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25/04/2024 | FRANCE | N°22/02925

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 25 avril 2024, 22/02925


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 AVRIL 2024



N° RG 22/02925

N° Portalis DBV3-V-B7G-VN6G



AFFAIRE :



S.A.S. BEARINGPOINT FRANCE





C/

[P] [N]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Août 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation de départage de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 18/0230

9



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SAS VOLTAIRE



Me Raphael LALLIOT







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versail...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 AVRIL 2024

N° RG 22/02925

N° Portalis DBV3-V-B7G-VN6G

AFFAIRE :

S.A.S. BEARINGPOINT FRANCE

C/

[P] [N]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Août 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation de départage de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F 18/02309

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SAS VOLTAIRE

Me Raphael LALLIOT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.S. BEARINGPOINT FRANCE

N° SIRET : 443 02 1 2 41

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentant : Me François HUBERT de la SAS VOLTAIRE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G668

APPELANTE

****************

Monsieur [P] [N]

né le 28 Mars 1988 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Raphael LALLIOT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 01 Mars 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] [N] a été engagé par la société Bearingpoint France suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 septembre 2014, en qualité de consultant fonctionnel/ sectoriel, position 2.1, coefficient 115, avec le statut de cadre.

En dernier lieu, il exerçait les fonctions de chargé de mission fonctionnel/sectoriel, position 2.1, coefficient 150.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseil dite Syntec.

Par lettre du 2 mars 2018, M. [N] a démissionné de son emploi.

Le 6 septembre 2018 M. [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre dans sa formation de référé afin d'obtenir la condamnation de la société au paiement de l'indemnité due au titre de la clause de non-concurrence.

Par ordonnance de référé du 29 janvier 2019 du conseil de prud'hommes de Nanterre, la société Bearingpoint France a notamment été condamnée à verser à M. [N] la somme de 6 738 euros à titre d'indemnité due pendant les six premiers mois au titre de la clause de non-concurrence, outre 673 euros au titre des congés payés afférents.

Le 6 septembre 2018, M. [N] a également saisi la section encadrement du conseil de prud'hommes de Nanterre afin d'obtenir la condamnation de la société Bearingpoint France à lui payer diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement de départage du 8 août 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- condamné la société Bearingpoint France, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 443 021 241 à payer à M. [N] les sommes suivantes :

* 1 200 euros au titre du bonus à la suite des résultats réalisés en 2017, outre 120 euros au titre des congés payés afférents,

* 2 700, 30 euros au titre de la prime SAP due au titre des missions SAP réalisées en 2017, outre 270,03 euros au titre des congés payés afférents,

- dit que les sommes dues au titre du bonus de résultat et de la prime SAP portent intérêt au taux légal à compter de la convocation de la société Bearingpoint France en bureau de conciliation, soit à compter du 2 octobre 2018,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- condamné la société Bearingpoint France immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 443 021 241 à remettre à M. [N] des bulletins de paie conformes à la présente décision,

- dit n'y avoir lieu à ordonner une astreinte,

- débouté la société Bearingpoint France de sa demande de remboursement de la somme de 11 712,40 euros versée à M. [N] au titre de la contrepartie financière prévue par la clause de non-concurrence inscrite dans son contrat de travail,

- condamné la société Bearingpoint France, immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 443 021 241 à payer à M. [N] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Bearingpoint France immatriculée au RCS de Nanterre sous le n° 443 021 241 aux entiers dépens,

- rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

- rappelé que la présente décision est exécutoire de droit.

Le 29 septembre 2022, la société Bearingpoint France a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 19 avril 2023, la société Bearingpoint France demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il :

- l'a condamnée à payer à M. [N] les sommes suivantes :

* 1 200 euros au titre du bonus à la suite des résultats réalisés en 2017, outre 120 euros au titre des congés payés afférents,

* 2 700, 30 euros au titre de la prime SAP due au titre des missions SAP réalisées en 2017, outre 270,03 euros au titre des congés payés afférents,

- a dit que les sommes dues au titre du bonus de résultat et de la prime SAP portent intérêt au taux légal à compter de la convocation de la société Bearingpoint France en bureau de conciliation, soit à compter du 2 octobre 2018,

- a ordonné la capitalisation des intérêts,

- l'a condamnée à remettre à M. [N] des bulletins de paie conformes à la présente décision,

- l'a déboutée de sa demande de remboursement de la somme de 11 712,40 euros versée à M. [N] au titre de la contrepartie financière prévue par la clause de non-concurrence inscrite dans son contrat de travail,

- l'a condamnée à payer à M. [N] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamnée aux entiers dépens,

- a rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,

- a rappelé que la présente décision est exécutoire de droit.

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de rappel de salaire afférent à l'annulation de son augmentation, de sa demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT, ainsi que sa demande de complément d'indemnité de non-concurrence,

- statuant à nouveau:

- débouter M. [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- rejeter l'appel incident formé par M. [N],

- condamner M. [N] à lui verser la somme de 11 712,40 euros indûment perçue par lui au titre de la contrepartie financière perçue en application de la clause de non-concurrence,

- condamner M. [N] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [N] également aux dépens,

- rappeler que l'infirmation du jugement de départage emporte obligation pour M. [N] de rembourser les sommes versées au titre de l'exécution provisoire avec intérêts au taux légal à compter de la date du paiement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 12 février 2024, M. [N] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné Bearingpoint France à lui verser la somme de 1 200 euros au titre du bonus dû au titre des résultats réalisés en 2017 outre les congés payés afférents,

- statuant à nouveau, condamner Bearingpoint France au paiement de la somme de 1 500 euros au titre du bonus dû au titre des résultats réalisés en 2017, outre 150 au titre des congés payés afférents,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Bearingpoint France à lui verser la somme de 2 700, 30 euros, outre 270, 03 euros au titre des congés payés afférents au titre de la prime SAP versée au salarié en raison des missions SAP réalisées en 2017,

- infirmer le jugement en sa formation de départage en ce qu'il l'a débouté de sa demande de rappel de salaires afférent à l'annulation illicite de son augmentation,

- statuant à nouveau, condamner la société Bearingpoint France au paiement de la somme de 1 684,61 euros bruts au titre de rappel de salaires afférents à l'annulation illicite de son augmentation, outre 168,46 euros au titre des congés payés afférents,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à condamner la société Bearingpoint France à verser un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT,

- statuant à nouveau, condamner la société Bearingpoint France au paiement de la somme de 974,27 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de complément d'indemnité de non-concurrence,

- statuant à nouveau, condamner la société à lui verser la somme de 2 022, 40 euros bruts au titre de complément d'indemnité de non-concurrence, outre 202,24 euros au titre des congés payés afférents,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Bearingpoint France à lui remettre des bulletins de paie régularisés,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'assortir la condamnation de la société Bearingpoint France à lui remettre des bulletins de paie régularisés sous astreinte de 50 euros par jour,

- statuant à nouveau, condamner la société Bearingpoint France à lui remettre des bulletins de paie régularisés sous astreinte de 50 euros par jours de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Bearingpoint France de sa demande de remboursement de la somme de 11 712,4 euros versée en application de la clause de non-concurrence,

- infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Bearingpoint France au paiement de la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- statuant à nouveau, condamner la société Bearingpoint France au paiement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ce comprenant l'intégralité des frais irrépétibles engagés par M. [N], pour assurer sa défense en première instance et en appel,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Bearingpoint France aux dépens,

- infirmer le jugement en ce qu'il a retenu comme point de départ des intérêts au taux légal du bonus de résultat pour l'année 2017 et de la prime SAP la date du 2 octobre 2018,

- statuant à nouveau, condamner la société Bearingpoint France au paiement des intérêts au taux légal concernant le bonus de résultat pour l'année 2017 et la prime SAP et d'en fixer le point de départ au mois de mars 2018,

- confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 20 février 2024.

MOTIVATION

Sur le bonus au titre des résultats 2017

L'employeur fait valoir que le critère de présence pour l'octroi du bonus discrétionnaire n'est pas rempli et que par ailleurs, le salarié n'a pas été évalué définitivement s'agissant de sa performance globale pour l'année 2017.

Le salarié soutient qu'il ne peut être soumis à la condition de présence puisqu'il a travaillé pendant la période de référence et que la condition de présence est postérieure à l'échéance de la période de référence et doit être écartée. Il ajoute qu'il a bien atteint les objectifs fixés.

Si l'ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumis à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut pas être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement .

Il ressort du document 'Financial Goals et système de rémunération variable' émis par la société pour l'année 2017 qu'un bonus discrétionnaire peut être accordé au salarié en fonction d'une note de performance de fin d'année qui dépend de l'atteinte d'objectifs sur 3 dimensions : 'job delivery (performance sur les missions), business metrics (taux d'utilisation), non financials (markets/collaboration/people/culture) et que ce bonus est versé sous condition de présence : 'le versement du variable est prévu au mois de mars 2018 ; il ne sera pas accordé aux salariés ayant donné leur démission à cette date'.

L'élément de rémunération concerné constitue un élément de rémunération variable. Il est afférent à une période entièrement travaillée par le salarié, l'année 2017.

Dès lors qu'il s'agit d'une partie de rémunération qui est versée au salarié en contrepartie de son activité et qui s'acquière au fur et à mesure, le salarié peut, même si son départ de l'entreprise est antérieur à son versement, y prétendre.

La condition de présence étant postérieure à l'échéance de la période de référence, elle doit être écartée.

Ainsi, le salarié qui a donné sa démission le 2 mars 2018 peut prétendre à sa rémunération variable relative à l'année 2017, même si son départ de l'entreprise est antérieur à son versement.

Il ressort des éléments du dossier que le salarié a été évalué comme suit 'bonne performance pour [P] en 2017" par son supérieur hiérarchique, que le document d'évaluation provisoire est produit aux débats par le salarié, même s'il n'est pas signé par les parties, qu'il est corroboré par une évaluation à mi-année le 4 août 2017 qui a conclu à un 'très bon 1er semestre'.

Au surplus, le salarié a perçu une somme de 1 500 euros au titre de son bonus en 2017 relatif à l'année 2016.

Par conséquent, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a condamné la société Bearingpoint France à lui payer la somme de 1 200 euros au titre du bonus pour l'année 2017, outre 120 euros au titre des congés payés afférents, au vu des performances du salarié, de la fourchette de bonus fixée entre 800 et 1 200 euros pour un consultant ayant réalisé une bonne performance et du montant octroyé pour l'exercice précédent.

Sur la prime SAP relative aux missions réalisées en 2017

L'employeur s'oppose au versement de la prime SAP faisant valoir que le salarié ne remplit pas la condition de présence au vu de la date de sa démission.

Le salarié soutient qu'il ne peut être soumis à la condition de présence puisqu'il a travaillé pendant la période de référence et que la condition de présence est postérieure à l'échéance de la période de référence et doit être écartée. Il ajoute qu'il a bien atteint les objectifs fixés, ayant consacré l'ensemble de son activité à différents projets SAP.

Si l'ouverture du droit à un élément de la rémunération afférent à une période travaillée peut être soumis à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut pas être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement .

Il ressort du document édité par la société intitulé 'Prime SAP règles d'éligibilité et processus' qu'une prime d'un montant maximal de 5% du salaire annuel brut, est octroyée aux salariés éligibles au prorata des heures passées sur des projets SAP et versée en mars de l'année suivante et que cette prime est versée sous condition de présence : 'versé[e] en mars de l'année N+1, à condition de ne pas avoir donné sa démission avant cette date (perte de la prime dans le cas contraire' .

L'élément de rémunération concerné constitue un élément de rémunération variable.

Il est afférent à une période entièrement travaillée par le salarié, l'année 2017.

Dès lors qu'il s'agit d'une partie de rémunération qui est versée au salarié en contrepartie de son activité et qui s'acquière au fur et à mesure, le salarié peut, même si son départ de l'entreprise est antérieur à son versement, y prétendre.

La condition de présence étant postérieure à l'échéance de la période de référence, elle doit être écartée.

Ainsi, le salarié qui a donné sa démission le 2 mars 2018 peut prétendre à sa prime SAP relative à l'année 2017, même si son départ de l'entreprise est antérieur à son versement.

Il ressort des éléments du dossier que le salarié a travaillé exclusivement sur des projets SAP pendant l'année 2017 et au vu des appréciations de ses responsables M. [L] et M. [W], il a donné satisfaction sur ces projets, l'employeur ne faisant état que de la condition de présence et ne contestant pas l'éligibilité du salarié à cette prime à un autre titre, ou le quantum de la prime sollicitée.

Par conséquent, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Bearingpoint France à payer à M. [N] la somme de 2 700,3 euros à titre de prime SAP pour les missions en 2017, outre 270,03 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le rappel de salaires au titre d'une augmentation en 2018

L'employeur fait valoir qu'aucune décision n'avait été prise quant à une quelconque augmentation de salaire pour le salarié et à un hypothétique quantum à ce titre. Il soutient qu'avait été uniquement envisagée une promotion du salarié et de le faire monter sur le projet de l'année, les augmentation et bonus étant encore en discussion.

Le salarié sollicite un rappel de salaire, outre congés payés afférents, faisant valoir que son employeur lui avait promis une nouvelle augmentation de l'ordre de 15% au 1er mars 2018, conforme aux usages internes de l'entreprise, son salaire ayant été augmenté à la même période les deux années précédentes. Il considère que la suppression de l'augmentation de salaire constitue une sanction pécuniaire prohibée liée à sa démission intervenue à la même période.

L'employeur fixe librement les éventuelles augmentations de salaire éventuelles de ses salariés dans le respect des minima conventionnels.

En l'espèce, il n'est pas justifié d'un accord qui serait intervenu entre les parties sur une augmentation de salaire octroyée par l'employeur au salarié à compter du 1er mars 2018 quant à son quantum, contrairement aux affirmations du salarié sur ce point, les seules discussions en cours ne valant pas accord, l'employeur n'ayant pas l'obligation d'augmenter le salarié.

Il convient, par conséquent, de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de rappel de salaire au titre de la suppression d'une augmentation ainsi que des congés payés afférents, en l'absence d'accord entre les parties sur une augmentation au 1er mars 2018.

Sur l'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT

Le salarié sollicite un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT sur la base de la privation de l'augmentation de salaire de 15% promise depuis le 1er mars 2018.

L'employeur conclut au rejet de la demande, à défaut d'augmentation de salaire accordée au salarié.

En l'espèce, en l'absence d'augmentation de salaire accordée par l'employeur au salarié à compter du 1er mars 2018, aucun rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et de RTT n'est dû au salarié.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande à ce titre.

Sur l'indemnité de non-concurrence

Le salarié sollicite un rappel d'indemnité de non-concurrence, outre congés payés afférents, sur la base de la privation de l'augmentation de salaire de 15% promise depuis le 1er mars 2018. Il indique qu'il a respecté son obligation de non concurrence depuis son départ de l'entreprise, que la société Criteo n'est pas un concurrent de la société Bearingpoint France, ne pratiquant pas d'activité de conseil aux entreprises. Il en déduit que la contrepartie financière prévue par son contrat doit lui être versée.

L'employeur conclut au rejet de la demande, à défaut d'augmentation de salaire justifiée. Il sollicite, à titre reconventionnel, le remboursement de la somme indûment perçue par le salarié au titre de la contrepartie financière en application de la clause de non-concurrence. Il indique que le salarié a violé sa clause de non-concurrence en se faisant embaucher par la société Criteo sur un poste impliquant notamment une activité de développement d'applications informatiques en contradiction avec les termes de la clause et en réalisant des missions SAP similaires à celles exercées antérieurement auprès de la société.

Il incombe à l'employeur, qui se prétend délivré de l'obligation, de payer la contrepartie financière d'une clause de non-concurrence, de rapporter la preuve de la violation de cette clause par le salarié, faute de quoi la contrepartie est due.

Le contrat de travail du salarié comprend en son article 15 une clause de non concurrence, le salarié s'engageant notamment à ne pas travailler directement ou indirectement en tant que salarié auprès des concurrents de la société pendant une durée de 12 mois sur le territoire français et qu'en contrepartie, le salarié recevra de la société une indemnité brute mensuelle égale à 30% de son salaire brut fixe mensuel.

La clause de non-concurrence n'a pas été levée par l'employeur.

Le salarié a retrouvé un emploi au sein de la société Criteo, en qualité de 'IT Application Dévelopment', à compter du 18 juin 2018.

Or, la société Criteo exerce dans le domaine du commerce marketing ayant pour activités principales, d'après son extrait K-Bis, les services et logiciels informatiques, l'agence de communication, le conseil aux entreprises, la vente à distance alors que la société Bearingpoint France est une société de conseil en management et en technologie.

Comme l'ont relevé les premiers juges, le fait que les deux sociétés appliquent la même convention collective nationale ne permet pas d'établir qu'elles exercent une activité concurrente.

La comparaison des extraits K-Bis des deux sociétés ne permet pas non plus d'établir que ces deux sociétés sont concurrentes.

Enfin, le fait que le salarié ait travaillé au sein de la société Beauringpoint France au déploiement de solutions SAP auprès de différentes entreprises en tant que consultant et qu'il ait été formé à ce progiciel SAP en suivant différents modules sur le processus métier et d'autres formations SAP, l'une d'elle lui ayant permis d'obtenir une certification, ne lui interdit pas d'être embauché à un poste de développement d'applications informatiques chez Criteo, poste dans lequel il n'est pas démontré qu'il a donné des conseils à des clients sur le déploiement de SAP. L'expérience professionnelle mentionnée sur le profil 'Linked In' du salarié en matière d'application SAP ne démontre pas davantage qu'il a exercé des missions concurrentes de Bearingpoint France de conseil auprès de clients pendant les douze mois prévus par la clause de non-concurrence.

Ainsi, la société Bearingpoint France ne rapporte pas la preuve de la violation de la clause de non-concurrence invoquée à l'encontre du salarié. Par conséquent la contrepartie financière prévue à la clause de non-concurrence est due au salarié.

Il ressort du dossier que la contrepartie financière a été entièrement réglée suite à l'ordonnance de référé du 29 janvier 2019 et à un courrier du 14 juin 2019. A défaut d'augmentation de salaire accordée par l'employeur au salarié à compter du 1er mars 2018, aucun rappel d'indemnité de non-concurrence n'est dû.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [N] de sa demande de complément d'indemnité de non-concurrence et la société Bearingpoint France de sa demande reconventionnelle en remboursement des sommes versées au titre de la clause de non-concurrence.

Sur les intérêts

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que les créances au titre du bonus de résultat et de la prime SAP portaient intérêts au taux légal à compter de la convocation de la société Bearingpoint France devant le bureau de conciliation, à compter du 2 octobre 2018 et en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts. Il n'y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme sollicité.

Sur la remise de documents

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a ordonné la remise par la société Bearingpoint France à M. [N] de bulletins de paie rectifés, sans qu'une astreinte soit prononcée.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Bearingpoint France succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. Elle devra régler à M. [N] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Bearingpoint France.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant :

Condamne la société Bearingpoint France aux dépens d'appel,

Condamne la société Bearingpoint France à payer à M. [P] [N] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Bearingpoint France,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/02925
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;22.02925 ?
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