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16/05/2024 | FRANCE | N°22/03166

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 16 mai 2024, 22/03166


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80J



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 MAI 2024



N° RG 22/03166

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPEA



AFFAIRE :



S.A.R.L. MÉTÉORE CONVOYAGES





C/

[O] [I]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de MANTES LA JOLIE



N° Section : C

° RG : 20/00081



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Fernando MANES



Me Xavier GUIDER







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versai...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80J

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 MAI 2024

N° RG 22/03166

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPEA

AFFAIRE :

S.A.R.L. MÉTÉORE CONVOYAGES

C/

[O] [I]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 20 Septembre 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Section : C

N° RG : 20/00081

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Fernando MANES

Me Xavier GUIDER

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. MÉTÉORE CONVOYAGES

N° SIRET : 531 01 0 3 38

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Fernando MANES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2249

APPELANTE

****************

Monsieur [O] [I]

né le 30 Mars 1972 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]/France

Représentant : Me Xavier GUIDER, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1138

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 15 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE

M. [O] [I] a été engagé par la société Météore convoyages suivant un contrat de travail à durée déterminée à compter du 22 janvier 2016 en qualité de convoyeur, position 118 M, groupe 3Bis, avec le statut d'ouvrier. Ce contrat à durée déterminée a ensuite été renouvelé à deux reprises. La relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée à compter du 22 juillet 2017 avec reprise d'ancienneté au 22 janvier 2016.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Le 28 février 2019, le salarié s'est vu notifier un avertissement.

Par lettre du 12 juin 2019, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 21 juin 2019.

Par lettre du 13 juillet 2019, la société Météore convoyages a licencié le salarié pour faute.

La société employait moins de onze salariés à la date de la rupture.

Contestant son licenciement, le 15 juin 2020 M. [I] a saisi le conseil de prud'hommes de Mantes la jolie afin de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de la société Météore convoyages au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'au paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 20 septembre 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- fixé le salaire moyen de M. [I] à la somme de 2343 euros brut,

- dit que le licenciement de M. [I] pour faute sérieuse est injustifié et l'a requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la Sarl Météore convoyages à payer à M. [I] la somme de 4 686 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jour de la mise à disposition du présent jugement conformément à l'article 1231-7 du code civil,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire, hormis les cas où elle est de droit,

- condamné la Sarl Météore convoyages à payer à M. [I] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné la remise de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de salaire conformes,

- débouté M. [I] du surplus de ses demandes,

- débouté la Sarl Météore convoyages en sa demande reconventionnelle,

- dit que la Sarl Météore convoyages supportera les entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution.

Le 19 octobre 2022, la société Météore convoyages a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 février 2024, la société Météore convoyages demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement en ce qu'il a débouté M. [I] de ses demandes de rappel d'heures supplémentaires et d'indemnité pour travail dissimulé,

- réformer le jugement pour le surplus

- à titre préliminaire constater l'effet libératoire du reçu pour solde de compte signé le 3 octobre 2019 par M. [I], s'agissant de sa demande de rappel d'heures supplémentaires,

- en tout état de cause, dire que le licenciement notifié à M. [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

- y ajoutant, condamner M. [I] à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 22 février 2024, M. [I] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a :

- fixé son salaire moyen à la somme de 2 343 euros brut,

- condamné la Sarl Météore convoyages à lui payer la somme de 4686 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- l'a débouté du surplus de ses demandes,

- confirmer le jugement pour le surplus,

- y ajoutant et statuant à nouveau, condamner la société Météore convoyages à lui verser les sommes suivantes:

* 8 061 euros à titre de dommages et intérêts à raison de son licenciement sans cause réelle et sérieuse (ou 7 029 euros brut à titre subsidiaire en cas de rejet de la demande d'heures supplémentaires),

* 10 143 euros brut à titre de rappel d'heures supplémentaires,

* 1 014 euros brut au titre des congés payés y afférents,

* 16 122 euros brut à titre d'indemnité pour travail dissimulé (ou 14 058 euros brut à titre subsidiaire en cas de rejet de la demande d'heures supplémentaires),

- fixer sa rémunération brute mensuelle de référence à 2 687 euros brut (ou 2 343 euros brut à titre subsidiaire en cas de rejet de la demande d'heures supplémentaires),

- juger que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes et les autres sommes à compter de l'arrêt,

- condamner la société Météore convoyages à lui remettre une attestation destinée au pôle emploi et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt dans un délai d'un mois à compter de son prononcé,

- condamner la société Météore convoyages à lui verser 1 500 euros au titre des frais irrépétibles de 1ère instance et 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

- condamner la société Météore convoyages aux dépens de première instance et d'appel,

- débouter la société Météore convoyages de l'ensemble de ses demandes.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 27 février 2024.

MOTIVATION

Sur les heures supplémentaires

Sur la recevabilité

L'employeur soulève le caractère libératoire du solde de tout compte au titre des heures supplémentaires réclamées. Il précise que le reçu, faute d'avoir été dénoncé dans les six mois de sa signature, présente un effet libératoire pour les sommes versées à titre de salaire, la demande de rappel d'heures supplémentaires constituant une demande salariale.

Le salarié fait valoir que le caractère libératoire ne concerne que les sommes expressément mentionnées sur le solde de tout compte et que le solde de tout compte qui lui a été remis est restrictif et ne vise que le seul salaire de base à l'exclusion de tout autre élément de salaire. Il note que le solde de tout compte ne fait mention du paiement d'aucune heure supplémentaire et qu'il est recevable à solliciter un rappel de salaire à ce titre.

Aux termes de l'article L. 1234-20 du code du travail, 'le solde de tout compte, établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.

Le reçu pour solde de tout compte peut être dénoncé dans les six mois qui suivent sa signature, délai au-delà duquel il devient libératoire pour l'employeur pour les sommes qui y sont mentionnées.'

En l'espèce, le solde de tout compte daté du 3 octobre 2019 mentionne la somme de 2 811,72 euros décomposée comme suit:

'salaire de base 1 600,12

absence complète - 1600,12

maintien absence maladie 166,16

IJSS brutes absence maladie - 102,21

ajustement du net - 20,05

indemnité compensatrice de congés payés 1 188,99

indemnité de licenciement exonérée 1877,6

impôt sur le revenu prélevé à la source - 8,96".

Ainsi, le solde de tout compte porte uniquement sur le solde de salaire de base s'agissant des éléments de salaire et non pas sur les heures supplémentaires. Par conséquent, il n'a pas d'effet libératoire à l'égard des heures supplémentaires, ce moyen soulevé par l'employeur doit être rejeté.

Sur le fond

En application de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences légales et réglementaires.

Après analyse des pièces produites par l'une ou l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, le salarié indique qu'il a travaillé de nombreuses heures supplémentaires au-delà des 35 heures hebdomadaires de son contrat de travail dans le cadre des nombreux convoyages réalisés aux quatre coins de la France.

Il produit un décompte de ses horaires du 8 juillet 2019 au 2 août 2019 montrant sur une base quotidienne son horaire de prise du véhicule variant de très tôt le matin jusqu'au début de l'après-midi, son trajet de convoyage avec son horaire d'arrivée à des horaires variant du début d'après-midi à tard le soir, son temps de convoyage compris entre 4h et 16h, soit une moyenne de 47,33 heures travaillées par semaine sur quatre semaines, correspondant à 12,33 heures supplémentaires par semaine.

Il verse aux débats à titre de justificatifs des rapports de l'application 'WeProov' utilisée par l'entreprise, des ordres de mission, des bons de commande, des billets de train, des factures d'hôtels sur la période considérée.

Le salarié extrapole ce volume horaire sur les trois dernières années travaillées, et calcule le volume d'heures supplémentaires suivant sur la période de juillet 2017 à juin 2019 :

246 heures supplémentaires en 2017, soit après déduction de 91 heures payées, un solde de 155 heures supplémentaires,

530 heures supplémentaires en 2018, soit après déduction de 139 heures payées, un solde de 391 heures supplémentaires,

271 heures supplémentaires en 2019, soit après déduction de 140 heures payées, un solde de 131 heures supplémentaires.

Après application des taux horaires majorés de 25% et 50%, le salarié sollicite le paiement des sommes suivantes sur la période de juillet 2017 à juin 2019 :

2 269 euros en 2017,

5 699 euros en 2018,

2 175 euros en 2019,

soit un montant total de 10 143 euros.

Il s'en déduit que le salarié présente des éléments suffisamment précis des heures supplémentaires qu'il considère avoir accompli de sorte que l'employeur est en mesure d'y répondre.

L'employeur ne produit pas d'éléments propres de contrôles des heures effectivement travaillées par le salarié et se borne à critiquer le décompte produit par le salarié, insuffisamment justifié. Il relève que le salarié n'a effectué aucune demande pour demander le paiement des heures supplémentaires en question pendant la période salariée.

Après analyse des éléments produits par l'une et l'autre des parties, la cour a la conviction que le salarié a accompli des heures supplémentaires non rémunérées, conformément aux missions qui lui étaient confiées, qu'il convient de fixer à la somme de 5 071,5 euros sur la période de juillet 2017 à juin 2019, outre 507,15 euros au titre des congés payés afférents.

Par conséquent, le jugement attaqué sera infirmé en ce qu'il a débouté M. [I] de ses demandes à ce titre et la société Meteore convoyages sera condamnée à payer à M. [I] les sommes de 5 071,5 euros à titre d'heures supplémentaires sur la période de juillet 2017 à juin 2019, outre 507,15 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

En l'espèce, le salarié ne démontre pas le caractère intentionnel du travail dissimulé, le seul fait que l'employeur ait mentionné sur les bulletins de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli ne permettant pas d'établir ce caractère intentionnel. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [I] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, est libellée comme suit :

« [...] Les motifs de notre décision sont les suivants :

Le 22 mai 2019, comme convenu avec notre client, la société Fleet Logistics, vous avez enlevé un véhicule de la marque Volvo, modèle Xc60 sur le parc automobile de la Société Abbott situé à [Localité 7]. Vous avez enregistré cet enlèvement sur l'Ipad selon la procédure requise.

Toutefois, vous avez livré le véhicule le jour même sans respecter la procédure de livraison qui implique de recueillir la signature du client réceptionnant le véhicule.

En effet, lorsqu'un véhicule est livré, il vous ait demandé d'enregistrer cette livraison sur l'Ipad et de recueillir la signature de la personne qui réceptionne le véhicule. La signature du client est la preuve de la bonne livraison du véhicule.

Lorsque notre client, la société Fleet Logistics nous a demandé de lui fournir les documents liés à la livraison du véhicule, nous étions dans l'impossibilité de répondre à cette demande.

Sans la signature du client qui réceptionne le véhicule, la société Fleet Logistics avait bien la preuve du prélèvement du véhicule par notre entreprise mais nous n'avions aucun moyen de démontrer que nous avions bien effectué la livraison.

En omettant de suivre la procédure de livraison du véhicule, vous avez commis une faute professionnelle préjudiciable à l'entreprise.

En effet, nous avons été contraints d'expliquer votre oubli auprès de la société Fleet Logistics. Votre manquement a nui à l'image de fiabilité de notre société et a altéré la confiance que nous portait la société Fleet Logistics. Or, il s'agit d'un de nos plus gros clients qui nous permet de réaliser environ un quart de notre chiffre d'affaires annuel. Si ce client décide de mettre un terme à nos relations commerciales, la pérennité financière de notre société serait gravement affectée.

De plus, lorsque nous vous avons interrogé sur le non-respect de la procédure de livraison de véhicule, vous avez minimisé le risque représenté par votre manquement et vous n'avez montré aucune préoccupation pour la situation. Cela démontre le désintérêt et la négligence avec lesquels vous effectuez votre prestation de travail.

Nous vous avions déjà notifié un avertissement en date du 28 février 2019 pour une autre faute professionnelle liée au non-respect de la procédure ayant causé une erreur sur le véhicule enlevé. Nous déplorons que cet avertissement ne vous ait pas incité à effectuer votre prestation de travail avec plus de rigueur.

Dans ces conditions, nous considérons que ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement. [...]'

L'employeur reproche au salarié d'avoir livré un véhicule à un client sans bon de réception, ni preuve de la livraison, ce dernier étant mal fondé à se prévaloir d'une absence du client et d'une impossibilité à obtenir un élément de preuve. Il indique qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de justifier de la livraison à son client contrairement à son cahier des charges. Il rappelle le passif disciplinaire du salarié qui s'était trompé de véhicule lors d'un convoyage.

Le salarié fait valoir que le licenciement est fondé sur une absence du client qui était en congés, cette situation ne lui étant pas imputable alors qu'il avait pris soin d'appeler le client pour arrêter les conditions de réalisation du convoyage, de convoyer et restituer le véhicule ainsi que les papiers et clés conformément aux instructions du client, d'informer son responsable des conditions de restitution en cours de trajet. Il indique qu'il n'a jamais eu l'intention de nuire à son employeur.

Sur le bien fondé du licenciement, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

Aux termes de l'article L. 1232-1 du code du travail, 'tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.

Il est motivé par une cause réelle et sérieuse'.

Il ressort du dossier que le 22 mai 2019 le salarié a effectué un convoyage d'un véhicule Volvo, modèle Xc60 enlevé sur le parc automobile de la société Abbott près de [Localité 7] et déposé à [Localité 6] pour le client la société Fleet Logistics.

L'employeur tient rigueur au salarié de ne pas avoir respecté la procédure pour la livraison du véhicule, à défaut de document de livraison et produit aux débats un courriel du 5 juin 2019 de demande de justificatif à travers l'application 'WeProov', le salarié ayant répondu le 6 juin 2019 qu'il n'avait pas fait de retour et en avoir parlé.

L'employeur expose avoir été contraint d'expliquer cette absence de justificatif auprès de la société Fleet Logistics, ce qui a nuit à son image de fiabilité et altéré la confiance du client.

De son côté, le salarié explique que son interlocuteur était absent et lui avait demandé de laisser le véhicule, les papiers et les clés, sans en justifier, qu'il avait prévenu son employeur de cette difficulté, sans en justifier. Il ne produit aucun élément de preuve démontrant qu'il a livré le véhicule comme demandé par le client, en contradiction avec le cahier des charges établi avec le client.

Par conséquent, au vu des éléments fournis par les parties, il y a lieu de considérer que le salarié a commis un manquement en ne respectant pas la procédure de livraison du véhicule dans le cadre d'un convoyage, à défaut de production du moindre élément prouvant cette livraison.

En outre, ce manquement s'inscrit dans le contexte d'un passif disciplinaire, le salarié ayant fait l'objet d'un avertissement le 28 février 2019 pour un autre manquement à la procédure dans le convoyage d'un véhicule.

Il s'en déduit que le licenciement du salarié est fondé sur une faute, constitutive d'une cause réelle et sérieuse. Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a condamné la société Meteore convoyages à payer à M. [I] une somme de 4 686 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et M. [I] doit être débouté de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur les intérêts

En application de l'article 1231-6 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes.

Sur les documents de fin de contrat

Il convient d'ordonner la remise de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de salaire conformes à la présente décision sans qu'il soit nécessaire de fixer de délai.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Meteore convoyages succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. Elle devra également régler à M. [I] une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Meteore convoyages.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a:

- débouté M. [O] [I] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé,

- condamné la société Meteore convoyages à payer à M. [O] [I] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que la société Meteore convoyages supportera les dépens qui comprendront les éventuels frais d'exécution,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Rejette le moyen d'irrecevabilité de la demande de rappel d'heures supplémentaires tiré de l'effet libératoire du solde de tout compte,

Condamne la société Meteore convoyages à payer à M. [O] [I] les sommes suivantes :

5 071,5 euros à titre d'heures supplémentaires sur la période de juillet 2017 à juin 2019,

507,15 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes,

Dit que le licenciement de M. [O] [I] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [O] [I] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Ordonne la remise de l'attestation Pôle emploi et du bulletin de salaire conformes à la présente décision,

Déboute M. [O] [I] de sa demande de fixation de délai,

Condamne la société Meteore convoyages aux dépens d'appel,

Condamne la société Meteore convoyages à payer à M. [O] [I] la somme de

2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Meteore convoyages,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/03166
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;22.03166 ?
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