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25/04/2024 | FRANCE | N°22/07505

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-6, 25 avril 2024, 22/07505


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78F



Chambre civile 1-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 22/07505 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VSFI



AFFAIRE :



S.A.S. EOS FRANCE



C/



[Y] [P]



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2022 par le Juge de l'exécution de PONTOISE

N° RG : 22/00264



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

déli

vrées le : 25.04.2024

à :



Me Julien BAOUADI avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE





Me Firmine AKLE avocat au barreau de VAL D'OISE







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La co...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78F

Chambre civile 1-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 AVRIL 2024

N° RG 22/07505 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VSFI

AFFAIRE :

S.A.S. EOS FRANCE

C/

[Y] [P]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2022 par le Juge de l'exécution de PONTOISE

N° RG : 22/00264

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 25.04.2024

à :

Me Julien BAOUADI avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Me Firmine AKLE avocat au barreau de VAL D'OISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. EOS FRANCE

Anciennement dénommée EOS CREDIREC, venant aux droits de la société COFINOGA

N° Siret : 488 825 217 (RCS Paris)

[Adresse 5]

[Localité 6]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Julien BAOUADI, Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 359 - Représentant : Me Eric BOHBOT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur [Y] [P]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 7] (Cote D'ivoire)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentant : Me Firmine AKLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 231

INTIMÉ

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 8 juillet 2003, la société Cofinoga a consenti à M. [Y] [P] une offre préalable de crédit. 

Après avoir prononcé la déchéance du terme, la société Cofinoga a obtenu contre M. [P] une ordonnance d'injonction de payer en date du 13 février 2007, portant sur la somme de 7 916,97 euros outre les intérêts au taux contractuel de 16,52% l'an à compter du 13 juillet 2006, outre une somme de 100 euros au titre de l'indemnité légale et les entiers dépens. Cette ordonnance signifiée le 12 juillet 2007, a reçu du greffier du tribunal d'instance de Montmorency l'apposition de la formule exécutoire le 21 septembre 2007.

La société EOS Credirec, devenue par la suite EOS France, venant aux droits du créancier suivant convention de cession de créances du 24 septembre 2014, signifiée à M. [P] par exploit d'huissier du 15 février 2016, a fait procéder à une saisie-attribution entre les mains du Crédit Lyonnais par acte du 6 décembre 2021, dénoncé à M. [P] le 14 décembre 2021, qui a permis de bloquer la somme de 507,97 euros après déduction sur solde bancaire insaisissable. 

Statuant sur la contestation de cette mesure sur assignation de M [P] du 13 janvier 2022, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise, par jugement contradictoire du 28 novembre 2022, a : 

constaté la recevabilité de la contestation par M. [P] de la saisie-attribution diligentée à son encontre par la SAS EOS France le 6 décembre 2021 

annulé l'acte de signification de l'ordonnance en injonction de payer revêtue de la formule exécutoire du 27 septembre 2007 

constaté la prescription de l'ordonnance en injonction de payer du 13 février 2007 revêtue de la formule exécutoire le 21 septembre 2007 

condamné la SAS EOS France à payer à M. [P] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile 

condamné la SAS EOS France aux dépens 

rappelé que l'exécution provisoire de la présente décision est de droit 

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le 14 décembre 2022, la SAS EOS France a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises au greffe le 16 octobre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, l'appelante demande à la cour de :

confirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise (RG N° 22/00264) le 28 novembre 2022 qui a constaté la recevabilité de la contestation par M. [P] de la saisie-attribution diligentée a' son encontre par la société EOS France le 6 décembre 2021 

infirmer le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Pontoise (RG N°22/00264) le 28 novembre 2022 qui a annulé l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer revêtue de la formule exécutoire du 27 septembre 2007, qui a constaté la prescription de l'ordonnance d'injonction de payer du 13 février 2007 revêtue de la formule exécutoire le 21 septembre 2007, qui a condamné la société EOS France a' payer a' M. [P] une somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamné aux dépens 

Statuant a' nouveau des chefs du jugement infirmés : 

débouter M. [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions 

dire et juger que l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer revêtue de la formule exécutoire du 27 septembre 2007 est valable 

dire et juger que l'ordonnance d'injonction de payer du 13 février 2007 revêtue de la formule exécutoire le 21 septembre 2007 n'est pas prescrite 

condamner M. [P] aux entiers dépens 

condamner M. [P] a' payer a' la SAS EOS France la somme de 3 500,00 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. 

Au soutien de ses demandes, la SAS EOS France fait valoir : 

que la cession de créance du 24 septembre 2014 de la société Laser Cofinoga, anciennement Cofinoga à la société EOS Credirec, devenue EOS France, est bien régulière puisque l'acte de cession comportait tous les éléments requis ; que cette cession de créance a été dûment signifiée à M. [P] par exploit d'huissier du 15 février 2016 par acte remis à personne, conformément à l'article 1690 ancien du code civil, et qu'elle lui est donc opposable ; que, la qualité à agir de la société EOS France est, par conséquent, justifiée ;

que l'adresse « [Adresse 2] » a toujours été l'unique et dernière adresse de M. [P] connue du créancier au moment de signifier l'ordonnance d'injonction de payer, M. [P] n'ayant jamais informé son créancier de son changement d'adresse ; que l'huissier a entrepris des diligences suffisantes, notamment en vérifiant que le nom de M. [P] apparaissait toujours sur la boîte aux lettres ; que, par ailleurs, M. [P] a eu connaissance de l'ordonnance d'injonction de payer étant donné que celle-ci lui a été signifiée le 12 juillet 2007 à tiers présent au domicile entre les mains de Mme [Z], sa cousine, qui a certifié le domicile et a accepté de recevoir l'acte ; que M. [P] n'a pas contesté cette procédure ni formé opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ; que toutefois le délai d'opposition n'ayant pas couru à défaut d'une signification à personne, M. [P] ne peut se prévaloir d'un grief puisque ses droits à recours n'ont jamais été méconnus; 

que le titre exécutoire n'est pas prescrit ; qu'en vertu des nouvelles dispositions issues de la loi du 17 juin 2008 réformant les délais de prescription, le titre exécutoire aurait été prescrit le 19 juin 2018 ; que le 4 avril 2017, une saisie-attribution a été pratiquée sur les comptes bancaires de M. [P], laquelle a valablement interrompu la prescription du titre exécutoire en application de l'article 2244 du code civil.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 1er février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, M. [P], intimé, demande à la cour de :

A titre principal, 

confirmer le jugement rendu le 28 novembre 2022 dans toutes ses dispositions 

condamner la société EOS France à verser 3000 euros à M. [P] au titre des dommages et intérêts en réparation des dommages subis 

A titre subsidiaire, 

dire que les sommes dues ne porteront pas d'intérêt ou à un taux réduit au moins égal au taux légal 

fixer la somme réclamée par la société EOS France à la somme de 7 916,97 euros 

accorder à M. [P] un échelonnement à la somme réclamée par des échéances mensuelles de 50 euros par mois sur 23 mois et le solde à la 24ème échéance 

condamner la société EOS France à verser à M. [P] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile 

condamner la société EOS France aux entiers dépens. 

Au soutien de ses demandes, M. [P] fait valoir : 

qu'il n'a jamais été informé de l'existence de l'ordonnance d'injonction de payer avant la saisie du 6 décembre 2021 ; que la signification préalable du 12 juillet 2007 a été remise à une tierce personne, à savoir une cousine, et que lors de la signification de l'ordonnance revêtue de la formule exécutoire le 27 septembre 2007, à [Localité 9], il avait déménagé depuis le 25 juillet 2007 au [Adresse 3] à [Localité 8] ; que le titre exécutoire dont se prévaut la société EOS n'est donc pas valide ;

qu'au demeurant, le titre exécutoire signifié en 2007 est prescrit ; que contrairement à ce que soutient la société EOS France, la saisie-attribution prétendument pratiquée le 4 avril 2017 n'a pas pu avoir d'effet interruptif, faute de lui avoir été dénoncée ou en tout cas, l'acte de dénonciation devant être annulé faute d'avoir été régularisé à son adresse de [Localité 8] ; 

qu'à titre subsidiaire, il convient de lui accorder des délais de paiement sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil et de préciser que les sommes dues ne porteront pas d'intérêts ou à un taux réduit au moins égal au taux légal ; que ces délais sont justifiés par sa situation personnelle et financière.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 6 février 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 6 mars 2024 et le prononcé de l'arrêt au 25 avril 2024, par mise à disposition au greffe de la cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond par voie de conséquence aux moyens que pour autant qu'ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.

La cour ne peut que constater à cet égard en réponse aux longs développements de la société EOS France sur la cession de créance et son opposabilité à M. [P], que ce dernier n'a dénié sa qualité à agir au poursuivant, ni devant le premier juge ni en cause d'appel. Il n'y a pas lieu de trancher cette question qui ne fait pas débat.

Sur la signification du titre exécutoire préalable à sa mise à exécution

L'article 503 du code de procédure civile, prescrit que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés.

M. [P] soutient que la signification de l'ordonnance d'injonction de payer faite le 27 septembre 2007 au [Adresse 2] chez Mme [Z] à [Localité 9] par dépôt à l'étude de l'huissier n'est pas valable au motif que depuis le 25 juillet 2007, il avait emménagé au [Adresse 3] à [Localité 8], adresse qui est toujours la sienne à ce jour.

Le premier juge a suivi son argumentation en relevant qu'en limitant ses investigations à la vérification du nom figurant sur la boîte aux lettres, l'huissier n'a pas procédé à des diligences suffisantes pour chercher à remettre l'acte à la personne de son destinataire, et que cette irrégularité avait été cause d'un grief à raison du caractère non contradictoire de la procédure d'injonction de payer, dont M. [P] n'a pas eu connaissance.

La société EOS France fait observer que l'adresse de Mme [Z] à [Localité 9] est celle dont Magistrat délégué par le Président [P] avait justifié pour souscrire le prêt en 2003, ainsi qu'à l'occasion de la signature de l'avenant du 24 septembre 2005, que lors de la signification initiale de l'ordonnance le 12 juillet 2007, Mme [Z] qui a accepté l'acte, a confirmé qu'il s'agissait bien du domicile de M. [P] ; qu'il ne peut faire le reproche à l'huissier de ne pas lui avoir signifié l'acte à [Localité 8] alors qu'il n'a jamais informé ni l'huissier ni son créancier d'un changement de coordonnées le concernant ; qu'il est coutumier du procédé consistant à entretenir le flou sur son adresse véritable puisque tout en prétendant qu'il n'a jamais changé d'habitation située [Adresse 3] à [Localité 8] jusqu'à ce jour, il s'était domicilié au [Adresse 4] à [Localité 8] dans son assignation saisissant le juge de l'exécution, qu'au moment de signifier la déclaration d'appel la personne rencontrée sur place a confirmé ce domicile ce qui n'a pas empêché M [P] de faire un incident de caducité en prétendant qu'il n'avait jamais cessé de résider au [Adresse 3].

Il est exact que l'adresse située chez Mme [Z] [Adresse 2] à [Localité 9] était celle dont M [P] avait justifié à son créancier au moment de contracter le crédit, confirmée lors de la conclusion d'un avenant le 24 septembre 2005. Il ne justifie pas avoir averti son créancier d'une autre domiciliation possible, ou qu'il aurait définitivement quitté cette adresse pour s'installer [Adresse 3] à [Localité 8]. Si la seule présence du nom du destinataire sur une boîte aux lettres a pu être jugée insuffisante pour exonérer l'huissier de vérifications complémentaires, il convient de tenir compte du contexte à savoir qu'en l'espèce Mme [Z], rencontrée sur place le 12 juillet 2007, a non pas averti l'huissier que M [P] était sur le point de déménager quelques jours plus tard, mais a confirmé qu'il s'agissait de son domicile. C'est en outre en application de l'article 114 du code de procédure civile à celui qui se prévaut d'une irrégularité en la forme d'un acte de justice de faire la preuve du grief qui en est résulté. En l'espèce, le grief ne peut pas être celui d'une privation des voies de recours contre l'ordonnance puisque celle-ci n'ayant pas été notifiée à personne, le délai d'opposition n'a pas commencé à courir le 27 septembre 2007.

Or, si le grief consiste dans l'ignorance prétendue de l'acte par M [P], ce dernier, en ayant laissé son nom inscrit sur la boîte aux lettres de Mme [Z], et en n'ayant pas fait suivre son courrier par les services de la poste pendant un an comme il est d'usage, ce qui lui aurait permis de recevoir en temps utiles la lettre prévue par l'article 658 du code de procédure civile que l'huissier indique également avoir adressée dans le délai imparti aux terme d'une mention valant jusqu'à inscription de faux, à supposer que Mme [Z] qui l'a reçu pour lui ne le lui ait pas transmis, il a directement concouru à l'émergence de ce prétendu grief, qui ne peut dès lors être rattaché aux diligences de l'huissier.

Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a invalidé la signification de l'ordonnance d'injonction de payer du 13 février 2007 pour en déduire que la saisie avait été effectuée sans titre exécutoire valable.

Sur la prescription du titre exécutoire

Le jugement dont appel a tenu pour conséquence de l'absence de signification valable de l'ordonnance exécutoire, l'irrégularité de tous les actes d'exécution subséquents qui n'ont dès lors pas produit d'effet interruptif de prescription, pour en déduire que l'ordonnance du 13 février 2007 était prescrite.

Dès lors que la signification de l'ordonnance est reconnue comme étant valable, en application des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 dont est issu l'article L111-4 du code des procédures civiles d'exécution fixant à 10 ans le délai pour exécuter une décision de justice, l'ordonnance du 13 février 2007 exécutoire depuis le 21 septembre 2007, pouvait être exécutée pendant 10 ans à compter de l'entrée en vigueur de la réforme ayant diminué le délai antérieur qui était de 30, soit jusqu'au 19 juin 2018.

La société EOS France se prévaut de l'effet interruptif résultant de l'article 2244 du code civil, produit par une saisie-attribution du 4 avril 2017, dénoncée le 12 avril 2017, et qui a produit un effet partiel par l'effet du paiement par le tiers saisi sur signification du certificat de non-contestation à la banque le 19 mai 2017, de la somme appréhendée de 1025,45 euros, sous déduction du solde bancaire insaisissable.

M [P] soutient que la dénonciation de cette saisie, faite au [Adresse 4] à [Localité 8] au lieu du 13 rue des Fossettes dans la même commune doit être déclarée nulle et de nul effet la privant en particulier de tout effet interruptif.

Force est cependant de constater que le procès-verbal de signification de la dénonciation de cet acte le 12 avril 2017 relate qu'il a été laissé entre les mains de son fils [N] qui l'a accepté en confirmant qu'il s'agissait bien du domicile de son père, dont le nom est inscrit sur la boîte aux lettres. Il ne peut pas prétendre qu'il ne résidait pas à cette adresse puisque c'est là que l'a trouvé l'huissier le 15 février 2016 lorsqu'il lui a remis à sa personne la signification de la cession de créance au profit de la société EOS Crédirec devenue EOS France, et que c'est bien celle qu'il donnait encore dans son assignation du 13 janvier 2022, qui a été reprise sur le jugement dont appel. D'ailleurs, son fils [N] rencontré sur place lors de la dénonciation de la saisie le 14 décembre 2021, ainsi que Mme [R] rencontrée le 26 janvier 2023 lors de la signification de la déclaration d'appel, qui s'est présentée comme étant sa compagne, ont tous deux confirmé à l'huissier de justice que M [P] résidait toujours en ce lieu, [Adresse 4] à [Localité 8]. Au demeurant, il ne tente même pas de décrire le grief qui en serait résulté alors que la mesure du 4 avril 2017 ayant été partiellement fructueuse, il ne peut l'avoir ignorée.

Le délai de prescription ayant dûment été interrompu par cette mesure d'exécution forcée, faisant courir un nouveau délai de 10 ans, le droit du créancier d'exécuter le titre exécutoire fondant la saisie du 6 décembre 2021 n'était pas éteint par la prescription.

Le jugement doit en conséquence être infirmé en toutes ses dispositions.

Sur le montant de la créance et la demande de délais de paiement

M. [P] demande que le montant de la créance soit limité au principal de 7 916,97 euros, et qu'il ne produise d'intérêts qu'au taux légal. Il n'a cependant développé au soutien de cette prétention aucun moyen dans la partie discussion de ses conclusions. A défaut de tout fondement légal à l'appui d'une telle demande, il ne peut y être fait droit. Il ne conteste pas autrement le décompte de la créance.

En ce qui concerne les délais de paiement, il se prévaut de l'article 1343-5 du code civil qui dispose que, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondantes aux échéances reportées portent intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital.

M [P] fait valoir que sa situation ne lui permet pas de régler la dette en une fois, qu'il a perçu un revenu de 3106 euros en 2022, qu'il est père de 3 enfants et qu'il a à sa charge le reste de sa famille restée au pays en Côte d'Ivoire, ce qui l'a contraint à recourir à de nombreux crédits, qu'il évalue ses charges à une somme de 2501 euros par mois.

Il ne ressort cependant pas de son dernier avis d'imposition qu'il ait 3 enfants à charge puisque son quotient fiscal est fixé à 1,5 parts. Son revenu fiscal de référence s'est établi en 2022 à 37 279 euros, et il justifie de son loyer de 605,32 euros.

Il propose de payer le montant de sa dette sur 24 mois, par versements de 50 euros, le solde à la dernière échéance. Il ne précise ce faisant nullement par quel moyen il garantit le paiement du solde à l'issue de ce délai. Il doit être rappelé qu'un délai de grâce pour ne pas devenir dilatoire, doit assurer au créancier un paiement intégral et lui faire l'économie de mesures de recouvrement forcé, en contrepartie de sa patience. A défaut, sa demande ne peut qu'être rejetée.

M. [P] qui succombe supportera les entiers dépens de première instance et d'appel et l'équité commande d'allouer à la partie intimée la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,

INFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

Constate que le titre exécutoire fondant la créance a valablement été signifié et que le droit de l'exécuter n'est pas prescrit ;

Déboute M. [P] de l'ensemble de ses contestations et de ses demandes ;

Condamne M. [P] à payer à la société EOS France la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [P] aux dépens de première instance et d'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-6
Numéro d'arrêt : 22/07505
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.07505 ?
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