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23/04/2024 | FRANCE | N°22/03127

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ch civ.1-4 expropriation, 23 avril 2024, 22/03127


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 70H



Ch. civ 1-4 expropriations



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 23 AVRIL 2024



N° RG 22/03127 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VFWW



AFFAIRE :



[E] [S]



C/



COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU PAYS DE [Localité 2]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2022 par le juge de l'expropriation de CHARTRES

RG n° : [Cadastre 1]/00011



Expédition

s exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me François CARE



Me Stéphanie ARENA



Mme [L] [C] (Commissaire du Gouvernement)

et les parties



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT TROIS AVR...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 70H

Ch. civ 1-4 expropriations

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 23 AVRIL 2024

N° RG 22/03127 - N° Portalis DBV3-V-B7G-VFWW

AFFAIRE :

[E] [S]

C/

COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU PAYS DE [Localité 2]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2022 par le juge de l'expropriation de CHARTRES

RG n° : [Cadastre 1]/00011

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me François CARE

Me Stéphanie ARENA

Mme [L] [C] (Commissaire du Gouvernement)

et les parties

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT TROIS AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [E] [S]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentant : Me François CARE de la SCP CARE PETITJEAN PERSON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000039

APPELANT

****************

COMMUNAUTÉ D'AGGLOMÉRATION DU PAYS DE [Localité 2] prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentant : Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637 et Me France CHARBONNEL de l'AARPI BARATA CHARBONNEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2009

INTIMÉ

****************

Les fonctions du COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT étant exercées par Mme [L] [C], direction départementale des finances publiques.

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, président chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président,

Madame Séverine ROMI, Conseiller,

Madame Marie-Cécile MOULIN-ZYS, Conseiller

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI

****************

La Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] procède à l'expropriation de trois parcelles cadastrées ZH n° [Cadastre 1], [Cadastre 6] et [Cadastre 7], d'une contenance de 34 260 m², situées à [M] (Eure-et-Loir), lieudit [Adresse 8], exploitées par M. [S].

La déclaration d'utilité publique est datée du 2 avril 2021 et l'ordonnance d'expropriation a été rendue le 12 octobre 2021.

Saisi par la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] selon requête parvenue au greffe le 31 mai 2021, le juge de l'expropriation de Chartres a par jugement en date du 28 mars 2022 fixé l'indemnité d'éviction due à M. [S] à 24 769,98 euros, sur la base de 7 230 euros l'hectare, et a condamné la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] à payer à M. [S] la somme de 720 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens. Pour statuer ainsi, il a relevé que deux méthodes étaient visées à la convention relative à l'indemnisation des exploitants agricoles en Eure-et-Loir, l'une sur la base de neuf années de marge brute et l'autre sur la base de 7 230 euros par hectare, et que la première méthode ne pouvait être retenue vu que les documents comptables produits par M. [S] portaient sur les ressources générées par l'ensemble des parcelles exploitées par lui, dont certaines étaient autres que celles objet de la présente expropriation.

Par déclaration en date du 4 mai 2022, M. [S] a relevé appel de ce jugement.

En son mémoire parvenu au greffe le 4 août 2022, qui a été notifié en une lettre recommandée du 25 août 2022 dont la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] et le commissaire du gouvernement ont accusé réception le 26 août 2022, M. [S] expose :

- qu'il s'agit de terres plates, de forme régulière et d'un seul tenant, constituées de terres limoneuses d'excellente qualité agronomique, et en outre faciles d'accès pour les engins agricoles ;

- que le premier juge a écarté à tort la première méthode de calcul de l'indemnité ; qu'en effet pour l'application du protocole régional Centre relatif à l'indemnisation des exploitants agricoles évincés lors d'acquisitions immobilières par des collectivités et organismes, la marge brute est définie par la différence entre le produit brut correspondant aux recettes globales de l'exploitation et les charges, qui est ramenée à l'hectare ; que ce n'est donc pas un calcul parcelle par parcelle qui doit être effectué, mais un calcul global, ramené à l'hectare ;

- que l'indemnité globale d'éviction correspond à neuf années ;

- que les comptes annuels font apparaître une marge brute moyenne de 1 065 euros soit 9 585 euros sur neuf ans ;

- que s'agissant de la parcelle ZH [Cadastre 7] huit années de bail restent à courir, et pour les parcelles ZH [Cadastre 1] et ZH [Cadastre 6], huit années ; qu'il peut prétendre à une indemnité spécifique pour existence de bail et déséquilibre d'exploitation de 10 % ;

- que l'indemnité globale d'éviction est de 11 894,38 euros par hectare soit 1,189438 euros/m² ;

- que la somme de 40 750,15 euros (soit 1 189438 x 34 260 m²) est due.

M. [S] demande en conséquence à la Cour d'infirmer le jugement, de fixer le montant de l'indemnité d'éviction lui revenant à 40 750,15 euros, et de condamner la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] à lui régler la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Dans son mémoire parvenu au greffe le 27 octobre 2022, qui a été notifié en une lettre recommandée du 28 octobre 2022 dont le commissaire du gouvernement et M. [S] ont accusé réception le 2 novembre 2022, la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] réplique :

- que les parcelles en cause sont exploitées par M. [J] et donc occupées ;

- que ne peut être prise en compte que la marge brute afférente aux seules parcelles expropriées, et non pas une valeur moyenne sur l'ensemble de l'exploitation ;

- que les demandes de M. [S] ne sont dès lors pas justifiées et la valeur de 7 230 euros par hectare prévue à la convention d'indemnisation doit être retenue ;

- que s'agissant des indemnités pour fumures et arrières-fumures, le barème forfaitaire n'est pas applicable à la commune de [M], seule une indemnité globale étant exigible, à l'exclusion de celle de 5 270 euros qui concerne les communes autres que [M] ;

- qu'en effet les deux barèmes sont alternatifs et non cumulatifs.

La Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] demande en conséquence à la Cour de :

- confirmer le jugement ;

- condamner M. [S] au paiement de la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [S] aux dépens d'appel.

Le 28 novembre 2022, le commissaire du gouvernement a déposé un mémoire qui a été notifié en une lettre recommandée du 2 décembre 2022 dont l'appelant et la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] ont accusé réception respectivement les 6 et 8 décembre 2022, dans lequel il indique :

- que l'indemnité d'éviction est déterminée par référence à la convention applicable en Eure-et-Loir, prévoyant que l'exproprié peut réclamer une indemnisation assise sur ses résultats réels à condition de produire les document comptables nécessaires ou à défaut selon un barème forfaitaire ;

- que dans le premier cas, il faut retenir la marge brute sur les 5 dernières années abstraction faite de la meilleure et de la moins bonne ;

- que le protocole ne précise pas si les deux barèmes, celui au réel et celui forfaitaire, peuvent se cumuler ou non ;

- que l'exproprié n'a produit de documents comptables que sur les trois dernières années, si bien que l'indemnisation forfaitaire doit être retenue, soit 7 290 euros par hectare.

Le commissaire du gouvernement propose à la Cour d'allouer à M. [S] une indemnité de 24 975,54 euros.

MOTIFS

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance. La date du jugement est le 28 mars 2022. Il y a lieu de prendre en compte la convention applicable sur la période allant du 1er septembre 2021 au 31 août 2022.

La convention relative à l'indemnisation des exploitants agricoles évincés lors d'acquisitions immobilières par toutes les collectivités et organismes tenus de solliciter l'avis du Service du Domaine en date du 28 juin 2021 prévoit que :

- sauf dans les cas prévus aux articles IV-A1 et IV-A2 du protocole, l'indemnisation est calculée (pour la région fiscale du Thymerais-Drouais) comme suit, en application du barème forfaitaire à l'hectare suivant : marge brute moyenne (3 951 euros), fumures, arrière-fumures, amendements, façons culturales (1 363,39 euros) ce qui donne une indemnité globale d'éviction arrondie à 5 320 euros ;

- au titre des majorations visées aux articles IV-A1 et IV-A2 du protocole,

dans les communes visées en annexe (à savoir l'annexe 1 : liste des communes situées en zone de pression foncière avec leur région fiscale de rattachement) il est fait application du barème forfaitaire suivant à l'hectare : 7 290 euros (pour la région fiscale du Thymerais-Drouais). La commune de [M] est visée à l'annexe.

Les termes du II de la convention du 28 juin 2021 stipulent que 'Dans les communes désignées en annexe I de la présente convention, il est fait application du barème forfaitaire suivant à l'hectare, compte tenu de la majoration retenue du nombre d'années de marge brute'. Il s'ensuit que les deux barèmes ne sont nullement cumulatifs mais bien au contraire sont alternatifs. D'ailleurs le mot 'forfaitaire' montre bien qu'il ne s'agit pas d'additionner des postes d'indemnités.

Il s'ensuit que M. [S] peut réclamer :

- soit la somme de 7 290 euros par hectare ;

- soit, conformément à l'article III du protocole visé par la convention :

* une indemnité d'exploitation correspondant à la perte de revenus, en fonction de la marge brute (différence entre le produit brut qui correspond au montant des recettes globales portées au compte d'exploitation et les charges proportionnelles qui sont nécessaires à une production déterminée et qui disparaissent avec la suppression des terres affectées à cette production ; cette différence est ramenée à l'hectare et est calculée sur la moyenne des marges brutes des cinq dernières années abstraction faite de la meilleure et de la moins bonne) ;

* une indemnisation compensatrice de la perte des fumures, arrières fumures, amendements et façons culturales ; elle est calculée en appliquant un pourcentage au montant de la consommation d'engrais chimiques, d'engrais organiques et d'amendements portés au compte type présenté par l'administration ;

* diverses indemnités dont un supplément pour existence de bail, qui vise à réparer le préjudice résultant de la privation de la stabilité foncière qu'avait acquise l'exploitant en concluant le bail, sous la condition que la durée restant à courir dudit bail soit d'au moins cinq ans.

M. [S] n'ayant fourni ses comptes annuels que sur les exercices 2018, 2019 et 2020, et non pas sur cinq années en faisant abstraction de la meilleure et de la moins bonne, il n'est pas fondé à solliciter l'application de la première méthode de calcul de l'indemnisation puisqu'il est nécessaire de connaître cette marge brute sur cinq années, sous réserve de ce qui précède. Par voie de conséquence, il peut réclamer uniquement la somme de 7 290 euros par hectare soit 24 975,54 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point et la somme susvisée allouée à l'appelant.

La Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2], qui succombe, sera condamnée au paiement de la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de M. [S], ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

- INFIRME le jugement en date du 28 mars 2022 en ce qu'il a fixé l'indemnité d'éviction revenant à M. [S] à la somme de 24 769,98 euros ;

et statuant à nouveau :

- FIXE l'indemnité d'éviction revenant à M. [S] à la somme de 24 975,54 euros ;

- CONFIRME le jugement pour le surplus ;

- CONDAMNE la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] à payer à M. [S] la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la Communauté d'agglomération du pays de [Localité 2] aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ch civ.1-4 expropriation
Numéro d'arrêt : 22/03127
Date de la décision : 23/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-23;22.03127 ?
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