COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
Chambre sociale 4-4
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 JUIN 2024
N° RG 22/01975
N° Portalis DBV3-V-B7G-VIVT
AFFAIRE :
Société SOLOCAL
C/
[V] [W]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 avril 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE - BILLANCOURT
Section : E
N° RG : F 20/00081
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Jérôme WATRELOT
Me Olivier BONGRAND
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Société SOLOCAL
N° SIRET : 444 212 955
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Jérôme WATRELOT de la SELAFA CHASSANY WATRELOT ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0100
APPELANTE
****************
Madame [V] [W]
née le 15 octobre 1987 à [Localité 5]
de nationalité française
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentant : Me Olivier BONGRAND de la SELARL O.B.P. Avocats, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0136
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Mme [W] a été engagée par la société Solocal, en qualité de conseillère en communication digitale spécialiste, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 1er mars 2019.
Cette société est spécialisée dans la publicité et le marketing numérique ainsi que dans l'inter médiation entre les particuliers et les professionnels (les pages jaunes). L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 50 salariés. Elle applique la la convention collective nationale de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1955.
Par lettre du 27 mai 2019, la période d'essai de Mme [W] a été renouvelée pour trois mois.
Par lettre du 21 août 2019, la société a informé Mme [W] de la rupture de sa période d'essai dans les termes suivants: « (') Le contrat de travail que nous avons conclu le 1er mars 2019 comportait une période d'essai de 3 mois renouvelée et arrivant à expiration le 11 septembre 2019 compte tenu de vos absences.
Suite à l'entretien que vous avez eu avec votre hiérarchie le 21 août 2019, nous vous confirmons notre décision de rompre votre période d'essai.
En conséquence, vous cesserez votre activité le 21 août 2019 au soir. Votre contrat de travail prendra fin au terme de votre période d'essai, soit le 11 septembre 2019 au soir. La période entre le 22 août 2019 et le 11 septembre 2019 vous sera toutefois rémunérée.
Vous percevrez également une indemnité compensatrice correspondant au délai de prévenance qui ne sera pas appliqué en raison du terme de la période d'essai (...) ».
Le 19 décembre 2019, Mme [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt aux fins de contester son licenciement, d'ordonner sa réintégration et en paiement de diverses sommes de nature salariale et de nature indemnitaire.
Par jugement du 28 avril 2022, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt (section encadrement) a :
. fixé le salaire de Mme [W] à 3 290 euros bruts mensuels,
. dit que la rupture de la période d'essai de Mme [W] est abusive,
. dit que l'indemnité forfaitaire n'aurait pas dû être retenue,
. rappelé que l'exécution provisoire est de droit en matière salariale,
. En conséquence :
. condamné la société Solocal à payer à Mme [W] la somme de 9 870 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 987 euros au titre des congés payés afférents,
. ordonné la remise d'une attestation Pôle emploi conforme par la société Solocal,
. débouté Mme [W] de ses autres demandes relatives à la rupture de la période d'essai,
. condamné la société Solocal au remboursement de 3 661 euros au titre de la retenue indue d'indemnité kilométrique sur le solde de tout compte,
. condamné la société Solocal au paiement de 1 000 euros au bénéfice de Mme [W] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
. reçu la société Solocal dans ses demandes reconventionnelles et l'en a débouté,
. mis les dépens à la charge de la société Solocal.
Par déclaration adressée au greffe le 23 juin 2022, la société a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 27 février 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 20 avril 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Solocal demande à la cour de :
. infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en ce qu'il a :
. fixé le salaire de Mme [W] à la somme de 3 290,00 euros brut mensuel ;
. dit que la rupture de la période d'essai de Mme [W] est abusive ;
. dit que l'indemnité forfaitaire n'aurait pas dû être retenue ;
. condamné la société Solocal à payer à Mme [W] la somme de 9 870,00 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 987,00 euros au titre des congés payés afférents ;
. ordonné la remise d'une attestation Pôle emploi conforme par la société Solocal ;
. condamné condamnera la société Solocal au remboursement de la somme de 3 661,00 euros au titre de la retenue indue d'indemnité kilométrique sur le solde de tout compte ;
. condamné la société Solocal au paiement de la somme de 1 000,00 euros au bénéfice de Mme [W] au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
. débouté la société Solocal de ses demandes reconventionnelles ;
. mis les dépens à charge de la société Solocal.
. confirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes relatives :
. à l'annulation de la rupture de son contrat de travail ;
. à la nullité de la rupture de son contrat de travail ;
. à sa réintégration au poste de Conseillère communication digitale spécialiste au sein de la société Solocal ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 98 700 euros à titre d'indemnité forfaitaire nette correspondant au montant des salaires dus depuis la rupture de son contrat de travail jusqu'à la réintégration effective ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser une indemnité de 98 700 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail nulle ;
. à l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture de son contrat de travail et la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 30 000 euros à titre d'indemnité pour rupture sans cause réelle et sérieuse ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 596 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la période d'essai ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 3 290 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure disciplinaire ;
. à la condamnation de la société Solocal à lui verser la somme de 2 500 euros à titre de rappel de salaire en application de l'article 53 de la Convention collective, outre 250 euros de congés payés y afférents.
Statuant à nouveau,
A titre principal
. juger que la rupture de la période d'essai de Mme [W] est régulière et ne présente aucun caractère abusif ;
. juger que la rupture de la période d'essai de Mme [W] n'est pas nulle ;
. juger que la retenue d'indemnité kilométrique est bien fondée ;
En conséquence,
. débouter Mme [W] de toutes ses demandes ;
À titre subsidiaire
. fixer le salaire de référence de Mme [W] à la somme de 3 183,14 euros ;
. juger que la Société Solocal est redevable de la somme de 3 183,14 euros, soit un mois de salaire, pour dommage et intérêts pour rupture du contrat sans cause réelle et sérieuse ;
. juger que la Société Solocal est redevable de la somme de 6 277,66 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 627,77 euros bruts au titre des congés payés afférents;
. juger que la Société Solocal est redevable de la somme 2 060,31 euros bruts au titre de l'indemnité due au titre de l'article 53 de la convention collective de la Publicité française et à la somme de 206,03 euros bruts au titre des congés payés y afférents ;
En tout état de cause
. condamner Mme [W] à verser à la société Solocal la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
. condamner Mme [W] aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 novembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [W] demande à la cour de :
. infirmer le jugement du Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 28 avril 2022 en ce qu'il a débouté Mme [W] de ses demandes d'annulation de la rupture de son contrat de travail et de sa réintégration au poste de Conseillère communication digitale spécialiste au sein de la société Solocal ;
. infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [W] de sa demande d'indemnité correspondant au montant des salaires dus depuis la rupture de son contrat jusqu'à la réintégration effective ;
Statuant à nouveau :
. confirmer le jugement en ce qu'il a :
. fixé le salaire de Mme [W] à 3 290,00 euros brut mensuel ;
A titre principal :
. annuler la rupture du contrat de travail de Mme [W] ;
. ordonner la réintégration de Mme [W] au poste de Conseillère communication digitale spécialiste au sein de la société Solocal ;
En conséquence :
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] la somme de 167 790 euros à titre d'indemnité de réintégration correspondant au montant des salaires dus depuis la rupture de son contrat jusqu'à la réintégration effective (montant arrêté provisoirement au 21 décembre 2023), outre la somme de 16 779 euros à titre de congés payés y afférents ;
A défaut de réintégration, à titre subsidiaire :
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] une indemnité de 98 700 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture du contrat de travail nulle ;
Très subsidiairement :
. juger la rupture du contrat de travail de Mme [W] sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence :
. Confirmer le jugement en ce qu'il condamne la société Solocal à verser à Mme [W] la somme suivante : 9 870 euros d'indemnité compensatrice de préavis, outre 987 euros de congés payés y afférents ;
Statuant à nouveau :
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] :
- 30 000 euros à titre d'indemnité pour rupture sans cause réelle et sérieuse ;
- 596 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
A titre infiniment subsidiaire,
. confirmer le jugement en ce qu'il a jugé la rupture de la période d'essai de Mme [W] abusive ;
En conséquence :
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] :
. 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive de la période d'essai ;
Statuant à nouveau, sur l'omission de statuer :
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] la somme suivante :
. 2 500 euros à titre de rappel de salaire en application de l'article 53 de la Convention collective, outre 250 euros de congés payés y afférents ;
En tout état de cause,
. confirmer en ce que le jugement a condamné Solocal à 3 661 euros au titre de la retenue indue d'indemnité kilométrique sur le solde de tout compte ;
. condamner la société Solocal à verser à Mme [W] les sommes suivantes :
. 3 290 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure disciplinaire;
. 3 000 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
. ordonner la remise d'une attestation Pôle emploi conforme à l'arrêt à intervenir ;
. assortir la condamnation des intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil s'agissant des créances salariales et de l'indemnité légale de licenciement ;
. condamner la société Solocal aux dépens ;
. débouter la société Solocal de ses demandes reconventionnelles.
MOTIFS
Sur la rupture du contrat de travail
La salariée expose qu'à défaut d'accord exprès de sa part quant au renouvellement de la période d'essai, la prolongation de cette période lui est inopposable de sorte que son contrat de travail est devenu ferme à l'issue de sa période d'essai de trois mois.
Elle conclut à la nullité de la rupture en raison d'une atteinte à sa liberté d'expression et demande en conséquence sa réintégration. A titre subsidiaire, elle soutient que la rupture de la période d'essai non motivée en dehors de la période d'essai caractérise un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A titre infiniment subsidiaire, elle conclut au caractère abusif de la rupture de sa période d'essai, exposant qu'elle n'a été rompue que parce qu'elle a envoyé un courriel au PDG pour lui faire part de sa motivation et de ses idées, alors pourtant que ses résultats étaient bons et appréciés.
En réplique, l'employeur objecte que le contrat de travail prévoyait la possibilité de renouveler la période d'essai et que la salariée a expressément accepté ce renouvellement de sorte que la période a été renouvelée jusqu'au 31 août 2019 et que la rupture de son contrat de travail, survenue le 21 août 2019, se situe donc bien pendant la période d'essai.
Il conclut à l'absence d'exigence de motivation de la rupture de la période d'essai et conteste que cette rupture soit abusive.
Il conteste également avoir porté atteinte à la liberté d'expression de la salariée, exposant ne pas avoir sanctionné cette dernière pour le courriel qu'elle a adressé au PDG de la société le 30 juillet 2019 et expose qu'il a mis un terme à la période d'essai sur l'unique fondement de ses compétences, notamment en raison de l'absence de mise en 'uvre de la démarche commerciale adéquate.
***
Sur le renouvellement de la période d'essai
L'article L. 1221-21 du code du travail dispose que « la période d'essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit » et que, dans cette hypothèse, « cet accord fixe les conditions et les durées de renouvellement ». L'article L. 2253-1 10° du code du travail donne prévalence à l'accord de branche sur l'accord d'entreprise pour définir les conditions et durées de renouvellement, le second ne pouvant primer qu'à condition de stipuler des garanties au moins équivalentes.
Le renouvellement qui ne peut, en toute hypothèse, intervenir qu'une seule fois, n'est donc possible que s'il est autorisé par un accord de branche étendu applicable dans l'entreprise.
Même lorsqu'elle est autorisée par un accord de branche étendu, l'article L. 1221-23 prévoit que la possibilité de renouveler la période d'essai ne se présume pas et doit faire l'objet d'une stipulation expresse dans le contrat de travail ou la lettre d'engagement.
Au cas présent, l'article 53 de la convention collective nationale de travail des cadres, techniciens et employés de la publicité française du 22 avril 1955 étendue par arrêté du 29 juillet 1955 (JORF 19 août 1955) prévoit, pour les salariés cadres :
« Le contrat de travail à durée indéterminée des cadres peut comporter une période d'essai, formalisée par écrit, d'une durée initiale qui ne peut excéder 3 mois.
Cette période d'essai pourra être renouvelée une fois, de sorte que la durée de la période d'essai, renouvellement compris, pourra être portée à 6 mois. La possibilité de renouveler la période d'essai et, le cas échéant, la possibilité d'un renouvellement à l'initiative d'une seule des parties, doit être expressément stipulée dans la lettre d'engagement ou le contrat de travail.
(')
Lorsqu'il est mis fin à la période d'essai par l'employeur, le salarié doit en être prévenu par écrit dans un délai de :
' 24 heures en-deçà de 8 jours de présence ;
' 48 heures entre 8 jours et 1 mois de présence ;
' 2 semaines après 1 mois de présence ;
' 1 mois après 3 mois de présence.
Le contrat de travail est définitivement rompu à l'issue du délai de prévenance et, au plus tard, au dernier jour de la période d'essai. L'impossibilité pour le salarié d'effectuer l'intégralité de son délai de prévenance, en raison de la survenance du terme de la période d'essai, doit être compensée, sans contrepartie en travail, par une indemnité équivalente à la rémunération de la portion du délai de prévenance qui n'a pu être respectée.
Dès lors que l'employeur, à l'origine du renouvellement de la période d'essai, notifie au salarié la rupture de sa période d'essai durant la période de renouvellement, le salarié bénéficie :
- d'une autorisation d'absence de 1 heure par jour de travail effectif durant le délai de prévenance exécuté afin de rechercher un nouvel emploi. Ce nombre d'heures d'absence autorisées peut être, avec l'accord des deux parties, cumulé sur 1 semaine ou sur 1 mois. Ce dernier dispositif sera appliqué pour les salariés en forfait jours ;
- d'une indemnité brute égale à 10 % des salaires bruts perçus par le salarié en contrepartie directe du travail réalisé depuis son embauche (1).
Lorsqu'il est mis fin à la période d'essai par le salarié, l'employeur doit en être prévenu par écrit dans un délai de :
- 24 heures si la durée de présence du salarié est inférieure à 8 jours ;
- 48 heures si la durée de présence du salarié est supérieure ou égale à 8 jours.
Le contrat de travail est définitivement rompu à l'issue du délai de prévenance et, au plus tard, au dernier jour de la période d'essai. Le non-respect de ce délai de prévenance par le salarié peut donner lieu à une indemnisation au profit de l'employeur.
La durée de la période d'essai doit correspondre à un temps de travail effectif. Les délais de prévenance et la durée de la période d'essai s'entendent en heure (s), jour (s), semaine (s) et mois calendaires.
(')
(1) A l'exclusion notamment des éléments variables et de toutes les primes exceptionnelles, sans pouvoir prendre en compte un salaire de référence inférieur au minimum conventionnel applicable. »,
L'accord de branche étendu définit les modalités du renouvellement, dans les limites posées par la chambre sociale de la Cour de cassation, laquelle exige que le renouvellement résulte « d'un accord exprès des parties intervenu au cours de la période initiale, même si les dispositions conventionnelles prévoient une simple information du salarié » (Cass. soc., 12 juill. 2010, n°09-41.875).
En l'espèce, la salariée a été engagée en qualité de cadre par contrat de travail à durée indéterminée daté du 1er mars 2019. L'article 2 de ce contrat prévoit : « Période d'essai. Le présent contrat ne deviendra ferme qu'à l'issue d'une période d'essai de trois mois. Toute suspension qui se produirait pendant la période d'essai (maladie, congés') prolongerait d'autant la durée de cette période qui doit correspondre à un travail effectif. Cette période d'essai pourra, le cas échéant, être renouvelée, par l'une ou l'autre des parties, sans que la durée totale de l'essai, renouvellement compris, ne puisse dépasser 6 mois. Durant cette période d'essai, chacune des parties pourra mettre fin au contrat à tout moment, sans indemnité d'aucune sorte, moyennant le respect du délai de prévenance prévu aux articles L. 1221-25 et L. 1221-26 du code du travail »
La période de trois mois correspondant à la période d'essai expirait donc le 31 mai 2019.
Par lettre du 27 mai 2019, l'employeur a informé la salariée qu'il avait « décidé » de « renouveler [sa] période d'essai pour une nouvelle durée de trois mois » pour expirer le « 31 août 2019 au soir » (pièce 2 de la salariée). La salariée a signé cette lettre qui s'achevait ainsi : « Nous (') vous demandons de bien vouloir nous retourner, pour la bonne règle, un des deux exemplaires originaux revêtu de votre accord ».
Elle soutient à juste titre que sa seule signature sur la lettre remise en main propre prolongeant la période d'essai ne saurait valoir accord exprès à son renouvellement (Soc., 15 mars 2006, n° 04-46.406, publié ; Soc., 25 nov. 2009, n°08-43.008, publié ; Soc., 8 juillet 2015, n 14-11.762).
Le renouvellement ou la prolongation de la période d'essai doit en effet résulter d'un accord exprès des parties et exige une manifestation de volonté claire et non équivoque du salarié ne pouvant être déduite de la seule apposition de sa signature sur un document établi par l'employeur (Soc., 22 septembre 2015, n 14-11.731)
Par contre, l'apposition par le salarié de la mention « lu et approuvé » et de sa signature sur la lettre de l'employeur lui notifiant le renouvellement de la période d'essai vaut acceptation de celle-ci (Soc., 23 septembre 2014, n 13-17.140 ; Soc., 21 janvier 2015, n° 13-23.018 ; Soc., 9 mai 2019, n° 18-14.068).
Ainsi, le fait, pour la salariée d'apposer sa signature la lettre du 27 mai 2019 par laquelle l'employeur avait décidé de renouveler la période d'essai, ne suffit pas à caractériser son accord exprès à son renouvellement.
La cour relève à ce titre que la lettre de renouvellement du 27 mai 2019 porte la mention suivante : « Signature du salarié précédée de la mention manuscrite « bon pour accord exprès et sans équivoque pour le renouvellement de la période d'essai ». Or, la salariée n'a pas fait précéder sa signature de la mention en question.
Les conditions dans lesquelles la salariée a remis la lettre de renouvellement, revêtue de sa signature, à l'employeur ne caractérisent pas non plus son acceptation expresse. Il ressort en effet des débats que la salariée n'a pas renvoyé la lettre par courrier mais que la lettre de renouvellement signée le 27 mai 2019 « a été remise à la salariée en mains propres contre décharge » (page 12 des conclusions de l'employeur).
Pour soutenir qu'au contraire, la salariée avait donné son accord exprès au renouvellement de la période d'essai, l'employeur tire argument de deux courriels :
. Le premier, un courriel de Mme [F] (directrice de la publicité TPE/PME) du 9 mai 2019, par lequel celle-ci écrit à Mme [P] (responsable des ressources humaines ayant signé la lettre de renouvellement du 27 mai 2019) afin de lui indiquer qu'elle s'est entretenue avec la salariée pour lui « expliquer pourquoi [elle lui] prolongeai[t] sa période d'essai » (pièce 9 de l'employeur) ;
. Le second, un courriel que la salariée a adressé à Mme [F] le 27 mai 2019 dans lequel elle se dit « ravie » du management de sa hiérarchie, « à l'aise dans le poste qui lui est confié », motivée par son travail et heureuse du travail en équipe.
Il ne ressort de ces deux courriels, antérieurs à la signature par la salariée de la lettre prolongeant sa période d'essai, aucun accord exprès caractérisant une volonté claire et non équivoque de la salariée de voir sa période d'essai renouvelée.
Au contraire, le courriel que la salariée a adressé à sa supérieure hiérarchique le 27 mai 2019 montre que de son côté, la salariée n'avait nul besoin de temps supplémentaire pour apprécier le poste qui lui était confié. La cour en déduit que la prolongation de sa période d'essai lui a été imposée par la seule volonté de l'employeur, qu'elle ne l'appelait pas de ses v'ux et donc que son acceptation par la seule apposation de sa signature sur la lettre du 27 mai 2019 est équivoque.
Il en résulte que, faute d'accord exprès de la salariée au renouvellement de sa période d'essai, son contrat de travail à durée indéterminée est devenu définitif à l'expiration de la période, c'est-à-dire le 1er juin 2019.
Sur la qualification de la rupture
La salariée expose que son contrat de travail étant devenu définitif, la rupture s'analyse soit en un licenciement nul, soit en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au soutien de sa demande tendant à dire nul son licenciement et de sa demande de réintégration, la salariée invoque une atteinte à sa liberté d'expression, affirmant que la rupture du 21 août 2019 est la conséquence du courriel qu'elle a adressé le 30 juillet 2019 à son PDG.
Au soutien de sa demande tendant à dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée expose que la rupture non motivée de la période d'essai caractérise un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
L'employeur conteste pour sa part toute atteinte à la liberté d'expression de la salariée.
***
Il est établi que la salariée a, par courriel du 30 juillet 2019, écrit au PDG de la société. Dans ce courriel, la salariée lui fait part de « l'aventure commerciale exceptionnelle » qu'elle vit et de son « plaisir à occuper sa fonction ». Elle lui fait aussi part de ses interrogations sur la compétitivité des offres faites par la société Solocal qu'elle décrit comme ne se différenciant pas suffisamment de celles de la concurrence, ajoute qu'elle souhaite se « rendre à [son] service (') à apporter des idées, des envies, des perceptions, tout en restant sans cesse en écoute active client » et conclut en se disant « prête à [s']impliquer sur [son] temps personnel s'il le faut » (pièce 4 de la salariée).
Pour établir le lien entre la rupture de son contrat de travail et la lettre qu'elle a adressée à sa hiérarchie le 30 juillet 2019, la salariée se fonde sur les éléments suivants :
. un courriel qu'elle a écrit à Mme [F] le 30 août 2019 dans lequel elle se dit surprise des reproches que cette dernière lui a adressés à propos de sa lettre au PDG (pièce 6 de la salariée) et la réponse de Mme [F] qui, par SMS, ne le conteste pas ;
. un témoignage de M. [I], représentant du personnel, qui expose avoir entendu Mme [F] confirmer à la salariée qu'il avait été mis fin à sa période d'essai en raison de son courriel du 30 juillet 2019 ;
. un compte-rendu de la commission locale de proximité du 23 septembre 2019 à l'occasion de laquelle un élu a interrogé la direction sur le point de savoir s'il existait un lien entre la rupture du contrat de travail et le courriel du 30 juillet 2019, ce à quoi la direction répondait qu'il n'était pas interdit de s'adresser à la direction sans en avoir préalablement informé sa hiérarchie.
Néanmoins, l'employeur établit qu'il avait pris la décision de ne pas confirmer la salariée à son poste avant le 30 juillet 2019 et donc avant le courriel que la salariée a adressé au PDG. En effet, par un courriel que Mme [F] a adressé à Mme [P] le 20 juillet 2019, elle indiquait : « Après une période d'essai renouvelée, je souhaite ne pas confirmer [la salariée]. Elle ne répond pas à ce que j'attends d'un collaborateur. J'ai réalisé à plusieurs reprises un recadrage sur son comportement ('). Je trouve que compte tenu de son renouvellement de période d'essai, elle ne sait toujours pas appliquer les étapes de vente ('). J'ai également dû recadrer oralement son attitude envers ses collègues car j'ai trouvé que par moment il y avait trop de souplesse. Je souhaite à [la salariée] le meilleur épanouissement dans ses prochaines fonctions au sein d'une autre entreprise ».
Par conséquent, il n'est pas établi que le courriel qu'elle a adressé au PDG le 30 juillet 2019 est la cause de la rupture de son contrat de travail. Il est au contraire démontré par l'employeur que la rupture est sans lien avec le courriel en question.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de nullité du licenciement, de sa demande de réintégration et des demandes subséquentes.
La rupture du contrat de travail, qui ne résulte que de la lettre du 21 août 2019 par laquelle l'employeur fait savoir à la salariée que « suite à l'entretien que vous avez eu avec votre hiérarchie le 21 août 2019, nous vous confirmons notre décision de rompre votre période d'essai » sans autre motif qui aurait pu caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement (pièce 8 de l'employeur), s'analyse donc en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
La salariée, qui justifie d'une ancienneté de 5 mois et 20 jours, soit zéro année complète, peut, par application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version issue de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse maximale correspondant à un mois de salaire brut.
Les parties sont en discussion sur le salaire de référence de la salariée. Celle-ci l'évalue à 3 290 euros bruts mensuels. L'employeur l'évalue à 3 183,14 euros.
La différence tient à la prise en compte ou non de la prime enfant vacances de 540 euros bruts versée à la salariée au mois de juin 2019.
Suivant les explications de l'employeur, sur ce point non contestées par la salariée, la prime de 540 euros bruts qu'elle a perçue en juin 2019 correspond à une 'uvre sociale du comité social et économique (ci-après « CSE »), versée par l'employeur pour le compte du CSE et non pas un élément de salaire versé en contre partie de l'accomplissement d'un travail.
Ainsi, la prime de 540 euros versée à la salariée, qui n'est pas un élément de son salaire mais une gratification décidée par le CSE, ne doit pas être prise en compte pour le calcul de sa rémunération brute mensuelle.
Il convient donc d'apprécier la rémunération brute de la salariée sans prendre en compte la prime litigieuse.
Compte tenu de l'ancienneté de la salariée (5 mois et 20 jours), de son niveau de rémunération (3 183,14 euros bruts mensuels), de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à son âge lors du licenciement (32 ans), de ce qu'elle a été admise au bénéfice de l'allocation d'aide au retour à l'emploi jusqu'au 31 octobre 2021 mais ne justifie d'aucune recherche d'emploi, le préjudice qui résulte, pour elle, de la perte injustifiée de son emploi sera réparée par une indemnité de 1 000 euros, somme au paiement de laquelle, par voie d'infirmation, l'employeur serra condamné.
La salariée peut aussi prétendre à une indemnité compensatrice de préavis. En effet, contrairement à ce que soutient l'employeur, le contrat n'a pas été rompu par suite de la rupture de la période d'essai puisque à la date de la rupture, la période d'essai s'était achevée ainsi qu'il a été jugé.
L'indemnité compensatrice de préavis correspond, en application de l'article 68 de la convention collective, à trois mois de salaire soit 9 549,42 euros. Toutefois, à raison l'employeur expose que de cette somme doivent être déduites celles qu'il a versées à la salariée au titre de l'indemnité relative au délai de prévenance. A ce titre, l'employeur a versé à la salariée une somme totale de 3 271,77 euros (1 055,41+1 160,95+1 055,41) entre août et septembre 2019.
Il conviendra donc, par voie d'infirmation, de condamner l'employeur à payer à la salariée la différence, soit la somme de 6 277,65 euros bruts outre 627,76 euros bruts au titre des congés payés afférents.
La salariée peut enfin prétendre, au titre de la rupture de son contrat de travail, à une indemnité de licenciement dont le montant est discuté entre les parties, l'employeur contestant l'éligibilité de la salariée au bénéfice de cette indemnité dès lors que la salariée ne justifie pas d'une ancienneté de 8 mois, la salariée exposant pour sa part qu'en tenant compte de son délai de préavis, elle justifie d'une ancienneté de 8 mois et 21 jours.
La condition d'ancienneté pour ouvrir droit à l'indemnité de licenciement doit s'apprécier au jour où l'employeur envoie la lettre recommandée de licenciement, date à laquelle est décidée la rupture du contrat de travail (Soc., 26 septembre 2006, n° 05-43.841).
En revanche, si le droit à l'indemnité de licenciement naît à la date où le licenciement est notifié, l'évaluation du montant de l'indemnité est faite en tenant compte de l'ancienneté à l'expiration du contrat (Soc., 11 septembre 2019, pourvoi n° 18-12.606). En l'espèce, l'employeur a rompu le contrat de travail le 21 août 2019. C'est à cette date qu'il convient d'apprécier l'ancienneté de la salariée au regard de son éligibilité au bénéfice d'une indemnité de licenciement.
A la date du 21 août 2019, la salariée comptait une ancienneté de 5 mois et 20 jours.
Or, selon l'article L. 1234-9 alinéa 1 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 24 septembre 2017, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
La salariée ne justifiant pas de l'ancienneté requise par la loi, elle ne peut prétendre à une indemnité de licenciement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure disciplinaire
La salariée expose que si l'employeur invoque une faute qu'elle a commise comme motif de rupture de la période d'essai, il était tenu de respecter la procédure disciplinaire prévue à l'article L. 1332-2 du code du travail et qu'à défaut, elle peut prétendre à des dommages-intérêts pour non-respect de la procédure disciplinaire.
L'employeur s'oppose à cette demande considérant que la rupture de la période d'essai n'a pas été fondée sur des motifs disciplinaires mais sur ses compétences professionnelles
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La cour relève que l'employeur n'a pas rompu le contrat de travail pour une faute de la salariée.
En outre, l'article L. 1235-2 alinéa 5 du code du travail dispose que lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4, L. 1233-11, L. 1233-12 et L. 1233-13 ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l'employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
Or, au cas d'espèce, la rupture a été jugée comme s'analysant en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ce qui exclut que la salariée puisse prétendre à une indemnité pour irrégularité de la procédure disciplinaire.
Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il déboute la salariée de ce chef de demande.
Sur la demande de « rappel de salaire en application de la contrepartie prévue par l'article 53 de la convention collective »
La salariée expose que le conseil de prud'hommes a omis de statuer sur la demande qu'elle formait devant lui au titre du rappel de salaire qu'elle sollicitait sur le fondement de l'article 53 de la convention collective. Elle précise qu'en application de cette disposition, elle peut prétendre au bénéfice de cette disposition dès lors que l'employeur est à l'origine du renouvellement de sa période d'essai et qu'il lui a notifié la rupture de sa période d'essai durant la période de renouvellement.
L'employeur s'oppose à cette demande, exposant que l'article 53 de la convention collective n'est pas applicable puisque la salariée était d'accord avec le renouvellement de la période d'essai. Subsidiairement, il demande de réduire les prétentions de la salariée.
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Ainsi qu'il a été vu ci-avant, l'article 53 de la convention collective prescrit notamment que si l'employeur, à l'origine du renouvellement de la période d'essai, notifie au salarié la rupture de sa période d'essai durant la période de renouvellement, le salarié bénéficie d'une indemnité brute égale à 10 % des salaires bruts perçus par le salarié en contrepartie directe du travail réalisé depuis son embauche, à l'exclusion notamment des éléments variables et de toutes les primes exceptionnelles, sans pouvoir prendre en compte un salaire de référence inférieur au minimum conventionnel applicable.
La cour relève que l'article 53 de la convention collective ne prévoit pas le versement d'un « salaire » mais d'une « indemnité ».
En tout état de cause, dès lors d'une part qu'il a été jugé que la période d'essai n'avait pas été renouvelée, faute pour la salariée de l'avoir expressément accepté, et d'autre part que la rupture ne résulte pas d'une rupture de la période d'essai durant la période de renouvellement mais procède d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée ne peut prétendre au bénéfice de l'indemnité, de 10 % prévue par le texte susvisé.
Ajoutant au jugement qui n'a pas statué sur cette demande, il conviendra d'en débouter la salariée.
Sur la demande de rappel d'indemnité kilométrique
La salariée invoque deux retenues indues de l'indemnité kilométrique, de 1 830,50 euros en août et en septembre 2019 (soit 3 661 euros au total). Elle expose avoir utilisé son véhicule personnel dans le cadre de ses fonctions dans l'attente de la livraison du véhicule de fonction.
L'employeur se fonde sur ses règles internes de remboursement des frais kilométriques pour soutenir que les retenues qu'il a réalisées sont justifiées. Plus précisément, il expose que la salariée a reçu entre mars et juillet 2019 une indemnité kilométrique forfaitaire de 1 114 euros par mois et qu'en application de sa « politique véhicule » une régularisation annuelle est prévue si les kilomètres effectués sont inférieurs à ceux résultant de l'application du forfait. Il ajoute qu'au cas d'espèce, la salariée a seulement déclaré 2702 kilomètres et que, sur cette base, elle aurait dû percevoir une indemnité kilométrique de 1 379 euros alors qu'elle a, en application de l'indemnité forfaitaire, bénéficié d'une somme plus importante, ce qui justifie la régularisation.
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Il n'est pas discuté par la salariée que de mars à juillet 2019, elle a perçu une indemnité forfaitaire kilométrique. Cela ressort au demeurant de ses bulletins de paie montrant qu'elle a perçu à ce titre :
. 583,52 euros en mars 2019,
. 1 114 euros en avril 2019,
. 1 114 euros en mai 2019,
. 1 114 euros en juin 2019,
. 1 114 euros en juillet 2019,
. soit une somme totale de 5 039,52 euros.
Ce forfait résulte de l'application des procédures internes à la société Solocal telles qu'elles sont présentées en pièce 13 par l'employeur (« Frais de déplacement force de vente TPE/PME et Grands Comptes ») montrant que le forfait en zone 6 s'élève à 1114 euros. Cette pièce montre aussi qu'« une régularisation est effectuée chaque année si les kilomètres effectués sont inférieurs à ceux du forfait appliqué ».
Les bulletins des mois d'août et septembre 2019 montrent pour leur part que la somme de 1 830,50 euros a été déduite du salaire de la salariée ce qui représente un total de 3 661 euros.
Au terme de la relation contractuelle, la salariée a donc perçu une somme de 1 678,52 euros bruts à titre d'indemnité kilométrique globale (5 039,52 ' 3 661).
Il n'est pas discuté que la salariée a parcouru avec son véhicule personnel 2702 kilomètres. Ce kilométrage réel doit correspondre à celui sur la base duquel les indemnités kilométriques doivent être calculées sur l'ensemble de la relation contractuelle.
Selon le calcul présenté par la société, 2702 kilomètres devaient être compensés par une indemnité kilométrique de 1 379,40 euros. La salariée ne conteste pas ce calcul.
Dès lors, la salariée, qui a bénéficié d'une indemnité kilométrique totale de 1 678,52 euros alors que selon un calcul qu'elle ne conteste pas, elle aurait dû ne bénéficier que d'une indemnité de 1 379,40 euros, a été remplie de ses droits.
Il convient donc d'infirmer de ce chef le jugement et, statuant à nouveau, de débouter la salariée de ce chef de demande.
Sur les intérêts
Les condamnations au paiement de sommes ayant une vocation indemnitaire seront assorties des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ou à compter du jugement du conseil de prud'hommes s'agissant des chefs de dispositif confirmés.
Les condamnations au paiement des indemnités de rupture et des rappels de salaire produiront quant à elles intérêts au taux légal à compter de la réception, par l'employeur, de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes.
Sur la remise des documents
Il conviendra de donner injonction à l'employeur de remettre à la salariée une attestation France travail conforme à la présente décision ainsi qu'elle le demande.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Le jugement sera confirmé en ce qu'il condamne l'employeur aux dépens de première instance et à payer à la salariée une indemnité de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Succombant, l'employeur sera condamné aux dépens de la procédure d'appel.
Il conviendra de condamner l'employeur à payer à la salariée une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais engagés en appel.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :
CONFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il déboute Mme [W] de sa demande de nullité du licenciement, de sa demande de réintégration et des demandes subséquentes, de sa demande d'indemnité de licenciement, de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure disciplinaire et condamne la société Solocal aux dépens et à payer à Mme [W] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
INFIRME le jugement sur le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
DIT que la rupture du contrat de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
CONDAMNE la société Solocal à payer à Mme [W] les sommes suivantes :
. 1 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
. 6 277,65 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 627,76 euros bruts de congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception, par la société Solocal, de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes,
DÉBOUTE Mme [W] de sa demande de « rappel de salaire en application de l'article 53 de la convention collective » et des congés payés afférents,
DONNE injonction à la société Solocal de remettre à Mme [W] une attestation France travail conforme au présent arrêt,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,
CONDAMNE la société Solocal à payer à Mme [W] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Solocal aux dépens de la procédure d'appel.
. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Dorothée Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président