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06/06/2024 | FRANCE | N°23/06913

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 06 juin 2024, 23/06913


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 30B



Chambre civile 1-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 JUIN 2024



N° RG 23/06913 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WDYK



AFFAIRE :



S.C. [Adresse 5]





C/

S.A.R.L. COMPAGNIE INTERNATIONALE DU COMMERCE GENERAL - COMING









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 28 Septembre 2023 par le Président du TJ de Nanterre

N° RG : 23/01219

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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06.06.2024

à :



Me Jean-olivier D'ORIA, avocat au barreau de PARIS



Me Fanny COUTURIER, avocat au barreau de VAL D'OISE







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRAN...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 30B

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JUIN 2024

N° RG 23/06913 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WDYK

AFFAIRE :

S.C. [Adresse 5]

C/

S.A.R.L. COMPAGNIE INTERNATIONALE DU COMMERCE GENERAL - COMING

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 28 Septembre 2023 par le Président du TJ de Nanterre

N° RG : 23/01219

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 06.06.2024

à :

Me Jean-olivier D'ORIA, avocat au barreau de PARIS

Me Fanny COUTURIER, avocat au barreau de VAL D'OISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Société [Adresse 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Jean-olivier D'ORIA de la SCP SMITH D'ORIA - IPP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1060 - N° du dossier E0002V9T

APPELANTE

****************

S.A.R.L. COMPAGNIE INTERNATIONALE DU COMMERCE GENERAL - COMING

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Fanny COUTURIER, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 191

Ayant pour avocat plaidant Me Alexis ZEKRI-POSTACCHINI, substitué par Me Anita STOJANOVIC, du barreau de Paris

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 22 Avril 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marina IGELMAN, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 3 mars 2000, la SC [Adresse 5] a donné à bail commercial à la SARL Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 4] (Hauts-de-Seine). Un renouvellement a eu lieu par acte du 20 mai 2010, prévoyant un loyer annuel hors taxes hors charges de 33 738 euros, payable par trimestre d'avance.

Des loyers sont demeurés impayés.

Par acte en date du 15 décembre 2022 le bailleur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire à la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming, pour une somme de 30 722,40 euros en principal au titre de la dette locative arrêtée au 1er octobre 2022.

Par acte de commissaire de justice délivré le 12 mai 2023, la société [Adresse 5] a fait assigner en référé la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming aux fins d'obtenir principalement la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail au 16 janvier 2023, sa condamnation au paiement de la somme provisionnelle de 58 902,78 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 2ème trimestre 2023, avec intérêts au taux légal à compter du commandement et de l'assignation, son expulsion, en cas de besoin, le concours de la force publique, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, le transport et la séquestration du mobilier trouvé dans les lieux dans tel garde-meubles qu'il plaira au bailleur aux frais, risques et péril de la partie expulsée, sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle égale au double du montant du dernier loyer appelé, augmenté des charges et des taxes et la capitalisation des intérêts.

Par ordonnance contradictoire rendue le 28 septembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre a :

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'acquisition de la clause résolutoire, et sur les demandes subséquentes d'expulsion et d'indemnité d'occupation,

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme provisionnelle de 36 848,36 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 2ème trimestre 2023, avec intérêts légaux à compter de l'assignation,

- autorisé la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à se libérer de la dette, par 12 mensualités égales, payables en sus du loyer courant, la première mensualité devant être payée le 10 du mois civil suivant la signification,

- dit que, faute pour la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming de payer à bonne date, en sus du loyer courant, une seule des mensualités, et 15 jours après l'envoi d'une simple mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de réception, la somme totale deviendra immédiatement exigible,

- dit n'y avoir lieu à ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming aux entiers dépens en ce non compris le coût du commandement,

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme de 1 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes les autres demandes des parties,

- rappelé que l'ordonnance de référé rendue en matière de clause résolutoire insérée dans le bail commercial a seulement autorité de chose jugée provisoire,

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 10 octobre 2023, la société Tour Michelet a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition, à l'exception de ce qu'elle a :

- dit que, faute pour la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming de payer à bonne date, en sus du loyer courant, une seule des mensualités, et 15 jours après l'envoi d'une simple mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de réception , la somme totale deviendra immédiatement exigible,

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme de 1 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes les autres demandes des parties,

- rappelé que l'ordonnance de référé rendue en matière de clause résolutoire insérée dans le bail commercial a seulement autorité de chose jugée provisoire,

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Dans ses dernières conclusions déposées le 18 mars 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Tour Michelet demande à la cour, au visa des articles 1103 et suivants, 1728 et suivants, 1225, 1343-5 du code civil, L. 145-41 du code de commerce, 834, 835 et suivants, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

'- recevoir la société [Adresse 5] en son appel, la déclarer recevable ;

y faisant droit,

- infirmer l'ordonnance rendue par la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Nanterre du 28/09/2023 [RG n° 23/01219] déférée en ce qu'elle a :

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'acquisition de la clause résolutoire et sur les demandes subséquentes d'expulsion et d'indemnité d'occupation ;

- condamné la société Coming à payer à la société [Adresse 5] une somme provisionnelle de 36 848,36 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 2e trimestre 2023 ;

- autorisé la société Coming à se libérer de la dette par 12 mensualités égales, payables en sus du loyer courant, la première mensualité devant être payée le 10 du mois civil suivant la signification ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner la capitalisation des intérêts ;

- n'a pas inclus le coût du commandement de payer dans les dépens mis à la charge de la société Coming.

statuant à nouveau :

- constater l'acquisition au profit de la bailleresse de la clause résolutoire contenue dans le bail du 03 mars 2000 renouvelé le 20 mai 2010, à effet du 1er janvier 2010, cela à la date du 16 janvier 2023 ;

en conséquence,

- ordonner l'expulsion de la société Compagnie Internationale du Commerce General - Coming et de toute personne de son chef des locaux qu'elle occupe au [Adresse 2], [Localité 4], tels que désignés dans le bail du 03 mars 2000 renouvelé le 20 mai 2010, à effet du 1er janvier 2010, et ce, au besoin, avec l'aide de la force publique ;

- condamner la société Compagnie Internationale du Commerce General Coming à restituer à la bailleresse les lieux dont il s'agit, libres de toute occupation et de tout mobilier, cela sous astreinte de 1 000 euros par jour calendaire de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir en vertu de l'article L. 131-3 du code des procédures civiles d'exécution.

- autoriser la société [Adresse 5] à séquestrer le mobilier se trouvant éventuellement dans les lieux dans tout garde-meubles, aux frais, risques et périls de la défenderesse ;

- fixer le montant de l'indemnité d'occupation due à compter du 16 janvier 2023 au double du montant du dernier loyer appelé, outre charges et taxes, en application des dispositions de l'article 24.1 du bail ;

- juger que cette indemnité d'occupation sera due au fur et à mesure de son exigibilité et jusqu'à la date du départ effectif, outre charges et taxes ;

- condamner à titre provisionnel la société Compagnie Internationale du Commerce General - Coming à payer à la société [Adresse 5] :

- l'arriéré locatif s'élevant à 40 078,56 euros TTC sauf à parfaire au jour de l'audience ;

- le montant de l'indemnité d'occupation fixée à compter du 16 janvier 2023 et cela au fur et à mesure de son exigibilité et jusqu'à la date du départ effectif, outre charges et taxes ;

- les entiers dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer.

- dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du commandement, pour les sommes qui y sont visées, et de la présente assignation pour le surplus ;

- ordonner la capitalisation des intérêts au visa de l'article 1343-2 du code civil ;

en tout état de cause

- débouter la société Compagnie Internationale du Commerce General Coming de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la société Compagnie Internationale du Commerce General Coming à payer à la société [Adresse 5] aux dépens de la présente instance ;

- condamner la société Compagnie Internationale du Commerce General Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.'

Dans ses dernières conclusions déposées le 28 mars 2024 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming (la société Coming) demande à la cour, au visa des articles L. 145-41 et suivants du code de commerce, 1104 et 1343-5 du code civil et 700 du code de procédure civile, de :

'- confirmer en tout point l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre en date du 28 septembre 2023 en ce qu'il a :

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'acquisition de la clause résolutoire, et sur les demandes subséquentes d'expulsion et d'indemnité d'occupation ;

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme provisionnelle de 36 848,36 euros au titre de l'arriéré locatif arrêté au 2ème trimestre 2023, avec intérêts légaux à compter de l'assignation,

- autorisé la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à se libérer de la dette, par 12 mensualités égales, payables en sus du loyer courant, la première mensualité devant être payée le 10 du mois civil suivant la signification ;

- dit que, faute pour la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming de payer à bonne date, en sus du loyer courant, une seule des mensualités, et 15 jours après l'envoi d'une simple mise en demeure adressée par lettre recommandée avec avis de réception, la somme totale deviendra immédiatement exigible ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming aux entiers dépens en ce non compris le coût du commandement ;

- condamné la société Compagnie Internationale du Commerce Général - Coming à payer à la société [Adresse 5] la somme de 1 800 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toutes les autres demandes des parties ;

- rappelé que l'ordonnance de référé rendue en matière de clause résolutoire insérée dans le bail commercial a seulement autorité de chose jugée provisoire ;

- rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

- dire que la société défenderesse a procédé au règlement des causes du commandement de payer dans le légal d'un mois ;

- dire que le décompte annexé au commandement de payer visant la clause résolutoire est imprécis et erroné ;

- dire que le commandement de payer visant la clause résolutoire ne peut pas produire d'effet ;

- dire que la société défenderesse a réglé une partie de la dette locative ;

- dire que la société Coming détient une créance d'un montant de de 16 054,42 euros au titre du paiement indu relatif à l'apurement des charges de l'année 2018 jamais justifié ;

- dire que la société demanderesse est de mauvaise foi ;

- dire que la société défenderesse est de bonne foi ;

en tout état de cause,

- débouter la société [Adresse 5] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

- condamner la société demanderesse à payer à la société Coming la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 avril 2024.

Expressément autorisée à l'audience de plaidoiries du 22 avril 2024, la société [Adresse 5], par note en délibéré transmise par RPVA le 26 avril 2024, confirme la bonne réception des 3 virements d'un montant de 6 034,03 euros évoqués par l'intimée dans ses conclusions et ajoute avoir depuis reçu un 4ème virement de 3 070,70 euros, de sorte que l'arriéré locatif s'élève aujourd'hui à la somme de 18 905,67 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La société Tour Michelet, bailleresse appelante, sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise à plusieurs titres.

Elle demande tout d'abord à la cour de constater que la clause résolutoire est acquise, et de faire droit à ses demandes subséquentes d'expulsion et d'indemnité d'occupation.

Elle entend démontrer que le commandement de payer qu'elle a fait délivrer à sa locataire ne souffre d'aucune contestation sérieuse, en ce qu'il est tout à fait lisible et qu'il comporte les mentions nécessaires à sa validité.

Elle prétend que ce commandement a été délivré de bonne foi et que le décompte qui y est annexé permet parfaitement à la société Coming de déterminer sa dette.

Elle explique avoir cantonné les sommes réclamées en prenant en considération les contestations portées par d'autres locataires de la galerie commerciale, alors même que la société Coming n'est pas concernée par ces contestations.

Elle ajoute que le décompte est parfaitement compréhensible pour « toute personne sachant lire et compter » ; qu'il fait apparaître les sommes portées au crédit ; qu'il fait apparaître l'intitulé exact des sommes dont il est sollicité le paiement, en explicitant les périodes s'y rapportant.

Elle souligne que la société Coming s'est rapprochée d'elle et d'un commissaire de justice, reconnaissant ainsi être débitrice.

Elle prétend que les causes du commandement n'ont pas été apurées dans le mois de sa délivrance, la locataire lui ayant adressé 3 chèques dont 2 étaient post datés des 1er février et 3 mars 2023, de sorte qu'il ne peut être considéré qu'elle a apuré sa dette avant la date butoir du 15 janvier 2023.

Sur le montant de la provision qu'elle sollicite, l'appelante indique justifier de la somme réclamée au titre de l'apurement des charges de l'année 2018 à hauteur de 16 054,42 euros et demande la condamnation provisionnelle de la société Coming à l'arriéré locatif actualisé.

En tout état de cause, elle s'oppose à l'octroi de délais de paiement, faisant valoir que le refus de la société Coming de payer aux termes convenus par le bail résulte davantage de la posture pour forcer une négociation déraisonnée que de véritables difficultés financières.

La société Coming, locataire intimée, sollicite la confirmation de l'ordonnance attaquée en qu'elle a prononcé une condamnation au paiement provisionnel de la somme de 36 848,36 euros, sauf éventuelle compensation judiciaire avec les sommes que la bailleresse lui devrait, ainsi qu'en ce qu'elle lui a octroyé un délai de 12 mois pour se libérer de sa dette.

Elle soulève plusieurs contestations sérieuses plaidant en faveur d'une neutralisation de la clause résolutoire.

Elle indique tout d'abord avoir apuré les causes du commandement dans le délai d'un mois, en adressant au bailleur, ainsi qu'en copie au commissaire de justice puis au mandataire immobilier, 3 chèques d'un montant total de 30 964,48 euros, à encaisser de manière échelonnée, et précise qu'aucun des destinataires de ces chèques ou copies n'ont émis la moindre observation sur le fait qu'ils ne permettraient pas de régler pas les causes du commandement de payer, relevant en outre que ces 3 chèques n'ont été remis à l'encaissement que le 3 avril 2023.

Elle soutient ensuite que le commandement de payer visant la clause résolutoire est imprécis et erroné, mentionnant la somme de 11 797,03 euros comme due au titre de la période s'écoulant du 1er janvier 2020 au 31 mars 2020, alors qu'elle avait bien réglé ce loyer.

Elle ajoute que cet acte comprend des sommes non classées chronologiquement ; qu'il débute le 18 août 2022, se poursuit sur l'année 2020 puis 2021 et s'achève au 1er octobre 2022 ; qu'il comporte plusieurs mentions tronquées.

Elle conclut ensuite sur la mauvaise foi de la bailleresse, qui a commis de multiples erreurs de gestion et de calcul au cours des années 2020 et 2021, qui a indûment refusé d'encaisser les chèques qui lui ont été adressés suite à la délivrance du commandement et qui lui a imputé un débit de 16 054 euros au titre d'un apurement de charges pour l'année 2018, sans la moindre explication ou justification.

Elle sollicite ensuite la confirmation du chef de l'ordonnance lui ayant accordé des délais de paiement, arguant de sa bonne foi en ayant payé les causes du commandement puis en ayant adressé plusieurs virements afin de continuer à apurer sa dette, qui s'élève en réalité à la somme de 36 848,36 euros.

Elle indique avoir respecté l'échéancier mis en place par le premier juge en effectuant des virements mensuels de 3 070,70 euros et qu'il reste désormais 7 mensualités afin d'apurer totalement son arriéré.

Sur ce,

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et ses effets :

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit à peine de nullité mentionner ce délai.

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et les effets du commandement, s'il n'entre pas dans les pouvoirs de la juridiction des référés de prononcer la nullité du commandement, en revanche les contestations élevées par l'intimée sur la validité du commandement peuvent faire échec en référé à la constatation de l'acquisition de la clause résolutoire si elles revêtent un caractère sérieux.

En l'espèce, le premier juge a retenu que le décompte annexé au commandement de payer, outre que ses caractères sont minuscules, est illisible et incompréhensible, ne mettant pas en avant les débits et les crédits, et n'étant pas présenté en ordre chronologique.

Au surplus a-t-il relevé, le loyer du 1er trimestre 2020 mentionné au décompte avait en réalité été payé, ce qui accentue l'absence de fiabilité dudit décompte.

A hauteur de cour, la bailleresse n'apporte pas davantage d'éclairage, notamment sur le loyer du 1er trimestre 2020 figurant indûment au décompte annexé au commandement de payer.

La cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.

La décision critiquée sera en conséquence confirmée en ce qu'au vu de l'existence d'une contestation sérieuse sur la régularité et les effets du commandement de payer, elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande d'acquisition de la clause résolutoire, ni sur les demandes qui en découlent sur l'expulsion et l'indemnité d'occupation.

Sur la provision :

Aux termes de l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, statuant en référé, peut, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

En application de ce texte, le montant de la provision qui peut être allouée en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.

Aux termes de sa note en délibéré, la bailleresse actualise l'arriéré locatif à la somme de 18 905,67 euros.

Y est joint un décompte arrêté au 3 avril 2024 inclus, mentionnant notamment au débit du compte de la locataire, en date du 1er septembre 2021, la somme de 16 054 euros au titre d'un apurement de charges pour l'année 2018, contestée par la preneuse et sur la redevabilité de laquelle le juge de première instance a considéré qu'il existait une contestation sérieuse.

Au soutien de cette contestation, la société Coming prétend que cette somme lui a été imputée sans le moindre explication ou justificatif, et que dans un litige opposant sa bailleresse à d'autres preneurs de locaux de la même galerie commerciale, la cour d'appel de Versailles, par arrêt du 17 novembre 2022, a confirmé la décision du premier juge en relevant la mauvaise foi de la société [Adresse 5] quant au calcul des charges effectué pour les années 2012 à 2015 (demandes brutales de paiement de sommes importantes sur des périodes anciennes assorties de motivations fluctuantes, application d'une nouvelle grille de répartition des tantièmes, rétention prolongée d'information et de justificatifs).

La société Tour Michelet verse quant à elle aux débats le courrier adressé le 21 octobre 2021 à la société Coming, concernant la reddition des charges de l'année 2018 ainsi que la facture d'apurement des charges 2018, le relevé des dépenses de l'année 2018, le tableau de synthèse des charges 2018 et le rapport du cabinet Brachet établi le 9 mars 2018, chargé de réaliser une répartition des charges locatives de la galerie marchande.

Ces éléments communiqués par la bailleresse établissent ainsi, avec l'évidence requise en référé, le caractère fondé de la facture établie au titre de la reddition des charges de l'année 2018 concernant la société Coming.

Les contestations de cette dernière à cet égard sont inopérantes dans la mesure où, d'une part elles sont relatives à d'autres locataires, et d'autre part et surtout, elles concernent une période antérieure à celle en cause.

Il n'y a en conséquence pas lieu de déduire la somme de 16 054 euros du décompte actualisé.

Par voie d'infirmation s'agissant du quantum, la société Coming sera condamnée à payer à la société [Adresse 5] la somme de 18 905,67 euros dont il convient de fixer le point de départ des intérêts à la date de l'assignation en justice du 12 mai 2023, les sommes figurant au commandement de payer ayant été acquittées grâce aux 3 chèques remis par la preneuse.

Sur les délais de paiement :

Le premier alinéa de l'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Il résulte du décompte actualisé produit par la bailleresse que depuis l'ordonnance dont appel, l'intimée a été en mesure de payer son loyer courant et de respecter l'échéancier de paiement de son arriéré locatif.

Dans ces conditions, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a accordé 12 mois de délai à la société Coming pour se libérer de sa dette.

Sur les demandes accessoires :

L'appelante sollicite la condamnation de l'intimée à supporter les dépens de première instance et le coût du commandement de payer, demandant l'infirmation de l'ordonnance qui a n'a pas inclus ce coût.

Compte tenu de ce que la présente action résulte essentiellement d'un retard de paiement de ses loyers par la preneuse, l'ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance, étant relevé que ceux-ci sont limitativement énumérés par l'article 695 du code de procédure civile et que le coût du commandement de payer peut éventuellement être inclus au titre des frais irrépétibles.

Par ailleurs, partie succombant pour l'essentiel en appel, la société [Adresse 5] supporter les dépens d'appel.

L'équité commande en revanche de débouter les deux parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Confirme l'ordonnance du 28 septembre 2023 sauf sur le quantum de la provision octroyée,

Statuant à nouveau du chef infirmé,

Condamne la société Coming à verser à la société [Adresse 5] la somme de 18 905,67 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2023 à titre de provision à valoir sur l'arriéré locatif arrêté au 3 avril 2024,

Dit que la société Tour Michelet supportera les dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Thomas VASSEUR, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 23/06913
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.06913 ?
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