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06/06/2024 | FRANCE | N°22/02478

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 06 juin 2024, 22/02478


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 JUIN 2024



N° RG 22/02478

N° Portalis DBV3-V-B7G-VLOR



AFFAIRE :



[H] [U]





C/

S.A.S. MONADIA













Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE

N° Section : AD

N° RG

: 20/00240



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la AARPI METIN & ASSOCIES



la SELEURL MINAULT TERIITEHAU







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JUIN 2024

N° RG 22/02478

N° Portalis DBV3-V-B7G-VLOR

AFFAIRE :

[H] [U]

C/

S.A.S. MONADIA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE

N° Section : AD

N° RG : 20/00240

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la AARPI METIN & ASSOCIES

la SELEURL MINAULT TERIITEHAU

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [H] [U]

née le 21 Janvier 1969 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me David METIN de l'AARPI METIN & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 159

APPELANTE

****************

S.A.S. MONADIA

N° SIRET : 413 46 3 8 60

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Mars 2024, devant la cour composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseillère,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB

EXPOSE DU LITIGE

Mme [H] [U] a été engagée par la société Monadia suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 mars 2007 en qualité d'assistante du service des opérations position 1.4.2, coefficient 250 avec le statut d'employée.

La salariée a fait l'objet d'un arrêt de travail pour maladie du 26 octobre 2010 au 2 février 2011 puis a repris le travail dans le cadre d'un temps partiel thérapeutique.

La salariée s'est vue attribuer par la caisse régionale d'assurance maladie d'Ile de France une pension d'invalidité de deuxième catégorie à compter du 1er février 2012.

La salariée a été, de nouveau, en arrêt de travail pour maladie du 28 janvier 2014 au 31 décembre 2015, ainsi que du 29 mai 2017 au 15 janvier 2018.

Suivant avenant à son contrat de travail du 30 avril 2019, elle a été nommée modératrice, position 1.4.2, coefficient 250, sur le site « mysaveur.com » à compter de février 2018.

La salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie du 14 janvier 2019 au 31 mars 2019.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs, conseils et des sociétés de conseils dite Syntec.

Par lettre du 30 septembre 2019, l'employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 14 octobre 2019.

Par lettre du 17 octobre 2019, l'employeur a licencié la salariée pour cause réelle et sérieuse.

Contestant son licenciement, le 27 juillet 2020 Mme [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye afin d'obtenir la condamnation de la société Monadia au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que pour perte de chance de bénéficier des avantages relatifs aux licenciements pour motif économique.

Par jugement en date du 29 juin 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a:

- dit que le licenciement de Mme [U] est fondé,

- débouté Mme [U] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté la S.A. Monadia de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à la charge de Mme [U] les dépens éventuels.

Le 1er août 2022, Mme [U] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 25 mars 2024, Mme [U] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que son licenciement était fondé,

- statuant à nouveau, juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

- en conséquence, à titre principal, écarter le plafonnement prévu par l'article L.1235-3 du code du travail en raison de son inconventionnalité, ce plafonnement violant les dispositions de l'article 24 de la charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l'OIT et le droit au procès équitable,

- condamner en conséquence la Sarl Monadia à lui verser la somme de 50 000 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- à titre subsidiaire, condamner la sarl Monadia à lui verser une somme d'un montant de 19 611 euros nets de CSG et de CRDS à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L. 1235-3 du code du travail (plafonnée),

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande tendant à voir juger que la réelle cause de son licenciement est un motif économique,

- statuant à nouveau, juger que la réelle cause son licenciement est un motif économique,

- en conséquence, condamner la Sarl Monadia à lui verser la somme de 15 000 euros au titre de la perte de chance de bénéficier des avantages relatifs aux licenciements pour motif économique,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de voir la Sarl Monadia condamnée à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuant à nouveau, condamner la Sarl Monadia à lui verser la somme de 4 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de transmission d'un certificat de travail conforme sous astreinte,

- statuant à nouveau, ordonner la transmission par la Sarl Monadia d'un certificat de travail conforme sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision,

- ordonner la transmission par la Sarl Monadia d'un bulletin de paie conforme sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision,

- infirmer le jugement en ce qu'il a laissé à sa charge les dépens éventuels et n'a pas fait droit à sa demande de condamner la Sarl Monadia aux entiers dépens y compris les éventuels frais d'exécution,

- statuant à nouveau, condamner la Sarl Monadia aux entiers dépens y compris les éventuels frais d'exécution de l'arrêt à intervenir.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 4 mars 2024, la société Monadia demande à la cour de confirmer le jugement ayant débouté Mme [U] de l'ensemble de ses demandes,

et statuant à nouveau sur l'appel formé par Mme [U], juger que le licenciement de Mme [U] repose sur des causes réelles et sérieuses, en conséquence, la débouter de l'intégralité de ses demandes en cause d'appel, la condamner reconventionnellement à régler à la société Monadia la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 26 mars 2024.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, est libellée comme suit :

« ['] le fait que nous avons été contraints de constater que vous n'avez été aucunement au rendez-vous de vos promesses et vous avez totalement manqué de professionnalisme au regard de la liberté d'organisation qui vous avait été accordée. En effet, nous avons malheureusement été contraints de constater une motivation défaillante caractérisée par un manque patent de travail régulier et de rigueur.

En effet, lors des relevés informatiques sur l'historique des validations que nous avons effectué nous avons malheureusement fait les constats suivants ' alors que la moyenne du volume des « validations » que nous étions en droit d'attendre devait être d'au moins de 40 et 70 validations:

' 20/09/2019 : 0 validation

' 13/09/2019 : 1 validation

' 30/08/2019 : 15 validations

' 23/08/2019 : 12 validations

' 12/07/2019 : 0 validation

' 5/07/2019 : 4 validations

' 28/06/2019 : 6 validations

' 21/06/2019 : 9 validations

' 14/06/2019 : 5 validations

Votre activité lors de ces journées de télétravail est donc régulièrement dérisoire voire totalement inexistante ce qui, pour un site tel que « My Saveur » est gravement préjudiciable.

Nous rappelons que parmi les tâches fondamentales qui vous ont été assignées dans le cadre de votre contrat de travail, il vous appartenait de « préparer des recettes dans le cadre des réseaux sociaux de « My Saveur ». Vous avez donc gravement manqué à votre mission fondamentale.

Pour exemple, nous avons observé qu'au mois d'août ' suite à votre retour de vacances ' vous n'aviez réalisé et posté qu'une seule de vos recettes. Le mois de septembre n'a guère été plus productif car vous n'avez réalisé et posté que 3 à 5 de vos recettes. Sur une période d'un mois c'est tout simplement incompréhensible et après analyse nous avons compris que vous laissiez le soin à vos collègues de faire le travail à votre place ce qui constitue une forme de déloyauté dans l'accomplissement de votre activité professionnelle et induit une désorganisation de l'activité.

Malheureusement, ce manque de motivation n'est pas nouveau. Je vous rappelle que nous avons dû vous changer votre poste initial en qualité de « Assistante à la direction des opération» pour celui actuel de « Modératrice » afin de répondre aux mécontentements de vos collègues de l'époque qui se plaignaient :

- Que vous étiez trop lente,

- Que vos rapports étaient truffés d'erreurs,

- Et au final, elles devaient refaire votre travail.

Vos carences sur le plan professionnel nuisent au bon fonctionnement de MONADIA et au site « My Saveur ». Ces circonstances constituent des cause réelles et sérieuses de licenciement qui nous conduisent à prononcer votre licenciement pour ces motifs. ['] »

La salariée conteste les griefs qui lui sont formulés dans la lettre de licenciement. Elle note que l'employeur ajoute dans le cadre de ses écritures un grief ne figurant pas dans la lettre, qui fixe les limites du litiges, relatif à son comportement. Elle soutient que l'employeur ne pouvait pas se prévaloir des griefs mentionnés dès lors qu'il n'avait pas fait procéder à la visite de reprise à la suite d'un long arrêt maladie et qu'en réalité, la véritable cause de son licenciement, est un motif économique.

L'employeur indique que la salariée a accompli de façon défaillante son activité professionnelle en profitant de la liberté d'organisation qui lui a été accordée notamment dans le cadre du télétravail et que les motifs reprochés son caractérisés, les tentatives d'explication de la salariée étant hors sujet, voire inexactes. Il précise que l'absence de visite médicale de reprise constitue un oubli et que l'accusation de fraude au licenciement économique est erronée.

Sur le bien-fondé du licenciement, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Aux termes de l'article L. 1232-1 du code du travail, 'tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.

Il est motivé par une cause réelle et sérieuse'.

Le juge doit, au-delà de la lettre de licenciement et de ses précisions ultérieures, rechercher la véritable cause du licenciement.

En l'espèce, la lettre de licenciement reproche, en substance, à la salariée un volume de travail dérisoire les vendredis en situation de télétravail et son manquement à son activité de préparation de recettes dans le cadre des réseaux sociaux de « My saveur ».

Sur l'absence de visite médicale de reprise, la salariée invoque le fait que l'employeur ne lui a pas fait passer de visite médicale de reprise après son arrêt maladie du 14 janvier 2019 au 31 mars 2019 et qu'il ne pouvait lui reprocher un manque d'efficacité alors que la visite de reprise n'a pas eu lieu.

L'employeur expose qu'il s'agit d'un oubli ponctuel en raison de l'absence de Mme [V] en charge du suivi administratif qui était en convalescence au moment de la reprise de la salariée et n'a pas eu la possibilité de gérer les aspects administratifs pendant un certain temps, mais qu'un suivi régulier de l'aptitude de la salariée a toujours été réalisé et qu'en tout état de cause, le médecin traitant de la salariée avait validé cette reprise comme il le faisait habituellement.

En l'espèce, il est établi que la salariée n'a pas bénéficié d'une visite de reprise après son arrêt maladie du 14 janvier 2019 au 31 mars 2019.

Cependant, l'employeur produit deux certificats médicaux des 8 juin 2016 et 5 avril 2018 du docteur [M], médecin traitant de la salariée, ayant conclu à un état de santé compatible avec une activité professionnelle ainsi que des fiches d'aptitude, attestations et avis de la médecine du travail du 7 janvier 2016, 9 juin 2016, 24 novembre 2016, 30 novembre 2017, 8 janvier 2018 montrant que l'aptitude de la salariée a fait l'objet d'un suivi régulier en dehors de cet oubli ponctuel s'expliquant par une difficulté dans l'organisation du suivi administratif de la salariée. Par conséquent, cet oubli ponctuel ne rend pas le licenciement, non fondé sur une absence de la salariée, sans cause réelle et sérieuse.

Sur la fraude invoquée au licenciement économique, la salariée indique qu'elle n'a pas été remplacée sur son poste qui a fait l'objet d'une suppression, qu'il n'y a pas eu de recrutement effectif alors que l'annonce diffusée est bien antérieure à la crise pandémique, que les compétences recherchées dans l'annonce montrent une volonté de l'employeur de réorienter son activité. Elle souligne que l'activité de la société a été réduite pour son activité liée en grande partie au site « my saveur » et que le site « my saveur » semble s'être arrêté en ce qui concerne les activités de tests et de challenges. Elle sollicite la production du registre des entrées et sorties du personnel, l'absence de production de cette pièce confirmant ses dires selon elle.

L'employeur fait valoir qu'un recrutement a été engagé dès le départ de la salariée et produit une annonce de recrutement publiée sur Pôle emploi le 12 novembre 2019, soit dans les semaines qui ont suivi le licenciement de la salariée. Il ajoute qu'il a reçu plusieurs candidatures et verse aux débats des curriculum-vitae de candidats, mais explique avoir gelé l'embauche en raison de la survenue de la crise pandémique et d'une mission de conseil en transition écologique. L'employeur produit l'attestation de M. [J], consultant en transition écologique, du 26 février 2024, confirmant avoir conseillé le report des embauches en cours dans ce contexte. Le fait que l'annonce publiée soit relative à un poste qui ait évolué, de façon relative dans certaines des missions confiées, entre dans le pouvoir de direction de l'employeur et ne permet pas de démontrer que la suppression du poste de la salariée était envisagée.

L'employeur fait état d'une progression de son chiffre d'affaires et produit l'attestation du cabinet d'expertise comptable et de commissariat aux comptes MYL montrant un chiffre d'affaires de 2,7 millions d'euros pour l'exercice du 1er avril 2018 au 31 mars 2019 s'élevant à 3,1 millions d'euros pour l'exercice du 1er avril 2019 au 31 mars 2020, soit en nette progression, et précise que le site « my saveur » n'a pas cessé son activité, le site ayant eu 657 « posts » en 2020 pour 2 310 754 personnes touchées par le site et produit un tableur excel des « posts facebook » sur ce point.

Par conséquent, aucune fraude au motif économique n'est avérée de la part de l'employeur.

Sur le volume de travail les vendredis en télétravail, l'employeur indique que la salariée devait effectuer la validation et correction de recettes et de tests de recettes et produit des relevés de statistiques de modération entre le 14 juin 2019 et le 20 septembre 2019 montrant qu'ont été réalisées entre 0 et 15 validations par la salariée par jour de télétravail. Il expose que lorsque la salariée se trouvait au bureau elle effectuait en moyenne 66 validations par jour.

La salariée fait valoir qu'aucun objectif ne lui était fixé quant à la périodicité ou au nombre de recettes à réaliser, que la société n'a pas assuré le nombre de challenges au long de l'année 2019, publiant trois fois mois de challenges qu'entre 2014 et 2018, qu'elle a validé un nombre cohérent de recettes correspondant à ce qui était attendu d'elle, que l'employeur n'a pas utilisé le décompte hebdomadaire se focalisant sur les seuls vendredis et n'a pas pris en compte les autres tâches réalisées comme la validation des tests, le travail effectué les samedis ou dimanches, les publication réalisées pendant le congé maternité de Mme [V] à compter de fin juin 2019. Elle soutient que la moyenne des validations effectuées sur les six derniers mois se situait à 49 recettes et non comme 66 comme affirmé par l'employeur.

Il ressort du dossier que l'employeur a fourni des statistiques de modération par jour, calculant une moyenne de validations au bureau hors vendredi de 66, les calculs étant étayés par des listings versés aux débats d'avril à septembre 2019. La salariée conteste cette moyenne faisant valoir que des jours fériés ou congés payés n'ont pas été décomptés, que les jours travaillés sont erronés et qu'en réalité elle effectuait 49 validations au bureau en moyenne sur la période considérée, cette moyenne sera donc retenue, à défaut de démonstration inverse de la part de l'employeur. Il en résulte cependant que le volume de travail fourni par la salariée en terme de validation les vendredis, jour de télétravail, est très faible sur la période considérée, ne dépassant pas 15 validations, soit nettement inférieur au volume de travail les jours de présence au bureau.

La salariée fait valoir qu'elle ne connaissait pas ses objectifs, cependant, comme indiqué par d'autres salariés M. [D] ou Mme [O], les objectifs en la matière sont verbaux et sont posés à la vue des résultats précédents.

La salariée indique que durant sa présence dans la société, les recettes étaient validées à un rythme normal ce qui est inopérant sur le volume de travail fourni les vendredis, le jour de télétravail.

La salariée invoque un rythme faible de challenges sur cette période, toutefois, les challenges constituent un mode d'animation du site et ne sont pas en lien avec le travail de validation de la salariée qui ne devait pas valider les recettes spécifiquement liées aux challenges mais devait valider toutes les recettes postées sur le site.

La salariée indique avoir, notamment, repris une partie des tâches de Mme [V] durant son congé maternité et qu'elle préparait régulièrement la publication des « Kantoch's » depuis son domicile. Cependant, elle ne produit aucun élément précis étayant son affirmation, l'employeur indiquant que Mme [V] n'avait pas pour taches de réaliser des recettes « Kantoch » mais de s'occuper de la production et de la programmation des jeux pour les membres et que la publication de ce type de recettes revenait à la salariée depuis qu'elle était devenue modératrice en février 2018. L'employeur produit, en outre, un historique des recettes postées en août et septembre 2019 montrant la réalisation de 4 recettes au total sur deux mois ce qui est faible.

Il s'en déduit que le grief relatif à un volume de travail insuffisant les vendredis, jour de télétravail, est avéré.

Sur l'activité de préparation de recettes dans le cadre des réseaux sociaux de « My saveur », l'employeur produit l'avenant du 30 avril 2019 du contrat de travail de la salariée lui fixant notamment comme mission les « propositions et préparations de recettes dans le cadre des réseaux sociaux de « my saveur », précise que le site avait pour objectif de publier une recette de cuisine chaque jour, s'agissant du fonctionnement structurel du site, que la salariée ayant posté 23 recettes en 2019, ses collègues étaient contraints d'effectuer le travail à sa place

La salariée expose qu'elle n'avait pas nécessairement à cuisiner des recettes mais qu'elle pouvait en proposer pour publication, que rien n'indique qu'il s'agissait d'une tâche quotidienne, que les directives n'étaient pas claires et qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir mis en ligne des recettes faites par les membres de l'équipe.

Cependant au vu de l'avenant au contrat de travail de la salariée clair quant à la mission notamment de préparation de recettes sur les réseaux sociaux de « my saveur » et du fonctionnement des réseaux sociaux de « my saveur » exigeant la publication d'une recette par jour, le volume insuffisant d'activité de préparation de recettes dans ce cadre fourni par la salariée est avéré.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le licenciement de la salariée est fondé sur une cause réelle et sérieuse, résultant d'un volume insuffisant de télétravail les vendredis et d'une activité insuffisante de préparation de recettes dans le cadre des réseaux sociaux de « My saveur ». Il convient de confirmer le jugement du conseil de prud'hommes qui a débouté la salariée de sa demande en conséquence de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la perte de chance de bénéficier des avantages relatifs aux licenciements pour motif économique

En l'espèce, aucune fraude au licenciement économique n'est avérée au vu des développements qui précèdent et des éléments portés à l'appréciation de la cour, le licenciement de la salariée étant fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Par conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de perte de chance de bénéficier des avantages relatifs au licenciement économique.

Sur les documents de fin de contrat

L'appelante succombant en ses prétentions, elle sera déboutée de sa demande de remise d'un certificat de travail et d'un bulletin de paie conformes à la présente décision, sous astreinte, le conseil de prud'hommes ayant omis de statuer sur cette prétention.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [U] succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant :

Déboute Mme [H] [U] de sa demande de de remise d'un certificat de travail et d'un bulletin de paie conformes à la présente décision, sous astreinte,

Condamne Mme [H] [U] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Mme [H] [U],

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Monadia,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/02478
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;22.02478 ?
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