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13/06/2024 | FRANCE | N°23/07506

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 13 juin 2024, 23/07506


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78F



Chambre civile 1-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 13 JUIN 2024



N° RG 23/07506 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WFM2



AFFAIRE :



S.A.S. COULON







C/

S.A.S. AZ METAL









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Octobre 2023 par le Président du TC de Nanterre

N° RG : 202300912



Expéditions exécutoires

Expé

ditions

Copies

délivrées le : 13.06.2024

à :



Me Stéphanie TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Laurence BENITEZ DE LUGO, avocat au barreau de VAL D'OISE







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE TREIZE JUIN DEUX MILLE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78F

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 13 JUIN 2024

N° RG 23/07506 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WFM2

AFFAIRE :

S.A.S. COULON

C/

S.A.S. AZ METAL

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 24 Octobre 2023 par le Président du TC de Nanterre

N° RG : 202300912

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 13.06.2024

à :

Me Stéphanie TERIITEHAU, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Laurence BENITEZ DE LUGO, avocat au barreau de VAL D'OISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. COULON

Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 785 34 8 4 00

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 - N° du dossier 20230386

Ayant pour avocat plaidant Me Claude VAILLANT, du barreau de Paris

APPELANTE

****************

S.A.S. AZ METAL

Prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 450 629 654

[Adresse 2]

[Localité 5]/FRANCE

Représentant : Me Laurence BENITEZ DE LUGO, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 128 - N° du dossier 230079

(ordonnance d'irrecevabilité des conclusions du 04 avril 2024)

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mai 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marina IGELMAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseiller,

Madame Marina IGELMAN, conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Coulon est spécialisée dans le secteur d'activité des travaux de peinture et de vitrerie.

La SAS AZ Métal exerce les activités de location, montage et démontage d'échafaudages.

Depuis 2016, les parties entretiennent des relations commerciales et collaborent sur de multiples chantiers.

Par acte de commissaire de justice du 12 mai 2023, la société AZ Métal a fait assigner la société Coulon devant le tribunal de commerce de Nanterre afin principalement de la voir condamner à lui régler la somme en principal de 174 885,67 euros.

Autorisée par ordonnance du 30 mai 2023 rendue par le président du tribunal, la société AZ Métal a fait pratiquer le 6 juin 2023 trois saisies conservatoires sur les comptes bancaires de la société Coulon, ouverts sur les livres de la Caisse d'Epargne IDF, BNP Paribas et Arkea Banque Entreprises et Institutionnels, à hauteur de la somme de 174 885,67 euros, saisies s'étant toutes révélées fructueuses.

Le 9 juin 2023, les saisies conservatoires ont été dénoncées à la société Coulon.

Le 18 juillet 2023, la société Coulon a réglé à la société AZ Métal la somme de 31 740 euros.

Par acte de commissaire de justice délivré le 3 août 2023, la société Coulon a fait assigner en référé la société AZ Métal aux fins d'obtenir principalement la mainlevée immédiate de l'ensemble des saisies conservatoires pratiquées sur ses comptes bancaires sur le fondement de l'ordonnance du 30mai 2023.

Par ordonnance contradictoire rendue le 24 octobre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a :

- débouté la société Coulon de sa demande de mainlevée des trois saisies conservatoires pratiquées le 6 juin 2023, selon ordonnance rendue le 30 mai 2023 par le président de ce tribunal sur requête du 20 avril 2023 de la société AZ Métal, sur les comptes bancaires de la société Coulon ouverts sur les livres respectivement de la Caisse d'Epargne d'Ile de France, d'Arkea Banque Entreprises et Institutionnels et de BNP Paribas,

- condamné la société Coulon à régler à la société AZ Métal la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

- condamné la société Coulon aux entiers dépens,

- liquidé les dépens à recouvrer par le greffe à la somme de 40,66 euros, dont TVA 6,78 euros.

Par déclaration reçue au greffe le 3 novembre 2023, la société Coulon a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a liquidé les dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées le 29 mars 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Coulon demande à la cour, au visa des articles L. 511-1 et suivant du code des procédures civiles d'exécution, de :

'- infirmer le jugement rendu en date du 25 octobre 2023 en toutes ses dispositions,

et, par conséquent :

- juger que les conditions exigées par l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas remplies,

- ordonner la mainlevée immédiate de l'ensemble des saisies conservatoires pratiquées sur les comptes bancaires de la société Coulon sur le fondement de l'ordonnance du 30 mai 2023 ainsi que la rétractation de cette même ordonnance.

- juger que la mainlevée sera effectuée sur simple dénonciation de la décision à la société AZ Métal et à Allianz Juris,

- débouter la société AZ Métal de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

- condamner la société AZ Métal au paiement d'une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. '

Par ordonnance du magistrat délégué en date du 4 avril 2024, qui n'a pas fait l'objet d'un déféré, les conclusions déposées par la société AZ Métal ont été déclarées irrecevables comme tardives.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Coulon appelante sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise, entendant démontrer que d'une part les conditions de l'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution ne sont pas réunies et d'autre part, que la réalité de la saisie ne fait nullement débat.

Elle conclut essentiellement sur le fait que la condition tenant à l'existence d'une menace sur le recouvrement de la créance n'est pas remplie, faisant valoir que le premier juge a, à tort, rejeté sa demande au motif qu'elle n'aurait pas réagi aux différentes mises en demeure.

Elle soutient que selon la jurisprudence, c'est la possible défaillance financière et l'impossibilité de recouvrer les sommes qui constituent la menace de recouvrement, ce dont la société AZ Métal n'a pas justifié et pour cause, la société Coulon étant en très bonne santé financière, disposant d'un excédent net de 11 338 817 euros.

Elle ajoute qu'en outre la créance est infondée, ni le principe, ni le montant d'une dette contractuelle ne pouvant se déduire valablement de factures, relevés de comptabilité, lettres de relances, mises en demeure, émanant exclusivement du demandeur au paiement.

Elle relève que pourtant la société AZ Métal s'est contentée de communiquer devant le juge du fond, des factures établies par elle-même, des devis non signés et des procès-verbaux de réception des échafaudages non signés par elle.

Elle précise que concernant spécifiquement le chantier du [Adresse 3], pour lequel la société AZ Métal demande une somme de 71 400 euros, la société AZ Métal a eu des retards et il y a eu des non-conformités dans l'établissement des échafaudages, de sorte que la bonne exécution de la prestation n'est pas démontrée, et que pour le surplus, la réalité des prestations n'est pas établie, les factures ne correspondant pas aux contrats signés.

La société Coulon sollicite également l'infirmation de l'ordonnance querellée en ce qu'elle a considéré qu'elle ne justifiait pas de la réalité des saisies pratiquées, alors qu'elle avait produit aux débats les trois saisies conservatoires.

Elle souligne que depuis, 2 saisies ont été levées, de sorte que reste en cours la seule saisie sur le compte de la Caisse d'Epargne.

Sur ce,

A titre liminaire il convient de rappeler qu'il résulte de l'article 472 du code de procédure civile que si, en appel, l'intimé ne comparaît pas, ou si ses conclusions ont été déclarées irrecevables, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

La cour doit examiner, au vu des moyens d'appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s'est déterminé.

L'article L. 511-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose dans son premier alinéa que « toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement ».

Cet article prévoit donc deux conditions cumulatives : le demandeur doit justifier d'une créance paraissant fondée en son principe, d'une part, et de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement, d'autre part.

L'article L. 512-1 du même code précise quant à lui que le juge peut donner mainlevée de la mesure conservatoire s'il apparaît que les conditions prescrites par l'article L. 511-1 ne sont pas réunies.

L'article R. 512-1 de ce code prévoit que :

« Si les conditions prévues aux articles R. 511-1 à R. 511-8 ne sont pas réunies, le juge peut ordonner la mainlevée de la mesure à tout moment, les parties entendues ou appelées, même dans les cas où l'article L. 511-2 permet que cette mesure soit prise sans son autorisation.

Il incombe au créancier de prouver que les conditions requises sont réunies. »

Par ailleurs, il est de principe que pour apprécier si les conditions légales sont réunies, le juge doit se placer au jour où il statue et tenir compte des faits postérieurs à l'ordonnance ayant autorisé la mesure conservatoire (voir notamment 2e Civ., 24 septembre 2015, pourvoi n° 14-19.601 ; 2e Civ., 28 juin 2006, pourvoi n° 04-18.598 ; 2e Civ., 12 janvier 1994, pourvoi n° 92-14.605).

Pour débouter la société Coulon de sa demande de mainlevée, le premier juge a retenu, s'agissant de la condition tenant à l'existence d'une menace sur le recouvrement alléguée par la société AZ Métal que « l'apparence de défaillance du débiteur, en raison de son absence de réactivité suite aux relances et mises en demeure de paiement émises par le créancier, suffit à caractériser une menace dans le recouvrement de la créance ».

Or, il ne peut y avoir menace dans le recouvrement que s'il est fait état d'éléments particuliers de nature à laisser supposer une insolvabilité imminente ou dont la survenance est à craindre, ou encore s'il est démontré une crainte légitime d'un défaut de paiement.

Ainsi, comme le fait valoir à juste titre l'appelante, le simple fait de ne pas répondre aux demandes de paiement adressées par un prétendu créancier est insuffisant pour caractériser les circonstances justifiant d'une menace sur le recouvrement de la créance alléguée.

De son côté, l'appelante verse aux débats une attestation de son commissaire aux comptes en date du 6 juillet 2023 certifiant la fiabilité des éléments comptables de la société Coulon, desquels il ressort notamment que son actif réalisable et disponible est supérieur à son passif exigible et que son résultat net est positif.

Dans ces conditions, il ne ressort d'aucun élément du débat tel que soumis à la cour que serait caractérisé un risque sur le recouvrement de la créance alléguée par la société AZ Métal.

Sans qu'il y ait lieu d'examiner la seconde condition, le défaut de caractérisation de celle ci-dessus examinée doit entraîner l'infirmation la décision déférée qui a débouté l'appelante de sa demande de mainlevée des trois saisies conservatoires pratiquées le 6 juin 2023, selon ordonnance rendue le 30 mai 2023 par le président du tribunal de commerce de Nanterre sur requête de la société AZ Métal, sur les comptes bancaires de la société Coulon dans les livres respectivement de la Caisse d'Epargne Ile-de-France, d'Arkea Banque Entreprises et Institutionnels, et de la société BNP Paribas.

Statuant à nouveau, l'ordonnance du 30 mai 2023 sera rétractée et la mainlevée de la saisie opérée dans les livres de la société Coulon ouverts auprès de la Caisse d'Epargne Ile-de-France, seule restant en cours selon l'appelante, sera ordonnée.

En revanche, il n'y a pas lieu de dire que la mainlevée sera effectuée sur simple dénonciation de la décision à la société AZ Métal et à la société Allianz Juris et l'appelante sera déboutée de ce chef de demande.

Sur les demandes accessoires :

La société Coulon étant accueillie en son recours, l'ordonnance sera infirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société AZ Métal devra supporter les dépens d'appel.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la société Coulon la charge des frais irrépétibles exposés. L'intimée sera en conséquence condamnée à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Infirme l'ordonnance du 24 octobre 2023,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Rétracte l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 30 mai 2023,

Ordonne la mainlevée de la saisie pratiquée auprès de la Caisse d'Epargne Ile-de-France par la société AZ Métal sur le fondement de l'ordonnance du 30 mai 2023 dans les livres de la société Coulon,

Déboute la société Coulon du surplus de ses demandes,

Dit que la société AZ Métal supportera les dépens de première instance et d'appel,

Condamne la société AZ Métal à verser à la société Coulon la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Monsieur Thomas VASSEUR, président, et par Madame Élisabeth TODINI, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 23/07506
Date de la décision : 13/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-13;23.07506 ?
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