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25/04/2024 | FRANCE | N°22/07355

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-6, 25 avril 2024, 22/07355


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53B



Chambre civile 1-6



ARRET N°



DÉFAUT



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 22/07355 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VRYG



AFFAIRE :



[R] [J]



C/



[W] [C]



S.A.S. EOS FRANCE



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Juin 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NANTERRE

N° RG : 20/06141



Expéditions exécutoires

Expédition

s

Copies

délivrées le : 25.04.2024

à :



Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Frédérique LEPOUTRE de la SCP SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE D'AVOCATS LEPOUTRE



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FR...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53B

Chambre civile 1-6

ARRET N°

DÉFAUT

DU 25 AVRIL 2024

N° RG 22/07355 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VRYG

AFFAIRE :

[R] [J]

C/

[W] [C]

S.A.S. EOS FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Juin 2022 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de NANTERRE

N° RG : 20/06141

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 25.04.2024

à :

Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Frédérique LEPOUTRE de la SCP SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE D'AVOCATS LEPOUTRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [R] [J]

[Adresse 10]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentant : Me Pierre BORDESSOULE DE BELLEFEUILLE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 392, substitué par Me Mikael KERVENNIC, avocat au barreau de VERSAILLES

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/007324 du 21/10/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)

APPELANTE

****************

S.A. SOCIETE GENERALE

N° Siret : B 552 120 222 (RCS Paris)

[Adresse 4]

[Localité 6]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Frédérique LEPOUTRE de la SCP SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE D'AVOCATS LEPOUTRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 709 - N° du dossier 202107

INTIMÉE

Monsieur [W] [C]

[Adresse 3]

[Localité 8]

INTIMÉ DÉFAILLANT

****************

S.A.S. EOS FRANCE

Agissant en vertu d'une lettre de désignation en date du 17 janvier 2022 en qualité de représentant recouvreur du FONDS COMMUN DE TITRISATION FONCRED V, représenté par la société FRANCE TITRISATION, S.A.S immatriculée au RCS de PARIS sous le n° 353 053 531, ayant son siège social [Adresse 1].

Venant aux droits de la SOCIETE GENERALE, SA ayant son siège social à [Adresse 9], ayant pour unique n° d'identification B 552 120 222 RCS PARIS, représentée par son Président en exercice, en vertu d'un bordereau de cession de créances en date du 03 août 2022 soumis aux dispositions du code monétaire et financier

N° Siret : 488 825 217 (RCS Paris)

[Adresse 5]

[Localité 7]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Frédérique LEPOUTRE de la SCP SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE D'AVOCATS LEPOUTRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 709

PARTIE INTERVENANTE VOLONTAIRE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MICHON, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre émise le 3 octobre 2005, la Société Générale a consenti à M. [C] et à Mme [J], agissant solidairement entre eux, un prêt immobilier dit " évolutif " d'un montant de 104 387 euros, remboursable en 291 échéances mensuelles, en ce compris une période de différé de 3 mois, au taux de 3,55% l'an hors assurance.

Ce prêt était destiné à financer une opération d'un montant total de 225 000 euros d'acquisition et de réalisation de travaux dans un appartement constituant la résidence principale des emprunteurs, [Adresse 11] (92).

A compter du mois d'août 2018, M. [C] et Mme [J] ont cessé de procéder au paiement des échéances dues au titre de ce prêt.

Par courrier recommandé du 7 novembre 2019, retourné à l'expéditeur 'pli avisé et non réclamé', les emprunteurs ont été mis en demeure de régler l'arriéré des échéances du prêt, à hauteur de 5 380,87 euros, dans un délai de huit jours, à peine du prononcé de l'exigibilité anticipée du prêt.

Par lettres recommandées avec avis de réception du 27 juillet 2020, revenues avec la mention 'destinataire inconnu à cette adresse' pour celle adressée à M. [C] et avec la mention 'pli avisé et non réclamé' pour celle adressée à Mme [J], la Société Générale a notifié aux emprunteurs que, faute de régularisation de la situation, elle se prévalait de l'exigibilité anticipée du prêt, et les a mis en demeure de lui régler, à ce titre, la somme de 111 246,76 euros.

Ces mises en demeure étant restées vaines, la Société Générale, par actes d'huissier délivrés le 4 août 2020, a fait assigner M. [C] et Mme [J] en paiement devant le tribunal judiciaire de Nanterre.

Par jugement rendu le 10 juin 2022, réputé contradictoire en l'absence de M. [C], assigné selon les modalités prévues par l'article 659 du code de procédure civile, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

condamné solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 110 701,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020,

condamné in solidum M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

rappelé que l'exécution provisoire est de droit,

condamné M. [C] et Mme [J] aux dépens, dont distraction au profit de Maître Frédérique Lepoutre, avocat associé de la SCP BLST,

rejeté le surplus des demandes,

rappelé qu'en application des dispositions de l'article 478 du code de procédure civile, le présent jugement deviendra non avenu s'il n'est pas notifié dans les six mois de sa date.

Par acte du 3 août 2022, la Société Générale a cédé la créance par elle détenue à l'encontre de M. [C] et de Mme [J] au Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, société de gestion, le recouvrement de la créance étant confié, par le cessionnaire, à la société EOS France, présent à l'acte.

Après avoir sollicité, le 28 juin 2022, l'aide juridictionnelle, Mme [J] a, le 7 décembre 2022, relevé appel du jugement susvisé.

Par conclusions du 14 février 2023, la société EOS France, agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, est intervenue volontairement à l'instance.

M. [C], à qui la déclaration d'appel a été signifiée le 29 décembre 2022, selon les modalités prévues par l'article 659 du code de procédure civile, et à qui les conclusions des parties ont été dûment signifiées, n'a pas constitué avocat.

Par ordonnance rendue le 5 mars 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction et a fixé la date des plaidoiries au 7 mars 2024.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 19 juin 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, Mme [J], appelante, demande à la cour de :

la recevoir en ses demandes et y faisant droit

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ; rejeté le surplus des demandes de (sic),

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : condamné solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 110 701,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 ; condamné in solidum M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; rappelé que l'exécution provisoire est de droit ; condamné M. [C] et Mme [J] aux dépens dont distraction au profit de Maître Frédérique Lepoutre, avocat associé de la SCP BLST ; rejeté le surplus des demandes de Mme [J],

Et statuant à nouveau :

A titre principal :

constater la forclusion et dire que la concluante n'est en rien recevable (sic) et en tirer les conséquences de droit dont la condamnation à restituer toutes les sommes indûment perçues,

dire que les articles L312-7 et L312-10 du code de la consommation (dans leurs versions en vigueur lors de la souscription) ont été violés,

En conséquence :

dire que la totalité des paiements reçus de Mme [J] et M. [C] à titre d'intérêts conventionnels seront imputés sur le capital restant dû,

juger que la Société Générale a commis une faute occasionnant un préjudice direct et certain à Mme [J],

condamner la Société Générale à verser solidairement (sic) des dommages et intérêts à Mme [J] en réparation du préjudice subi pour un montant de 110 000 euros,

A titre subsidiaire :

rectifier toute erreur de décompte,

ordonner à la banque la restitution des sommes indûment remboursées par les exposants,

juger que la situation financière de Mme [J] est obérée,

En conséquence,

octroyer les plus larges délais de paiement au profit de Mme [J],

autoriser Mme [J] à régler la Société Générale par des versements mensuels de 150 euros, et solde au 24ème mois,

reporter ou échelonner en conséquence le paiement des sommes éventuellement dues par Mme [J] et prescrire que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit qui ne peut être inférieur au taux légal ou que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital,

En tout état de cause,

condamner la Société Générale au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure de 1ère instance,

débouter la partie adverse de toutes ses demandes s'opposant aux présentes,

condamner la partie adverse à verser à Maître [M] Bordessoule de Bellefeuille une somme de 2 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 700 du code de procédure civile, sous réserve que Maître [M] Bordessoule de Bellefeuille renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat,

condamner aux entiers dépens la partie adverse, tant pour la procédure de première instance que celle d'appel, lesquels seront recouvrés par Maître Bordessoule de Bellefeuille sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 2 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Société Générale, intimée, appelante incidente, demande à la cour de :

A titre principal,

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 10 juin 2022 en ce qu'il condamne in solidum M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; rappelle que l'exécution provisoire est de droit ; condamne M. [C] et Mme [J] aux dépens, dont distraction au profit de Me Frédérique Lepoutre, avocat associé de la SCP BLST,

infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 10 juin 2022 en ce qu'il prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ; condamne solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 110 701,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020,

Statuant à nouveau,

déclarer Mme [J] mal fondée en l'ensemble de ses demandes et l'en débouter,

débouter Mme [J] de sa demande de constatation de la forclusion et de condamnation de la Société Générale à restituer toutes les sommes indûment perçues,

débouter Mme [J] de sa demande consistant à voir imputer la totalité des paiements reçus de Mme [J] et M. [C] à titre d'intérêts conventionnels sur le capital restant dû,

juger que la Société Générale n'a pas commis de faute occasionnant un préjudice direct et certain à Mme [J],

débouter Mme [J] de sa demande de condamnation de la Société Générale à lui payer la somme de 110 000 euros en réparation du préjudice subi,

débouter Mme [J] de sa demande de rectification du décompte et de restitution de sommes indûment remboursées par elle-même et M. [C],

débouter Mme [J] de sa demande de condamnation de la Société Générale à lui verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

condamner solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à EOS France agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation la somme de 111 246,76 euros telle qu'arrêtée au 27 juillet 2020 augmentée des intérêts au taux conventionnel majoré, soit 6,55% à compter du 28 juillet 2020 jusqu'à parfait paiement,

A titre subsidiaire,

condamner solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la société EOS France agissant en qualité de recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation la somme de 110 701,69 euros (après déchéance du droit aux intérêts) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 (date de l'exigibilité) jusqu'à parfait paiement,

débouter Mme [J] de sa demande de dommages et intérêts à hauteur de la somme de 110 000 euros comme étant totalement infondée, et si par impossible la cour retient une responsabilité de la banque et fixe à ce titre des dommages et intérêts, en limiter le montant et dire que la compensation avec les sommes dues au titre du prêt s'appliquera,

Y ajoutant,

condamner Mme [J] aux entiers dépens de l'appel.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 2 février 2024, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société EOS France, agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, venant aux droits de la Société Générale, intervenant volontaire, demande à la cour de :

confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 10 juin 2022 en ce qu'il condamne in solidum M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; rappelle que l'exécution provisoire est de droit ; condamne M. [C] et Mme [J] aux dépens, dont distraction au profit de Me Frédérique Lepoutre, avocat associé de la SCP BLST,

infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nanterre le 10 juin 2022 en ce qu'il prononce la déchéance du droit aux intérêts conventionnels ; condamne solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 110 701,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020,

Statuant à nouveau,

déclarer Mme [J] mal fondée en l'ensemble de ses demandes et l'en débouter,

débouter Mme [J] de sa demande de constatation de la forclusion et de condamnation de la Société Générale à restituer toutes les sommes indûment perçues,

débouter Mme [J] de sa demande consistant à voir imputer la totalité des paiements reçus de Mme [J] et M. [C] à titre d'intérêts conventionnels sur le capital restant dû,

juger que la Société Générale n'a pas commis de faute occasionnant un préjudice direct et certain à Mme [J],

débouter Mme [J] de sa demande de condamnation de la Société Générale à lui payer la somme de 110 000 euros en réparation du préjudice subi,

débouter Mme [J] de sa demande de rectification du décompte et de restitution de sommes indûment remboursées par elle-même et M. [C],

débouter Mme [J] de sa demande de condamnation de la Société Générale à lui verser une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

condamner solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à EOS France agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation la somme de 111 246,76 euros telle qu'arrêtée au 27 juillet 2020 augmentée des intérêts au taux conventionnel majoré, soit 6,55% à compter du 28 juillet 2020 jusqu'à parfait paiement,

A titre subsidiaire,

condamner solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la société EOS France agissant en qualité de recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation la somme de 110 701,69 euros (après déchéance du droit aux intérêts) augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 (date de l'exigibilité) jusqu'à parfait paiement,

Y ajoutant,

condamner Mme [J] à payer à la société EOS France agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'appel.

A l'issue de l'audience, l'affaire a été mise en délibéré au 25 avril 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION 

Sur l'étendue de la saisine de la cour

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion, et qu'elle ne répond aux moyens que pour autant qu'ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.

Elle rappelle également, s'agissant des prétentions énoncées au dispositif saisissant la cour, que les demandes de 'dire' ou de 'juger' qui ne tendent qu'au rappel des moyens invoqués à l'appui des demandes sans conférer de droit à la partie qui les requiert, ne sont pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile.

Sur la prescription

Mme [J] invoque la 'forclusion' de la demande principale en paiement, en faisant valoir, au visa de l'article L.218-2 du code de la consommation ( ancien article L.137-2), qui s'applique précise-t-elle aux crédits immobiliers, que, à tout le moins pour une partie des sommes réclamées, la partie adverse ne justifie pas de façon claire et évidente que le premier impayé soit intervenu dans le délai de deux ans, sans au demeurant préciser par rapport à quel terme.

A l'appui du rejet du moyen, la Société Générale et la société Eos France objectent que la première échéance impayée est celle du 8 août 2018, ce qui ressort tant des lettres recommandées avec accusé de réception des 7 novembre 2019 et 27 juillet 2020 adressées aux emprunteurs, comportant des décomptes de créances annexés, mais également du courrier de réclamation de Mme [J] du 21 novembre 2019, rappelant que le prêt a été remboursé jusqu'en juillet 2018, et qu'en novembre 2019, le montant cumulé d'impayés s'élevait à la somme de 5 157 euros, ce qui revient à faire remonter les échéances impayées à celle du 8 août 2018, soit moins de 2 ans avant l'assignation.

Aux termes de l'article L.218-2 ( anciennement L. 137-2) du code de la consommation, qui édicte une règle de prescription et non une règle de forclusion, étant rappelé qu'il s'agit de deux notions distinctes, et étant observé qu'il n'existe pas de forclusion pour les crédits immobiliers dans le code de la consommation, l'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans.

En application de ce texte, à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance : ainsi, l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, tandis que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.

La plus ancienne échéance impayée dont le recouvrement est poursuivi, ainsi qu'il résulte des décomptes établis à l'appui de la demande en paiement, est celle du 8 août 2018 ; la déchéance du terme a été prononcée le 27 juillet 2020, tandis que la demande en justice, qui interrompt la prescription, est du 4 août 2020.

Dans ces conditions, la demande en paiement, formulée moins de deux ans après la date du premier impayé, ne se heurte à aucune prescription.

A supposer, pour les besoins du raisonnement, que des échéances antérieures aient été impayées, ce qu'au demeurant l'appelante ne prouve pas, alors qu'elle soutient elle-même ( sa pièce n°10 notamment) que le prêt a été remboursé jusqu'au 7 juillet 2018, ceci serait absolument sans incidence sur la recevabilité de la demande en paiement telle qu'elle est soumise à la cour, puisque celle-ci ne porte pas sur des échéances antérieures au 8 août 2018.

Le moyen est donc écarté.

Sur la validité de la déchéance du terme

Mme [J] soutient que la déchéance du terme du prêt soulevée par la banque est irrégulière, étant rappelé que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la déchéance du terme doit être expresse, et la mise en demeure de la banque doit préciser le délai imparti pour y faire obstacle ; qu'en outre, la banque a été déloyale et fautive en empêchant de facto toute possibilité de faire obstacle à la déchéance du terme, notamment en refusant, sans même y répondre, toutes ses propositions de régularisation ; qu'enfin, la clause dont se prévaut la banque pour demander la déchéance du contrat est abusive en ce qu'elle prévoit que la déchéance peut avoir lieu en cas de 'non paiement à son échéance d'une mensualité ou de toutes sommes dues à la Société Générale, à un titre quelconque' ; que dès lors, le caractère abusif de cette clause est équivoque (sic) en ce qu'il suffit d'un retard de paiement d'une somme de 343 euros pour que la banque puisse exiger immédiatement un remboursement intégral majoré des intérêts conventionnels, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les parties au profit de l'établissement bancaire professionnel.

Selon la Société Générale et la société Eos France, la déchéance du terme n'a rien d'équivoque ni d'irrégulier. Elle a été prononcée selon courrier adressé en LRAR à M. [C] et Mme [J] le 27 juillet 2020, après une mise en demeure préalable des emprunteurs de rembourser les échéances impayées, notamment selon LRAR en date du 7 novembre 2019. Contrairement à ce que soutient l'appelante, cette dernière a disposé d'un délai suffisant pour régulariser sa situation avant le prononcé de la déchéance du terme, et en outre, la banque a pris soin, dans sa lettre de mise en demeure contenant exigibilité du prêt, de permettre à ses clients de faire échec à la déchéance du terme en se rapprochant d'elle sous un délai de 8 jours. Les conditions dans lesquelles la déchéance du terme a été prononcée sont conformes aux dispositions contractuelles telles que visées à l'article 11 des conditions générales du prêt. Et il est justifié que la déchéance du terme a été prononcée dans des circonstances permettant aux clients de réagir, ce qu'ils n'ont pas fait.

Il est stipulé à l'article 11 A des conditions générales du contrat de prêt, intitulé ' Exigibilité anticipée - défaillance de l'emprunteur' :

' La Société Générale pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts, primes et surprimes d'assurance, échus mais non payés [en cas de ] non-paiement, à son échéance, d'une mensualité ou de toute somme dues à la Société Générale, à un titre quelconque, en vertu des présentes (...).

[Dans ce cas] la Société Générale notifiera à l'emprunteur (...), par lettre recommandée avec AR, qu'elle se prévaut de la présente clause et prononce l'exigibilité anticipée du prêt.

La Société Générale n'aurait pas à faire prononcer en justice la déchéance du terme qui lui demeurerait acquise nonobstant tous paiements ou régularisations postérieurs à l'exigibilité prononcée.'

En premier lieu, ces dispositions telles qu'énoncées ci-dessus ne dispensent pas la banque d'une mise en demeure ou d'une sommation préalable au prononcé de la déchéance du terme, et ne l'autorisent pas à exiger immédiatement, sans une telle mise en demeure ou sommation préalable, la totalité des sommes dues au titre du prêt en cas de défaillance de l'emprunteur.

Ainsi, contrairement à ce que soutient l'appelante, il ne suffit pas d'un retard de paiement d'une seule échéance de 343 euros pour que le solde du prêt devienne immédiatement et automatiquement exigible par la banque.

Ainsi qu'elle en justifie, la banque a, avant de prononcer l'exigibilité anticipée du prêt, envoyé aux emprunteurs une lettre recommandée avec demande d'avis de réception, datée du 7 novembre 2019, leur demandant de régler, dans les 8 jours de la réception de cette lettre, les échéances non réglées du prêt, soit 5 380,87 euros, à défaut de quoi l'exigibilité anticipée du prêt serait prononcée.

La lettre, présentée le 9 novembre 2019, a été retournée à l'expéditeur avec la mention 'pli avisé et non réclamé', mais il résulte de ses propres productions que Mme [J] en a eu connaissance, puisqu'elle verse aux débats des courriers électroniques datés des 15 et 21 novembre 2019, adressés à la personne désignée par la lettre comme étant celle à contacter, et faisant référence à ce courrier du 7 novembre 2019.

Il n'y a donc pas eu d'exigibilité immédiate prononcée sans mise en demeure préalable précisant le délai imparti pour y faire obstacle.

En second lieu, les dispositions susvisées ne stipulent pas non plus la résiliation de plein droit du contrat de prêt après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d'une durée raisonnable : elles prévoient en effet que l'exigibilité anticipée du prêt doit être prononcée par la banque pour qui elle reste une simple faculté, et notifiée à l'emprunteur, et ne fixent aucun délai dans lequel l'emprunteur devrait nécessairement avoir régularisé sa situation pour faire obstacle à la déchéance du terme.

Dans ces conditions, faute que les clauses dont Mme [J] soutient le caractère abusif figurent dans le contrat de prêt, le moyen invoqué ne peut prospérer.

Quant à la mise en oeuvre de la clause, si Mme [J] prétend que la banque a été déloyale et fautive en empêchant de facto toute possibilité de faire obstacle à la déchéance du terme, et en refusant, sans même lui répondre, ses propositions de régularisation, elle ne justifie pas que les emprunteurs ont effectivement réglé tout ou partie des échéances en retard entre la réception de la mise en demeure et le prononcé de la déchéance du terme, et a fortiori dans le délai imparti par la banque. Elle réclame, dans son courrier électronique du 15 novembre 2019, la transmission d'un RIB de la Société Générale, en précisant que 'si [elle] peut alimenter le compte de la Société Générale avant le 7 décembre [elle le fera]', et évoque, dans son courrier électronique du 21 novembre suivant, des accords pris avec la banque pour la reprise du remboursement du prêt à partir du 7 décembre 2019 et pour le règlement de la moitié de l'arriéré à partir du mois de janvier 2020, en demandant que lui soient transmis un RIB pour le règlement des mensualités du prêt et une proposition de protocole pour le remboursement des impayés, mais elle ne justifie pas de l'accord effectif de la banque pour le règlement partiel échelonné qu'elle lui propose, ni même d'avoir réellement tenté d'apurer une partie de l'arriéré du prêt, ce qui ne nécessitait pas obligatoirement qu'elle dispose du RIB de la banque, de sorte que la banque, qui n'était pas obligée d'accepter le remboursement partiel et échelonné proposé par Mme [J], n'a agi ni de manière déloyale ni de manière fautive en prononçant, plusieurs mois plus tard, la déchéance du terme, alors que les emprunteurs avaient bénéficié d'un délai d'une durée parfaitement raisonnable au regard du montant réclamé pour régulariser leur situation.

Le moyen tiré de l'irrégularité de la déchéance du terme, nouvellement soutenu en cause d'appel, est donc écarté.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Selon l'appelante, c'est à raison que le tribunal a prononcé, conformément à sa demande, la déchéance du droit de la banque aux intérêts conventionnels. Alors que l'envoi de l'offre par voie postale à l'emprunteur éventuel constitue une formalité substantielle, dont le non respect par l'organisme de crédit est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts, la banque, ainsi qu'elle le reconnaît elle-même, n'est pas en mesure de justifier de l'envoi aux deux emprunteurs de l'offre de prêt émise le 3 octobre 2005 par voie postale, de sorte qu'elle doit être déchue de son droit aux intérêts. Dès lors que la banque est déchue de son droit aux intérêts, ajoute-t-elle, les juges peuvent imputer les intérêts contractuels déjà payés par l'emprunteur sur le capital restant dû.

A l'appui de son appel incident sur ce point, la Société Générale, de même que la société EOS France qui s'associe à l'argumentation développée, fait valoir que compte tenu de l'ancienneté du dossier, elle n'a pas retrouvé les lettres d'envoi de l'offre ; que pour autant, il ne saurait être fait application de la jurisprudence consistant à voir imputer les intérêts contractuels déjà payés par l'emprunteur sur le capital restant dû, alors que Mme [J] vient opposer ce moyen plus de 15 ans après la date à laquelle le contrat de prêt a été consenti et a reçu application ; qu'en outre, l'acceptation de l'offre versée aux débats par Mme [J] démontre sans contestation possible que les emprunteurs ont bénéficié du délai de réflexion de 10 jours ; qu'enfin, la demande de Mme [J] consistant à voir appliquer la déchéance du droit aux intérêts pour la banque se heurte à la prescription de l'article 2224 du code civil.

Le délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts, qui été ramené à 5 ans depuis la loi du 17 juin 2008, court en vertu de l'article 2224 du code civil, à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur affectant l'offre de prêt qu'il critique, soit à compter de la date de l'acceptation de l'offre lorsque l'examen de sa teneur permet de constater le non respect des formalités légales, soit, lorsque tel n'est pas le cas, à compter de la date de la révélation de ce manquement.

Mme [J] fait valoir, à l'appui de sa demande, des manquements de la banque aux dispositions des articles L. 312-7 et L.312-10 (anciens) du code de la consommation, en vertu desquels le prêteur est tenu de formuler par écrit une offre adressée gratuitement par voie postale à l'emprunteur éventuel ainsi qu'aux cautions déclarées par l'emprunteur lorsqu'il s'agit de personnes physiques, l'envoi de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de trente jours à compter de sa réception par l'emprunteur, l'offre est soumise à l'acceptation de l'emprunteur et des cautions, personnes physiques, déclarées, l'emprunteur et les cautions ne peuvent accepter l'offre que dix jours après qu'ils l'ont reçue, et l'acceptation doit être donnée par lettre, le cachet de la poste faisant foi.

Les conditions d'envoi de l'offre de prêt, la date de sa réception par les emprunteurs, la date d'acceptation de celle-ci, et les modalités de son renvoi pouvant être constatées par les emprunteurs dès la conclusion du contrat de prêt, observation faite que les intéressés, dans le document intitulé 'acceptation de l'offre par les emprunteurs', produit par l'appelante, qu'ils ont signé, ont déclaré l'avoir reçue en deux exemplaires, par voie postale, le 4 octobre 2005, et l'accepter le 15 octobre 2005, le délai de prescription de l'action en déchéance du droit aux intérêts a commencé à courir dès l'acceptation de l'offre de prêt, soit à compter du 15 octobre 2005. En sorte que ce délai, qui était amplement suffisant pour permettre à un contractant normalement vigilant de s'assurer du respect de ses droits, tout en préservant l'impératif de sécurité juridique des contrats, était expiré lorsque Mme [J] a, reconventionnellement devant le tribunal, demandé que la totalité des paiements reçus par la banque à titre d'intérêts conventionnels soient imputés sur le capital restant dû.

Dans ces conditions, le jugement déféré est infirmé en ce que, faisant droit à cette demande, il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

Sur le quantum dû

Mme [J] critique le jugement, s'agissant du quantum de la condamnation prononcée à son encontre, au motif qu'il n'a pas tenu compte de la forclusion, ni de l'irrégularité de la déchéance du terme, et qu'en tout état de cause, il n'a pas procédé à une rectification exhaustive des erreurs de décompte à la banque la restitution des sommes indûment remboursées par les exposants (sic). En revanche, ajoute-t-elle, c'est à raison que le tribunal a rejeté la demande de capitalisation des intérêts, comme constituant un coût non mentionné aux articles L.312-39 et L.312-40 du code de la consommation.

La Société Générale objecte que Mme [J] ne produit aucun élément de nature à rapporter la preuve du montant susceptible de venir s'imputer sur le capital, comme elle prétend le voir opérer ; qu'au surplus, la déchéance du droit aux intérêts n'a pas à recevoir application, au regard de la prescription de cette demande ; que le quantum de la créance doit être retenu pour la somme de 111 246,76 euros telle qu'arrêtée au 27 juillet 2020, augmentée des intérêts au taux conventionnel majoré, soit 6,55% à compter du 28 juillet 2020 jusqu'à parfait paiement.

La société EOS France fait valoir les mêmes observations, et rappelle que, venant aux droits de la Société Générale, c'est désormais elle-même qui est créancière de Mme [J] et de M. [C].

Comme dit ci-dessus, la cour retient qu'aucune forclusion ni prescription ne peut être opposée à la banque, que la déchéance du terme du prêt a été valablement prononcée, et qu'il n'y a pas lieu de prononcer la déchéance du droit du prêteur aux intérêts conventionnels, une telle demande se heurtant à la prescription de l'article 2224 du code civil.

L'article 11 B des conditions générales du contrat de prêt stipule que :

' Toutes sommes dues au titre du prêt, y compris en cas d'exigibilité anticipée, porteront au jour de leur exigibilité normale ou anticipée et jusqu'à complet paiement, intérêts, sans mise en demeure préalable, aux taux stipulé dans les conditions particulières.

Si le prêteur n'exige pas le remboursement immédiat desdites sommes, le taux ci-dessus pourra être majoré de 3 points jusqu'à ce que l'emprunteur ait repris le cours normal des échéances contractuelles. (...).

Par contre, si le prêteur exige le remboursement immédiat des sommes dues, il peut demander une indemnité qui ne peut dépasser 7% desdites sommes.'

Il est produit à l'appui de la demande en paiement un décompte portant sur la période du 8 août 2018 au 27 juillet 2020, détaillant chacune des échéances impayées, et le calcul des intérêts appliqués à ces échéances impayées, au taux (majoré) de 6,55%, et mentionnant le montant du capital dû à la déchéance du terme, 102 449,77 euros, soit une somme totale due de 111 246,76 euros.

Mme [J] n'indique pas à la cour quelles sont les erreurs qu'il contiendrait, qui mériteraient d'être rectifiées ; elle ne fait valoir aucune critique utile à l'encontre de ce décompte détaillé, et n'oppose aucun décompte contraire.

En conséquence, le décompte de la banque doit être retenu, et les emprunteurs condamnés solidairement au paiement de la somme de 111 246,76 euros.

Eu égard aux stipulations contractuelles rappelées ci-dessus, le taux d'intérêt applicable à cette condamnation est le taux conventionnel de 3,55%, et non pas le taux majoré réclamé par le créancier : l'application du taux majoré cesse lorsque le prêteur décide de prononcer la déchéance du terme, le prêteur pouvant, en cas de prononcé de la déchéance du terme, réclamer non plus l'application d'un taux d'intérêt majoré, mais une indemnité de 7% des sommes dues, laquelle n'est pas réclamée en l'espèce.

Quant à la capitalisation des intérêts, qui a été à raison écartée par le tribunal, elle n'est pas sollicitée en cause d'appel.

Enfin, la société EOS France justifie de la cession de la créance de la Société Générale au Fonds Commun de Titrisation Foncred V, représenté par la société France Titrisation, et de sa propre désignation en qualité de recouvreur.

Dans ces conditions, M. [C] et Mme [J] seront condamnés solidairement à régler à la société EOS France, ès qualités, une somme de 111 246,76 euros, arrêtée au 27 juillet 2020, avec intérêts au taux de 3,55% à compter du 28 juillet 2020.

Le jugement déféré est infirmé en conséquence.

Sur la demande de dommages et intérêts de Mme [J]

Mme [J] soutient, tout d'abord, que la banque a commis des manquements graves à ses obligations d'information, de conseil, de mise en garde et de loyauté contractuelle, sur lesquels le jugement entrepris reste silencieux. Elle fait valoir, ensuite, que la banque a commis une faute, en clôturant, au mois d'août 2018, sans les en informer, le compte contentieux interne à la Société Générale, ouvert après la clôture du compte personnel de M. [C], sur lequel étaient prélevées les mensualités de remboursement du prêt, dont M. [C], qui selon ce qu'avaient convenu les emprunteurs devait prendre en charge le remboursement du prêt, virait le montant depuis un autre compte bancaire ouvert auprès de Hello Bank. Par ailleurs, alors qu'elle avait prévenu la Société Générale qu'elle serait en mesure, au mois de mars 2020, de régler une partie importante des impayés, puisqu'elle allait percevoir l'AAH rétroactivement, le service contentieux de la banque n'en a pas tenu compte, et ne lui a même pas répondu, alors qu'il devait à tout le moins lui communiquer un RIB pour le versement des mensualités de remboursement du prêt qu'elle souhaitait reprendre. Le comportement fautif de la banque, qui est à l'origine des impayés du prêt, lui a causé un préjudice matériel indéniable, puisqu'elle a subi un appauvrissement important et se trouve dans une situation financière obérée.

En outre, ces difficultés financières et l'attitude fautive de la banque ont causé une dégradation notable de son état de santé : les poussées de sclérose en plaques dont elle est victime sont incontestablement liées aux périodes de stress intense qu'elle a vécues de son fait. Outre son état de santé, sa carrière est gravement affectée par les négligences de la banque, en particulier dans le secteur bancaire et financier, où elle a toujours travaillé. Elle réclame, dans ces conditions, le versement de dommages et intérêts pour un montant de 110 000 euros.

La Société Générale conclut à la confirmation du jugement déféré, considérant que Mme [J] ne rapporte pas la moindre preuve de l'existence de manquements de la banque, encore moins celle d'un préjudice avéré pour un montant de 110 000 euros, et d'un lien ce causalité entre de prétendus manquements et un tel préjudice. A supposer qu'une responsabilité de la banque soit retenue, Mme [J] ne pourrait obtenir le paiement d'une somme équivalant quasiment au montant du prêt, sauf à profiter d'un enrichissement sans cause, puisque le prêt consenti à permis aux emprunteurs de financer l'acquisition d'un bien immobilier, pour lequel elle a débloqué des fonds. Enfin, elle ne saurait être déclarée responsable de l'état de santé de Mme [J], dont l'origine remonte à 2009 selon les conclusions de cette dernière.

Si le prêteur de deniers est tenu, à l'égard de l'emprunteur, d'une obligation d'information, d'une obligation de conseil et d'une obligation de mise en garde, il appartient à Mme [J], a minima, d'indiquer à la cour en quoi, en l'occurrence, la Société Générale se serait montrée défaillante dans l'exécution de ces obligations.

Or, la cour ne peut que constater que Mme [J] ne précise ni en quoi elle n'aurait pas été suffisamment informée sur l'objet et les caractéristiques du prêt en cause, ni pour quelle raison son attention aurait dû être attirée sur l'inadaptation du dit prêt à ses capacités financières et les risques d'endettement nés de l'octroi du prêt, ce qui suppose la démonstration de capacités financières insuffisantes au jour de l'octroi de celui-ci, ni en vertu de quel contrat la Société Générale, qui en tant que banquier dispensateur de crédit n'est pas débitrice d'un devoir général de conseil à l'égard de son client, se serait engagée à lui en fournir un.

Dans ces conditions, aucun manquement de la Société Générale aux obligations susvisées ne peut être retenu.

La cour a, par ailleurs, retenu que la banque n'avait pas commis de faute ni d'acte de déloyauté en prononçant, comme elle l'a fait, la déchéance du terme, le 27 juillet 2020. Mme [J] justifie qu'elle a perçu 13 960 euros d'AAH au titre du mois de mars 2020, mais ne justifie en rien avoir tenté, à cette époque, de se rapprocher de la banque pour apurer l'arriéré de remboursement du prêt, pour faire obstacle à la déchéance du terme, ce qu'elle pouvait faire par tout moyen de paiement ne nécessitant pas la détention d'un RIB de la banque.

S'agissant de la clôture du compte sur lequel les échéances de remboursement du prêt étaient prélevées, c'est à raison que le tribunal a retenu que Mme [J] ne justifiait pas qu'elle était à l'origine des impayés ayant entraîné la déchéance du terme du prêt, dès lors qu'aucun élément ne vient établir la clôture alléguée du dit compte. Il sera ajouté que Mme [J] explique elle-même dans ses écritures qu'elle a été avertie par M. [C] dès le mois de mars 2019 qu'il rencontrait une difficulté dans la prise en charge du prêt, parce que les mensualités étaient bien débitées de son compte bancaire Hello Bank, mais lui étaient re-créditées après quelques jours, de sorte que le non paiement des mensualités de remboursement du prêt, dont elle était solidairement tenue avec M. [C], sans pouvoir opposer utilement à la banque d'éventuels accords intervenus entre les seuls débiteurs, ni sa conviction 'que cette difficulté avait été réglée par M. [C] qui prenait à sa charge lesdites mensualités', était connu d'elle dès cette date. Au surplus, Mme [J] n'explique pas, ni ne justifie, en quoi les emprunteurs ne pouvaient remédier dès cette époque à une clôture intempestive du compte, à supposer celle-ci effective, ni régulariser les impayés, ce qui, à l'égard de la banque, incombait autant à l'un qu'à l'autre des co-emprunteurs solidaires, surtout alors que les sommes servant au remboursement du prêt étaient, à suivre ses explications, remises à la disposition de M. [C], qui pouvait ainsi parfaitement les provisionner.

C'est également à raison que, surabondamment, le tribunal a retenu que Mme [J] ne démontrait pas non plus de lien de causalité entre la prétendue faute de la banque et le préjudice allégué, dès lors qu'elle indique elle-même que la maladie dont elle souffre a été diagnostiquée en 2009, avec une aggravation en 2016, soit avant les premiers incidents de paiement.

Faute pour Mme [J] d'apporter la preuve d'une faute de la banque qui lui a causé un préjudice, sa demande de dommages et intérêts ne peut prospérer, et le jugement qui l'en a déboutée mérite confirmation sur ce point.

Sur la demande de délais de paiement

Mme [J] demande à bénéficier de délais de paiement, sur le fondement de l'article 1343-5 du code civil, et considère avoir à tort été déboutée de cette demande par le tribunal. Elle fait valoir sa bonne foi, sa situation financière obérée, et son état de santé dégradé, proposant, dans le corps de ses écritures, de procéder à des règlements mensuels de 450 euros (150 dans leur dispositif), pendant 23 mois, et le solde le 24ème mois.

La société EOS France s'oppose à l'octroi de délais, au regard de l'ancienneté de la créance, la Société Générale s'en rapportant pour sa part sur cette demande, qui désormais concerne la société EOS France.

Pour rejeter la demande de délais présentée par Mme [J], le tribunal a relevé, d'une part, qu'au regard des ressources et charges qu'elle invoquait, elle ne bénéficiait pas d'une capacité suffisante pour désintéresser la banque dans le délai de 2 ans, étant ajouté qu'elle s'abstenait de toute explication quant à sa capacité à obtenir les liquidités nécessaires, à l'issue de ce délai, pour s'acquitter du solde du prêt, dès lors qu'elle ne se prévaut d'aucun projet de vente de son bien, et d'autre part, qu'alors qu'elle jouit du bien acquis grâce au prêt, elle a déjà bénéficié de larges délais de fait, le dernier paiement au profit de la banque ayant été effectué au mois de juillet 2018.

Cette motivation, que la cour approuve, conserve toute sa pertinence à hauteur d'appel : pas plus que devant les premiers juges Mme [J] ne justifie qu'elle sera en mesure, une fois écoulées les deux années qui constituent le maximum du délai que la loi permet de lui accorder, de régler le solde de sa dette, étant rappelé que le but d'un report de paiement ou d'un échelonnement est que la dette soit effectivement apurée à l'issue du délai.

Le jugement déféré est donc également confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, Mme [J] doit supporter les dépens de l'appel.

Elle sera également condamnée à régler à la société EOS France, agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V une somme de 1 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de l'appel.

Le rejet de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance est confirmé, et il n'y a pas lieu d'y faire droit à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut,

CONFIRME le jugement rendu le 10 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Nanterre, sauf en ce qu'il a :

prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels,

condamné solidairement M. [C] et Mme [J] à payer à la Société Générale la somme de 110 701,69 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2020 ;

Statuant à nouveau de ces chefs infirmés, et y ajoutant,

Rejette la demande de déchéance du droit aux intérêts conventionnels ;

Condamne M. [C] et Mme [J] solidairement à payer à la société EOS France, agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V représenté par la société France Titrisation, une somme de 111 246,76 euros, arrêtée au 27 juillet 2020, avec intérêts au taux de 3,55% à compter du 28 juillet 2020 ;

Condamne Mme [J] à payer à la société EOS France, agissant en qualité de représentant recouvreur du Fonds Commun de Titrisation Foncred V représenté par la société France Titrisation, la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Condamne Mme [J] aux dépens de l'appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-6
Numéro d'arrêt : 22/07355
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.07355 ?
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