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16/05/2024 | FRANCE | N°23/06631

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 16 mai 2024, 23/06631


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 70O



Chambre civile 1-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 MAI 2024



N° RG 23/06631 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WC73



AFFAIRE :



[H] [V] Gérante-Associée de la SCI [H] PARC LOISIR

...



C/

Commune [Localité 19]









Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Septembre 2023 par le Président du TJ de VERSAILLES

N° RG : 23/01040

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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16.05.2024

à :



Me Julie GOURION-RICHARD, avocat au barreau de VERSAILLES (51)



Me Mathias CASTERA, avocat au barreau de VERSAILLES







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 70O

Chambre civile 1-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 MAI 2024

N° RG 23/06631 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WC73

AFFAIRE :

[H] [V] Gérante-Associée de la SCI [H] PARC LOISIR

...

C/

Commune [Localité 19]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Septembre 2023 par le Président du TJ de VERSAILLES

N° RG : 23/01040

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16.05.2024

à :

Me Julie GOURION-RICHARD, avocat au barreau de VERSAILLES (51)

Me Mathias CASTERA, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [H] [V]

née le 03 Avril 1988 à [Localité 18]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 9]

Monsieur [G] [L] Associé de la SCI [H] PARC LOISIR

né le 27 Septembre 1984 à [Localité 17] (17)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 9]

S.C.I. [H] PARC LOISIR

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité.

[Adresse 1]

[Localité 10]

Représentant : Me Julie GOURION-RICHARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 51 - N° du dossier 2231396

APPELANTS

****************

Commune [Localité 19]

représentée par son Maire en exercice, Monsieur [W] [U]

[Adresse 2]

[Localité 19]

Représentant : Me Mathias CASTERA, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES - N° du dossier C230024

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 25 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI,

Et en présence de Madame Caroline TABOUROT, conseiller en preaffectation

EXPOSE DU LITIGE

Le 11 octobre 2005, M. [B] [T] et Mme [O] [T] ont acquis un centre équestre et un chalet d'habitation situés [Adresse 15] à [Localité 19] (Yvelines) et implantés sur un terrain de 3 hectares, composé de parcelles cadastrées à l'origine ZA[Cadastre 13], divisées ultérieurement en ZA[Cadastre 4], ZA[Cadastre 5], ZA[Cadastre 14], A[Cadastre 7] et A[Cadastre 8].

Ils ont acquis ultérieurement une parcelle A[Cadastre 11] en avril 2015.

Par acte notarié en date du 7 janvier 2022, la société civile immobilière [H] Parc Loisir, représentée par ses deux associés, M. [G] [L] et Mme [H] [V], a acquis la propriété de ces parcelles.

Affirmant que M. [L] et Mme [V] avaient entrepris des travaux en vue d'aménager une vaste aire d'accueil pour caravanes sur leur terrain, par actes du 13 juillet 2023, la commune de [Localité 19] a fait assigner en référé la société [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] aux fins d'obtenir principalement, sur le fondement de l'existence d'un trouble manifestement illicite du fait des travaux réalisés, l'injonction de cesser les travaux et démolir, dépolluer le terrain et retirer la clôture réalisée.

Par ordonnance réputée contradictoire rendue le 7 septembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Versailles a :

- déclaré recevable la demande de la commune de [Localité 19],

- rejeté la demande aux fins de voir écartées des débats les pièces n° 19, 31, 64 et 65 de la demanderesse,

- constaté que :

- la construction de la troisième partie de l'atelier postérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14], et d'une extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] ainsi que l'aménagement d'un logement en leur sein,

- l'aménagement d'une aire d'accueil pour caravanes et la persistance de la présence de déchets compactés,

- la pose d'une clôture autour du terrain,

réalisés sans autorisation sur le terrain de l'ancien centre équestre, sis [Adresse 15] à [Localité 19] et composé des parcelles ZA[Cadastre 14], ZA[Cadastre 12], A[Cadastre 11], A[Cadastre 7] et A[Cadastre 8] sont constitutifs d'un trouble manifestement illicite,

- enjoint à la société [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] de :

- démolir la troisième partie de l'atelier situé sur la parcelle ZA[Cadastre 14], l'extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] et de supprimer le logement aménagé en leur sein,

- procéder à la dépollution du terrain en retirant les déchets restant enfouis,

- supprimer tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes,

- retirer les caravanes installées sur le terrain,

- retirer la clôture installée autour du terrain,

- dit que la démolition de l'atelier, la suppression du logement aménagé dans les écuries, la dépollution du terrain et le retrait de la clôture interviendront dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard passé ce délai pendant une période de 6 mois,

- condamné les défendeurs in solidum à payer à la commune de [Localité 19] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les défendeurs aux entiers dépens de l'instance,

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 22 septembre 2023, la société [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] ont interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Dans leurs dernières conclusions déposées le 2 novembre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, Mme [V], M. [L] et la société [H] Parc Loisir demandent à la cour de :

'- déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la Sci [H] Parc Loisir, M. [G] [L] et Mme [H] [V].

y faisant droit,

- réformer l'ordonnance de référé rendue le 7 septembre 2023 par le président du tribunal judiciaire de Versailles, en ce qu'elle a :

- déclaré recevable la demande de la commune de [Localité 19],

- rejeté la demande aux fins de voir écartées des débats les pièces n° 19, 31, 64 et 65 de la demanderesse,

- constaté que :

- la construction de la troisième partie de l'atelier postérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14], et d'une extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] ainsi que l'aménagement d'un logement en leur sein, - l'aménagement d'une aire d'accueil pour caravanes et la persistance de la présence de déchets compactés,

- la pose d'une clôture autour du terrain,

réalisés sans autorisation sur le terrain de l'ancien centre équestre, sis [Adresse 15] à [Localité 19] et composé des parcelles ZA[Cadastre 14], ZA[Cadastre 5], A[Cadastre 11], A[Cadastre 7] et A[Cadastre 8] sont constitutifs d'un trouble manifestement illicite,

- enjoint à la sci [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] de :

- démolir la troisième partie de l'atelier situé sur la parcelle ZA[Cadastre 14], l'extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] et de supprimer le logement aménagé en leur sein,

- procéder à la dépollution du terrain en retirant les déchets restant enfouis,

- supprimer tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes,

- retirer les caravanes installées sur le terrain,

- retirer la clôture installée autour du terrain,

- dit que la démolition de l'atelier, la suppression du logement aménagé dans les écuries, la dépollution du terrain et le retrait de la clôture interviendront dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard passé ce délai pendant une période de 6 mois,

- condamné les défendeurs in solidum à payer à la commune de [Localité 19] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les défendeurs aux entiers dépens de l'instance,

- rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

en conséquence,

- déclarer irrecevables, la demande de première instance de la commune de [Localité 19], ainsi que toutes ses autres demandes, fins et conclusions.

- débouter la commune de [Localité 19], en toutes ses autres demandes, fins et conclusions, celles-ci étant infondées.

- écarter des débats le rapport de l'inspection des installations classées, réalisée le 11 mai 2022 (pièce n° 19 annexée à l'assignation), le procès-verbal d'infraction daté du 19 octobre 2022, réalisé par M. [E] [P], garde-champêtre, chef principal, agissant en tant qu'agent de l'état assermenté et commissionné par le maire de [Localité 19] (pièce n° 31 annexée à l'assignation), et le procès-verbal de constat dressé les 28 et 30 juillet 2023 (pièces n° 64 et 65 annexées à l'assignation).

- condamner la commune de [Localité 19] à une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la commune de [Localité 19] aux entiers dépens.

- dire qu'ils pourront être directement recouvrés par [T] Julie Gourion-Richard, avocat au barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. '

Dans ses dernières conclusions déposées le 1er décembre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la commune de [Localité 19] demande à la cour, au visa des articles 564, 565, 566, 835, 491 et 700 du code de procédure civile, L. 480-14 du code de l'urbanisme, L. 541-32 et L. 541-35 du code de l'environnement et L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, de :

'- confirmer l'ordonnance du 7 septembre 2023 du tribunal judiciaire de Versailles en ce qu'elle a :

- déclaré recevable la demande de la commune de [Localité 19] ;

- rejeté la demande aux fins de voir écartées des débats les pièces n°19, 31, 64 et 65 de la commune ;

- constaté les troubles manifestement illicites nés des travaux suivants réalisés sans autorisation sur le terrain de l'ancien centre équestre, sis [Adresse 15] à [Localité 19] et composé des parcelles ZA[Cadastre 14], ZA[Cadastre 5], A[Cadastre 11], A[Cadastre 7] et A[Cadastre 8] :

- la construction de la troisième partie de l'atelier postérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14], et d'une extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] ainsi que l'aménagement d'un logement en leur sein ;

- l'aménagement d'une aire d'accueil pour caravanes et la persistance de la présence de déchets compactés ;

- la pose d'une clôture autour du terrain ;

- enjoint à la sci [H] Parc Loisir, à Mme [H] [V] et à M. [G] [L] de :

- démolir la troisième partie de l'atelier situé sur la parcelle ZA[Cadastre 14], l'extension du bâtiment des écurie situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] et de supprimer le logement aménagé en leur sein ;

- procéder à la dépollution du terrain en retirant les déchets restant enfouis ;

- supprimer tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes ;

- retirer les caravanes installées sur le terrain ;

- retirer la clôture installée autour du terrain ;

- dit que la démolition de l'atelier, la suppression du logement aménagé dans les écuries, la dépollution du terrain et le retrait de la clôture interviendront dans un délai d'un mois à compter de la signification de l'ordonnance sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 6 mois ;

- condamné in solidum la sci [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L], in solidum, à payer à la commune la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens en première instance ;

- infirmer l'ordonnance du 7 septembre 2023 du tribunal judiciaire de Versailles en ce qu'elle a rejeté les demandes de première instance présentées par la commune, tendant au constat des troubles manifestement illicites et au prononcé d'une injonction de remise en état, s'agissant :

- des deux premières parties de l'atelier construites antérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14] ;

- des déchets enfouis sur le terrain, autres que les briques et gravats visibles sur les photos du constat d'huissier produit par la sci [H] Parc Loisir ;

et statuant à nouveau :

- constater les troubles manifestement illicites nés de :

- la construction perlée de l'atelier sur la parcelle ZA[Cadastre 14], formant une entreprise unique de travaux échappant la prescription ;

- l'enfouissement de déchets pour rendre carrossable et permettre l'installation de caravanes sur l'ancienne carrière équestre sise sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et ZA[Cadastre 5] (2.750 m²) avec un exhaussement du terrain de 7 mètres, ainsi que sur la parcelle A[Cadastre 11] (745 m²) entièrement artificialisée, tel que constaté par le rapport du 11 mai 2022 de l'inspection des installations classées et par les procès-verbaux d'infractions dressés les 24 mars 2022 et 19 octobre 2022 ;

- enjoindre à la sci [H] Parc Loisir, à Mme [H] [V] et à M. [G] [L] de : - démolir les deux premières parties de l'atelier construites antérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14] ;

- procéder à la dépollution totale du terrain en retirant tous les déchets enfouis pour rendre carrossable et permettre l'installation de caravanes sur l'ancienne carrière équestre sise sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et ZA[Cadastre 5] (2.750 m²) avec un exhaussement du terrain de 7 mètres, ainsi que sur la parcelle A[Cadastre 11] (745 m²) entièrement artificialisée, tel que constaté par le rapport du 11 mai 2022 de l'inspection des installations classées et par les procès-verbaux d'infractions dressés les 24 mars 2022 et 19 octobre 2022 ;

- dire que la démolition des deux premières parties de l'atelier et le retrait des déchets enfouis sur l'ancienne carrière équestre sise sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et ZA[Cadastre 5] (2.750 m²), ainsi que sur la parcelle A[Cadastre 11] (745 m²), interviendront dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 12 mois ;

et y ajoutant :

- constater le trouble manifestement illicite né de la poursuite des travaux délictuels postérieurement au 7 septembre 2023 sans autorisation sur la parcelle ZA[Cadastre 5], constatés par les procès-verbaux de constat d'infractions dressés les 15 septembre, 10 novembre et 24 novembre 2023, et tenant à :

- l'achèvement de la clôture ;

- l'installation de nouvelles caravanes ;

- la poursuite des dépôts et enfouissements de déchets dans le cadre de l'exhaussement de la parcelle ZA[Cadastre 5] ;

- la création d'un chemin d'accès bétonné reliant la parcelle ZA[Cadastre 5] à la voie publique ; - la construction de l'abri de jardin et du chalet sur la parcelle ZA[Cadastre 5] ;

- enjoindre à la sci [H] Parc Loisir, à Mme [H] [V] et à M. [G] [L] de :

- démolir la clôture dont la construction a été achevée ;

- retirer l'ensemble des caravanes installées sur le terrain ;

- retirer les déchets déposés et enfouis pour l'exhaussement de la parcelle ZA[Cadastre 5] ;

- supprimer le chemin d'accès bétonné reliant la parcelle ZA[Cadastre 5] à la voie publique ;

- démolir l'abri de jardin et le chalet édifiés sur la parcelle ZA[Cadastre 5] ;

- dire que la suppression de tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes, la démolition de la clôture, le retrait de toutes les caravanes, le retrait des déchets déposés et enfouis pour l'exhaussement de la parcelle ZA[Cadastre 5] et la suppression du chemin d'accès bétonné, la démolition de l'abri de jardin et du chalet sur la même parcelle, interviendront dans un délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 12 mois ;

- condamner la sci [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] à verser à la commune de [Localité 19] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

- condamner la sci [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] à supporter les entiers dépens en cause d'appel, en ce compris les frais de signification et d'exécution de la décision de la cour d'appel à intervenir.'

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'écarter des pièces

Les appelants demandent d'écarter des débats le rapport de l'inspection des installations classées, réalisé le 11 mai 2022 (pièce n° 19 annexée à l'assignation), le procès-verbal d'infraction daté du 19 octobre 2022, réalisé par M. [E] [P], garde-champêtre, chef principal, agissant en tant qu'agent de l'état assermenté et commissionné par le maire de [Localité 19] (pièce n° 31 annexée à l'assignation), et le procès-verbal de constat dressé les 28 et 30 juillet 2023 (pièces n° 64 et 65 annexées à l'assignation) au motif que tous ces constats et rapports ont été réalisés sur leur propriété sans leur accord et qu'il s'agit d'une violation de domicile.

La commune de [Localité 19] indique que les procès-verbaux de garde- champêtre font foi jusqu'à preuve contraire, rappelant que les agents chargés de rechercher les infractions à la législation sur l'environnement sont habilités à procéder à leurs constatations en tout lieu, sans accord préalable du propriétaire, sauf en cas de visite d'un domicile et qu' aucune limite n'existe quant aux constats qui peuvent être réalisés depuis la voie publique, aussi bien en matière environnementale qu'urbanistique. Ils contestent sur ce point que les constructions litigieuses puissent constituer le domicile de M. [L] et Mme [V] et soulignent que les procès-verbaux ont été réalisés depuis la voie publique.

Sur ce,

L'article L. 521-1 du code de la sécurité intérieure dispose que 'les gardes champêtres concourent à la police des campagnes. Ils sont chargés de rechercher, chacun dans le territoire pour lequel il est assermenté, les contraventions aux règlements et arrêtés de police municipale.

Ils dressent des procès-verbaux pour constater ces contraventions.'

L'article 24 du code de procédure pénale dispose quant à lui que 'outre les compétences mentionnées à l'article 22 du présent code et à l'article L. 521-1 du code de la sécurité intérieure, les gardes champêtres recherchent et constatent par procès-verbal les délits et contraventions qui portent atteinte aux propriétés situées dans les communes pour lesquelles ils sont assermentés, dans les mêmes conditions que celles énoncées, en matière d'infractions forestières, aux articles L. 161-14 à L. 161-18 du code forestier ainsi que, en matière environnementale, à l'article L. 172-8 du code de l'environnement'.

L'article L. 461-1 du code de l'urbanisme indique que 'le préfet et l'autorité compétente mentionnée aux articles L. 422-1 à L. 422-3 ou leurs délégués, ainsi que les fonctionnaires et les agents mentionnés à l'article L. 480-1 peuvent visiter les lieux accueillant ou susceptibles d'accueillir des constructions, aménagements, installations et travaux soumis aux dispositions du présent code afin de vérifier que ces dispositions sont respectées et se faire communiquer tous documents se rapportant à la réalisation de ces opérations.', l'article L. 461-2 précisant que ce droit de visite et de communication 's'exerce entre 6 heures et 21 heures et, en dehors de ces heures, lorsque ces lieux sont ouverts au public'.

En l'espèce, les procès-verbaux litigieux (pièces n°31, 64 et 65) ont été établis par M. [P], garde-champêtre municipal dans le créneau horaire susmentionné, sans qu'il soit démontré qu'il aurait pénétré dans la partie que Mme [V] et M. [L] indiquent être leur domicile, étant au demeurant précisé qu'il s'agit de terrains à vocation agricole non constructibles.

De même, l'article L. 172-5 du code de l'environnement prévoit que : 'les fonctionnaires et agents mentionnés à l'article L. 172-4 recherchent et constatent les infractions prévues par le présent code en quelque lieu qu'elles soient commises.

Toutefois, ils sont tenus d'informer le procureur de la République, qui peut s'y opposer, avant d'accéder :

1° Aux établissements, locaux professionnels et installations dans lesquels sont réalisées des activités de production, de fabrication, de transformation, d'utilisation, de conditionnement, de stockage, de dépôt, de transport ou de commercialisation. Ils ne peuvent pénétrer dans ces lieux avant 6 heures et après 21 heures. En dehors de ces heures, ils y accèdent lorsque les locaux sont ouverts au public ou lorsqu'une des activités prévues ci-dessus est en cours ;

2° Aux véhicules, navires, bateaux, embarcations et aéronefs professionnels utilisés pour la détention, le transport, la conservation ou la commercialisation des animaux, des végétaux ou de tout autre produit susceptible d'être l'objet d'une infraction prévue par le présent code.

Les visites dans les domiciles et les locaux comportant des parties à usage d'habitation ne peuvent être commencées avant 6 heures et après 21 heures, avec l'assentiment de l'occupant ou, à défaut, en présence d'un officier de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale relatives aux visites domiciliaires, perquisitions et saisies des pièces à conviction. Cet assentiment doit faire l'objet d'une déclaration écrite de la main de l'intéressé ou, si celui-ci ne sait écrire, il en est fait mention au procès-verbal, ainsi que de son assentiment', et la visite d'inspection du 11 mai 2022 (pièce n°19) a été effectuée conformément à la réglementation.

La demande de la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] d'écarter ces pièces sera donc rejetée et l'ordonnance attaquée sera confirmée de ce chef.

Sur les demandes de démolition et remise en état

La société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] affirment en premier lieu n'avoir pas réalisé les aménagements et constructions litigieuses (construction de la troisième partie de l'atelier sur la parcelle ZA[Cadastre 14], extension du bâtiment des écuries situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] et aménagement d'un logement en leur sein), qui existaient lors de leur acquisition et avaient fait l'objet d'un permis de construire de régularisation en 2013, aucune urgence ou trouble manifestement illicite ne pouvant en conséquence être caractérisés pour ce motif à leurs dires.

Ils indiquent en deuxième lieu que la commune ne peut demander la remise en état pour les constructions pour lesquelles la prescription décennale est acquise, outre que ces ouvrages ne seraient pas contraires par nature aux dispositions du règlement PLU de la commune. Ils soulignent sur ce point que l'agrandissement des écuries a eu lieu avant 2013, que l'atelier a été réalisé en 2012 et que le bâtiment 'écuries' comportait depuis 1987 des pièces à vivre.

Concernant ensuite la réalisation des travaux d'exhaussement par enfouissement des déchets pour aménager une aire d'accueil pour caravanes, la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] soutiennent ne pas être responsables des agissements des occupants sans droit ni titre s'étant installés illégalement leur propriété durant plusieurs mois (plusieurs plaintes pénales ayant été déposées) qui ont procédé à ces travaux. Ils précisent d'ailleurs avoir été autorisés par la commune à remettre leur parcelle en l'état en octobre 2022.

Les appelants font valoir qu'aucun déchet ne se trouve à ce jour sur la parcelle de la société civile immobilière [H] Parc Loisir.

Concernant l'aménagement d'une aire de stationnement, la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] affirment qu'il s'agit en réalité d'un espace qui a toujours été utilisé comme stationnement pour les engins agricoles et qu'ils doivent pouvoir en disposer pour stationner leurs propres résidences mobiles.

Affirmant disposer du droit de clore leur parcelle, les appelants contestent avoir continué cette édification de la clôture postérieurement à l'arrêté du 14 juin 2023 et soutiennent avoir commencé à poser un grillage conformément aux règles du PLU, qui aura vocation à être doublé d'une haie bocagère.

La société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [V] et M. [L] invoquent les articles 8 et 14 de la CEDH pour soutenir qu'une atteinte disproportionnée a été portée à leur vie privée et qu'ils sont victimes de discrimination en raison de leur appartenance à la communauté des gens du voyage.

Ils indiquent enfin que les injonctions et astreintes prononcées par le premier juge sont manifestement disproportionnées aux faits d'espèce.

La commune de [Localité 19] invoque l'existence d'un trouble manifestement illicite né de l'édification d'un atelier, de l'extension des écuries et de l'aménagement d'un logement sans autorisation et en méconnaissance du PLU, reconnaissant que ces travaux ont été réalisés par les anciens propriétaires du terrain et précisant que :

- s'agissant de l'atelier, la construction a été réalisée sur plusieurs années et jusqu'en 2016, la prescription décennale ne commençant à courir qu'au jour de l'achèvement total des travaux selon elle,

- l'aménagement du logement au sein des écuries a eu lieu en 2014 malgré le rejet de la demande de permis de construire en 2013.

Elle en déduit que ces travaux, qui ne sont pas régularisables, sont contraires au PLU puisque M. et Mme [T], les précédents propriétaires, n'étaient pas exploitants agricoles mais commerçants, pas davantage que les appelants.

Concernant la réalisation de travaux de création d'une aire d'accueil pour caravanes, la commune affirme que les pièces du dossier permettent d'établir de façon manifeste que des travaux d'exhaussement et de stabilisation du terrain par enfouissement de déchets ont été réalisés sans autorisation, indiquant sur ce point que le 14 octobre 2022, le garde- champêtre a constaté la création d'une plate-forme sur la partie haute du terrain recouvrant les déchets devant être enlevés.

Elle soutient que ces travaux sont incompatibles avec la destination agricole du terrain et constituent un délit, un risque de pollution durable étant en outre établi, précisant que seule une expertise avec prélèvement d'échantillons et carottage du terrain, notamment au niveau de la carrière équestre, permettrait de démontrer l'absence de déchets et que les appelants n'ont jamais fourni le moindre justificatif de l'évacuation de ces déchets.

La commune de [Localité 19] fait valoir que l'aménagement d'une aire d'accueil pour caravanes et l'installation de caravanes sur le terrain sont démontrés par de nombreuses pièces alors que le PLU prohibe l'installation de caravanes en zone agricole et réfute l'argument selon lequel cette aire de stationnement aurait toujours existé.

Exposant que des travaux ont été réalisés sur la parcelle ZA [Cadastre 5] postérieurement à l'ordonnance querellée, la commune se plaint d'un achèvement de la clôture, de l'installation de nouvelles caravanes, d'un exhaussement de la parcelle, de la création d'un chemin d'accès bétonné et de la construction d'un abri de jardin et d'un chalet, tous aménagements constitutifs de nouveaux troubles manifestement illicites.

La commune de [Localité 19] expose qu'en application du PLU, les clôtures neuves doivent être de type agricole ou constituées d'un grillage doublé d'une haie bocagère et qu'une déclaration préalable doit être déposée en vertu d'une délibération du conseil municipal du 29 novembre 2007.

Elle explique que M. [L] avait commencé à poser une clôture le 6 juin 2023 lorsqu'il a été interrompu par l'intervention des gendarmes, que la déclaration de travaux qu'il a déposée ensuite mentionne la parcelle A[Cadastre 6] qui ne lui appartient pas et que la clôture posée n'est pas conforme au PLU, outre qu'il ne démontre pas que la pose de cette clôture serait directement liée et nécessaire à l'activité d'une exploitation agricole.

L'intimée conclut à la confirmation de l'ordonnance querellée en ce qu'elle a ordonné les mesures de remise en état, réfute l'application de l'article 8 de la CEDH au motif que M. [L] et Mme [V] ne justifient pas de liens suffisamment étroits et continus avec les constructions litigieuses et n'y habitent pas. Elle conclut à la proportion des mesures ordonnées avec l'objectif de protection des terres agricoles, rappelant que les appelants avaient parfaitement connaissance du classement du terrain en zone agricole lors de leur acquisition et qu'il existe plusieurs aires d'accueil dans les communes voisines.

Sur ce,

sur l'existence d'un trouble manifestement illicite

Aux termes de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite s'entend de toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit. Le dommage est réalisé et il importe d'y mettre un terme.

L'illicéité du trouble suppose la violation d'une obligation ou d'une interdiction préexistante et doit être manifeste. Il appartient à la partie qui s'en prévaut d'en faire la démonstration avec l'évidence requise devant le juge des référés.

En outre, le juge des référés ne peut prononcer que les mesures conservatoires strictement nécessaires pour préserver les droits d'une partie.

Sur la construction de l'atelier, l'extension des écuries et l'aménagement d'un logement

L'article L. 480-14 du code de l'urbanisme dispose que : 'La commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme peut saisir le tribunal judiciaire en vue de faire ordonner la démolition ou la mise en conformité d'un ouvrage édifié ou installé sans l'autorisation exigée par le présent livre, en méconnaissance de cette autorisation ou, pour les aménagements, installations et travaux dispensés de toute formalité au titre du présent code, en violation de l'article L. 421-8. L'action civile se prescrit en pareil cas par dix ans à compter de l'achèvement des travaux'.

Il est acquis en l'espèce que la construction de l'atelier, l'extension des écuries et l'aménagement d'un logement ont été édifiés sur des parcelles situées en zone A, et partiellement en zone A1 du PLU de la commune de [Localité 19] , qui :

- pour la zone A : interdit toute nouvelle construction en zone agricole, à l'exception des constructions, installations et aménagements à condition d'être nécessaires à l'activité d'une exploitation agricole ou les abris de prairie nécessaires au pâturage des équidés dans la limite de 20m2 avec au moins un côté ouvert et sans porte,

- pour la zone A1 : interdit toute nouvelle construction à l'exception des constructions de bâtiment à usage d'habitation à condition d'être destinées au logement principal des exploitants agricoles dans la mesure où cette construction est strictement nécessaire à l'exploitation agricole et où elle est implantée à moins de 30 mètres du siège de l'exploitation,

- pour la zone A : interdit toute transformation en locaux d'habitation de locaux à usage agricole.

La commune de [Localité 19] démontre par la production de photographies aériennes et de constats d'huissiers de justice que des constructions ont été réalisées par les précédents propriétaires des parcelles, étant précisé qu'est sans incidence la circonstance que les terrains aient fait l'objet d'une vente, la commune étant recevable à se prévaloir de la réglementation en matière d'urbanisme à l'égard de tout propriétaire dès lors que la prescription n'est pas acquise.

L'acte de vente du 7 janvier 2022 mentionne sur ce point : 'l'immeuble a fait l'objet depuis son acquisition, soit il y a moins de dix ans, de travaux nécessitant une autorisation administrative (...). Ces travaux n'ont donné lieu à aucune autorisation administrative ou autre ni souscription d'assurance liées à la construction ce dont l'acquéreur déclare avoir parfaite connaissance. (...) Le vendeur déclare avoir réalisé les travaux suivants :

- agrandissement de la maison en mai 2014 par extension du séjour représentant environ 40 m2,

- agrandissement de l'atelier en septembre 2012 représentant environ 127 m2.

Ces travaux n'ont donné lieu à aucune autorisation administrative ou autre ni souscription d'assurance.'

Ces actes de construction en violation du PLU constituent un trouble manifestement illicite justifiant l'application des dispositions de l'article L. 480-14 susvisé pour y mettre fin, étant précisé d'une part que M. [L] et Mme [V] ne justifient pas de leur qualité d'exploitant agricole sur la commune et d'autre part, que le transfert de propriété intervenu en 2022 est sans incidence sur les droits de la commune.

Aux termes de cet article, la prescription décennale pour demander leur démolition est de 'dix ans à compter de l'achèvement des travaux'.

La commune de [Localité 19] verse aux débats des photographies satellites datées qui permettent de constater que la construction de l'atelier, débutée après le 31 décembre 2011, a été réalisée progressivement par la suite puisque des modifications sont observables entre le 21 juin 2014, le 15 mars 2016 et le 26 juin 2018. Dès lors, s'agissant d'une opération unique de construction qui avait été achevée depuis moins de 10 ans à la date de la saisine du premier juge, il convient de dire que la démolition de l'ensemble du bâtiment est susceptible d'être ordonnée.

Concernant l'aménagement du logement au sein des écuries, il ressort des déclarations mêmes des vendeurs dans l'acte notarié du 7 janvier 2022 que la prescription décennale n'est pas susceptible d'être acquise.

Sur les demandes relatives à l'aire d'accueil des caravanes

En vertu de l'article L. 541-32 du code de l'environnement, 'toute personne valorisant des déchets pour la réalisation de travaux d'aménagement, de réhabilitation ou de construction doit être en mesure de justifier auprès des autorités compétentes de la nature des déchets utilisés et de l'utilisation de ces déchets dans un but de valorisation et non pas d'élimination.

Dans le cadre de ces travaux, l'enfouissement et le dépôt de déchets sont interdits sur les terres agricoles, à l'exception de la valorisation de déchets à des fins de travaux d'aménagement ou de la valorisation de déchets autorisés à être utilisés comme matières fertilisantes ou supports de culture.'

Le PLU de la commune de [Localité 19] interdit l'installation de caravanes en zone agricole (article A/1.7) et les exhaussements de sols (article A/1.11) et sa violation est, comme déjà indiqué, susceptible de constituer un trouble manifestement illicite.

La commune de [Localité 19] verse aux débats :

- le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme établi par le garde-champêtre le 24 mars 2022 indiquant avoir constaté les travaux suivants :

'- des travaux d'apport de terre, gravats : interdit en zone A du PLU,

- des exhaussements et affouillements de sol : interdit en zone A du PLU,

- création d'aire de stationnement pour caravanes : interdit en zone A du PLU' ;

- le rapport de l'Inspection des installations classées du 12 mai 2022 qui mentionne notamment : 'Il a été constaté que :

- les aménagements réalisés ne sont pas conformes aux documents d'urbanisme,

- aucun justificatif sur la Traçabilité et la dangerosité des matériaux utilisés pour les exhaussements de sols et les remblaiements n'a été présenté,

- les déchets présents sur le site ne proviennent pas tous de l'ancienne activité équestre exercée par le passé et n'ont pas été éliminés conformément au code de l'environnement (...)

Il est ainsi considéré qu'il s'agit d'un dépôt sauvage de déchet et non une installation relevant de la réglementation des IPCE.' ;

- le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme établi par le garde-champêtre le 19 octobre 2022 indiquant avoir constaté les travaux suivants :

'- des exhaussements de terrain (...)

- création d'une plate-forme sur toute la partie haute recouvrant les déchets devant être enlevés (...) J'ai constaté que ces déchets (clôture, ferraille, déchets divers...) ont été enfouis et recouverts avec la terre livrée par les camions lors des travaux antérieurs constatés le 21 mars 2022 (...),

- démolition des abris de prairie équidés existants sur les parcelles et mouvements de terrains et exhaussements interdit en zone A du PLU." ;

- le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme établi par le garde-champêtre le 28 juillet 2023 mentionnant 'des travaux de terrassement et de décaissement ont été effectués à l'endroit où la végétation avait été coupée (parcelles ZA [Cadastre 14] et ZA [Cadastre 5]).d'apport de terre, gravats : interdit en zone A du PLU.' ;

- le procès-verbal d'infraction au code de l'urbanisme établi par le garde-champêtre le 4 août 2023 indiquant avoir constaté 'le remblaiement du chemin situé sur la parcelle A[Cadastre 5] par des gravats de plâtre et de mâchefer.'.

Le procès-verbal de constat de commissaire de justice du 23 novembre 2022 établi à la demande de la société [H] Parc Loisirs, s'il mentionne 'la présence d'un grand terrain dont le sol est entièrement en terre battue non stabilisé' sur lequel 'pour l'essentiel il n'y a pas de déchets' apparaît peu probant dès lors que non seulement la parcelle n'est pas identifiée et aucun plan n'est annexé au constat et que les photographies font apparaître la présence de déchets concassés au sol, mais surtout qu'il n'est pas de nature à démontrer que les déchets dont la présence avait été antérieurement constatée auraient été enlevés et non simplement recouverts.

Or, si les appelants versent aux débats deux devis de terrassement (société Terrasol du 30 septembre 2022 d'un montant de 3 136, 810 euros) et de nettoyage de terrain par enlèvement des déchets polluants et dangereux (société Saguey du 7 septembre 2022 d'un montant de 1800 euros), correspondant au demeurant à des travaux très modestes, force est de constater que les factures afférentes ne sont pas produites et que rien ne permet en conséquence de considérer que ces travaux auraient été réalisés.

En conséquence, est avérée l'existence d'un trouble manifestement illicite du fait de l'enfouissement et du dépôt de déchets sur les terres agricoles et d'exhaussements des sols.

La création de l'aire d'accueil des caravanes est également démontrée par les appelants eux-mêmes qui versent aux débats un procès-verbal de commissaire de justice du 21 avril 2022 mentionnant : 'je remarque la présence d'un terrain clôturé (...) Je remarque que le sol, à l'intérieur de cette clôture, a été entièrement remblayé, qu'il est parfaitement plan, en quasi-totalité recouvert de gravillonnage. Je constate sur ce terrain (...) la présence de cinq aménagements permettant l'alimentation et l'évacuation de l'eau (...) Je constate la présence d'une fosse septique, d'un regard en béton également sur cet espace. Une seconde fosse septique est installée dans cette zone.', sans que la démolition de cette aire soit démontrée par la suite.

L'argument des appelants aux termes duquel une aire de stationnement était existante lors de leur arrivée, outre qu'il n'est pas justifié, n'est en tout état de cause pas opérant, les travaux d'aménagement réalisés sur le terrain ne correspondant manifestement pas à une simple zone de stationnement.

La violation du PLU interdisant l'installation de caravanes en zone agricole est donc avérée et constitue un nouveau trouble manifestement illicite.

Il convient de souligner sur ce point que, malgré les arrêtés municipaux d'interdiction et l'injonction faite par le premier juge sur ce point, les travaux d'aménagement de l'aire d'accueil des caravanes n'ont pas cessé puisque le garde-champêtre de la commune de [Localité 19] a établi de nouveaux procès-verbaux d'infraction au code de l'urbanisme (le 24 août 2023 pour poursuite des travaux de clôture malgré interdiction, division de plusieurs parcelles sur la partie haute et pose de clôtures de séparation, pose de portail et création de zones de stationnement pour caravanes, l'installation de 4 caravanes étant avérée à cette date et le 15 septembre 2023 pour poursuite des travaux de clôture des parcelles malgré interdiction, mise en place d'un revêtement bétonné sur l'un des accès créés sur la parcelle ZA[Cadastre 5] et création d'un abri de jardin sur la parcelle ZA[Cadastre 5]) et que l'agent de police municipale de [Localité 16] a quant à lui dressé 2 procès-verbaux d'infraction pour poursuite de travaux malgré une décision judiciaire ou un arrêté en ordonnant l'interruption (constatant le 10 novembre 2023 la présence d'une bétonnière en fonctionnement et la présence d'une tranchée réalisée sur la dalle devant la porte du bâtiment A et le 23 novembre 2023 la construction en cours d'un chalet au nord de la parcelle ZA[Cadastre 5] et la présence d'au moins 3 caravanes non attelées, de 2 fourgons et d'une fourgonnette portant des bastaings sur la galerie et des matériaux à l'intérieur), tous éléments qui démontrent de plus fort l'existence d'un trouble manifestement illicite à ce titre.

Sur les mesures de démolition et de remise en état

Il est constant qu'en cas d'aménagements et de constructions non autorisés, seule la remise en état des lieux permet de supprimer les conséquences de la violation de la règle de droit.

La commune justifie les mesures sollicitées par la nécessité de protéger les zones agricoles et les zones naturelles et pour un motif d'intérêt général d'ordre écologique.

A ce motif d'intérêt général, l'appelant oppose le droit au respect de sa vie privée et familiale et de son domicile conformément aux exigences de l'article 8 de la CEDH.

Toutefois, Mme [V] et M. [L] ne démontrent pas résider effectivement sur les parcelles litigieuses et les pièces qu'ils versent aux débats tendent au contraire à démontrer le caractère inhabitable des bâtiments édifiés. Au surplus, l'adresse qu'ils mentionnent eux-mêmes dans leurs écritures est située en Gironde.

Ils ne justifient pas davantage d'une discrimination liée à leur qualité de gens du voyage, la commune de [Localité 19] justifiant par la production du schéma départemental la présence de plusieurs aires d'accueil installées à cette fin dans un périmètre très proche des parcelles litigieuses, l'interdiction figurant au PLU de faire stationner des caravanes en zone agricole visant à assurer l'effectivité de l'interdiction générale de modifier l'affectation de ces terres et la préservation du caractère agricole des parcelles.

Il s'ensuit que les mesures de remise en état demandées par la commune de [Localité 19] présentent un caractère proportionné au but recherché de protection de l'environnement.

A titre surabondant, il convient de souligner que l'attitude des appelants est exclusive de toute bonne foi dès lors d'une part que l'acte notarié de vente précisait explicitement le classement des parcelles et les contraintes en découlant et d'autre part, qu'ils ont continué à artificialiser les sols et à édifier divers constructions et aménagements sur leur terrain malgré les nombreuses mises en demeure et injonctions contraires, et même postérieurement à la décision ordonnant des démolitions, démontrant ainsi leur volonté de s'affranchir de toute réglementation.

L'ordonnance querellée sera donc confirmée en ce qu'elle a enjoint la société civile immobilière [H] Parc Loisir, à Mme [H] [V] et à M. [G] [L] de :

- démolir la troisième partie de l'atelier situé sur la parcelle ZA[Cadastre 14], l'extension du bâtiment des écurie situées sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et A[Cadastre 8] et de supprimer le logement aménagé en leur sein; - procéder à la dépollution du terrain en retirant les déchets restant enfouis ;

- supprimer tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes ;

- retirer les caravanes installées sur le terrain.

Il convient à hauteur d'appel d'ajouter les injonctions suivantes :

- démolir les deux premières parties de l'atelier construites antérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14] ;

- procéder à la dépollution totale du terrain en retirant tous les déchets enfouis pour rendre carrossable et permettre l'installation de caravanes sur l'ancienne carrière équestre sise sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et ZA[Cadastre 5] (2.750 m²) ainsi que sur la parcelle A[Cadastre 11] (745 m²) ;

- démolir la clôture dont la construction a été achevée ;

- supprimer le chemin d'accès bétonné reliant la parcelle ZA[Cadastre 5] à la voie publique ;

- démolir l'abri de jardin et le chalet édifiés sur la parcelle ZA[Cadastre 5].

Eu égard à la résistance des appelants et afin d'assurer l'effectivité de ces travaux, il convient d'assortir ces travaux d'une astreinte, modulée en fonction des obligations en cause, selon les modalités prévues au dispositif.

Sur les demandes accessoires

L'ordonnance sera également confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie perdante, la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] ne sauraient prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doivent supporter les dépens d'appel.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la commune de [Localité 19] la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. Les appelants seront en conséquence condamnés à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance attaquée,

Y ajoutant,

Enjoint la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] de :

- démolir les deux premières parties de l'atelier construites antérieurement au 15 mars 2016 sur la parcelle ZA[Cadastre 14] ;

- procéder à la dépollution totale du terrain en retirant tous les déchets enfouis pour rendre carrossable et permettre l'installation de caravanes sur l'ancienne carrière équestre sise sur les parcelles ZA[Cadastre 14] et ZA[Cadastre 5] (2.750 m²) ainsi que sur la parcelle A[Cadastre 11] (745 m²) ;

- démolir la clôture dont la construction a été achevée ;

- supprimer le chemin d'accès bétonné reliant la parcelle ZA[Cadastre 5] à la voie publique ;

- démolir l'abri de jardin et le chalet édifiés sur la parcelle ZA[Cadastre 5];

Dit que l'enlèvement de l'ensemble des caravanes installées sur le terrain et de la clôture devront intervenir dans un délai de 2 mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 12 mois ;

Dit que la démolition des trois parties de l'atelier construites sur la parcelle ZA[Cadastre 14], la suppression du logement aménagé en leur sein, la suppression de tous les aménagements réalisés pour la création de l'aire d'accueil des caravanes et du chemin d'accès bétonné reliant la parcelle ZA[Cadastre 5] à la voie publique et la démolition de l'abri de jardin et du chalet édifiés sur la parcelle ZA[Cadastre 5] devront intervenir dans un délai de 6 mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 12 mois ;

Dit que les travaux de dépollution totale des parcelles ZA[Cadastre 14], ZA[Cadastre 5] et A[Cadastre 11] (745 m²) devront intervenir dans un délai de 12 mois à compter de la signification de la décision à intervenir sous peine d'astreinte de 1 000 euros par jour de retard pendant une période de 12 mois.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] à verser à la commune de [Localité 19] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société civile immobilière [H] Parc Loisir, Mme [H] [V] et M. [G] [L] aux dépens d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Thomas VASSEUR, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 23/06631
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;23.06631 ?
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