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16/05/2024 | FRANCE | N°23/05969

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-5, 16 mai 2024, 23/05969


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 72D



Chambre civile 1-5



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 16 MAI 2024



N° RG 23/05969 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WBP7



AFFAIRE :



Syndic. de copro. [Adresse 6]





C/

[K] [B]

...







Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 10 Mars 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG : 21/01051



Expéditions

exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16.05.2024

à :



Me Julien AUCHET, avocat au barreau de VAL D'OISE - 13



Me Christian BOUSSEREZ, avocat au barreau de VAL D'OISE - 89



Me Marion CORDIER, avocat au barreau de VERSAILLES, ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 72D

Chambre civile 1-5

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 16 MAI 2024

N° RG 23/05969 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WBP7

AFFAIRE :

Syndic. de copro. [Adresse 6]

C/

[K] [B]

...

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 10 Mars 2023 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PONTOISE

N° RG : 21/01051

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 16.05.2024

à :

Me Julien AUCHET, avocat au barreau de VAL D'OISE - 13

Me Christian BOUSSEREZ, avocat au barreau de VAL D'OISE - 89

Me Marion CORDIER, avocat au barreau de VERSAILLES, 189

Me Frédérique FARGUES, avocat au barreau de VERSAILLES - 138

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Syndic. de copro. [Adresse 4]

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentant : Me Julien AUCHET de la SCP EVODROIT, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 13 - N° du dossier 20231021 - Représentant : Pers. morale CABINET BETTI (Syndic)

APPELANTE

****************

Madame [K] [B]

née le 07 Janvier 1976 à [Localité 12] (93)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 9]

Représentant : Me Christian BOUSSEREZ, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 89 - N° du dossier 170403

S.A. ALLIANZ IARD

agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : 542 11 0 2 91

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 - N° du dossier S230289

Ayant pour avocat plaidant Me Philippe EL FADL, du barreau de Paris

QBE EUROPE SA/NV

[Adresse 13]

[Localité 7]

Représentant : Me Frédérique FARGUES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 138

Ayant pour avocat plaidant Me Armelle HUBERT

S.A.S. VOLT'AIR

[Adresse 3]

[Localité 8]

(défaillante)

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 20 Mars 2024, Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Thomas VASSEUR, Président,

Madame Pauline DE ROCQUIGNY DU FAYEL, Conseiller,

Madame Marina IGELMAN, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Elisabeth TODINI

En présence de Madame Caroline TABOUROT, conseiller en preaffectation

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique de vente du 30 juillet 2015, Mme [K] [B] a acquis un appartement situé au 2ème étage de la résidence sise [Adresse 5] à [Localité 10] .

En décembre 2015, Mme [B] a constaté l'apparition d'un dégât des eaux dans les WC de cet appartement.

Elle a sollicité la désignation d'un expert judiciaire et, par ordonnance en date du 20 octobre 2017, M. [S] [D] a été désigné.

L'expert judiciaire s'est saisi de sa mission et a procédé au dépôt de son rapport le 6 avril 2021.

Par acte du 30 novembre 2021, Mme [B] a fait assigner en référé le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] aux fins d'obtenir principalement sa condamnation au paiement d'une indemnité provisionnelle de 100 000 euros et 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 19 janvier 2022, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 6] a fait assigner en référé la société Samoa, aux droits de laquelle vient la société Volt'air, la société QBE Insurance Europe Limited et la société Allianz Iard aux fins d'obtenir principalement leur intervention forcée.

Par ordonnance contradictoire rendue le 10 mars 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Pontoise a :

- ordonné la jonction des procédures enrôlées sous les numéros RG 22/00120 et RG 21/01051 sous ce seul et dernier numéro,

au principal,

- renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront,

mais dès à présent, au provisoire,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 6] à verser à Mme [B] la somme de provisionnelle de 36 227 euros ;

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à réaliser les travaux de réparation des parties communes de l'immeuble préconisés par M. [D], expert judiciaire, dans son rapport du 6 avril 2021 dans les deux mois de la signification de l'ordonnance et passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et pendant un délai de deux mois passé lequel il devra être procédé à la liquidation de l'astreinte provisoire et au prononcé éventuel d'une astreinte définitive,

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de complément d'expertise tant à titre principal que subsidiaire,

- déclaré irrecevable la demande en garantie formée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à l'encontre de la société Volt'air,

- dit n'y avoir lieu à statuer, faute d'action en paiement diligentée à titre principal à son encontre en qualité de co-obligée, sur la demande du syndicat des copropriétaires de condamnation solidaire de la société Volt'air,

- rejeté la fin de non-recevoir des demandes de Mme [B] soulevée par la société Allianz Iard,

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande en garantie du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à l'encontre de la société Allianz Iard,

- mis hors de cause la société QBE Insurance Europe Limited,

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la compagnie QBE Europe SA/NV en lieu et place de la société QBE Insurance Europe Limited,

- dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes en garantie du syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à l'encontre de la société QBE Europe SA/NV,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à verser à Mme [B] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] aux dépens qui seront recouvrés, pour ceux dont elle aura fait l'avance, par Maître Valérie Baume conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- rappelé que Mme [B] est dispensée de toute participation à la dépense commune des frais de la procédure en application des dispositions de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration reçue au greffe le 9 août 2023, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.

Dans ses dernières conclusions déposées le 19 octobre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] demande à la cour de :

'- infirmer l'ordonnance de référé du 10 mars 2023 en toutes ses dispositions

statuant à nouveau

- débouter Mme [K] [B] de toutes fins, moyens et prétentions

subsidiairement,

- réduire la provision allouée à hauteur de 27 065 euros TTC, sous réserve de la justification de l'absence d'indemnisation par son propre assureur.

- rejeter toute autre demande

- condamner solidairement la société Volt'air à hauteur de 15 %, la compagnie QBE et la compagnie Allianz à relever et garantir indemne le SDC 88-90-92 et [Adresse 6] de toutes condamnations éventuellement prononcées à son encontre au profit de Mme [K] [B],

- condamner solidairement la société Volt'air à hauteur de 15 %, la compagnie QBE et la compagnie Allianz à verser au SDC 88-90-92 et [Adresse 6] une indemnité de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la scp Evodroit, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. '

Dans ses dernières conclusions déposées le 30 novembre 2023auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Allianz Iard demande à la cour, au visa des articles 122 du code de procédure civile, L. 113-2, L. 114-1, L. 114-2 et L. 112-3 du Code des assurances, de :

'à titre principal,

- confirmer l'ordonnance du 10 mars 2023 du juge des référés du tribunal judiciaire de Pontoise

- débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 11] (95), de toutes ses demandes, fins et conclusions

en tout état de cause,

- condamner le syndicat des copropriétaires sis [Adresse 6] ou qui mieux le devra aux entiers dépens ainsi qu'à verser la somme de 3 000 euros à Allianz sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile'

Dans ses dernières conclusions déposées le 19 novembre 2023 auxquelles il convient de se rapporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société QBE EUROPE SA/NV demande à la cour, au visa des articles L. 124-3, L. 242-1, L. 114-1 et L. 113-2 2° et 3° du code des assurances, de :

'à titre principal,

- confirmer l'ordonnance rendue le 10 mars 2023 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Pontoise en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'elle a ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de garantie à l'encontre de QBE Europe SA/NV ;

- débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 11] (95), de toutes ses demandes, fins et conclusions à l'encontre de QBE Europe SA/NV ;

à titre subsidiaire,

si la cour d'appel devait estimer pouvoir entrer en voie de condamnation,

- juger que toute éventuelle condamnation à l'encontre de QBE Europe SA/NV ne serait en toute hypothèse susceptible de concerner que le second sinistre survenu en 2019 sous l'empire de sa garantie ;

- juger que le quantum des demandes devra en conséquence être limité à ce seul sinistre ;

en toute hypothèse,

- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 11] (95), à payer à QBE Europe SA/NV, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens qui seront recouvrés par Maître Frédérique Fargues, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.'

Mme [B] a constitué avocat le 28 décembre 2023 et n'a pas conclu.

La société Volt'air, à qui la déclaration d'appel a été signifiée, à personne, le 25 septembre 2023 et les conclusions ont été signifiées, à personne, le 3 novembre 2023, n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

sur les demandes de provisions et les appels en garantie

Pour contester le montant de la provision allouée à Mme [B], le syndicat des copropriétaires fait valoir que celle-ci n'a pas justifié de l'indemnité reçue par son assureur pour la réalisation des travaux en partie privative et qu'il existe donc une contestation sérieuse sur ce point.

L'appelant expose que l'expert judiciaire a retenu la responsabilité de la société Volt'air à hauteur de 15% en raison du défaut de raccordement de la gaine de VMC, ce qui justifie la condamnation de cette société à la garantir dans cette proportion.

Il indique que la société Allianz, qui a été assureur de l'immeuble entre 2014 et le 31 décembre 2016, couvrant le risque dégât des eaux et RC immeuble, est concernée par le premier sinistre survenu en 2015 tandis que la société QBE, assureur pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2019 selon une police multirisques immeuble, doit sa garantie pour le sinistre constaté par l'expert le 2 février 2019.

Il affirme que, les deux sinistres nécessitant une réparation intégrale de l'appartement de Mme [B], sans qu'il soit possible de distinguer précisément les conséquences de chaque sinistre, il conviendra de prononcer une condamnation solidaire des deux compagnies d'assurances.

Réfutant toute prescription, le syndicat des copropriétaires soutient que :

- la société Allianz n'a effectué aucune diligence sérieuse pour prendre en charge le sinistre qui lui avait été déclaré,

- il a été lui-même actionné par Mme [B] le 30 novembre 2021 et il a donc respecté le délai de deux ans,

- la désignation de l'expert a suspendu le délai de prescription durant les opérations d'expertise conformément à l'article 2239 du code civil,

- la prescription ne pourrait lui être opposée que si le contrat rappelait en caractères très apparents les dispositions des articles L. 114-1 et 2 du code des assurances, les causes ordinaires d'interruption et les différents points de départ, ce qui n'est pas démontré en l'espèce.

La société Allianz soulève la prescription biennale pour s'opposer à la demande du syndicat des copropriétaires et fait valoir non seulement qu'il n'est pas démontré qu'un sinistre aurait été déclaré par l'appelant en 2015 mais qu'en tout état de cause, l'assignation qu'elle a reçue date de janvier 2022 est tardive, aucun acte interruptif de prescription n'étant selon elle versé aux débats.

Elle souligne que :

- l'interruption de la prescription ne joue qu'au profit du demandeur à l'expertise, soit en l'espèce Mme [B] et non le syndicat des copropriétaires,

- l'assignation en référé en vue de la désignation d'un expert constitue une action en justice qui fait courir la prescription contre l'assuré et il appartenait en conséquence au syndicat des copropriétaires de l'assigner dans les deux ans de l'ordonnance du 20 octobre 2017,

- le contrat précisait bien les textes applicables et les causes de prescription en caractère apparents.

Sur le fond, la société Allianz fait valoir qu'aucune condamnation en référé n'est possible dans le cadre d'une demande formée in solidum à l'encontre de deux assureurs successifs portant sur deux sinistres successifs, l'un de 2015, l'autre de 2019, étant au surplus précisé que les deux sinistres ont, selon l'expert, des causes différentes, la ventilation des garanties entre les assureurs ne pouvant avoir lieu qu'au fond.

Elle affirme en outre que l'expert a constaté un défaut de contrôle et d'entretien de la descente d'eaux pluviales, constituant une faute du syndicat des copropriétaires, de nature à entraîner une exclusion de garantie.

La société Allianz indique ensuite la déchéance du droit à indemnité en raison du préjudice causé par l'absence de déclaration du sinistre dès lors qu'elle ne s'est trouvée en mesure ni de participer aux opérations d'expertise amiable ou judiciaire, ni de prendre position en cours de procédure.

Enfin, l'intimée argue de l'absence de condamnation possible en référé sur le fondement d'un rapport d'expertise judiciaire non contradictoire qui ne serait corroboré par aucune autre pièce.

La société QBE soulève pour sa part l'inopposabilité du rapport d'expertise judiciaire au motif qu'il n'a pas été établi à son contradictoire et qu'elle n'a pas été en mesure de le discuter.

Elle expose ensuite que l'expert considère que les deux sinistres de 2015 et 2019 sont liés, le second étant la conséquence du premier, et en déduit que sa garantie 'dommages aux biens' n'est donc pas mobilisable puisqu'elle n'était pas assureur à la date du sinistre et qu'elle n'a pas été informée de son existence lors de la souscription de la police alors que le syndicat des copropriétaires en avait connaissance.

Concernant la garantie 'RC immeuble', la société QBE expose qu'il faut que les dommages immatériels aux tiers soient consécutifs à un dommage matériel ou corporel aux tiers, soit le résultant d'un dommage aux biens garantis et qu'en outre, il existe une exclusion de garantie en cas de défaut d'entretien, qui a été relevé en l'espèce par l'expert.

La société QBE se fonde sur la prescription de la demande du syndicat des copropriétaires, exposant avoir reçu en 2019 une déclaration de sinistre qui n'aurait été suivie d'aucune autre démarche avant l'assignation du 19 janvier 2022.

Subsidiairement, l'intimée indique qu'elle ne pourrait être amenée qu'à garantir le second sinistre, que l'expert n'a pas distingué les dommages relevant des deux sinistres et que Mme [B] n'a pas justifié de l'indemnisation perçue de son propre assureur habitation, ce qui doit limiter les éventuelles condamnations mises à sa charge.

Sur ce,

Selon l'alinéa 2 de l'article 835 du code de procédure civile :'Dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, il (le président ) peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire'.

Ce texte impose donc au juge une condition essentielle avant de pouvoir accorder une provision : celle de rechercher si l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Doivent être précisés les éléments de la contestation qui rendent celle-ci sérieuse.

Il sera retenu qu'une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

À l'inverse, sera écartée une contestation qui serait à l'évidence superficielle ou artificielle. Le montant de la provision allouée n'a alors d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

sur la provision accordée à Mme [B]

L'expert conclut dans son rapport :

- ' les infiltrations chez Mme [B] proviennent bien de la gaine technique commune située derrière son wc. Les causes des infiltrations sont des défauts d'étanchéité au niveau des traversées de la colonne de descente d'eaux pluviales et ce depuis la toiture-terrasse et également un défaut de raccordement du chapeau de VMC au niveau de la toiture-terrasse. Les travaux refaits par l'entreprise missionnée par le syndic Batim et fils (...) génèrent donc un défaut d'étanchéité au niveau de la sortie de VMC en toiture, ce qui laisse l'eau pénétrer.' (...) En ce qui concerne l'inondation du 2 février 2019, le lien avec l'objet du litige est établi. La descente d'eaux pluviales bouchée a créé de façon quasi certaine des débordements chez Mme [B] avant l'inondation du 2 février en n'étant alors que partiellement bouchée.'

- proposition d'imputation :

- syndicat des copropriétaires 85% : 'les 2 sources d'infiltrations identifiées, à savoir la descente d'eaux pluviales et la gaine de VMC situées dans la gaine technique passant derrière le WC de Mme [B] appartiennent aux parties communes'

- Volt'Air 15% : 'je peux indiquer que c'est bien cette entreprise qui a réalisé les travaux de ventilation en toiture-terrasse dont fait logiquement partie la souche de ventilation sur la gaine de ventilation fuyarde. (...) La causalité principale entre les 2 sources d'infiltrations identifiées, à savoir la descente d'eaux pluviales et la gaine de VMC, pour les 1ers désordres constatés au début de ma mission est probablement la descente d'eaux pluviales. En effet, l'eau est rentrée dans l'appartement de Mme [B] de façon très importante au point de décrocher un meuble du WC et d'abîmer énormément certaines cloisons dans son appartement. La gaine verticale de VMC de par sa configuration ne me semble pas pouvoir occasionner de tels désordres mais elle a dû y participer un peu. En revanche, l'inondation de février 2019 est uniquement liée à la descente d'eaux pluviales. Cette inondation semble aussi confirmer l'hypothèse de la descente d'eaux pluviales comme étant la source des 1eres infiltrations chez Mme [B]. La descente d'eaux pluviales ne fait pas partie des travaux de l'entreprise Volt'Air.'

Il chiffre les travaux réparatoires à la somme de 27 065 euros. Mme [B] a en outre sollicité devant le premier juge la prise en charge de ses frais de déménagement à hauteur de 9 162 euros, ce devis ayant été transmis à l'expert.

L'argument tendant à dire que Mme [B] a nécessairement perçu une indemnisation de son propre assureur, qui n'est étayé par aucun élément et constitue une simple allégation, ne saurait caractériser une contestation sérieuse et l'ordonnance querellée sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné le syndicat des copropriétaires à verser à Mme [B] la somme provisionnelle de 36 227 euros.

sur la garantie de la société Volt'air

La société Volt'Air a participé aux opérations d'expertise diligentées par M. [D].

Compte tenu de l'imputation des dommages évaluée par l'expert telle que rappelée ci-dessus, c'est à juste titre que le syndicat des copropriétaires sollicite la garantie de la société Volt'Air à hauteur de 15 % de la condamnation mise à sa charge, aucune contestation sérieuse n'étant établie en l'espèce. L'ordonnance querellée sera donc infirmée de ce chef.

sur la garantie de la société Allianz

Il doit tout d'abord être relevé qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés, juge de l'évidence, de constater l'acquisition d'une prescription, un tel moyen ne pouvant devant ce juge qu'être examiné sur le point de savoir s'il constitue une contestation suffisamment sérieuse faisant obstacle à l'allocation d'une provision.

En vertu des dispositions de l'article L. 114-1 du code des assurances, 'toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. Par exception, les actions dérivant d'un contrat d'assurance relatives à des dommages résultant de mouvements de terrain consécutifs à la sécheresse- réhydratation des sols, reconnus comme une catastrophe naturelle dans les conditions prévues à l'article L. 125-1, sont prescrites par cinq ans à compter de l'événement qui y donne naissance. (...) Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier'.

Le syndicat des copropriétaires a souscrit un contrat d'assurance avec la société Allianz le 6 mai 2014, à effet au 1er janvier 2014 et l'a résilié au 31 décembre 2016.

Le syndicat des copropriétaires justifie avoir procédé le 20 septembre 2016 auprès de la société Allianz à une déclaration de sinistre 'DAB-DDE Canalisation' le 2 décembre 2015, qui semble avoir donné lieu à une expertise amiable le 1er décembre 2016 (au vu des échanges de courriels produits par l'appelant en pièce 8), sans que la société Allianz s'explique sur ce point.

Il résulte d'une jurisprudence constante que toute action en référé est une action en justice au sens de l'article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances (1re Civ., 10 mai 2000, pourvoi n° 97-22.651 ; 2e Civ., 3 septembre 2009, pourvoi n° 08-18.092). La qualification d'action en justice au sens de l'article L. 114-1 du code des assurances n'étant pas subordonnée à la présentation d'une demande indemnitaire chiffrée, une action en référé-expertise fait courir la prescription biennale de l'action de l'assuré contre l'assureur.

Or, il apparaît en l'espèce que, bien qu'assigné à comparaître par Mme [B] par acte du 28 septembre 2017 dans le cadre d'un référé-expertise, le syndicat des copropriétaires n'a pas fait intervenir la société Allianz à la procédure qui a donné lieu à la désignation d'un expert par ordonnance du 20 octobre 2017.

Ce n'est que par acte du 19 janvier 2022 que le syndicat des copropriétaires, préalablement assigné par Mme [B], a assigné en intervention forcée les sociétés Allianz et QBE, soit plus de deux ans après cette première citation.

Les conditions générales du contrat d'assurance mentionnent clairement en leur article 10.7 les délais de prescription applicables en la matière et les articles L. 114-1 à L. 114-3 du code des assurances sont intégralement reproduits.

Il convient en conséquence de dire qu'est sérieuse la contestation de la société d'assurance Allianz au titre de l'acquisition de la prescription biennale.

A titre surabondant, l'expert indique dans son rapport qu''il y a manifestement eu un défaut de contrôle et d'entretien de la descente d'eaux pluviales' et les conditions générales du contrat stipulent en leur article 8 que le contrat ne garantit pas 'les dommages résultant d'un défaut d'entretien et de réparation', ce qui constitue une seconde contestation sérieuse.

L'ordonnance querellée sera confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de garantie formée à l'encontre de la société Allianz.

sur la garantie de la société QBE

Concernant la société QBE, le contrat a été conclu le 26 décembre 2016, à effet au 1er janvier 2017.

Il n'est pas contesté que Mme [B] a subi une inondation du 2 février 2019, soit lors de la période de garantie de la société QBE mais le syndicat des copropriétaires ne justifie d'aucune déclaration de sinistre auprès de cet assureur.

Il ne saurait être considéré que la demande d'expertise de Mme [B] a fait courir le délai de prescription biennale de l'action de l'assuré contre l'assureur au sens de l'article L. 114-1 susmentionné puisque l'assignation en référé de Mme [B] date du 28 septembre 2017, soit antérieurement à ce second sinistre.

La première demande de Mme [B] à l'encontre du syndicat des copropriétaires au titre de l'inondation du 2 février 2019 a donc été formée par son assignation en référé-provision du 30 novembre 2021 et, partant, la contestation tenant à la prescription de l'action exercée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société QBE ne peut être qualifié de sérieuse.

En revanche, il est constant que la société QBE n'a pas été attraite à l'expertise et il convient de dire qu'est sérieuse la contestation relative à l'opposabilité du rapport de M. [D] à son égard, étant précisé qu'en l'état les données de l'expertise ne sont pas corroborées par d'autres éléments.

De façon surabondante, et comme pour la société Allianz, la mobilisation de la garantie de la société QBE est sérieusement contestable en présence d'un rapport d'expertise relevant le défaut de contrôle et d'entretien de la descente d'eaux pluviales.

L'ordonnance querellée sera donc confirmée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à référé sur la demande en garantie formée par le syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société QBE.

sur la demande de réalisation de travaux sous astreinte

Le syndicat des copropriétaires soutient que la réparation des parties communes a été effectuée et qu'aucune astreinte n'est donc justifiée.

Sur ce,

Aux termes de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite est caractérisé par 'toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit'. Il appartient à la partie qui s'en prévaut d'en faire la démonstration avec l'évidence requise devant le juge des référés.

Pour apprécier l'existence d'un tel trouble, il appartient à la cour de se placer à la date à laquelle le premier juge a statué.

L'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que tout juge peut, même d'office, ordonner une astreinte pour assurer l'exécution de sa décision.

Cette mesure a pour finalité de contraindre la personne qui s'y refuse à exécuter les obligations imposées par une décision juridictionnelle et d'assurer ainsi le respect du droit de la partie adverse à cette exécution. Le juge dispose d'un pouvoir souverain pour apprécier si les circonstances font apparaître la nécessité de la prononcer.

Le syndicat des copropriétaires ne conteste pas sur le fond être tenu de remédier aux désordres affectant l'appartement de Mme [B], ayant pour origine des dégâts des eaux en provenance des parties communes de l'immeuble.

Alors que l'ordonnance attaquée date du 10 mars 2023, le syndicat des copropriétaires verse en l'espèce aux débats une facture du 29 septembre 2023 relative à des travaux de réfection des toitures-terrasses des 5 bâtiments de la copropriété.

Le trouble manifestement illicite était donc caractérisé au jour où le premier juge a statué et, au regard du retard du syndicat des copropriétaires à effectuer les réparations qui lui incombaient et qui avaient été clairement identifiées par l'expert et de l'urgence à assurer le clos et le couvert de l'immeuble, l'astreinte prononcée par le premier juge était justifiée.

La date à laquelle l'ordonnance querellée a été signifiée n'est pas établie, étant précisé que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] était condamné à réaliser les travaux de réparation des parties communes de l'immeuble préconisés par l'expert dans les deux mois de la signification de l'ordonnance et passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant un délai de deux mois.

Il convient en conséquence de confirmer la décision attaquée de ce chef, le syndicat des copropriétaires ne démontrant pas que les travaux ont été réalisés dans le délai de deux mois qui lui était imparti.

Sur les demandes accessoires

L'ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.

Partie essentiellement perdante, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] ne saurait prétendre à l'allocation de frais irrépétibles et doit supporter les dépens d'appel.

Il serait par ailleurs inéquitable de laisser à la société QBE et la société Allianz la charge des frais irrépétibles exposés en cause d'appel. L'appelant sera en conséquence condamné à leur verser chacune une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire rendu en dernier ressort,

Confirme l'ordonnance querellée sauf en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la société Volt'Air,

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Condamne la société Volt'air à garantir indemne, à hauteur de 15 %, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 6] des condamnations prononcées à son encontre au profit de Mme [K] [B] ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] à verser à la société Allianz et à la société QBE Europe SA/NV la somme de 1 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 11] aux dépens d'appel avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Thomas VASSEUR, Président et par Madame Elisabeth TODINI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-5
Numéro d'arrêt : 23/05969
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;23.05969 ?
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