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16/05/2024 | FRANCE | N°22/03145

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 16 mai 2024, 22/03145


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80O



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 16 MAI 2024



N° RG 22/03145

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPAF



AFFAIRE :



[D] [K]



C/



S.C.P. BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mediapro France



...





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juillet 2022 par le Conseil de P

rud'hommes Formation paritaire de BOULOGNE - BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : 22/00168



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELEURL FREDERIC CHHUM AVOCATS



la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES







le...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80O

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 16 MAI 2024

N° RG 22/03145

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPAF

AFFAIRE :

[D] [K]

C/

S.C.P. BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Mediapro France

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juillet 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de BOULOGNE - BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : 22/00168

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL FREDERIC CHHUM AVOCATS

la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEIZE MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [D] [K]

né le 20 Février 1983 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentant : Me Frédéric CHHUM de la SELEURL FREDERIC CHHUM AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0929

APPELANT

****************

S.C.P. BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], en qualité de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 - Substitué par Me Laura COZ, avocat au barreau de PARIS

AGS CGEA D'IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 13 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE.

M. [D] [K] a été embauché entre le 20 septembre 2012 et le 5 février 2021, par le biais de 466 contrats de travail à durée déterminée d'usage, en qualité de 'technicien supérieur serveur vidéo' (statut de cadre) par la société MEDIAPRO FRANCE, employant habituellement au moins onze salariés et ayant une activité de production et de distribution audiovisuelle.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale des entreprises techniques au service de la création et de l'événement.

Par jugement du 15 septembre 2021, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE et a désigné la société BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 4 février 2022, M. [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt pour demander la requalification des contrats à durée déterminée d'usage en un contrat à durée indéterminée, la requalification de la rupture d'un tel contrat en un licenciement sans cause et sérieuse ainsi que la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de la relation contractuelle, assortie de la garantie de l'AGS.

Par un jugement du 21 juillet 2022, le conseil de prud'hommes a :

- débouté M. [K] de l'ensemble de ses demandes ;

- débouté la société BTSG, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- mis les dépens à la charge de chacune des parties.

Le 18 octobre 2022, M. [K] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 19 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [K] demande la cour d'infirmer l'intégralité du jugement attaqué et, statuant à nouveau, de :

-REQUALIFIER les CDDU successifs en contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel avec reprise d'ancienneté au 20 septembre 2012 (premier CDDU irrégulier) ;

- JUGER que la rupture de la relation de travail du 5 février 2021 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- FIXER à titre principal le salaire de référence à 2.139,67 euros bruts mensuels, correspondant à la moyenne des 12 derniers mois précédant la baisse fautive de sa rémunération, à titre subsidiaire, à 1.430,83 euros bruts mensuels ;

- FIXER AU PASSIF DE LA PROCEDURE de la société MEDIAPRO France à son bénéfice les sommes suivantes :

* 5 000 euros nets à titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi au titre de la violation de la durée quotidienne maximale du travail ;

* 9 000 euros nets à titre d'indemnité de requalification ;

* 6 419 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis à titre principal, subsidiairement, 4.292,49 euros bruts ;

* 641,90 euros bruts à titre des congés payés afférents à titre principal, subsidiairement, 429,25 euros bruts ;

* 5 349,17 euros bruts à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement à titre

principal, subsidiairement, 3 577 euros bruts ;

* 17 117,86 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre principal, subsidiairement, 11 446,64 euros bruts ;

* 45 000 euros nets à titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi en raison de la perte de chance de bénéficier du plan de sauvegarde de l'emploi ;

* 4 000 euros nets au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

* Les dépens éventuels.

- ORDONNER le remboursement par la SCP BTSG, en qualité de liquidateur judiciaire de

la société MEDIAPRO France, à l'organisme concerné, du montant des allocations de chômage versées à Monsieur [K] du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de six mois d'indemnités.

- DEBOUTER la SCP BTSG, en qualité de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO

France, de sa demande de condamnation au remboursement à Pôle emploi de l'ensemble des allocations chômage perçues durant les trois dernières années;

- DECLARER l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France ;

- ORDONNER les intérêts légaux sur les sommes à caractère salarial à compter de la saisine

du Conseil de prud'hommes, et à compter de la notification du jugement pour les autres sommes;

- ORDONNER la remise par la SCP B.T.S.G, en qualité de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO France des documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi, certificat de travail et solde de tout compte) conformes au jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

- ASSORTIR cette injonction d'une astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter du cinquième jour suivant la notification du jugement à intervenir, et se réserver la possibilité de liquider ladite astreinte.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 8 mars 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE, demande à la cour de:

1 ) IN LIMINE LITIS :

- CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du

21 juillet 2021 en ce que Mme [D] [K] ne fait état d'aucune critique sur les moyens du

jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 21 juillet 2021 et par conséquent, DEBOUTER Mme [D] [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

2 ) À TITRE PRINCIPAL :

- CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du

21 juillet 2021 ;

- DEBOUTER Mme [D] [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

3) À TITRE SUBSIDIAIRE :

- RELEVER ET JUGER que Monsieur [D] [K] n'apporte pas la preuve d'un calcul

susceptible de justifier ses demandes pécuniaires ;

- FIXER le salaire de référence de Monsieur [D] [K] à hauteur de 1.271,30 euros ;

- DEBOUTER Monsieur [D] [K] de sa demande de fixation d'une créance de

113.828,15 euros à son bénéfice au passif de la société MEDIAPRO FRANCE ;

- DIRE ET JUGER que cette somme sera fixée à concurrence de 38.134,41 euros au maximum;

- DEBOUTER Monsieur [D] [K] de sa demande de remboursement par la SCP BTSG

à l'organisme concerné du montant des indemnités chômage éventuellement versées au salarié ;

- ORDONNER à Monsieur [D] [K] de rembourser à Pôle Emploi l'ensemble des

allocations chômage perçues durant les 3 dernières années.

4) EN TOUT ÉTAT DE CAUSE :

- CONDAMNER Mme [D] [K] à payer à MEDIAPRO France la somme de 3.000 euros

au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER Mme [D] [K] aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 12 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, l'AGS CGEA Île-de-France Ouest demande à la cour de :

1 ) A Titre Principal :

- CONFIRMER le jugement en toutes ses dispositions

- DEBOUTER M. [K] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions

2) A titre subsidiaire :

- Fixer le salaire de référence de M. [K] à titre principal à 632,50 euros et à titre subsidiaire à 1867,08 euros.

- Limiter les créances fixées au passif compte tenu de ces salaires de référence et de la réalité du

préjudice allégué par M. [K]

3) en tout état de cause :

- METTRE HORS DE CAUSE l'AGS s'agissant de la demande d'astreinte et des frais

irrépétibles de la procédure.

- FIXER l'éventuelle créance allouée au salarié au passif de la Société MEDIAPRO FRANCE.

- DIRE que le CGEA, en sa qualité de représentant de l'AGS, ne devra procéder à l'avance des

créances visées aux articles L 3253-6, L 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15, L 3253-19 à 21 et L 3253-

17 du Code du Travail.

- DIRE ET JUGER que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait

évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra

s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le Mandataire judiciaire et selon les plafonds

légaux.

Une ordonnance de clôture de l'instruction a été rendue le 12 mars 2024.

SUR CE :

Sur la saisine de la cour :

Aux termes des deuxième et troisième alinéas de l'article 954 du code de procédure civile : 'Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte./ La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion'.

En l'espèce, alors que le jugement attaqué déboute M. [K] de l'ensemble de ses demandes, ce dernier, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, demande à la cour 'd'infirmer l'intégralité du jugement' attaqué puis formule ses différentes prétentions.

Le cour constate qu'elle est ainsi saisie de prétentions par l'appelant.

Sur la requalification des contrats à déterminée d'usage en un contrat à durée indéterminée:

Il résulte de la combinaison des articles L.1242-1, L.1242-2, L.1245-1 et D. 1242-1 du code du travail que, dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats à durée déterminée lorsqu'il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l'accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la directive n° 1999/70/CE du 28 juin 1999, en ses clauses 1 et 5, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l'utilisation de ces contrats est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi. Ainsi, la détermination par accord collectif de la liste précise des emplois pour lesquels il peut être recouru au contrat de travail à durée déterminée d'usage ne dispense pas le juge, en cas de litige, de vérifier concrètement l'existence de ces raisons objectives.

En l'espèce, à titre liminaire, il n'est pas contesté que la société MEDIAPRO FRANCE avait une activité dans le secteur de l'audiovisuel qui relève des dispositions des articles L.1242-2 et D.1242-1 mentionnés ci-dessus et que la convention collective permet le recours aux contrat à durée déterminée d'usage pour les fonctions de 'technicien supérieur serveur vidéo' confiées à M. [K].

Par ailleurs, il ressort des pièces versées aux débats et notamment des contrats à durée déterminée d'usage conclus entre les parties que M. [K] a été employé entre le 20 septembre 2012 et le 5 février 2021 par le biais de 466 contrats à durée déterminée d'usage d'une durée de quelques heures ou d'une journée pour le même emploi de 'technicien supérieur serveur vidéo', entrecoupés de périodes intercalaires.

A ce titre, il a travaillé de manière régulière tous les mois sur la période en cause à l'exception, certaines années, de mois d'été, et ce pour un nombre de jours oscillant, en année pleine, entre 24 et 77 jours.

Le travail ainsi confié à M. [K] consistait à participer à la production habituelle de différentes émissions sportives confiées par des clients de la société MEDIAPRO FRANCE à la suite d'appels d'offre, et particulièrement par la société BeIN Sport, ou réalisées par la société elle-même, laquelle constitue le coeur de l'activité de production de la société MEDIAPRO FRANCE, des tâches semblables étant d'ailleurs confiées à des salariés employés par le biais de contrat à durée indéterminée.

Par ailleurs, la société MEDIAPRO FRANCE ne justifie pas que les tâches confiées à M. [K] correspondaient à des remplacements de salariés permanents ou à des 'pics d'activité' de production liés à des événements sportifs ponctuels, contrairement à ce qu'elle prétend.

Dans ces conditions, l'ensemble des contrats en cause avait bien pour objet de pourvoir durablement un poste lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise dans le domaine de la production audiovisuelle et la société MEDIAPRO FRANCE ne justifie pas de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi de technicien supérieur serveur vidéo en litige.

En conséquence, M. [K] est fondé à demander la requalification de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée à compter du 20 septembre 2012, date de son engagement par le biais d'un contrat irrégulier. Le jugement attaqué sera donc infirmé en ce qu'il déboute M. [K] de cette demande de requalification.

Sur l'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée :

En application de l'article L. 1245-2 du code du travail, en cas de requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Le montant minimum de l'indemnité de requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée est calculé selon la moyenne de salaire mensuel dû au titre du contrat dans le dernier état de la relation de travail avant la saisine de la juridiction prud'homale.

M. [K] soutient qu'il est fondé à invoquer, à titre de salaire de référence, la rémunération annuelle perçue en 2019, le salaire versé les années suivantes ainsi que le nombre d'heure de travail fournies ayant diminué ce qui constitue une modification unilatérale du contrat de travail.

Toutefois, la cour rappelle que la requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail.

Il n'y a donc pas lieu de prendre en compte la rémunération de 2019 pour fixer la rémunération moyenne mensuelle afférente au calcul de l'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée.

Au vu des pièces versées, et notamment des bulletins de salaire, la moyenne de salaire mensuel de M. [K] sur les douze derniers mois précédant la rupture s'élève à la somme de

1 430,83 euros brut.

Il sera dans ces conditions fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE une créance d'un montant de 1 500 euros à titre d'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée, en l'absence de justification d'un plus ample préjudice.

Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

Sur la rupture du contrat de travail et les indemnités de rupture :

Lorsqu'un contrat à durée déterminée est requalifié en contrat à durée indéterminée, en cas de rupture des relations contractuelles à l'initiative de l'employeur, les règles applicables au licenciement doivent être respectées.

En l'espèce, il est constant que la relation de travail entre les parties requalifiée en contrat à durée indéterminée a cessé le 5 février 2021 à l'initiative de la société MEDIAPRO FRANCE sans qu'une procédure de rupture n'ait été engagée et notamment sans qu'une lettre de licenciement ne soit adressée à M. [K].

En conséquence, la rupture de la relation de travail s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse à cette date et ouvre droit pour le salarié aux indemnités de rupture.

Ainsi, et eu égard à la rémunération moyenne mensuelle de M. [K] s'élevant ainsi qu'il a été dit ci-dessus à la somme de 1 430,83 euros brut, il y a lieu de fixer au passif de la société MEDIAPRO FRANCE les créances suivantes :

- 4 292,49 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 429,25 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 3 577 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

En outre, M. [K] est fondé à réclamer une créance d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant compris entre un trois et huit mois de salaire brut, eu égard à son ancienneté de huit années complètes, en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail. Eu égard à son âge (né en 1983), à sa rémunération, à l'absence d'éléments sur sa situation postérieure au licenciement, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE une créance de 6 000 euros à ce titre.

Le jugement attaqué sera ainsi infirmé sur ces différents points.

Sur les dommages-intérêts pour perte de chance de bénéficier d'un PSE :

En l'espèce, M. [K] invoque les clause d'un plan de sauvegarde de l'emploi prévu par un accord unilatéral de juin 2021.

Toutefois aucun élément ne démontre que ce plan a été mis en oeuvre, les pièces versées démontrant seulement la mise en oeuvre d'un PSE prévu par un accord collectif du 22 septembre 2021.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le débouté de cette demande.

Sur les dommages-intérêts pour violation de la durée quotidienne maximale de travail :

Aux termes de l'article 5.1.1 de la convention collective : ' La durée quotidienne de travail effectif ne peut excéder 10 heures par jour.

Par exception, cette durée quotidienne peut être portée à 12 heures pour les personnels définis à l'article 5. 5 :

- pour des raisons de sécurité qui nécessitent une intervention rapide, immédiate et continue afin de ne pas mettre en danger des installations et / ou les personnels ;

- pour achever une prestation qui ne peut être interrompue ou poursuivie avec un personnel différent.'.

En l'espèce, il est constant que M. [K] a travaillé dans le courant de l'année 2020, à sept reprises, 12 heures par jour.

Le liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE ne justifie pas de la réalité des motifs prévus par la convention collective, mentionnés ci-dessus, permettant de déroger à la durée maximale légale de 10 heures par jour.

Dans ces conditions, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société une créance d'un montant de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice nécessairement causé par ces violations de la durée maximale quotidienne de travail, en l'absence de justification d'un plus ample préjudice.

Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

Sur la remise de documents sociaux sous astreinte :

Eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'ordonner à la société BTSG, ès qualités de liquidateur judiciaire, de remettre à M. [K] une attestation pour France Travail, un certificat de travail et un solde de tout compte conformes au présent arrêt. Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

En revanche, il y a lieu de confirmer le débouté de la demande d'astreinte à ce titre, une telle mesure n'étant pas nécessaire.

Sur les intérêts légaux :

Il y a lieu de rappeler qu'application des dispositions de l'article L. 622-28 du code du commerce, le jugement du tribunal de commerce du 15 septembre 2021 qui a prononcé l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de la société MEDIAPRO FRANCE a arrêté le cours des intérêts légaux à cette date.

Les créances de nature indemnitaire et salariale de M. [K] ne produiront donc pas intérêts.

Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur la garantie de l'AGS :

Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Ouest qui ne devra procéder à l'avance des créances mentionnées ci-dessus et visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Il sera rappelé en outre que la créance du salariée fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société au titre de l'article 700 du code de procédure civile n'entre pas dans le champ de la garantie de l'AGS.

Sur le remboursement des indemnités de chômage par l'employeur :

Eu égard à la solution du litige, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE, au profit des organismes concernés, une créance au titre des indemnités de chômage éventuellement versées à M. [K] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, et ce dans la limite d'un mois d'indemnités. Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

Sur la demande formée par le liquidateur judiciaire de remboursement par le salarié à Pôle emploi des allocations de chômage perçues pendant les trois dernières années :

Cette demande de remboursement des indemnités de chômage par le salarié à Pôle emploi formée par le liquidateur judiciaire est dépourvue de tout fondement. Il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points.

Il y a lieu de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE au profit de M. [K] une créance de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel.

Les dépens de première instance et d'appel sont mis à la charge du liquidateur judiciaire ès qualités. Ils seront pris en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Constate qu'elle est saisie de prétentions par M. [D] [K],

Infirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il statue sur, les dommages-intérêts pour perte de chance de bénéficier d'un plan de sauvegarde de l'emploi, la demande d'astreinte, la demande de remboursement par M. [D] [K] des allocations de chômage, les intérêts légaux,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Requalifie les contrats de travail à déterminée d'usage conclus entre Mme [D] [K] et la société MEDIAPRO FRANCE en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 septembre 2012,

Dit que la rupture du contrat de travail à durée indéterminée intervenue le 5 février 2021 s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE la créance de M. [D] [K] aux sommes suivantes :

- 1 500 euros à titre d'indemnité de requalification en contrat à durée indéterminée,

- 4 292,49 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 429,25 euros bruts au titre des congés payés afférents,

- 3 577 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

- 6 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour violation de la durée maximale quotidienne de travail,

Ordonne à la société BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE, de remettre à M. [D] [K] une attestation pour France Travail, un solde de tout compte et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Rappelle que les créances de nature salariale de M. [D] [K] portent intérêts légaux à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes jusqu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective et que les créances de nature indemnitaire ne produisent pas intérêts,

Ordonne la capitalisation des intérêts légaux dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Ouest qui ne devra procéder à l'avance des créances mentionnées ci-dessus et visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et déclare que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE une créance de M. [D] [K] d'un montant de 4 000 euros l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en première instance et en appel et rappelle que cette créance n'entre pas dans le champ de garantie de l'AGS CGEA d'Ile de France Ouest,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE, au profit des organismes concernés, une créance au titre des indemnités de chômage éventuellement versées à M. [D] [K] du jour du licenciement au jour de l'arrêt, et ce dans la limite d'un mois d'indemnités,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Met les dépens de première instance et d'appel à la charge de société BTSG, prise en la personne de Me [X] [F], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MEDIAPRO FRANCE et dit qu'ils seront pris en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/03145
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;22.03145 ?
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