La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/05/2024 | FRANCE | N°22/05496

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-2, 07 mai 2024, 22/05496


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 51A



chambre 1 - 2



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 MAI 2024



N° RG 22/05496 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VMQJ



AFFAIRE :



M. [L] [T]



C/

Mme [K] [J] Assistée de sa curatrice l'Association Tutélaire des Yvelines (ATY)



...



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juin 2022 par le Juge des contentieux de la protection de VERSAILLES



N° RG :

11-21-320



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 07/05/24

à :



Me Yasmina SIDI-AISSA



Me Marie-laure TESTAUD



Me Sabrina DOURLEN





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 51A

chambre 1 - 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 MAI 2024

N° RG 22/05496 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VMQJ

AFFAIRE :

M. [L] [T]

C/

Mme [K] [J] Assistée de sa curatrice l'Association Tutélaire des Yvelines (ATY)

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juin 2022 par le Juge des contentieux de la protection de VERSAILLES

N° RG : 11-21-320

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 07/05/24

à :

Me Yasmina SIDI-AISSA

Me Marie-laure TESTAUD

Me Sabrina DOURLEN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT MAI DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [L] [T]

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représentant : Maître Yasmina SIDI-AISSA, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 411

APPELANT

****************

Madame [K] [J] Assistée de sa curatrice l'Association Tutélaire des Yvelines (ATY) dont le siège est situé [Adresse 2] et désignée en cette qualité par jugement rendu le 25 mai 2021 par le Juge des Contentieux de la Protection près le tribunal judiciaire de Versailles, dont le siège social est situé [Adresse 2]

née le 06 Juillet 1973 à [Localité 8]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Maître Marie-laure TESTAUD, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 483

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro C78646202300042 du 09/06/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

S.A. LES RESIDENCES, Société Anonyme d'Habitations à Loyer Modéré à Directoire Général et Conseil de surveillance, venant aux droits de l'OPIEVOY

N° SIRET : 308 435 460 RCS Versailles

Ayant son siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Maître Sabrina DOURLEN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 453

Représentant : Maître Frédéric CATTONI de la SELARL CABINET SALLARD CATTONI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS -

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Décembre 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe JAVELAS, Président,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 12 novembre 2014, la société Les Résidences a donné à bail à Mme [J] et M. [T] un logement à usage d'habitation sis [Adresse 4] à [Localité 10], pour un loyer mensuel initial de 413, 42 euros hors charges.

Par acte de commissaire de justice délivré le 12 février 2021, la société Les Résidences a assigné Mme [J] et M. [T] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Versailles aux fins de, à défaut de conciliation :

- condamner solidairement Mme [J] et M. [T] à lui payer au titre d'arriérés de loyers, charges et frais la somme de 5 680 euros,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail passé entre les parties,

A titre subsidiaire,

- prononcer la résiliation du bail pour impayé de loyer conformérnent aux articles 1729 et 1741 du code civil,

- condamner Mme [J] et M. [T] à lui payer à compter de la résiliation du bail précité une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi et ce jusqu'à la libération effective des lieux,

- prononcer en conséquence l'expulsion de Mme [J] et M. [T] et de leurs biens et de tous occupants de leur chef des lieux loués, au besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier,

- prononcer en conséquence l'expulsion de Mme [J] et M. [T] à lui payer à compter de la résiliation du bail précité une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus si le bail s'était poursuivi et ce jusqu'à la libération effective des lieux,

- prononcer le transport et la séquestration des meubles et objets mobiliers garnissant les lieux dans un garde-meuble qu'il désignera ou dans tel lieu au choix du bailleur et sans garantie de toutes sommes qui pourront être dues conformément aux articles R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution du décret n° 2012-783 du 30 mai 2012,

- dire et juger que les frais de gardiennage et de transport du mobilier seront à la charge du locataire,

- condamner Mme [J] et M. [T] au paiement d'une somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [J] et M. [T] aux dépens de la présente instance au titre de l'article 696 du code de procédure civile,

- prononcer l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant 1'exercice de toutes voies de recours.

Par jugement contradictoire du 2 juin 2022, le tribunal judiciaire de Versailles a :

- déclaré la demande d'acquisition de la clause résolutoire de la société Les Résidences recevable,

- constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire figurant au bail conclu le 12 novembre 2014 entre la société Les Résidences et Mme [J] et M. [T] concernant l'appartement à usage d'habitation situé au [Adresse 4] - à [Localité 9] sont réunies à la date du 15 juin 2020,

- dit que Mme [J] et M. [T] sont redevables d'une indemnité d'occupation à compter de la date d'acquisition de la clause résolutoire,

- dit n'y avoir lieu à délais de paiement,

- ordonné en conséquence à Mme [J] et M. [T] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement,

- dit qu'à défaut pour Mme [J] et M. [T] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, la société Les Résidences pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

- condamné Mme [J] et M. [T] solidairement à verser à la société Les Résidences la somme de 9 643,18 euros (décompte arrêté au 28 mars 2022, incluant les loyers, charges et indemnité d'occupation jusqu'à l'échéance du mois de février 2022), avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

- condamné Mme [J] et M. [T] solidairement à payer à la société Les Résidences une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter de l'échéance de mars 2022, la dette locative incluant l'indemnité d'occupation due jusqu'à l'échéance du mois de février 2022, et ce jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'enlèvement, le transport et la séquestration des meubles éventuellement laissés sur place et dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1, L. 433-2 du Code des procédures civiles d'exécution,

- rejeté la demande de la société Les Résidences au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [J] et M. [T] in solidum aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et des notifications à la CCAPEX et à la préfecture,

- rappelé que la présente décision est immédiatement exécutoire,

- débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif.

Par déclaration reçue au greffe en date du 26 août 2022, M. [T] a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 5 janvier 2023, M. [T], appelant, demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 2 juin 2022 en ce qu'il a :

- dit que M. [T] était redevable d'une indemnité d'occupation à compter de la date d'acquisition de la clause résolutoire,

- ordonné en conséquence à M. [T] de libérer les lieux et restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement,

- dit qu'à défaut pour M. [T] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, la société Les Résidences pourra deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux et faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

- condamné M. [T] solidairement à verser à la société Les Résidences la somme de 9 643,18 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

- condamné M. [T] à payer à la société Les Résidences une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi à compter de l'échéance de mars 2022, la dette locative incluant l'indemnité d'occupation due jusqu'à l'échéance du mois de février 2022 et ce jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux,

- condamné Mme [J] et M. [T] in solidum aux dépens qui comprendront notamment le coût du commandement de payer, de l'assignation et des notifications à la CCAPEX et à la préfecture,

Statuant de nouveau de ces chefs :

- débouter la société Les Résidences de toutes ses demandes en ce qu'elles sont dirigées contre M. [T],

- condamner la société Les Résidences à verser la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Les Résidences aux entiers dépens de la procédure d'appel.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 23 octobre 2023, la société Les Résidences, intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :

- adjuger à la société Les Résidences le bénéfice des présentes, et y faisant droit,

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf :

* en ce qu'il a ordonné l'expulsion de M. [T],

* à actualiser le montant de la dette,

Statuant à nouveau,

- ordonner l'expulsion de Mme [J], ainsi que de tout occupant de son chef des lieux sis à [Adresse 4] à [Localité 9],

- condamner Mme [J] à payer à la société Les Résidences la somme de 12 008,77 euros au titre de l'arriéré au 12 octobre 2023, terme de septembre 2023 inclus,

En tout état de cause,

- débouter M. [T] de toutes ses demandes,

- débouter Mme [J] de toutes ses demandes et appels incidents,

- condamner M. [T], ou toute partie succombante, à payer à la société Les Résidences une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [T] ou toute partie succombante, aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont le recouvrement sera effectué par Me Dourlen, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses conclusions signifiées le 22 mai 2023, Mme [J], intimée assistée de son curateur, demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* dit que Mme [J] et Mme [T] sont redevables d'une indemnité d'occupation à compter de la date d'acquisition de la clause résolutoire,

* dit n'y avoir lieu à délais de paiement,

* ordonné en conséquence à Mme [J] et M. [T] de libérer les lieux et de restituer les clés dans le délai de quinze jours à compter de la signification du présent jugement,

* dit qu'à défaut pour Mme [J] et M. [T] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, la société Les Résidences pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux, faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique,

* condamné Mme [J] et M. [T] solidairement à verser à la société Les Résidences la somme de 9 643,18 euros (décompte arrêté au 28 mars 2022, incluant les loyers. charges et indemnité d'occupation jusqu'à l'échéance du mois de février 2022), avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement,

* condamné Mme [J] et M. [T] solidairement à payer à la société Les Résidences une indemnité mensuelle d'occupation d'un montant équivalent à celui du loyer et des charges, tel qu'il aurait été si le contrat s'était poursuivi, à compter de l'échéance de mars 2022, la dette locative incluant l'indemnité d'occupation due jusqu'à l'échéance du mois de février 2022, et ce jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux,

* débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif,

Statuant à nouveau :

- octroyer à Mme [J], assistée de sa curatrice l'association tutélaire des Yvelines, un délai de paiement de trois ans conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi n°89-462 et en conséquence la suspension des effets de la clause résolutoire,

- débouter la société Les Résidences de toutes ses demandes plus amples ou contraires à l'égard de Mme [J].

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 novembre 2023.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et l'expulsion des occupants

M. [T], appelant, fait grief au premier juge d'avoir retenu que le bail serait résilié à son égard et celui de Mme [J] par suite de l'acquisition de la clause résolutoire.

Il conteste également le jugement en ce qu'il a ordonné son expulsion des lieux.

Il fait valoir qu'il est divorcé de Mme [J] depuis un jugement rendu le 12 juillet 2019 par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles qui a attribué la jouissance du logement à Mme [J] uniquement.

Le divorce a été retranscrit sur les registres d'état civil le 3 octobre 2019.

Il indique qu'il n'est plus titulaire du bail depuis la date de la retranscription et que, par suite, le tribunal ne pouvait constater que la clause résolutoire du bail était acquise à son égard le 15 juin 2020, ni ordonner son expulsion.

Mme [J] intimée et appelante à titre incident, indique, s'agissant de l'expulsion ordonnée, s'associer à la demande de M. [T] et précise avoir communiqué en première instance le jugement de divorce informant la société les Résidences de la situation.

Elle fait valoir que M. [T] a quitté le logement six mois après le prononcé du divorce et qu'il ne résidait plus dans le logement lorsque le commandement de quitter les lieux a été délivré.

Elle soutient qu'il n'est pas contesté qu'il n'existait pas de dette locative lors du départ de M. [T] du logement et s'associe à sa demande portant sur l'infirmation du jugement de ce chef.

La société Les Résidences, intimée, indique qu'aucun élément n'avait été produit devant le premier juge démontrant que le divorce aurait été retranscrit sur les registres d'état civil et donc qu'il lui serait opposable.

Elle fait valoir devant la cour que, compte tenu des preuves rapportées en appel, il apparaît que M. [T] n'est plus titulaire du bail depuis octobre 2019 et n'habite plus les lieux, de sorte que son expulsion ne saurait être ordonnée.

Elle demande que le jugement entrepris soit réformé sur ce point et qu'il soit seulement ordonné l'expulsion de Mme [J] ainsi que des occupants de son chef.

Elle fait valoir concernant la clause résolutoire du bail, que c'est à bon droit que le premier juge a constaté qu'elle était acquise, faute pour Mme [J] d'avoir apuré les causes du commandement délivré le 15 avril 2020.

Elle sollicite la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire à l'égard de Mme [J].

Sur ce,

L'article 1134 du code civil, dans sa rédaction en vigueur au moment de la conclusion du contrat objet du présent litige dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutées de bonne foi.

L'article 24-1 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989 prévoit que "toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux".

L'article 1751 du code civil dispose que : 'Le droit au bail du local, sans caractère professionnel ou commercial, qui sert effectivement à l'habitation de deux époux, quel que soit leur régime matrimonial et nonobstant toute convention contraire et même si le bail a été conclu avant le mariage, ou de deux partenaires liés par un pacte civil de solidarité, dès lors que les partenaires en font la demande conjointement, est réputé appartenir à l'un et à l'autre des époux ou partenaires liés par un pacte civil de solidarité.

En cas de divorce ou de séparation de corps, ce droit pourra être attribué, en considération des intérêts sociaux et familiaux en cause, par la juridiction saisie de la demande en divorce ou en séparation de corps, à l'un des époux, sous réserve des droits à récompense ou à indemnité au profit de l'autre époux.

En cas de décès d'un des époux ou d'un des partenaires liés par un pacte civil de solidarité, le conjoint ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité survivant co-titulaire du bail dispose d'un droit exclusif sur celui-ci sauf s'il y renonce expressément'.

En l'espèce, il est établi que M. [T] et Mme [J] ont contracté mariage le 4 juin 2011 devant l'officier d'état civil de [Localité 11].

Une procédure de divorce a ensuite été initiée et une ordonnance de non-conciliation a été rendue le 7 décembre 2018.

Le divorce a été prononcé par jugement du 12 juillet 2019 rendu par le juge aux affaires familiales de Versailles, aux termes duquel le droit au bail a été attribué à Mme [J], divorcée [T].

Le divorce a été retranscrit sur les actes d'état civil et notamment l'acte de mariage par mention apposée le 3 octobre 2019.

Il se déduit des constatations qui précèdent qu'à compter de cette date, le divorce est devenu opposable à la société les Résidences qui ne pouvait l'ignorer lors de la procédure devant le premier juge, postérieure à cette date. La retranscription du jugement de divorce ayant attribué le droit au bail à Mme [J] a mis fin à la co-titularité du bail conventionnelle dont se prévalait la société Les Résidences pour obtenir condamnation à l'encontre de M. [T].

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné l'expulsion de M. [T] qui n'était plus co-titulaire du bail à la date de la décision déférée.

S'agissant de l'acquisition de la clause résolutoire, le bail conclu le 12 novembre 2014 contient une clause résolutoire (article 13 b) et un commandement de payer visant cette clause a été signifié le 15 avril 2020, pour la somme en principal de 1 637,03 euros, représentant le montant des loyers impayés, terme du mois de mars 2020 inclus.

Ce commandement est demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte qu'il y a lieu de constater que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 15 juin 2020.

L'expulsion de Mme [K] [J] et de tous occupants de son chef doit, de ce fait, être ordonnée et le jugement déféré, dès lors, confirmé de ce chef à l'égard de Mme [J].

Sur la dette locative

Il y a lieu de rappeler que le paiement des loyers et charges aux termes convenus dans le contrat est une obligation essentielle du locataire, résultant tant des dispositions contractuelles du bail signé entre les parties que de l'article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989.

La société Les Résidences produit un décompte actualisé démontrant que Mme [K] [J] reste lui devoir la somme de 12 008,77 euros, correspondant à l'arriéré arrêté au 12 octobre 2023, terme de septembre 2023 inclus.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a condamné solidairement M. [T] au paiement d'un arriéré locatif et d'une indemnité d'occupation ; seule Mme [J], titulaire du bail, sera condamnée au paiement de cette somme actualisée à 12 008,77 euros.

Sur la demande de délais de paiement

Mme [J] sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de délais.

Elle expose avoir rencontré des difficultés personnelles à compter de l'année 2019, notamment de santé l'ayant empêché de régler régulièrement ses loyers.

Par décision du juge des tutelles de Versailles en date du 25 mai 2021, il a été ordonné l'ouverture d'une mesure de curatelle renforcée à son profit au regard de son état de santé.

L'Association Tutélaire des Yvelines, désignée en qualité de curatrice, a pris attache auprès du bailleur afin de l'informer de la mesure et de solliciter la transmission des avis d'échéance des loyers.

Des démarches en vue d'un relogement ont été engagées par l'Association Tutélaire des Yvelines et un refus d'attribution de logement lui a été notifié le 3 février 2022 faute de revenus suffisants.

Un dossier de surendettement auprès de la Banque de France a été déposé et par décision du 28 novembre 2022, la commission a décidé d'un effacement total des dettes comprenant notamment celle de la société les Résidences à hauteur de 11 769,68 euros.

Elle indique ne pas avoir été informée de l'existence d'un appel de cette décision.

Elle soutient que la caisse d'allocations Familiales (CAF) lui a rétabli les droits à l'aide personnalisée au logement (APL) de 273,45 euros par mois, qui est versée directement à la société Les Résidences, et que depuis le rétablissement de cette aide, elle règle l'intégralité du loyer restant à sa charge au moyen de ses ressources actuelles composées du revenu de solidarité active (RSA) qui s'élève à 526,72 euros par mois.

Elle fait également valoir que, par décision du 9 mars 2023, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) a réévalué sa situation et lui a attribué une allocation aux adultes handicapés (AAH) pour la période du 18/07/2022 au 30/11/2024.

Elle soutient que le montant de cette aide va lui permettre de régler les loyers courants et, en outre, d'apurer sa dette de loyer.

Elle sollicite l'octroi d'un délai de paiement de trois ans en application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil et de l'article 24 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs.

La société Les Résidences rappelle que la dette de Mme [J] s'élève à la somme de 12 008,77 euros, terme de mai 2023 inclus, et que ce montant au 12 octobre 2023, terme de septembre 2023 inclus, n'a point évolué.

Elle soutient qu'au regard de ses revenus, Mme [J] n'est pas en mesure d'apurer sa dette à l'égard de la société Les Résidences, dans un délai de 3 ans et alors qu'elle n'a pas commencé à essayer d'apurer sa dette et règle ses loyers de manière irrégulière.

Elle demande à la cour de la débouter de sa demande de délais et de confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur ce,

Selon de l'article 1343-5 du code civil, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, le juge peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.

Il appartient au débiteur qui sollicite un tel délai d'effectuer une offre sérieuse et précise de règlement et d'apporter des éléments de preuve concernant sa situation financière, à savoir notamment ses revenus et ses charges prévisibles, éléments permettant de penser raisonnablement qu'il est en capacité de régler l'intégralité de sa dette dans le délai proposé.

Mme [J] ne peut utilement se prévaloir du caractère définitif d'une décision de la commission de surendettement alléguée qui aurait prononcé l'effacement de sa dette locative à l'égard de la société Les Résidences, dans la mesure où elle ne justifie pas de son caractère définitif et ne permet ainsi pas à la cour d'exercer un contrôle de son application sur le montant de la dette actuelle plus élevée que celle dont elle indique avoir fait l'objet d'un effacement.

En outre, Mme [J] a déjà bénéficié de délais importants dans le cadre de la présente procédure, et n'indique pas comment ses très faibles ressources actuelles lui permettraient, même dans un délai de 36 mois, de régler une somme aussi importante que celle au paiement de laquelle elle est condamnée et dont elle ne conteste pas le montant actualisé.

Il y a donc lieu de rejeter sa demande de délais et de confirmer le jugement déféré.

Sur les mesures accessoires :

La société Les Résidences, qui succombe au principal, sera condamnée à payer à M. [T] la somme de 1 200 euros au titre des frais de procédure par lui exposés sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Les Résidences, partie perdante, est condamnée aux dépens d'appel ; Mme [J] sera seule condamnée aux dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS.

La cour,

Statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonnée l'expulsion de M. [L] [T] et l'a condamné au paiement d'un arriéré de loyers, d'indemnité d'occupation et aux dépens de première instance ;

Statuant à nouveau sur les chefs de jugement infirmés

Déboute la société Les Résidences de ses demandes d'expulsion et en paiement dirigées contre M. [L] [T] ;

Condamne Mme [K] [J], divorcée [T], assistée de sa curatrice l'association tutélaire des Yvelines, à payer à la société les Résidences la somme actualisée de 12 008,77 euros au titre de l'arriéré au 12 octobre 2023, terme de septembre 2023 inclus;

Condamne Mme [K] [J], divorcée [T], assistée de sa curatrice l'association tutélaire des Yvelines, aux dépens de première instance ;

Ajoutant au jugement entrepris

Déboute Mme [K] [J], divorcée [T], assistée de sa curatrice l'association tutélaire des Yvelines ;

Déboute la société Les Résidences de ses demandes ;

Condamne la société Les Résidences à verser à M. [L] [T] la somme de 1200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Les Résidences aux dépens d'appel.

- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Anne-Sophie COURSEAUX, le Faisant Fonction de Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le faisant fonction de greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-2
Numéro d'arrêt : 22/05496
Date de la décision : 07/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-07;22.05496 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award