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25/04/2024 | FRANCE | N°22/05590

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-3, 25 avril 2024, 22/05590


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 60A



Chambre civile 1-3



ARRET N°



REPUTE

CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 22/05590



N° Portalis DBV3-V-B7G-VMYA





AFFAIRE :



[K] [E] [Y]

...



C/



CPAM DES YVELINES

...









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2016 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre :

4

N° RG : 14/10392



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :









Me Sylvie

DERACHE-DESCAMPS de la SELARL DERACHE-DESCAMPS SUDRE





Me Christophe DEBRAY,avocat au barreau de VERSAILLES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUP...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 60A

Chambre civile 1-3

ARRET N°

REPUTE

CONTRADICTOIRE

DU 25 AVRIL 2024

N° RG 22/05590

N° Portalis DBV3-V-B7G-VMYA

AFFAIRE :

[K] [E] [Y]

...

C/

CPAM DES YVELINES

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Mai 2016 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° chambre : 4

N° RG : 14/10392

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Sylvie

DERACHE-DESCAMPS de la SELARL DERACHE-DESCAMPS SUDRE

Me Christophe DEBRAY,avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [K] [E] [Y]

né le [Date naissance 3] 1960 à [Localité 18] (GUINEE)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Monsieur [V] [E] [Y]

né le [Date naissance 9] 1966 à [Localité 19] (SENEGAL)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Monsieur [I] [E] [Y]

né le [Date naissance 6] 1979 à [Localité 19] (SENEGAL)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Madame [R] [E] [Y] épouse [S]

née le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 19] (SENEGAL)

[Adresse 10]

[Localité 17]

Monsieur [F] [E] [Y]

né le [Date naissance 7] 1990 à [Localité 19] (SENEGAL)

[Adresse 5]

[Localité 15]

Madame [D] [E] [Y]

née le [Date naissance 8] 2001 à [Localité 21]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 15]

Madame [L] [E] [Y]

née le [Date naissance 2] 2003 à [Localité 21]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 15]

Agissant en leur nom propre et en qualité d'ayant droits de Mme [C] [T] épouse [E] [Y], décédée le [Date décès 4] 2005

Représentant : Me Sylvie DERACHE-DESCAMPS de la SELARL DERACHE-DESCAMPS SUDRE, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 154

APPELANTS

****************

CPAM DES YVELINES

[Adresse 16]

[Localité 14]

PARTIE INTERVENANTE FORCEE - DEFAILLANTE

S.A. GENERALI IARD

N° SIRET : 552 062 063

[Adresse 12]

[Localité 13]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627

Représentant : Me Anaïs GUILLEMOT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 février 2024, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller chargé du rapport et Madame Charlotte GIRAULT, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,

Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller

Madame Charlotte GIRAULT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme FOULON,

***********

FAITS ET PROCEDURE :

Le 19 février 2004, M. [K] [E] [Y], son épouse [C] [T] et leur fille [L] alors âgée d'un an, ont été blessés lors d'un accident de la voie publique impliquant le véhicule de M. [M] [Z], assuré par la société Generali.

S'agissant des lésions d'[C] [E] [Y], le certificat médical du Dr [P] est rédigé en ces termes : « Lors de l'examen clinique pratiqué le 19 février 2004 et aux différents examens successifs il a été constaté :

- une luxation fracture postérieure du cotyle droit sans complication nerveuse,

- une fracture du cadre obturateur gauche,

- une importante plaie de la joue droite,

- un traumatisme abdominal avec au scanner un hémopéritoine avec fissuration splénique,

ITT trois mois ».

[C] [E] [Y] est décédée le [Date décès 4] 2005.

M. [M] [Z] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel de Versailles pour blessures involontaires causées à M. [E] [Y], son épouse et leur fille.

Par jugement du 6 février 2006, le tribunal a ordonné un complément d'information et une expertise aux fins de rechercher la cause du décès d'[C] [E] [Y] et de déterminer l'existence d'un lien de causalité avec l'accident.

L'expert, le docteur [O], a déposé son rapport le 27 février 2009, et a conclu que le décès d'[C] [E] [Y] était dû à un cancer du sein métastasé sans lien de causalité avec l'accident.

Par jugement du 10 juin 2010, le tribunal correctionnel, statuant sur la constitution de partie civile de M. [K] [E] [Y] tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentant légal de sa fille [L], a liquidé leurs préjudices corporels respectifs. L'appel formé par M. [K] [E] [Y] a été déclaré irrecevable par arrêt du 23 juin 2011.

Par actes des 31 octobre 2014 et 06 novembre 2014, M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi que ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y] ont assigné la société Generali Iard et M. [M] [Z] devant le tribunal de grande instance de Versailles en réparation du préjudice causé, d'une part, par le décès selon eux imputable à l'accident d'[C] [E] [Y], et, d'autre part, par l'aggravation de l'état de santé de M. [K] [E] [Y] et de sa fille [L].

Par jugement du 17 mai 2016, le tribunal de grande instance de Versailles a rejeté les demandes des consorts [E] [Y] et les a condamnés aux dépens.

Par acte du 28 juillet 2016, les consorts [E] [Y] ont interjeté appel.

Par arrêt du 31 janvier 2019, la cour d'appel de Versailles a :

- infirmé le jugement déféré en ce que les demandes des consorts [E] [Y] au titre de l'action successorale du chef du préjudice subi par [C] [E] [Y] de son vivant ont été rejetées,

- sursis à statuer sur ces demandes, ainsi que sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- avant dire droit, ordonné une expertise sur pièces afin d'évaluer le préjudice corporel subi par [C] [E] [Y] lors de l'accident du 19 février 2004, et désigné pour y procéder le Dr [A] [U], clinique [20], [Adresse 11] ' [Localité 14] avec pour mission de :

* se faire communiquer par les parties tous documents utiles concernant les blessures subies par [C] [E] [Y] lors de l'accident du 19 février 2004,

* donner un avis sur la nécessité d'une aide temporaire, imputable à l'accident,

* déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire imputable à l'accident et, si l'incapacité fonctionnelle n'a été que partielle, en préciser le taux,

* fixer la date de consolidation,

* dire si une ou des activités professionnelles auraient été rendues plus difficiles ou impossibles si le décès n'était pas survenu,

* décrire les souffrances physiques, psychiques ou morales du fait des blessures subies lors de l'accident et les évaluer selon l'échelle habituelle de sept degrés,

* donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique imputable à l'accident en précisant s'il est temporaire ou définitif et l'évaluer selon l'échelle habituelle de sept degrés,

* dire s'il existe un préjudice sexuel imputable à l'accident ; le décrire en précisant s'il recouvre l'un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la morphologie, l'acte sexuel (libido, impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction).

* faire toute observation qu'il estime utile à la solution du litige.

- dit que l'expert pourra se faire communiquer tant par les médecins que par les caisses de sécurité sociale et par les établissements hospitaliers concernés, tous les documents médicaux qu'il jugerait utiles aux opérations d'expertise,

- dit que l'expert devra déposer son rapport au service des expertises de la cour d'appel de Versailles dans un délai de quatre mois à compter du jour où il aura été avisé du versement de la consignation, et en adresser une copie aux conseils des parties,

- fixé à 1 200 euros le montant de la somme à consigner par M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y] à la régie des avances et recettes du greffe de la cour d'appel de Versailles dans un délai de deux mois à compter du prononcé de la présente décision, à peine de caducité de la désignation de l'expert,

- condamné la société Generali à payer à M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi que ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y], unis d'intérêts, la somme de 10 000 euros à valoir sur la réparation des préjudices subis par leur auteur [C] [E] [Y],

- confirmé le jugement déféré en ce que le surplus des demandes de M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi que ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y] a été rejeté,

- fait injonction à M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi qu'à ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y] d'assigner devant la cour l'organisme social dont dépendait [C] [E] [Y], dans les deux mois du prononcé du présent arrêt, à peine de radiation.

Le docteur [U] a déposé son rapport le 24 avril 2019.

Par ordonnance du 17 septembre 2020, le magistrat chargé de la mise en état a rendu une ordonnance de radiation, faute de mise en cause de l'organisme de sécurité sociale dont dépendait [C] [E] [J].

Par dernières conclusions de rétablissement du 5 septembre 2022, les consorts [E] [Y] prient la cour de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur demande,

- ordonner la réinscription au rôle de la cour de Versailles de l'affaire enregistrée devant la 3ème chambre sous le n° 16/05866, laquelle a fait l'objet d'une radiation le 17 septembre 2020,

Y faisant droit,

- dire que la société Generali est tenue de garantir les dommages subis par Mme [C] [E] [Y] résultant de l'accident de la circulation de voie publique du 19 février 2004,

- homologuer le rapport d'expertise établi par le Dr. [U] le 25 avril 2019,

- condamner la société Generali à payer aux consorts [E] [Y] la somme totale de 9 954,84 euros, en réparation des préjudices extrapatrimoniaux et patrimoniaux subis par Mme [C] [E] [Y], décédée le [Date décès 4] 2005, déduction faite de la provision de 10 000 euros allouée par arrêt du 31 janvier 2009, étant précisé que cette somme s'entend en sus de toutes les prestations sociales qui ont été versées et d'ores et déjà déduites des sommes sollicitées, lesquelles portent intérêt de droit au taux légal à compter du fait générateur du 19 février 2004,

- déclarer commun et opposable à la CPAM des Yvelines l'arrêt à intervenir,

- condamner la société Generali à verser aux consorts [E] [Y] la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Generali aux entiers dépens, en ceux compris les frais d'expertise et les frais inhérents à la délivrance de l'assignation en intervention de la CPAM des Yvelines et avec recouvrement direct.

Par dernières écritures du 12 octobre 2022, la société Generali Iard prie la cour de :

- accueillir la concluante en ses présentes écritures et l'y déclarer bien fondée,

- constater que la concluante s'en rapporte sur la question du rétablissement de la présente affaire au rôle,

- fixer l'indemnisation des préjudices d'[C] [E] [Y] de la façon suivante :

* Frais de pharmaceutique : Rejet

* Frais d'hospitalisation : Rejet

* Frais de transport : Rejet

* Besoin en tierce personne : 2 587 euros

* Déficit fonctionnel temporaire : 3 215 euros

* Souffrances endurées : 8 000 euros

* Préjudice esthétique temporaire : 500 euros

* Déficit fonctionnel permanent : 11,22 euros

* Préjudice esthétique permanent : 9,30 euros

* Article 700 : rejet

- statuer ce que de droit sur les dépens.

La Caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines a été assignée devant la cour d'appel le 8 septembre 2023 et s'est vu signifier les conclusions d'appelant mais n'a pas constitué avocat.

Par courrier en date du 2 mars 2023, l'organisme s'est dit dans l'impossibilité de faire état d'une créance quelconque au titre de l'accident, en raison de l'expiration du délai de conservation des pièces justificatives, prévu par l'article D. 253-44 du code de la sécurité sociale.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 11 janvier 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il est rappelé que notre cour a sursis à statuer sur les chefs de demande relatifs à l'indemnisation des préjudices subis par [C] [E] [Y], décédée le [Date décès 4] 2005, du fait de l'accident survenu le 19 février 2004, après avoir infirmé le jugement déféré ayant débouté les héritiers de leur action successorale à ce titre.

Considérant que la demande formée par les héritiers, dont la qualité n'est pas contestée, au titre du préjudice subi par [C] [E] [Y] avant son décès, ne se heurtait à aucune objection de principe, la cour, qui a estimé ne pas disposer des éléments suffisants pour évaluer ce préjudice, a ordonné une expertise sur pièces et a sursis à statuer sur les demandes dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

A cet égard, il n'y a pas lieu d'homologuer ou non le rapport d'expertise déposé par le docteur [U] le 25 avril 2019, en ce qu'il est le résultat d'une mesure d'instruction destinée à éclairer la cour, dont il sera nécessairement tenu compte en tant que telle pour apprécier le bien-fondé des demandes.

I. Sur le rétablissement de l'affaire au rôle

La présente affaire a fait l'objet d'une ordonnance de clôture, rendue le 11 janvier 2024, et a été appelée pour être plaidée à l'audience du 8 février 2024, de sorte que la décision de réinscription au rôle, qui est une mesure d'administration judiciaire a, de fait, été prise.

L'affaire ayant déjà été réinscrite au rôle, il n'y a donc pas lieu d'ordonner son rétablissement à ce stade.

A titre superfétatoire, il est précisé que l'article 383, alinéa 2 du code de procédure civile, énonce qu'à moins que la péremption de l'instance ne soit acquise, l'affaire est rétablie, en cas de radiation, sur justification de l'accomplissement des diligences dont le défaut avait entraîné celle-ci.

En l'espèce, l'affaire a été radiée, par ordonnance du 17 septembre 2020, faute de mise en cause de l'organisme de sécurité sociale dont dépendait [C] [E] [Y]. Par la suite, les consorts [E] [Y] ont justifié avoir signifié une assignation en intervention forcée de la CPAM des Yvelines, par acte d'huissier du 8 septembre 2022, démontrant par là même l'accomplissement de diligences de nature à faire progresser l'instance avant l'expiration du délai de deux ans prévu par l'article 386 du code de procédure civile, en même temps que l'accomplissement des diligences requises pour permettre le rétablissement de l'affaire au rôle.

II. Sur la liquidation du préjudice subi par [C] [E] [Y]

Dans son rapport d'expertise, le Dr. [U] retient :

* date de consolidation : 24 décembre 2004

* activités d'agrément : néant

* assistance tierce personne : 1 heure par jour du 9 juin 2004 au 24 décembre 2004

* déficit fonctionnel temporaire :

- total : du 19 février 2004 au 23 mars 2004 (période du 24 février 2004 au 3 mars 2004 non imputable)

- partiel (taux de 25 %) : du 23 mars 2004 au 9 juin 2004

* déficit fonctionnel permanent : 5 %

* activités professionnelles avant l'accident : néant

* souffrances endurées : 3,5/7

* préjudice esthétique : 4/7

* préjudice sexuel : néant

1. Sur les préjudices patrimoniaux temporaires

a) dépenses de santé actuelles :

Elles correspondent aux frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation déjà exposés tant par les organismes sociaux que par la victime.

Les consorts [E] [Y] sollicitent la somme de 1 000 euros au titre des « frais médicaux, paramédicaux et pharmaceutiques » restés à la charge d'[C] [E] [Y], sans exposer le décompte et l'objet des dépenses alléguées et sans produire de justificatif à même d'établir l'existence des frais prétendument exposés.

Les appelants, qui ne rapportent pas la preuve de la réalité de leur préjudice, seront déboutés de ce chef de demande.

b) frais divers :

' frais de déplacement :

Les consorts [E] [Y] sollicitent la somme de 389, 46 euros au titre des frais de transport effectués chaque jour pour se rendre aux côtés d'[C] [E] [Y] durant son hospitalisation et sa rééducation.

La société Generali répond que les frais décrits correspondent à ceux exposés par M. [E] [Y], victime indirecte, alors que la cour n'a vocation à statuer que sur les préjudices de la victime directe.

Sur ce,

Ce poste indemnise en tant que préjudice personnel, les frais de déplacement exposés par la victime pour consultations et soins mais également des frais de transport et d'hébergement des proches pour visiter la victime puisque le moral du blessé peut agir sur l'évolution de son état de santé.

Il est justifié d'une hospitalisation du 19 février 2004 au 23 mars 2004 au centre hospitalier de [Localité 21], situé à 1,5 km du domicile, et d'une hospitalisation pour rééducation au centre de rééducation fonctionnel de [Localité 22], situé à 4,7 km du domicile, du 23 mars au 9 juin 2004.

En comptant un aller-retour par jour et en prenant pour base le barème des indemnités kilométriques de 2004 (0.468 euro/km), il est retenu le calcul suivant, au demeurant non contesté : (3 km x 33 jours + 9, 4 x 78 jours) 832,20 km x 0, 468 = 389, 46 euros.

La société Generali sera condamnée au paiement de la somme de 389, 46 euros à ce titre.

' forfait hospitalier et frais de location d'un téléviseur :

Les consorts [E] [Y] sollicitent 429 euros au titre des frais de forfait hospitalier et 444 euros au titre des frais de location d'un téléviseur.

La société Generali, qui expose que « la réalité de la dépense n'est pas contestable », fait néanmoins valoir qu'« il ne peut être exclu que ces frais ont été pris en charge par les organismes tiers payeurs ».

Toutefois, tandis que la CPAM des Yvelines ne fait valoir aucune créance, il n'est versé aux débats aucune pièce permettant d'établir qu'[C] [E] [Y] disposait d'une mutuelle qui serait subrogée dans ses droits.

Dans ces conditions, le montant des frais engagés n'étant pas contesté, il y a lieu de faire droit à la demande des consorts [E] [Y] et de condamner la société Generali à leur régler la somme demandée de 873 euros.

' tierce personne avant consolidation :

Les consorts [E] [Y] sollicitent la somme de 3 016, 70 euros, calculée sur la base du taux horaire du SMIC, charges patronales et congés payés inclus (soit 13, 43 euros x 199 jours = 3 016, 70 euros).

La société Generali accepte de verser la somme de 2 587 euros (13 euros x 199 jours).

Sur ce,

Le poste des frais divers couvre également les dépenses liées à la réduction de l'autonomie de la victime, entre le dommage et la consolidation. Le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne saurait être réduit en cas d'assistance d'un membre de la famille ni subordonné à la production de justificatifs des dépenses effectives.

Compte tenu du besoin en tierce personne retenu par l'expert judiciaire à raison d'une heure par jour, entre le 9 juin 2004, date de fin d'hospitalisation d'[C] [E] [Y] et le 24 décembre 2004, date de consolidation, en raison des douleurs mécaniques de la hanche droite, la boiterie et la marche avec une canne, ce poste de préjudice sera justement indemnisé à hauteur de 13, 43 euros de l'heure, dans la limite de la demande formée par les consorts [E] [Y].

La société Generali sera condamnée à leur régler la somme de 3 016, 70 euros de ce chef.

' frais de garde des enfants :

Les consorts [E] [Y] produisent les factures de l'association Aide aux mères et aux familles, intervenue à domicile entre les mois de mars et novembre 2004 et réclament un remboursement à hauteur de 302, 45 euros. Ils font valoir qu'[C] [E] [Y] n'exerçait pas d'activité professionnelle, puisqu'elle se consacrait exclusivement à ses 6 enfants âgés de 8 mois à 14 ans au moment de l'accident, et que l'organisme a assuré un service de garde des enfants lors de son hospitalisation et après son retour au domicile.

La société Generali estime qu'aucune indemnisation n'est due durant la période couverte par l'indemnisation allouée au titre de l'assistance par une tierce personne, puisqu'en fixant le besoin en aide humaine, l'expert aurait déjà tenu compte de la nécessité pour [C] [E] [Y] de faire appel à une aide pour la garde de ses enfants. Elle estime que seuls les frais engagés pour la période s'étendant du 19 février au 8 juin 2004 sont susceptibles de faire l'objet d'une indemnisation.

Sur ce,

Il ne ressort pas du rapport d'expertise que pour évaluer le besoin en aide humaine d'[C] [E] [Y] à une heure par jour après son retour à domicile l'expert ait tenu compte des besoins de celle-ci pour la garde des enfants, de sorte que les consorts [E] [Y] apparaissent bien fondés à se prévaloir d'un préjudice distinct et dont ils justifient.

Il sera fait droit à leur demande, à hauteur de 302, 45 euros, inférieure au montant total des factures versées aux débats, datées des mois de mars à novembre 2014.

2. Sur les préjudices extrapatrimoniaux

a) Sur les préjudices extrapatrimoniaux temporaires :

' déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste inclut, pour la période antérieure à la consolidation, la perte de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante durant la maladie traumatique, le préjudice temporaire d'agrément, éventuellement le préjudice sexuel temporaire.

L'expert retient une période de gêne fonctionnelle temporaire totale du 19 février 2004 au 23 mars 2004, durant l'hospitalisation d'[C] [E] [Y] à l'hôpital de [Localité 21], mais estime que la période du 24 février 2004 au 3 mars 2004 n'est pas imputable à l'accident en ce qu'elle résulte du report de l'intervention liée à la fracture du bassin, qui aurait pu être évité en l'absence de surdosage de l'héparine.

Il retient par ailleurs une gêne fonctionnelle temporaire partielle du 9 juin 2004 au 24 décembre 2004, au taux de 25 %, en raison de l'utilisation d'une canne anglaise.

La société Generali ne critique pas les taux retenus et ne demande pas à ce que soit considérée comme non imputable à l'accident la période du 24 février 2004 au 3 mars 2004 isolée par l'expert. Elle sollicite une évaluation sur la base d'une indemnité de 20 euros par jour, là où les appelants sollicitent la somme de 4 822, 50 euros sur la base de 30 euros par jour.

Compte tenu de la gêne fonctionnelle décrite, il sera accordé une indemnisation sur la base de 27 euros par jour, soit 2 997 euros (27 euros x 111 jours) au titre du déficit fonctionnel temporaire total et 1 343, 25 euros (27 euros x 25 % x 199 jours) au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel, pour un montant total de 4 340, 25 euros.

' souffrances endurées :

Il s'agit d'indemniser les souffrances tant physiques que morales endurées par la victime du fait des atteintes à son intégrité, à sa dignité et à son intimité, et des traitements, interventions, hospitalisations qu'elle a subis depuis l'accident jusqu'à la consolidation.

L'expert a estimé les souffrances endurées à 3,5/7, soit des souffrances modérées à moyenne, en expliquant avoir tenu compte :

- de la nature du traumatisme initial,

- du nombre et de la nature des interventions chirurgicales réalisées : réduction de la luxation de la hanche et ostéosynthèse de la fracture du cotyle,

- du nombre et de la durée des séjours hospitaliers,

- de la durée et de la nature de la rééducation,

- des douleurs endurées, physique et psychologiques.

Compte tenu des éléments médicaux décrits et de la durée de la phase de consolidation (10 mois), le préjudice sera évalué à la somme de 8 750 euros.

' préjudice esthétique temporaire :

Ce poste vise à indemniser, pendant la maladie traumatique, et notamment pendant l'hospitalisation, l'altération de l'apparence physique de la victime.

L'expert a retenu un préjudice esthétique temporaire du 19 février 2004 au 24 décembre 2004 évalué à moyen (4/7), sans autre précision.

Les consorts [E] [Y] exposent qu'[C] [E] [Y] a présenté de nombreuses luxations et fractures sur le corps, un traumatisme abdominal, ainsi qu'une importante plaie à la joue droite. Ils relèvent également l'existence d'une boiterie et d'une suture au visage et sollicitent en conséquence la somme de 1 200 euros.

La société Generali propose une indemnisation à hauteur de 500 euros, en ce que l'existence d'une cicatrice suturée sur la joue n'a pas été constatée par l'expert et que ce préjudice est survenu sur une courte période.

En l'espèce, il est fait état d'une importante plaie à la joue droite, mentionnée dans le certificat médical initial, et de diverses autres lésions qui, au regard de ce qu'elles impliquent en termes de traitements, ont nécessairement altéré de façon significative l'apparence physique de la victime durant la maladie traumatique.

Son préjudice à ce titre sera évalué dans la limite de la demande des consorts [E] [Y] à la somme de 1 200 euros.

b) Sur les préjudices extrapatrimoniaux permanents :

' déficit fonctionnel permanent :

Compte tenu du délai écoulé entre la date de consolidation (24/12/2004) et le décès d'[C] [E] [Y] à l'âge de 42 ans (14/01/2005), soit 22 jours, les consorts [E] [Y] limitent leur demande au montant proratisé de 14, 77 euros, sur la base de 1580 euros le point.

La société Generali s'y oppose et offre la somme de 11, 22 euros, sur la base de 1200 euros le point.

Sur ce,

Ce poste de préjudice vise à indemniser la réduction définitive, après consolidation, du potentiel physique, psycho-sensoriel ou intellectuel de la victime résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomo-psychologique, à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, et notamment la douleur permanente qu'elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales.

Il s'agit, pour la période postérieure à la consolidation, de la perte de qualité de vie, des souffrances après consolidation et des troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence (personnelles, familiales et sociales) du fait des séquelles tant physiques que mentales qu'elle conserve.

Si le droit pour la victime d'obtenir réparation du préjudice subi existe dès la survenance du fait dommageable, l'évaluation du préjudice doit être faite à la date à laquelle le juge statue, en tenant compte de tous les éléments connus à la date de la décision.

Il convient ainsi de tenir compte du décès de la victime directe survenu le [Date décès 4] 2005 avant la date de la liquidation et d'indemniser au prorata temporis.

Il y a lieu pour ce faire, d'évaluer le poste de préjudice de manière viagère puis de diviser le montant obtenu par le nombre d'années d'espérance de vie d'une femme âgée de 42 ans à la date de consolidation selon la table de mortalité établie par l'INSEE pour les années 2012-2014, soit 42,97 ans, puis de multiplier le résultat par le temps écoulé entre la consolidation et le décès, soit 0,060 an (22 jours / 365 jours).

L'expert a fixé à 5 % le déficit fonctionnel permanent, en notant qu'il persistait une légère boiterie à la marche et une limitation des amplitudes articulaires de la hanche gauche.

Au regard des circonstances de la cause et de l'âge de la victime, la valeur du point sera justement fixée à 1 580 euros.

Au vu des séquelles constatées et non contestées, et de l'âge d'[C] [E] [Y] à la date de la consolidation (42 ans), il convient d'évaluer son déficit fonctionnel permanent subi entre le 24 décembre 2004, date de la consolidation, jusqu'à son décès, le [Date décès 4] 2005, à la somme de 11, 03 euros, calculée sur la base d'une indemnité de 7 900 euros (1580 x 5), proratisée suivant la méthode de calcul ci-dessus décrite (7 900 /42, 97 x 0, 060).

Toutefois, eu égard au principe dispositif, il sera fait droit à la demande mieux-disante de la société Generali à hauteur de 11, 22 euros.

' préjudice esthétique permanent :

Les consorts [E] [Y] demandent une indemnisation de 14, 96 euros à ce titre, calculée au prorata temporis sur la base de 8 000 euros.

La société Genarali s'y oppose et offre la somme de 9, 30 euros, sur la base de 5 000 euros.

Sur ce,

Ce poste de préjudice vise à réparer une altération définitive de l'apparence physique.

L'expert a considéré que le préjudice esthétique définitif pouvait être évalué à « modéré », du fait d'une boiterie persistante et de la cicatrice importante au visage.

La société Generali estime que cette appréciation correspond à une cotation de 4/7. Celle-ci sera effectivement retenue.

Au vu des séquelles constatées et de l'âge d'[C] [E] [Y] à la date de la consolidation (42 ans), il convient d'évaluer son préjudice esthétique permanent subi entre le 24 décembre 2004, date de la consolidation, jusqu'à son décès, le [Date décès 4] 2005, à la somme de 11, 17 euros, calculée sur la base d'une indemnité de 8 000 euros, proratisée suivant la méthode de calcul ci-avant décrite (8 000 /42, 97 x 0, 060).

III. Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, et dans la limite des demandes formées qui ne tendent pas à remettre en cause la condamnation aux dépens de première instance, la société Generali supportera les dépens d'appel, incluant les frais de la dernière expertise et les frais inhérents à la délivrance de l'assignation en intervention forcée de la CPAM des Yvelines, dont distraction au profit de Me Sylvie Derache Descamps, en application des articles 696 et 699 du code de procédure civile.

La cour ayant préalablement sursis à statuer sur les frais irrépétibles, l'équité commande de faire droit à la demande dont la cour est aujourd'hui saisie à ce titre, et de condamner la société Generali à régler aux consorts [E] [Y] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition, et dans la limite du sursis à statuer prononcé par l'arrêt rendu par notre cour le 31 janvier 2019,

Rappelle que ledit arrêt a :

- infirmé le jugement déféré en ce que les demandes des consorts [E] [Y] au titre de l'action successorale du chef du préjudice subi par [C] [E] [Y] de son vivant ont été rejetées,

- sursis à statuer sur ces demandes, ainsi que sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Generali à régler la somme de 10 000 euros à valoir sur la réparation des préjudices subis par leur auteur [C] [E] [Y],

Statuant à nouveau sur les chefs restant à juger,

Fixe les préjudices suivants subis par [C] [E] [Y], à la suite de l'accident dont elle a été victime :

* frais divers : 4 581, 61 euros (389,46 + 873 + 3 016,70 + 302,45)

* déficit fonctionnel temporaire : 4 340, 25 euros

* souffrances endurées : 8 750 euros

* préjudice esthétique temporaire : 1 200 euros

* déficit fonctionnel permanent : 11, 22 euros

* préjudice esthétique permanent : 11, 17 euros

Total : 18 894, 25 euros

Condamne en conséquence la société Generali Iard à régler à M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi qu'à ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y], ensemble, la somme unique de 8 894, 25 euros, après déduction de la provision de 10 000 euros due en exécution de l'arrêt du 31 janvier 2019,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Condamne la société Generali Iard à régler les dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Sylvie Derache Descamps, conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

Condamne la société Generali Iard à régler à M. [K] [E] [Y], agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de ses enfants mineurs [D] et [L] [E] [Y], ainsi qu'à ses enfants majeurs, MM. et Mme [I], [R], [F] et [V] [E] [Y], ensemble, la somme unique de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Déclare commun l'arrêt à la CPAM des Yvelines.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame F. PERRET, Président et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-3
Numéro d'arrêt : 22/05590
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.05590 ?
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