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11/06/2024 | FRANCE | N°23/01139

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-2, 11 juin 2024, 23/01139


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51G



Chambre civile 1-2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 11 juin 2024



N° RG 23/01139 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VWEC



AFFAIRE :



S.A. SEQENS



C/



[I] [O] [V] épouse [W]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Janvier 2023 par le Tribunal de proximité d'ASNIERES SUR SEINE



N° RG : 11-22-000593



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 11/06/24

à :



Me Véronique BUQUET-ROUSSEL



Me Frédérique FARGUES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE ONZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51G

Chambre civile 1-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 11 juin 2024

N° RG 23/01139 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VWEC

AFFAIRE :

S.A. SEQENS

C/

[I] [O] [V] épouse [W]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 Janvier 2023 par le Tribunal de proximité d'ASNIERES SUR SEINE

N° RG : 11-22-000593

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 11/06/24

à :

Me Véronique BUQUET-ROUSSEL

Me Frédérique FARGUES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. SEQENS

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]'

[Localité 3]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 - N° du dossier 3023 -

Représentant : Maître Elisabeth GOELEN Substituant Maître Fabienne BALADINE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0744

APPELANTE

****************

Madame [I] [O] [V] épouse [W]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Maître Frédérique FARGUES, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 138

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Madame Anne THIVELLIER, Conseiller,

Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,

EXPOSE DU LITIGE,

Suivant acte sous-seing privé du 20 mai 2011, la société Seqens, a consenti un bail d'habitation à Mme [I] [V] épouse [W] pour un bien immobilier situé à [Adresse 2] à [Localité 4].

Le logement étant infesté par des punaises de lit, Mme [W] en a avisé son bailleur.

La confédération générale du logement (C.G.L.) a également adressé un courrier le 12 novembre 2020 à la société Seqens en lui transmettant la liste des locataires touchés.

Le 13 janvier 2021, une intervention de détection canine de punaises de lit a été organisée.

Le problème perdurant, Mme [W] a adressé une lettre recommandée à son bailleur le 9 février 2021, reçue le 11 février 2021.

Le 3 mars 2021, le conseil de Mme [W] a mis en demeure le bailleur de faire procéder aux travaux ou traitements nécessaires ou de proposer un autre logement à société cliente.

Le 22 mars 2021, la société Seqens a répondu qu'un premier traitement avait été effectué le 25 février 2021 et un second le 11 mars 2021.

Alléguant que le problème persistait, le conseil de Mme [W] a adressé le 9 novembre 2021 une nouvelle mise en demeure à la société Seqens.

C'est dans ces conditions que par acte de commissaire de justice du 28 avril 2022, Mme [W] a fait citer la société Seqens à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'[Localité 4] pour obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

à titre principal,

- la condamnation de la société Seqens à lui proposer, dans le délai de 2 mois, un nouveau logement équivalent au sien, de même surface et aux mêmes conditions de loyer, présentant un certificat de non infestation récent, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai de 2 mois suivant la signification du jugement,

à titre subsidiaire,

- la condamnation de la société Seqens à mettre en 'uvre dans le délai de 2 mois tous les moyens nécessaires à l'éradication des punaises de lit et produire à la fin des travaux un certificat de non infestation, faute de quoi son logement devra être assuré, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai de 2 mois suivant la signification du jugement, et en assurant le relogement le temps de travaux,

en tout état de cause,

- la condamnation de la société Seqens à lui verser la somme de 377 euros par mois, représentant 80% de son loyer actuel, depuis l'apparition des punaises de lit dans son appartement en novembre 2020 au titre du préjudice de jouissance.

et pour la période postérieure à la signification du jugement, prononcer la suspension du paiement du loyer jusqu'à relogement dans un appartement propre ou production d'un certificat de non infestation dans son logement actuel,

- la condamnation de la société Seqens au paiement des sommes suivantes :

* 865,97 euros au titre du préjudice matériel,

* 2 000 euros au titre des dommages et intérêts,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamnation de la société Seqens aux entiers dépens.

Par jugement réputé contradictoire du 19 janvier 2023, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité d'Asnières sur Seine a :

- rejeté la demande de relogement,

- condamné la société Seqens à procéder au nombre nécessaire d'interventions d'éradication des nuisibles (punaises de lit), et justifier à cette fin, à l'issue de ces interventions d'un certificat de non infestation,

- dit que ces interventions devront être réalisées dans un délai de 2 mois suivant la signification du présent jugement et ne devront en tout état de cause pas excéder un délai de 4 mois après la signification du présent jugement,

- assorti cette obligation, passé le délai de 4 mois, d'une astreinte provisoire de 80 euros par jour de retard pour une durée de 6 mois,

- condamné la société Seqens, à Mme [W] la somme de 4 900 euros à titre d'indemnisation de son préjudice de jouissance,

- condamné la société Seqens à payer à Mme [W] la somme de 865,97 euros au titre du préjudice matériel,

- condamné la société Seqens à payer à Mme [W] la somme de 1 500 euros au titre des dommages intérêt pour son préjudice moral,

- condamné la société Seqens à payer à Mme [W] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Seqens aux dépens,

- rappelé que le bénéfice de l'exécution provisoire est de droit.

Par déclaration déposée au greffe 20 février 2023, la société Seqens a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 23 janvier 2024, la société Seqens, appelante, demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son argumentation,

- débouter Mme [W] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il :

* l'a condamnée à procéder à l'éradication des punaises de lit dans le délai de deux mois de la signification du jugement et avant le délai de quatre mois,

* a dit que passé le délai de quatre mois, une astreinte de 80 euros par jour de retard serait due pour une durée de six mois,

* l'a condamnée à payer à Mme [W] la somme de 4 900 euros au titre de son préjudice de jouissance,

* l'a condamnée à payer à Mme [W] la somme de 865,97 euros au titre de son préjudice matériel,

* l'a condamnée à payer la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

* l'a condamnée à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [W] de sa demande de relogement et de sa demande de suspension du paiement du loyer jusqu'à son relogement,

- débouter Mme [W] de son appel incident,

- débouter Mme [W] de sa demande de relogement sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai de deux mois de la signification,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner à éradiquer les punaises de lit dans son logement ou dans l'immeuble sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai de deux mois de la signification,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de son préjudice moral,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement de la somme de 13 112,16 euros au titre de son préjudice de jouissance actualisé,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement de la somme de 31,49 euros au titre de son préjudice matériel complémentaire,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement de la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts au titre de l'article 560 du code de procédure civile;

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement de la somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- débouter Mme [W] de sa demande tendant à la voir condamner au paiement des entiers dépens,

y ajoutant :

- condamner Mme [W] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner Mme [W] au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 24 janvier 2024, Mme [W], intimée, demande à la cour :

- vu l'appel partiel interjeté par la Société Seqens, de le juger mal fondé, et débouter la société Seqens de ses demandes,

- vu l'appel incident qu'elle a formé, d'infirmer le jugement en ce que le tribunal l'a déboutée de société demande relogement,

ce faisant,

- condamner la société Seqens à lui proposer un logement de même surface et à loyer équivalent, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

subsidiairement,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Seqens à procéder à l'éradication des nuisibles (punaises de lit) dans l'immeuble où se trouve le logement qu'elle occupe, dans un délai de deux mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

- l'infirmer en ce que l'astreinte journalière a été fixée à 80 euros à compter d'un délai de 4 mois et ce faisant, assortir la condamnation de la société Seqens à une astreinte de 100 euros par jour de retard à l'expiration du délai de deux mois à compter de cette signification,

en tout état de cause,

- d'infirmer le jugement en ce que le tribunal a limité l'indemnisation de son préjudice de jouissance à la somme de 4 900 euros, et limité celle de son préjudice moral à la somme de 1 500 euros,

- confirmer le jugement pour le surplus,

statuant à nouveau des chefs infirmés,

- condamner la société Seqens à lui régler une somme de 3 500 euros au titre de son préjudice moral, et subsidiairement la somme de 2 000 euros,

- condamner la société Seqens à lui régler la somme de 15 181,01 euros au titre de son préjudice de jouissance, arrêtée à janvier 2024 et à parfaire jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Seqens à lui régler une somme de 31,49 euros au titre de son préjudice matériel en sus de la condamnation de première instance à ce titre,

- condamner la société Seqens à lui régler une somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts;

- condamner la société Seqens à lui régler une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, en sus de la condamnation prononcée à ce titre en première instance,

- la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Fargues, avocat aux offres de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 février 2024.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DECISION.

Sur l'appel de la société Seqens.

- Sur la persistance de la présence de punaises de lit dans le logement donné à bail à Mme [V].

Au soutien de son appel, la société Seqens poursuit l'infirmation du jugement rendu le 19 janvier 2023 par le tribunal de proximité d'[Localité 4] en ce qu'il a considéré que l'appartement donné à bail à Mme [V] était infesté de punaises de lit, ce qui ne permettait pas à la locataire de jouir paisiblement des lieux. La société Seqens fait valoir qu'à la suite d'une détection positive,

elle a procédé immédiatement le 24 février 2021 à la désinfection de l'appartement de Mme [V] et que, dans le même temps, la société La Rationnelle a fait de même dans les autres logements où la détection s'était révélée positive, qu'elle a ensuite confié à la société Sapian les prestations de désinfection de la résidence au cours de l'année 2022, et que dans le cadre de l'exécution du jugement de première instance, elle a fait procéder le 2 mars 2023 à une nouvelle détection dans le logement de Mme [V] qui s'est avérée négative, que contrairement aux allégations de Mme [V] en première instance, celle-ci n'a jamais justifié la présence de punaises de lit dans son appartement depuis le 24 février 2021, qu'elle s'est donc prévalue d'une situation ancienne pour demander et obtenir sa condamnation. La société Seqens ajoute qu'il a été fait droit aux demandes de la locataire qu'en l'absence de représentation de la société Seqens et sur la bas de pièces de l'année 2020 et 2021 qui n'ont pas été actualisées, que Mme [V] n'a pas versé la moindre pièce de nature à confirmer la présence de nuisibles dans son logement à la date de l'audience devant le premier juge, le 22 novembre 2022, qu'en cause d'appel, elle ne produit pas davantage de pièces tel, un constat de commissaire de justice ou un rapport de l'ARS lui permettant de justifier la présence de nuisibles à son domicile entre 2021 et 2023.

Mme [V] poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'elle a été déboutée de sa demande de relogement. Elle expose que, si c'est à bon droit que le premier juge a retenu la responsabilité de la société Seqens dans la persistance de l'infestation par punaises de lit de son logement, elle lui reproche néanmoins d'avoir estimé que le bailleur n'était pas tenu à son relogement, en l'absence d'arrêté d'insalubrité, alors que le bailleur échoue à lui délivrer un logement décent. Elle expose que la persistance de la présence des punaises est attestée par ses voisins qui s'en plaignent également, que si le rapport établi par la société Sapian qui est intervenue en mars 2023 pour une opération de désinfection, retient qu'aucune présence de punaises n'a été détectée dans son appartement, il n'en demeure pas moins que plusieurs voisins continuent d'être infestés, et que ce sont les nombreuses mesures de nettoyage soigneux qu'elle a mis en place dans son logement, quotidiennement, qui expliquent la non infestation actuelle malgré la présence de punaises dans les logements contigus au sien, qu'elle a été également contrainte d'apposer des adhésifs au pourtour de sa porte palière qu'elle remplace régulièrement.

Sur ce,

La société Seqens qui produit en cause d'appel le bon de commande du 1er février 2021 relatif au traitement des punaises de lit dans l'appartement occupé par Mme [V] confié à la société La Rationnelle, ainsi que la facture correspondant à la prestation réalisée le 24 février 2021, émise le 31 décembre 2021 par la société, justifie s'être montrée très réactive, dès qu'elle a été informée du problème par la locataire.

La cour observe qu'à l'audience du 22 novembre 2022 devant le premier juge à laquelle la société Seqens n'était pas comparante, ni représentée, Mme [V] s'est bornée à affirmer qu'elle était victime d'infestation de punaises de lit sans étayer son allégation par la moindre pièce actualisée, tel un procès-verbal de constat dressé par un commissaire de justice ou tout autre rapport établi par une autorité habilitée pour ce faire,soit le service d'hygiène et de sécurité de la mairie soit l'ARS, qu'en l'absence de pièce produite à l'audience par Mme [V] de nature à établir la persistance de la présence des insectes dans son appartement, c'est à tort que le premier juge a retenu la responsabilité de la société Seqens sur les seules déclarations de la locataire.

- sur la demande de relogement formée par Mme [V].

L'article 1719 du Code civil dispose: ' le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant'.

L'article 6 de la loi d'ordre public du 6 juillet 1989 dansa sa version en vigueur à compter du 25 novembre 2018, dispose notamment que ' le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifeste pour sa santé, exempt de toute infestation d'espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale à respecter et un calendrier de mise en oeuvre échelonnée.

(....°

Le bailleur est obligé :

a) de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les éléments mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer (.....).

b) d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du Code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle, hormis ceux qui, consignés dans l'état des lieux, auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée ci-dessus.

c) d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués.

(...)'

Il incombe par ailleurs au bailleur de délivrer au locataire un logement en bon état d'usage, de réparation et qui réponde aux normes décentes prescrites par les articles 1 et 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatifs aux caractéristiques du logement décent étant rappelé que cette obligation a un caractère d'ordre public.

Il s'ensuit que le bailleur a l'obligation de maintenir le logement dans cet état décent et non dangereux pour le locataire, dès lors qu'il a été informé de sa dégradation à la suite d'événements non imputables au locataire.

En l'espèce, Mme [V] dont la cour a constaté ci-dessus qu'elle n'établissait pas au jour de l'audience devant le premier juge, le 22 novembre 2022, la persistance de la présence de punaises de lit dans l'appartement qui lui a été donné à bail par la société Seqens, doit être déboutée de sa demande de relogement.

- sur la disposition du jugement ayant condamné la société Seqens à prendre les mesures nécessaires à éradiquer les punaises de lit présentes dans l'appartement de Mme [V].

Pour les mêmes motifs que ceux-ci dessus déjà exposés, le jugement doit être infirmé en ce 'qu'il a condamné la société Seqens à procéder au nombre nécessaire d'interventions d'éradication de nuisibles (punaises de lit), et justifier à cette fin, à l'issue de ces interventions d'un certificat de non infestation, dit que ces interventions devront être réalisées dans un délai de 2 mois suivant la signification du présent jugement et ne devront en tout état de cause pas excéder un délai de 4 mois après la signification du présent jugement, assorti cette obligation, passé le délai de 4 mois, d'une astreinte provisoire de 80 euros par jour de retard pour une durée de 6 mois'.

La cour observe que a société Seqens produit le rapport de détection dressé le 2 mars 2023 par la société Sapian de l'examen duquel il ressort que, si une détection positive a été observée dans un certain nombre d'appartements, tel n'est pas le cas de celui de Mme [V] dont la détection s'est révélée négative.

Y ajoutant, Mme [V] doit être déboutée de sa nouvelle demande en cause d'appel : en effet, même si elle conteste les dispositions susvisées du jugement, la société Seqens justifie avoir néanmoins, depuis la décision dont appel, avoir signé le 1er mars 2022 un marché de désinsectisation avec la société Sapian, avoir sollicité le 10 mars 2023 un devis avec la même société pour le traitement des parties communes et de huit logements de l'immeuble, avoir signé le 8 janvier 2024, sur la base du devis précité un bon de commande d'un montant de 5 195,85 euros auprès de la société Sapian afférent à la détection canine des 75 logements et des parties communes des deux bâtiments.

La bailleresse produit le mail aux termes duquel la société mandatée pour ce faire, informe qu'elle interviendra la 22 janvier 2024, l'avis de passage, ainsi que la liste des locataires concernés, la cour observant d'ailleurs à cet égard que la locataire s'est opposée à toutes nouvelles interventions de désinsectisation dans son logement après que celui-ci a été déclaré comme étant parfaitement sain le 2 mars 2023 et que la société Seqens a fait acter le refus d'intervention par acte de commissaire de justice du 2 août 2023 produit aux débats.

- sur les demandes indemnitaires de Mme [V].

* sur l'indemnisation du trouble de jouissance.

La société Seqens poursuit l'infirmation du jugement en ses dispositions ayant fait droit aux demandes indemnitaires de Mme [V]. Elle fait valoir en premier lieu que le préjudice de jouissance allégué par la locataire a été limité dans le temps puisque dès qu'elle a été informée de la présence de punaises de lit à la fin de l'année 2020, qu'elle est intervenue le 24 février 2021 et qu'à la date du 2 mars 2023, l'appartement n'était plus infesté alors que Mme [V] ne rapporte pas la preuve de la persistance de la présence des punaises entre 2021 et 2023. Elle s'oppose de plus fort à la demande d'actualisation de la demande de la locataire à ce titre, trouvant contradictoire le fait pour Mme [V] de solliciter des dommages-intérêts complémentaires, alors qu'elle refuse toute intervention dans son logement.

Mme [V] réplique que l'importance de l'infestation, sa persistance pendant plusieurs années malgré plusieurs interventions justifient que le préjudice de jouissance qu'elle a subi soit indemnisé à hauteur de 80% du montant de son loyer, faisant valoir que son préjudice est caractérisé par les piqûres qu'elle a subies au cours de l'année 2021, l'importance du symptôme allergique développé, les mesures qu'elle a dû prendre personnellement pour éradiquer les punaises (appartement meublé au minimum - matelas et canapé protégés par un emballage en plastique - effets personnels protégés dans des housses et caisses en plastique), le temps passé quotidiennement au nettoyage du logement sans discontinuer depuis le mois de novembre 2020. Elle ajoute ne plus pouvoir recevoir ses proches.

Sur ce,

Le préjudice de jouissance résultant de la présence de punaises de lit, fût-il circonscrit, est incontestable, la cour observant à cet égard que, si effectivement Mme [V] n'a pas justifié de leur persistance dans le temps, il est concevable qu'elle ait pu être confrontée au problème durant une période plus longue que celle comprise entre fin décembre 2020 et février 2021 dès lors que des appartement contigus au sien ont été également infestés.

Il s'ensuit que Mme [V] doit être déclarée bien fondée en sa demande d'indemnisation de préjudice de jouissance résultant de la présence de punaises de lit dans son appartement et ayant des répercussions certaines non seulement sur sa santé dont elle justifie, mais également sur sa vie quotidienne et sa vie personnelle, dont la cour a les éléments nécessaires pour l'évaluer à la somme de 4 000 euros, le jugement étant donc infirmé sur le montant alloué à ce titre, étant observé que pour les motifs ci-dessus exposés, Mme [V] doit être déboutée de sa demande d'actualisation de ce préjudice formée en cause d'appel.

* sur l'indemnisation du préjudice matériel.

La société Seqens poursuit l'infirmation du jugement en ce qu'elle a été condamnée à verser la somme de 865,97 euros à Mme [V] au titre de son préjudice matériel alors que la locataire sollicite la confirmation du jugement sur ce point et demande en outre la condamnation de la bailleresse à lui verser la somme de 31,49 euros au titre de son préjudice matériel en sus de la condamnation de première instance à ce titre.

Sur ce,

Le jugement doit être confirmé sur ce point, Mme [V] justifiant de son préjudice matériel par les factures de différents magasins de bricolage qu'elle produit et de l'examen desquelles il ressort que les achats sont en lien avec les nuisances subies.

En revanche, Mme [V] doit être déboutée comme non fondée à solliciter la somme complémentaire de 31,49 euros.

* sur l'indemnisation du préjudice moral.

Il y a lieu de confirmer le jugement déféré à la cour en ce qu'il a condamné la société Seqens à verser à Mme [V] la somme de 1 500 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral qu'elle a incontestablement subi du fait de l'infestation de son appartement par des punaises de lit.

* sur la demande de Mme [V] de dommages-intérêts.

Mme [V] sollicite en cause d'appel la somme de 800 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 560 du code de procédure civile, au motif que l'absence de comparution de la société Seqens en première instance était volontaire et destinée à lui nuire.

La société Seqens réplique que son défaut de comparution non volontaire n'a pénalisé qu'elle-même puisqu'elle n'a été condamnée que sur les seules allégations de Mme [V].

Sur ce,

Mme [V] doit être déboutée comme mal fondée en sa demande, dès lors qu'elle n'établit pas la faute volontaire de la société Seqens dans son absence de comparution en première instance, ni de son préjudice.

Sur les mesures accessoires.

La société Seqens doit être condamnée aux dépens de la procédure d'appel, les dispositions du jugement contesté relatives aux dépens de première instance étant, par ailleurs, confirmées.

Il y a lieu de faire droit à la demande de Mme [V] au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d'appel en condamnant la société Seqens à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS.

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement rendu le 19 janvier 2023 par le tribunal de proximité d'[Localité 4] en toutes ses dispositions, sauf celles relatives au débouté de la demande de Mme [V] tendant à voir condamner la société Seqens à la reloger, à l'indemnisation des préjudices matériels et moral subis par Mme [V],

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Déboute Mme [V] de sa demande formée tendant à voir condamner la société Seqens à procéder à l'éradication des nuisibles (punaises de lit) dans l'immeuble où se trouve le logement qu'elle occupe, sous astreinte,

Condamne la société Seqens à verser à Mme [V] la somme de 4 000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice de jouissance,

Y ajoutant,

Déboute Mme [V] de ses demandes actualisées ou nouvelles demandes formées en cause d'appel dont sa demande de dommages-intérêts complémentaire,

Condamne la société Seqens à verser à Mme [V] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Seqens aux dépens d'appel distraction au profit de Me Fargues, avocat aux offres de droit, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Céline KOC, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-2
Numéro d'arrêt : 23/01139
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;23.01139 ?
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