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05/06/2024 | FRANCE | N°24/03227

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 05 juin 2024, 24/03227


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 50Z



Chambre civile 1-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 05 JUIN 2024



N° RG 24/03227 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WRPK



AFFAIRE :



[K] [H] [M] [Y] et de nationalité italienne

...



C/

[G] [F]

...







Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu le 30 Mai 2024 par le Président du TJ de NANTERRE

N° RG : 24/01171



Expéditions exécuto

ires

Expéditions

Copies

délivrées le : 05.06.2024

à :



Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES,



Me Oriane DONTOT, avocat au barreau de VERSAILLES,



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE CINQ JUIN DEUX M...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 50Z

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 05 JUIN 2024

N° RG 24/03227 - N° Portalis DBV3-V-B7I-WRPK

AFFAIRE :

[K] [H] [M] [Y] et de nationalité italienne

...

C/

[G] [F]

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu le 30 Mai 2024 par le Président du TJ de NANTERRE

N° RG : 24/01171

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 05.06.2024

à :

Me Mélina PEDROLETTI, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Oriane DONTOT, avocat au barreau de VERSAILLES,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE CINQ JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K] [H] [M] [Y]

né le 20 Septembre 1986 à [Localité 21] - ITALIE

de nationalité Argentine et italienne

[Adresse 24]

[Localité 21] - ITALIE

Madame [J] [A] [M] [W]

née le 02 Avril 1987

de nationalité Argentine

[Adresse 23]

[Localité 13] - ARGENTINE

Madame [C] [L] [M] [W]

née le 16 Mai 1989 à [Localité 13] - ARGENTINE

de nationalité Argentine

[Adresse 15]

[Adresse 15], Provincia de [Localité 13]

[Localité 13] - ARGENTINE

Madame [B] [M] [O]

née le 04 Avril 1996 à [Localité 13] - ARGENTINE

de nationalité Argentine

[Adresse 5]

[Localité 19] - URUGUAY

Monsieur [K] [S] [M] [N]

représenté par sa mère Madame [R] [I] [N]

né le 13 Février 2013

de nationalité Argentine

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 13] - ARGENTINE

Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 26448

Ayant pour avocats plaidants Me Gilles MOREU et Maître Lola CHUNET

APPELANTS

****************

Monsieur [G] [F]

né le 25 Octobre 1965 à [Localité 11] - ALGERIE

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240388, ayant pour avocat plaidant Me Marine LE BIHAN, du barreau de Paris

S.A.S. [9]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

N° SIRET : 442 812 301

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - N° du dossier 20240388

Ayant pour avocats plaidants Me Arthur GAULIER et Victor DE BELOT, du barreau de Paris

INTIMES

***************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 03 Juin 2024, Monsieur Thomas VASSEUR, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseillère,

Madame Marina IGELMAN, Conseillère,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI

EXPOSE DU LITIGE

Au mois de novembre 1986, le footballeur argentin [K] [M] s'est vu attribuer par le magazine France Football, la société Adidas et la FIFA le trophée dit du Ballon d'or.

Au mois de mai 2024, la société de vente volontaire [9] a annoncé la vente aux enchères de ce trophée, présenté comme appartenant désormais à M. [F] pour le 6 juin 2024.

Par actes du 21 mai 2024, les enfants de feu [K] [M], à savoir Mmes [J] [A] et [C] [L] [M], Mme [B] [M] [O] et MM. [K] [H] [M] [Y] et [K] [S] [M] [N], ce dernier étant représenté par Mme [R] [I] [N] (ci-après les consorts [M]) ont fait assigner la société [9] et M. [F] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre en demandant l'interdiction de la vente, ainsi que le séquestre de ce trophée, outre la publication de l'ordonnance à venir sur le site de vente en ligne de la société [9].

M. [F] a demandé que soient écartées certaines des pièces produites par les consorts [M] et soulevé l'irrecevabilité de leur action pour défaut de qualité à agir, en demandant à titre subsidiaire qu'il soit dit n'y avoir lieu à référé.

La société [9] a également soulevé l'irrecevabilité des demandes des consorts [M], en contestant leur qualité et leur intérêt à agir, et demandé à titre subsidiaire le rejet de leurs demandes.

Par ordonnance du 30 mai 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Nanterre a :

dit qu'il y a lieu d'écarter parmi les pièces communiquées par les consorts [M] :

la pièce n° 1 à l'exception du certificat d'hérédité du 4 mars 2021, des actes d'état civil relatifs à la naissance des requérants, de l'acte de mariage entre [K] [M] et [E] [Z] [W], de la reconnaissance de paternité de Mme [B] [M], ainsi que les pièces d'identité de Mmes [J] [A] et [C] [L] [M] ;

l'intégralité de la pièce n° 3 ;

rejeté l'exception d'irrecevabilité pour défaut de qualité ou d'intérêt à agir des demandeurs soulevée tant par M. [F] que par la société [9] ;

débouté les consorts [M] de l'ensemble de leurs demandes ;

condamné in solidum les consorts [M] à payer à M. [F] et la société [9] pour chacun la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les consorts [M] aux dépens.

Les consorts [M] ont interjeté appel de cette ordonnance le jour de son prononcé, à 14 h 43.

Par requête du même jour, les consorts [M] ont sollicité que l'affaire soit appelée à jour fixe.

Par ordonnance du même jour, le président de la chambre 1-5, agissant par délégation du premier président, a autorisé les consorts [M] à faire assigner M. [F] et la société [9] à l'audience du 3 juin 2024, à 11 heures, en indiquant que les actes d'assignation devraient être délivrés avant le 31 mai 2024, à 10 h 30.

M. [F] et la société [9] ont été assignés respectivement le 30 mai 2024 à 18 heures 05 par remise de l'acte en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire et le 31 mai 2024 à 9 heures 05 auprès d'un employé de la société déclarant être habilité à recevoir l'acte.

Dans leurs conclusions n° 2 remises le 3 juin 2024, les consorts [M] demandent à la cour de :

infirmer l'ordonnance de première instance en ce qu'elle les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes et les a condamnés au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

interdire à la société [9] et à M. [F] de procéder à la vente du trophée Ballon d'or proposé à la vente aux enchères « A testimony of football history » organisée le 6 juin 2024, et à toute vente dudit lot jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa propriété par décision exécutoire rendue au fond ;

organiser le séquestre du trophée Ballon d'Or proposé à la vente aux enchères « A testimony of football history » organisée le 6 juin 2024 par un commissaire de justice qu'il désignera aux frais avancés des demandeurs jusqu'à ce qu'il soit statué sur sa propriété par décision exécutoire rendue au fond ;

ordonner la publication de l'ordonnance devant être rendue sur le site en ligne de la société [9] dans le délai de 24 heures suivant la signification de l'ordonnance, assortie d'une astreinte provisoire de 1.000 euros par heure de retard pendant une période de 72 heures ;

condamner la société [9] à verser aux consorts [M] la somme de 3.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société [9] aux entiers dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile dont le montant sera recouvré par leur avocat ;

confirmer l'ordonnance pour le surplus.

Les consorts [M] exposent que leur père, récipiendaire du Ballon d'Or, a placé celui-ci sous coffre à la [12], à [Localité 21], ville dans laquelle ce dernier résidait mais que le 26 octobre 1989, plusieurs membres d'une organisation mafieuse se sont introduits dans la banque, masqués et lourdement armés, prenant en otage les 14 employés sur place, les forçant à ouvrir les coffres et ont ainsi volé ce trophée. Ils exposent que de nombreux articles de presse publiés à l'époque des faits ont relaté cet événement et qu'une plainte a été déposée. Les consorts [M] indiquent que c'est ainsi avec surprise qu'ils ont appris au mois de mai 2024 la vente aux enchères de ce trophée, sur la provenance duquel la société [9] se garde bien de donner des informations. Ils considèrent que M. [F], galeriste, ne pouvait pas ignorer l'origine frauduleuse de ce trophée. Ils font valoir que par lettre du 10 mai 2024, signifiée par huissier de justice, ils ont mis en demeure la société [9] de retirer le trophée de la vente et de le séquestrer dans l'attente d'un accord entre eux et le détenteur ou d'une décision de justice se prononçant sur la propriété dudit trophée. Ils exposent que l'origine de propriété du trophée est douteuse et qu'il est loisible de soupçonner à tout le moins une infraction de recel, qui a d'ailleurs fait l'objet d'une plainte le 21 mai 2024 auprès du procureur de la République près le tribunal judiciaire de Nanterre. Ils indiquent que, suivant leurs informations, une enquête aurait été ouverte, dont l'Office central de lutte contre les trafics de biens culturels serait saisi.

Les consorts [M] fondent leur action sur les articles 834 et 835 du code de procédure civile et indiquent que l'article 2276 du Code civil n'institue une présomption de propriété en faveur du possesseur d'un bien qu'à la condition que celle-ci soit paisible, non équivoque et de bonne foi. Ils considèrent que M. [F] ne peut être tenu comme un possesseur de bonne foi, d'autant qu'il reconnaît lui-même qu'il savait que le trophée avait été dérobé, ce qui résulte d'une enquête du journal France Football, publiée en ligne le 6 mai 2024, article qui relate que M. [F] a fait de longues recherches sur Internet pour retrouver l'historique du trophée.

Les consorts [M] indiquent qu'ils n'ont pas à établir devant le juge des référés les conditions précises dans lesquelles M. [F] a pu acquérir le trophée mais simplement à faire état des conditions troubles dans lesquelles ce dernier prétend avoir acquis le bien, en soulignant que M. [F] lui-même prétend avoir acheté le trophée au sein d'un lot de quincailleries dont les éléments le composant ne sont pas inventoriés, pour un prix unitaire de 1,20 euros. Les consorts [M] considèrent ainsi que M. [F] peut être considéré comme l'inventeur du trophée et que, à la différence de l'acquéreur, le voleur et l'inventeur ne peuvent se prévaloir des dispositions de l'article 2276 du Code civil. Ils ajoutent que M. [F] ne peut revendiquer une possession utile depuis 30 ans, de sorte que l'action en revendication qu'ils entendent exercer est recevable.

Les consorts [M] exposent en outre que la possession de M. [F] n'a pas été publique, dès lors que celui-ci a dissimulé le trophée pendant plusieurs années et a indiqué de lui-même n'avoir tenté de contacter la famille [M] qu'à partir de 2021, soit après la mort du footballeur.

Les consorts [M] considèrent ainsi que l'imminence de la vente et les conséquences irrémédiables de celle-ci caractérisent l'urgence requise par l'article 834 du code de procédure civile et que la vente irréversible du bien constitue un dommage imminent au sens de l'article 835 du même code, de sorte qu'il convient d'interdire la vente du trophée et d'en organiser le séquestre judiciaire.

Les consorts [M] exposent que s'agissant de la condition tenant à l'existence d'un différend, au sens de l'article 834 du code de procédure civile, ils ne sont pas tenus de démontrer les chances de succès de l'action qu'ils envisagent et ils font valoir qu'une plainte a été déposée le 21 mai 2024, à la suite de laquelle une enquête pénale a été ouverte pour recel aggravé et tromperie, ce seul fait étant constitutif d'un différend sérieux.

Ils ajoutent que l'appartenance du Ballon d'or à [K] [M] n'est pas contestable, cette attribution ne pouvant pas s'assimiler à une mise à disposition temporaire, comme c'est le cas pour la coupe du monde de football qui reste quant à elle la propriété de la FIFA : le Ballon d'or a été remis à [K] [M] par le magazine France Football, la société Adidas et la FIFA lors d'une cérémonie. Ils ajoutent également, en réponse au moyen de M. [F], que le vol du Ballon d'or le 26 octobre 1989 est un fait avéré, qui a été largement relayé par les médias de l'époque ainsi qu'en 2011 et que l'ex-épouse de [K] [M], Mme [E] [W], ainsi que l'avocate italienne de celle-ci, Me [D] [P], en a attesté.

Ces derniers développements figurent dans les conclusions n° 2 des consorts [M], qui renvoient à 16 pièces, mais pas dans leurs premières conclusions, qui ne renvoient quant à elles qu'à 10 pièces, cette indication étant apportée en raison de la contestation par la société [9] de la recevabilité des conclusions n° 2 des appelants. La liste des prétentions demeure pour sa part inchangée du premier jeu de conclusions au second.

M. [F], aux termes de ses conclusions remises le 3 juin 2024, demande à la cour de :

confirmer l'ordonnance prononcée le 30 mai 2024 par le président du tribunal judiciaire de Nanterre en ce qu'elle a :

dit qu'il y a lieu d'écarter parmi les pièces communiquées par les consorts [M] :

la pièce n° 1 à l'exception du certificat d'hérédité du 4 mars 2021, des actes d'état civil relatif à la naissance des requérants, de l'acte de mariage entre [K] [M] et [E] [Z] [W], de la reconnaissance de paternité de Mme [B] [M], ainsi que les pièces d'identité de Mmes [J] [A] et [C] [L] [M] ;

l'intégralité de la pièce n° 3 ;

débouté les consorts [M] de l'ensemble de leurs demandes ;

débouté les consorts [M] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

rappelé que la décision est exécutoire par provision ;

infirmer l'ordonnance prononcée le 30 mai 2024 par le président du tribunal judiciaire de Nanterre en ce qu'elle a condamné in solidum les consorts [M] à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

condamner in solidum les consorts [M] à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses demandes, M. [F] indique qu'il était le gérant et associé de la société ARTS Galerie [F], qui avait son siège social à [Localité 22] et pour activité principale la commercialisation d'objets d'art puis, qu'après la liquidation de cette société, il a repris une activité de brocanteur en tant que auto-entrepreneur à [Localité 22]. Il expose être de nouveau sans-emploi mais n'avoir jamais cessé de chiner et de fréquenter les brocantes. Il expose qu'en janvier 2016, il s'est rendu à l'hôtel [16] de [Localité 20] en son site appelé [17], situé dans le [Localité 4] et dans lequel se déroulaient les ventes courantes, non cataloguées, de mobiliers et d'objets de peu de valeur. Ayant été déclaré adjudicataire de huit lots comprenant plusieurs centaines d'objets divers, pour un prix total hors frais de 500 euros, il a remarqué, quelques mois après cette acquisition, ce qui lui semblait alors être de vulgaires copies de trophées célèbres. Il indique qu'un expert en articles de sport au sein de la maison [9], s'est montré le premier catégorique quant à l'origine du Ballon d'or. M. [F] indique alors avoir pris attache avec le conseil de la famille [M] afin de lui proposer de vendre le Ballon d'or et d'en partager les fruits, l'informant qu'à défaut, il agirait en se considérant libéré de toute contrainte. Il expose que le conseil de la famille [M] ne l'a alors pas pris au sérieux et que c'est dans ce contexte qu'il a mandaté la maison de vente [9] pour vendre le trophée aux enchères publiques.

M. [F] indique que les appelants ne peuvent pas se prévaloir d'un dommage imminent dès lors qu'il détient un titre et possède le Ballon d'or en toute bonne foi depuis le 28 janvier 2016. Il considère que si les consorts [M] envisagent un jour de revendiquer le Ballon d'or, ils pourront le faire entre les mains du futur adjudicataire dont la société [9] communiquera le nom et les coordonnées à première demande. Il expose qu'en tout état de cause, la vente du 6 juin 2024 a été reportée et que par conséquent la cour ne saurait retenir l'existence d'un dommage imminent justifiant le séquestre du Ballon d'or.

M. [F] considère que les consorts [M] ne peuvent davantage alléguer un différend dès lors que celui-ci ne revêt aucun caractère sérieux et a été créé artificiellement par eux. Il indique que le Ballon d'or se trouve actuellement en France et que, quand bien même il aurait été volé en Italie, toute revendication du bien est soumise au droit français. Il expose que les consorts [M] ne justifient pas d'un titre de propriété sur le Ballon d'or et qu'ils se contentent de coupures de presse et d'un extrait de biographie. S'il est bien certain que [K] [M] a été le récipiendaire du Ballon d'or, rien ne prouve en revanche qu'il en a été le donataire, l'un n'impliquant pas l'autre.

M. [F] expose également que les consorts [M] ne démontrent pas que le Ballon d'or aurait été placé dans un coffre de banque ni qu'il aurait été volé et que s'ils prétendent qu'une plainte a été déposée et qu'une enquête a eu lieu en 1989, ils ne versent aucun élément à cet égard.

À l'inverse des consorts [M], M. [F] indique disposer d'un titre de propriété, dès lors que l'adjudication opère transfert de propriété. Il expose également qu'il en est le possesseur de bonne foi et que le délai de trois ans prévus à l'article 2276, alinéa 2, du Code civil est un délai préfix qui commence à courir du jour de la perte ou du vol. En tout état de cause, étant un possesseur de bonne foi, M. [F] indique que sa possession vaut titre de propriété et que les consorts [M] ne peuvent plus revendiquer le Ballon d'or entre ses mains.

M. [F] expose que l'adjudicataire, qui ne connaît pas l'identité du vendeur, n'est pas en mesure de vérifier l'origine du bien et donc la régularité de sa possession par le vendeur, de sorte qu'il ne pouvait pas imaginer que le vendeur du bien de ce qui allait se révéler être le Ballon d'or ne puisse en être le légitime propriétaire.

M. [F] expose qu'il ignorait avoir acquis le Ballon d'or lors de l'adjudication et qu'il a d'ailleurs rencontré de grandes difficultés à le faire authentifier. Il ajoute que sa possession est publique, dès lors qu'il s'est ouvert auprès de nombreux interlocuteurs de ce qu'il était en quête de faire authentifier le trophée. Sa bonne foi et sa possession non viciée sont ainsi, selon lui, parfaitement établies.

M. [F] indique que sa bonne foi est exclusive de tout recel et que le Ballon d'or ne peut revêtir la qualification juridique de trésor, un trésor devant, selon l'article 716, alinéa 2, du Code civil être une chose cachée enfouie et qui a été découverte par le pur effet du hasard. Au demeurant, s'il s'agissait d'un trésor, il conviendrait, en application du premier alinéa de l'article précité, que celui-ci ait été trouvé dans le fonds des consorts [M] pour voir s'appliquer cette disposition, ce qui n'est pas le cas.

Aux termes de ses conclusions remises le 3 juin 2024, la société [9] demande à la cour de :

à titre liminaire, rejeter les conclusions signifiées le 3 juin par les appelants et les pièces 11 à 16 communiquées le même jour ;

Sur le fond,

déclarer mal fondés les appelants en leur appel interjeté à l'encontre de l'ordonnance de référé rendue le 30 mai 2024 par le président du tribunal judiciaire de Nanterre (n° RG 24/01171) ;

déclarer en revanche la société [9] bien fondée en son appel incident ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 30 mai 2024 en ce qu'elle rejeté l'exception d'irrecevabilité pour défaut de qualité et intérêt à agir des demandeurs soulevée tant par M. [F] que par la société [9] ;

Statuant à nouveau de ce chef :

déclarer irrecevables les consorts [M] pour défaut d'intérêt à agir ;

Pour le surplus :

confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a :

écarté parmi les pièces communiquées par les consorts [M] :

la pièce n° 1 à l'exception du certificat d'hérédité du 4 mars 2021, des actes d'état civil relatif à la naissance des requérants, de l'acte de mariage entre [K] [M] et [E] [Z] [W], de la reconnaissance de paternité de Mme [B] [M], ainsi que les pièces d'identité de Mmes [J] [A] et [C] [L] [M] ;

l'intégralité de la pièce n° 3 ;

débouté les consorts [M] de l'ensemble de leurs demandes ;

condamné in solidum les consorts [M] au paiement à la société [9] de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné in solidum les consorts [M] au paiement à M. [F] de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté des consorts [M] de leurs demandes de paiement émises de ce chef ;

condamné les consorts [M] au paiement des dépens ;

En tout état de cause et y ajoutant,

condamner in solidum les consorts [M] à verser à la société [9] la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société [9] expose en premier lieu qu'elle a décidé, le dimanche 2 juin 2024, de reporter la vente initialement prévue au jeudi 6 juin. Elle indique que cette vente constitue une opération cruciale pour elle, alors qu'elle travaille sur ces enchères depuis plusieurs mois, les travaux d'expertise ayant été longs et coûteux et d'importants fonds ayant été nécessaires pour l'organisation de cette vente ainsi que sa promotion, laquelle a mobilisé trois sociétés de relations avec la presse afin de faire de cette vente un événement médiatique mondial. Elle considére à cet égard que le climat de polémique et les incertitudes qui entourent la vente ne lui permettent plus d'assurer correctement son rôle de tiers de confiance. Elle indique ainsi que la vente est reportée sine die.

La société [9] expose que M. [F] est devenu propriétaire de ce trophée lors d'une vente aux enchères publiques du 28 janvier 2016 organisée par la maison Tessier Sarrou & Associés, à [16] Nord, en précisant que cet espace a la particularité d'organiser des ventes aux enchères courantes, avec une courte exposition de quelques heures avant la vente, sans liste ou catalogue établi au préalable.

La société [9] indique que la thèse selon laquelle le Ballon d'or aurait été volé repose sur les déclarations d'un chef de clan mafieux napolitain, thèse qui apparaît être fantaisiste puisque le Ballon d'or, composé de laiton, ne pouvait pas être fondu en lingots. Elle ajoute qu'aucun élément ne permet d'établir que le Ballon d'or aurait été réellement importé en Italie puis placé dans le coffre de la banque de la future épouse de [K] [M]. Selon la société [9], les articles de la presse française qui mentionnent de manière contradictoire un vol dans une banque ou au domicile napolitain de [K] [M], produits par les appelants, ne sont que l'écho de cette thèse manifestement mensongère et qui avait pour seul but d'alimenter la légende de [K] [M]. La société [9] expose qu'un « soulier d'or » a été retrouvé dans le même lot acquis par M. [F] le 28 janvier 2016 et qu'après quelques investigations, il est apparu qu'un soulier d'or avait été remis lors de la même soirée au [18] en 1986 au joueur néerlandais [X] qui, interrogé à ce sujet, avait indiqué qu'il s'agissait probablement de son trophée. Ainsi, pour que les deux objets, remis lors de la même soirée, figurent dans la même caisse de trophées vendus en lot dans une vente aux enchères courantes 30 ans plus tard, à 4 km de distance du [18], il est très probable que les deux n'avaient jamais quitté la ville de [Localité 22].

La société [9] indique que M. [F], après le décès de [K] [M] le 25 novembre 2020, a contacté l'avocat de de ce dernier afin de lui faire part de son acquisition et lui proposer un partage des fruits de la vente du Ballon d'or avec les ayants droits du joueur, en vain. Elle ajoute que M. [F] avait par ailleurs mis aux enchères le Ballon d'or sur le site eBay et qu'il avait également rendu public le fait qu'il en était devenu propriétaire dans un article du journal L'indépendant de l'Yonne. En dépit de toutes ces démarches, l'entourage de [K] [M] ne s'était jamais manifesté à cette époque.

La société [9] indique que la base de données d'Interpol « The Art Loss Register » qui est la plus grande base de données informatiques du monde en matière d''uvres d'art volées, a indiqué que cet article n'avait pas été porté à sa connaissance comme ayant été volé ou manquant. Elle ajoute qu'aucune plainte pour vol n'avait été déposée et qu'aucune procédure n'avait été engagée à ce sujet par quiconque ni en France ni en Italie.

La société [9] soulève en premier lieu l'irrecevabilité de la demande formée par les consorts [M] qui ne justifient pas de ce que le Ballon d'or faisait partie du patrimoine de [K] [M] au moment de son décès.

La société [9] expose que les requérants en première instance ont versé aux débats 89 pages de pièces dont 70 étaient en langue étrangère. Elle ajoute que la production de pièces consistant uniquement en des articles de presse ne peut être suffisante pour justifier de leurs prétentions. Elle expose en outre que la tardiveté de la plainte des consorts [M], déposée seulement le 21 mai 2024, induit que ceux-ci n'avaient jamais mis en 'uvre la moindre diligence depuis 35 ans en vue de recouvrer le Ballon d'or.

La société [9] indique qu'à l'inverse, la propriété de M. [F] sur le Ballon d'or est incontestable, dès lors que celui-ci bénéficie des dispositions de l'article 2276 du Code civil, étant entré de bonne foi en possession de ce trophée, pour l'avoir acquis lors d'une vente aux enchères publiques et courantes. Elle ajoute que l'action en revendication est en tout état de cause largement prescrite et que le Ballon d'or ne correspond pas à un trésor, au sens de l'article 716 du Code civil puisqu'il ne s'agit pas d'une chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété et qui serait découverte par le pur effet du hasard.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rejet des dernières conclusions des consorts [M] :

Aux termes de l'article 15 du code de procédure civile, les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense.

La société [9] a été destinataire de l'assignation à jour fixe, à laquelle avaient été jointes les premières conclusions des consorts [M] par acte remis le 31 mai 2024, à 9h15.

À ces premières conclusions des consorts [M] était annexé un bordereau de 10 pièces. Ces mêmes conclusions ont été notifiées au conseil de la société [9] le 31 mai également, par RPVA.

Le lundi 3 juin 2024, le conseil des consorts [M] a remis par RPVA de nouvelles conclusions avec de nouveaux développements et un bordereau renvoyant à cinq nouvelles pièces, numérotées de 11 à 16.

Ces pièces sont respectivement une attestation de Mme [E] [W], trois articles de journaux (La Repubblica, le Corriere della Sera et Il Mattino), une attestation d'une avocate italienne, Me [D] ainsi qu'un échange de courriels intervenu le 31 mai 2024 à 16 h 56 entre l'avocat des consorts [M] et le procureur de la République adjoint près le tribunal judiciaire de Nanterre.

L'envoi de ces nouvelles pièces le jour même de l'audience, qui a été fixée à 11 heures du matin, et qui comprend notamment des articles de journaux anciens ou une attestation d'une avocate qui aurait pu être demandée bien auparavant et qui est elle-même en tout état de cause datée du 31 mai 2024 procède d'une méconnaissance du principe de la contradiction en ce que ces éléments, au moins pour certains d'entre eux, auraient pu être collectés dès avant l'envoi des premières conclusions, intervenu le vendredi 31 mai 2024. Leur remise aux intimés le jour même de l'audience, qui s'est tenue le matin à 11 heures, n'a pas mis ces derniers en mesure de pouvoir y répondre utilement.

Aussi convient-il de déclarer irrecevables les conclusions n° 2 remises par les consorts [M] ainsi que les pièces numérotées de 11 à 16 visées dans le bordereau qui y est annexé et de se baser sur les conclusions qui étaient jointes à la requête déposée par les consorts [M] pour être autorisés à assigner à jour fixe.

Sur l'intérêt à agir des consorts [M] :

L'article 31 du code de procédure civile dispose que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

Il n'est contesté par aucune des parties que les cinq consorts [M] sont, ainsi que l'a d'ailleurs précisément détaillé le juge de première instance, les enfants de [K] [M] et qu'ils ont ainsi vocation à en être les héritiers.

Il est non moins certain que le trophée du Ballon d'or a bien été, lors de sa remise, intégré au patrimoine de [K] [M].

Le point de savoir si ce trophée figurait encore dans le patrimoine de [K] [M] au moment de son décès est une question contestée, mais qui n'a en tout état de cause pas lieu d'être tranchée dans le cadre de la présente instance en référé, étant observé au surplus que les indications de la société [9] tenant à ce que « les allégations de vol sont (...) contredites par les rumeurs selon lesquelles le trophée aurait été échangé par [K] [M] contre de la drogue ou perdu lors d'un tournoi de poker » ne procèdent elles-mêmes que de spéculations qui ne sont étayées par aucune pièce probante.

Aussi convient-il de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société [9] tenant au défaut d'intérêt à agir.

Sur la demande d'interdiction de la vente du Ballon d'or :

L'article 834 du code de procédure civile prévoit que dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'article suivant prévoit en son premier alinéa que ce même juge peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Par ailleurs, l'article 2276 du Code civil dispose : « En fait de meubles, la possession vaut titre.

Néanmoins, celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la revendiquer pendant trois ans à compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve ; sauf à celui-ci son recours contre celui duquel il la tient. »

Il est avéré que la propriété du trophée fait l'objet d'un différend, au sens de l'article 834 du code de procédure civile, entre les consorts [M] et M. [F]. Il est non moins certain qu'il n'incombe pas au juge des référés de trancher la question de la propriété de ce bien, qu'il s'agisse de présager du sort d'une éventuelle action en revendication des consorts [M] ou qu'il s'agisse de reconnaître que M. [F] serait un possesseur de bonne foi et, comme tel, propriétaire du trophée par application de l'article 2279 du Code civil.

À cet égard, il convient de relever que contrairement à ce qu'indiquent la société [9] et M. [F], le bordereau d'achat que ce dernier produit, en date du 28 janvier 2016, et par lequel il est indiqué qu'il a acquis auprès de la société de vente volontaire Tessier Sarrou & Associés divers éléments ne caractérise aucunement le fait qu'il ait acquis le Ballon d'or à cette occasion : ce bordereau d'achat évoque pêle-mêle l'acquisition de différents lots, parmi lesquels quatre lots désignés respectivement comme étant « 3 caisses de cuivres divers, trophées et divers », « Caisse de trophées, coupes », « Caisse de trophées » et « 2 caisses de cuivres » ; rien ne permet de retenir que le trophée du Ballon d'or figurait dans l'un de ces lots.

La possession de bonne foi elle-même ne relève pas de l'évidence requise en matière de référé alors que M. [F], dans un courriel du 29 décembre 2020 (qu'il produit lui-même en pièce n° 11), évoquait « un Ballon d'or adidas france football 1986 celui-là même qui fut remis à Mr [K] [H] [M] selon le corriere dela aurait été cambriolé dans une banque Italienne par la carmorra et fondu » (la structure de la phrase et l'orthographe sont conservés tels quels). Le possible aspect douteux de cette acquisition résulte également de la pièce n° 12 que M. [F] produit lui-même, qui consiste en un courriel du 30 avril 2021 émanant du représentant d'une société Catawiki à laquelle M. [F] s'était adressé, courriel par lequel ledit représentant lui indique n'avoir pu vérifier l'authenticité complète et la provenance de l'article avec les informations qui lui étaient fournies. De même, l'article du journal L'Indépendant de l'Yonne, que M. [F] produit également, évoque l'hypothèse selon laquelle le trophée aurait été volé par une bande mafieuse italienne et plus encore cet article indique lui-même que [K] [M] « semblait disposé à récompenser de 15 millions de livres (8000 euros) quiconque lui ramenait son trophée. » Ainsi, il résulte des propres pièces de M. [F] que le trophée en question est à tout le moins susceptible d'être entré dans le patrimoine de [K] [M] et d'en être sorti sans son consentement, par l'effet d'un vol émanant d'une organisation criminelle.

L'ensemble des pièces qui viennent d'être citées émanent de M. [F] lui-même, de sorte que l'acquisition de ce bien, qu'elle soit le fait de l'achat de lots auprès de la maison Tessier Sarrou & Associés ou qu'elle soit le fait de sa possession de bonne foi, est à tout le moins sujette à une contestation sérieuse.

La très brève échéance à laquelle la vente aux enchères a été initialement envisagée et l'effet irrémédiable de la vente qui pourrait en résulter caractérisent l'urgence, au sens de l'article 834 déjà évoqué. L'indication, nouvelle en cause d'appel, de la société [9] selon laquelle il a été décidé de reporter la vente en raison de ce que cette partie indique être le climat polémique qui l'entoure n'est pas de nature à faire disparaître l'urgence qui s'attache à la demande des consorts [M] : en effet, la société [9] n'a aucunement indiqué que ce report serait calé sur le calendrier de l'enquête pénale en cours ou d'une éventuelle action en revendication qui serait formée par les consorts [M]. Ainsi, la déprogrammation de la vente initialement prévue au lendemain du prononcé du présent arrêt peut n'être que temporaire et les consorts [M] ne disposent d'aucune garantie de ce que le bien ne sera pas remis prochainement à la vente, le simple report, que la maison [9] indique être sine die, n'excluant aucunement la remise aux enchères prochaine de ce lot.

En conséquence, il convient, en infirmant partiellement l'ordonnance entreprise, d'accueillir la demande des consorts [M] tendant à l'interdiction de la vente du trophée, dans l'attente de l'issue du différend opposant ces derniers à M. [F].

Cette mesure étant justifiée par l'existence d'un différend, son maintien sera conditionné à l'introduction, par les consorts [M] et dans le délai de trois mois à compter du prononcé du présent arrêt, d'une action au fond devant un tribunal judiciaire français afin de revendiquer le bien. A défaut, la mesure d'interdiction sera caduque.

Surabondamment, ces mesures d'interdiction et de séquestre ne se justifient pas seulement par l'urgence et l'existence d'un différend, tels que prévus par l'article 834 précité : il s'agit également de mesures conservatoires destinées à prévenir le dommage imminent qui tient à la vente de ce trophée revendiqué par les consorts [M]. Ainsi, ces mesures procèdent également de la mise en oeuvre de l'article 835 du même code.

Sur la demande de séquestre du Ballon d'or :

Au titre des mesures que justifie l'existence de ce différend, il convient également, afin d'éviter tout risque de nouvelle disparition du trophée, d'ordonner le séquestre de celui-ci, aux frais avancés des consorts [M], demandeurs à cette mesure.

En effet, si la société [9] a accepté de reporter la vente aux enchères qui était initialement prévue pour le 6 juin 2024, elle n'a cependant pris aucun engagement quant à la date à laquelle elle serait susceptible de remettre le bien en vente.

Dès lors, le séquestre judiciaire est la seule mesure qui permet de préserver à la fois les intérêts des consorts [M], qui sont fondés à vouloir se prémunir d'une nouvelle disparition du bien, et de M. [F], la présente instance n'étant pas de nature à permettre de statuer sur son éventuel droit de propriété sur ce bien.

Il convient de confier la charge de celui-ci à la société de commissaires de justice Alliance Juris, désignée en qualité de séquestre judiciaire, comme telle soumise aux dispositions des articles 1961 à 1963 du code civil.

A l'instar de ce qui vient d'être indiqué s'agissant de la mesure d'interdiction de la vente, cette mesure de séquestre ne sera maintenue que pour autant que les consorts [M] auront introduit, dans le délai de trois mois à compter du prononcé du présent arrêt, une action au fond devant un tribunal judiciaire français afin de revendiquer le bien. A défaut, la mesure de séquestre sera caduque.

Il convient de rappeler que la société Alliance Juris, désignée en tant que séquestre judiciaire, a de ce fait la qualité d'auxiliaire de justice au sens de l'article 719 du code de procédure civile. Dès lors, les règles relatives à la taxe posées aux articles 704 à 718 du même code doivent être appliquées (Civ. 2ème, 3 février 1983, Bull. II n° 32, pourvoi n° 81-16.758) pour sa demande de rémunération.

En tout état de cause, il demeure loisible aux consorts [M] et à M. [F] de convenir d'une mainlevée de ces mesures d'interdiction et de séquestre indépendamment même de l'existence d'une action au fond sur la propriété du trophée. De même, un accord au fond quant à la propriété du trophée peut lui-même se substituer à l'exigence précitée d'une instance au fond.

Sur la demande de publication de la présente décision :

Les consorts [M] ne justifient ni de la raison de publier la présente décision sur le site internet de la société [9] ni de ce que leur apporterait une telle mesure. Au demeurant, ils ne développent aucun moyen à ce titre, se bornant à faire état de cette demande dans la partie de leur discussion relative aux moyens, sans l'étayer d'une quelconque manière. Aussi n'y a-t-il pas lieu de faire droit à leur demande formée de ce chef.

Sur les mesures accessoires :

Ainsi qu'il vient d'être indiqué notamment au titre du dernier chef de demande, chacune des parties succombe partiellement en ses demandes. Aussi convient-il de dire que les dépens qu'elles ont chacune exposés, tant à l'occasion de la première instance que de l'appel, resteront à leur charge respective.

Pour la même raison, il convient de débouter chacune des parties des demandes qu'elles forment au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les conclusions n° 2 remises par les consorts [M] ainsi que les pièces numérotées de 11 à 16 visées dans le bordereau qui est annexé ;

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société [9] tenant au défaut d'intérêt à agir des consorts [M] ;

Infirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a :

dit qu'il y a lieu à écarter parmi les pièces communiquées par les consorts [M] :

la pièce n° 1 à l'exception du certificat d'hérédité du 4 mars 2021, des actes d'état civil relatif à la naissance des requérants, de l'acte de mariage entre [K] [M] et [E] [Z] [W], de la reconnaissance de paternité de Mme [B] [M], ainsi que les pièces d'identité de Mmes [J] [A] et [C] [L] [M] ;

l'intégralité de la pièce n° 3 ;

rejeté l'exception d'irrecevabilité pour défaut de qualité ou d'intérêt à agir des demandeurs soulevée tant par M. [F] que par la société [9] ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Interdit à la société [9] de procéder à la vente du Ballon d'or qui avait été remis à [K] [M] ;

Ordonne le séquestre de ce trophée entre les mains de la société de commissaires de justice Alliance Juris, [Adresse 6], téléphone [XXXXXXXX01], courriel [Courriel 14] , cette société étant en charge du transport du bien du lieu où il se trouve actuellement jusqu'au lieu où elle entend le séquestrer ;

Dit que ces mesures d'interdiction et de séquestre seront maintenues que jusqu'à ce qu'il soit statué sur la propriété de ce trophée par une décision rendue au fond ou par un accord entre les parties, les consorts [M] disposant d'un délai de trois mois à compter du prononcé du présent arrêt pour saisir une juridiction française au fond de ce litige, sous peine de caducité de ces mesures ;

Condamne les consorts [M] à verser à la société Alliance Juris la somme de 3.000 euros en avance des frais de séquestre ;

Rappelle que la rémunération de la société Alliance Juris pour sa mission de séquestre judiciaire relève de la demande relative aux frais, émoluments et débours non compris dans les dépens, telle que prévue aux articles 719 et suivants du code de procédure civile ;

Dit que le greffe adressera copie du présent arrêt à la société Alliance Juris ;

Déboute les consorts [M] de leur demande de publication de la présente ordonnance ;

Dit que les parties conserveront chacune la charge des dépens de première instance et d'appel qu'elles ont respectivement exposés ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Thomas VASSEUR, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 24/03227
Date de la décision : 05/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-05;24.03227 ?
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