formalités, à défaut de quoi les dispositions de ce règlement intérieur ne sont pas opposables au salarié.

Le salarié invoque l'absence de règlement intérieur prévoyant la sanction de mise à pied disciplinaire. La société sur ce point transmet le règlement intérieur de la société Citroën [Localité 6] les Ulis qui fixe, en son article 26, la liste des sanctions applicables en fonction de la gravité de l'infraction commise ( notamment la mise à pied disciplinaire d'une durée maximale de six jours) et justifie des modalités d'affichage.

Le règlement intérieur produit par la société date du 28 février 2014 et concerne la société commerciale Citroën [Localité 6] les Ulis et M. [H] soutient qu'il ne lui serait pas opposable la société devant produire le règlement intérieur applicable pour PSA Retail France.

Il apparaît néanmoins de l'extrait KBIS communiqué que la société a fait l'objet en juin 2017 d'un simple changement de dénomination sociale. En conséquence, le règlement intérieur transmis demeure applicable notamment en son article 26 prévoyant la sanction de mise à pied.

Ainsi, le moyen de nullité tiré du règlement intérieur est inopérant.

S'agissant des faits reprochés au salarié, la société prétend que le 10 septembre 2019, M. [H] aurait réceptionné un véhicule DS5, l'aurait garé dans l'enceinte du garage, aurait déposé les clés dans la boîte à clés sécurisée mais n'aurait pas ouvert de déclaration de travaux et signés avec le dépositaire ledit document. Le 19 septembre 2019 à la suite de la réclamation du client, la société s'est aperçue que le véhicule était non répertorié.

M. [H] conteste être à l'origine de cette faute en précisant que trois réceptionnaires sont également présents sur le site de réception des véhicules. La société transmet les attestations sur l'honneur des trois autres réceptionnaires qui déclarent n'avoir pas pris en charge ce véhicule.

Il résulte de l'article L. 1333-1 du code du travail, qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et que si un doute subsiste, il profite au salarié. Selon l'article L. 1333-2 du code du travail, le juge peut annuler une sanction injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

En l'espèce, de la même manière que les trois autres collègues présents sur le site, M. [H] conteste sa responsabilité dans les faits intervenus le 10 septembre 2019. Dans la mesure où il n'existe aucun autre élément de nature à lui imputer cette faute, le doute doit lui profiter et la sanction doit en conséquence être annulée.

En conséquence de cette annulation, il convient de faire droit à la demande de rappel de salaire correspondant à cette mise à pied, soit la somme de 140 euros et 14 euros au titre des congés payés afférents. Au regard du préjudice subi par cette annulation et du fait de l'irrégularité de procédure, il y a lieu d'indemniser le préjudice moral à hauteur de 500 euros.

Sur la délivrance des documents sociaux conformes

Au regard des condamnations prononcées, il convient d'ordonner la remise par la société à M. [H] des documents sociaux rectifiés conformes au présent arrêt, de bulletins de paye, d'une attestation France Travail et d'un certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt. Le prononcé d'une astreinte ne s'avère pas en l'état nécessaire, à défaut de la justification d'une résistance abusive de l'employeur.

Sur les intérêts des créances

Il y a lieu d'ordonner que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt. Il convient également d'autoriser la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :

Infirme le jugement du conseil de prud'hommes de Poissy du 2 décembre 2021 sauf en ce qu'il a ordonné la jonction des procédures référencées RG numéro 21/00 81 et RG numéro 20/00 49;

Y ajoutant et statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [H] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Ordonne l'annulation de la mise à pied disciplinaire prononcée à l'encontre de M. [H] le 8 novembre 2019 ;

Condamne la société Stellantis & You France à payer à M. [H] la somme de :

* 51'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 15'000 à titre de dommages et intérêts pour non-respect par l'employeur de son obligation de sécurité,

* 6857,54 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 685,75 euros au titre des congés payés y afférents,

*140 euros à titre de rappel de salaire et 14 euros au titre des congés payés y afférents,

* 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la sanction disciplinaire;

Dit que les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;

Autorise la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;

Ordonne la remise par la société à M. [H] des documents sociaux rectifiés conformes au présent arrêt, de bulletins de paye, d'une attestation France Travail et d'un certificat de travail rectifiés conformes au présent arrêt ;

Dit n'y effectivement avoir lieu à astreinte ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Stellantis & You France à payer à M. [H] la somme de 5000 euros pour les frais exposés en première instance et en cause d'appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus des demandes ;

LAISSE les dépens à la charge de la société Stellantis & You France.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Laurence SINQUIN, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-3
Numéro d'arrêt : 22/00313
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;22.00313 ?
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