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28/03/2024 | FRANCE | N°22/02388

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 28 mars 2024, 22/02388


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 28 MARS 2024



N° RG 22/02388

N° Portalis DBV3-V-B7G-VK7A



AFFAIRE :



[H] [B]





C/

SAS HOLISTEA











Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de CERGY PONTOISE

N° Section : E

N° RG : F21/00142
>

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Margot DESPINS



la ASSOCIATION AVOCALYS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT HUIT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 28 MARS 2024

N° RG 22/02388

N° Portalis DBV3-V-B7G-VK7A

AFFAIRE :

[H] [B]

C/

SAS HOLISTEA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 30 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de CERGY PONTOISE

N° Section : E

N° RG : F21/00142

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Margot DESPINS

la ASSOCIATION AVOCALYS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [H] [B]

née le 14 Mai 1987 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Margot DESPINS, Plaidant/PConstitué, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

SAS HOLISTEA

N° SIRET : 441 39 8 6 17

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l'ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620

Représentant : Me Joëlle BERANGUER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Février 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE.

Mme [H] [B] a été embauchée selon des contrats de travail à durée déterminée, à compter du 1er septembre 2010, en qualité d'attachée de formation par la société HOLISTEA, ayant une activité d'enseignement en ostéopathie et employant habituellement au moins onze salariés.

Le 2 octobre 2013, les parties ont conclu un contrat de travail à durée indéterminée et à temps partiel pour le même emploi d'attachée de formation.

Par avenant à effet au 1er septembre 2015, la durée annuelle du travail de Mme [B] a été fixée à 520 heures, incluant les activités de cours et les activités dites induites ( telles que notamment la préparation des cours, la correction de copies, la participation aux conseils de classe) et sa rémunération annuelle a été portée à 13'830,96 euros brut, soit 1152,58 euros brut par moi.

La convention collective applicable à la relation de travail est la convention collective nationale de l'enseignement privé indépendant.

Le 22 mai 2019, Mme [B] s'est présentée au premier tour des élections aux fonctions de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique.

Par lettre du 22 novembre 2019, le syndicat SNEP UNSA a désigné Mme [B] en qualité de délégué syndical, cette désignation a été ensuite annulée par jugement du 26 décembre 2019.

Par lettre du 12 février 2020, la société HOLISTEA a convoqué Mme [B] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 4 mars 2020, la société HOLISTEA a notifié à Mme [B] son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le 8 mars 2021, Mme [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise pour demander à titre principal la nullité du licenciement, sa réintégration au sein de la société HOLISTEA et la condamnation de cette dernière à lui payer un rappel de salaire pour la période d'éviction ou des dommages-intérêts pour licenciement nul, et à titre subsidiaire pour contester le bien-fondé de son licenciement, et pour par ailleurs demander l'allocation de diverses sommes à titre indemnitaire et salarial.

Par un jugement du 30 juin 2022, le conseil de prud'hommes a :

- dit que le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société HOLISTEA à payer à Mme [B] les sommes nettes suivantes :

* 11'429 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation par la partie défenderesse en ce qui concerne les créances salariales et à compter du jugement en ce qui concerne les créances indemnitaires ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- ordonné en tant que de besoin à la société HOLISTEA de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Mme [B] dans la limite d'un mois ;

- mis les dépens la charge de la société HOLISTEA.

Le 26 juillet 2022, Mme [B] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 2 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, Mme [B] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué et statuant à nouveau :

1) A TITRE PRINCIPAL

- prononcer la nullité du licenciement et ordonner sa réintégration

- rappel de salaire entre le 4 juin 2020 et la date de réintégration : montant à parfaire

- subsidiairement, indemnité pour licenciement nul à hauteur des salaires entre le 4 juin 2020 et la date de jugement : montant à parfaire

2) à titre subsidiaire :

- juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse

- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 22'572,90 euros

3) en tout état de cause :

- fixer le salaire mensuel moyen à la somme de 2 257,29 euros

- dommages-intérêts pour harcèlement moral : 40'631,22 euros

- dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat : 40'631,22 euros

- dommages-intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires : 13'543,73 euros

- rappel de salaire sur les trois dernières années (maintien) : 27'580,52 euros

* subsidiairement (heures déclarées par la salariée) : 19'867,36 euros

* très subsidiairement (370 heures reconnues par l'employeur) : 19'025,77 euros

* et infiniment subsidiairement (heures déclarées par l'employeur) : 15'494,91 euros ;

- congés payés afférents : 2758,05 euros

* et subsidiairement : 1922,89 euros

* et très subsidiairement : 1902,58 euros

* et infiniment subsidiairement : 1594,91 euros

- dommages-intérêts pour travail dissimulé : 13'543,74 euros

- dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat : 13'543,73 euros

- ordonner la confiscation des intérêts

- article 700 du code de procédure civile (première instance) : 2 000 euros

- article 700 du code de procédure civile (appel) : 3 000 euros.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 5 février 2024, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société HOLISTEA demande à la cour de :

1) A titre principal :

- Confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a débouté Mme [B] de ses demandes ;

- Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a jugé que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et l'article 700 du code de procédure civile et statuant à nouveau :

* juger du bien-fondé du licenciement

* prendre acte de ce que s'engage à payer 42,59 euros bruts et 4,25 euros au titre de congés payés;

- Débouter Mme [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Condamner Mme [B] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civil et aux entiers dépens correspondant aux frais irrépétibles engagés devant le conseil de prud'hommes.

- Condamner Mme [B] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civil et aux entiers dépens correspondant aux frais irrépétibles engagés devant la Cour d'appel.

2) A titre subsidiaire si la Cour juge le licenciement nul en raison d'actes de

harcèlement moral ou de discrimination :

- Fixer la moyenne de salaire mensuelle à la somme de 1.334,45 euros bruts.

- Débouter Mme [B] de toutes ses demandes fondées sur des calculs de salaire liés à une réintégration, en l'absence d'informations communiquées sur sa situation professionnelle, et ses revenus, empêchant de définir le quantum de l'indemnisation, la Cour ne pouvant se substituer à Mme [B] pour opérer et déterminer des quantums. En effet Mme [B] ne verse au débat aucune pièce et ne justifie pas de sa situation professionnelle, y compris financière.

3) A titre plus subsidiaire, si la Cour jugeait nul le licenciement de Mme [B], et recevable la demande de réintégration, il conviendrait de limiter le montant des indemnités pour licenciement nul au montant des salaires qu'elle aurait perçus entre sa demande de réintégration intervenue le 3 mars 2021 et sa réintégration effective et non depuis son licenciement et déduction faite des revenus perçus pendant cette période dont elle ne justifie pas , rendant sa demande non recevable et non fondée. En cas de versement de salaire fondé à la suite d'une décision de réintégration, débouter Mme [B] de toute demandes de dommages et intérêts quel qu'en soit le fondement et la nature et notamment pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, pour licenciement dans des conditions vexatoires, pour exécution déloyale du contrat de travail, Mme [B] n'étant pas en droit de réclamer une indemnité supplémentaire liée à ce caractère illicite.

3) A titre encore plus subsidiaire limiter l'indemnisation à 6 mois de salaire, soit la

somme de 8.006,70 euros.

4) Si le licenciement est considéré comme étant sans cause réelle et sérieuse, limiter l'indemnisation à 3 mois de salaire, soit la somme de 4.003,35 euros, débouter Mme [B] de ses demandes au titre des dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination, pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat, pour licenciement dans des conditions vexatoires, pour exécution déloyale du contrat de travail, et travail dissimulé.

5) En tout état de cause :

- Juger de l'absence de préjudice financier dans la mesure où Mme [B] ayant une activité professionnelle à temps plein.

- La débouter en tout état de cause de sa demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé, .

- La débouter de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- Condamner Mme [B] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civil, et aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Fabrice HONGRE BOYELDIEU du Cabinet AVOCALYS, correspondant aux frais irrépétibles engagés devant la Cour d'appel.

- Condamner Mme [B] au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civil et aux entiers dépens correspondant aux frais irrépétibles engagés devant le conseil de prud'hommes.

Une ordonnance de clôture de l'instruction a été rendue le 6 février 2024.

Par ordonnance du 20 février 2024, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de révocation de l'ordonnance de clôture formée par Mme [B].

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les dommages-intérêts pour harcèlement moral :

Mme [B] soutient qu'elle a été victime d'agissements répétés de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie, ayant dégradé ses conditions de travail et son état de santé, constitués par:

1) le fait d'avoir subi, comme les autres salariés, un harcèlement généralisé ainsi que l'a relevé l'inspecteur du travail dans un rapport d'enquête ;

2) un retrait des fonctions 'd'encadrant clinique', constitutif d'une rétrogradation et la soumission à une procédure de recrutement injuste pour continuer à occuper ce poste ;

3) le retrait de fonctions au sein de la partie clinique de la société ;

4) des pressions incessantes pour conclure un avenant au contrat de travail défavorable à ses intérêts;

Elle réclame en conséquence l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

La société HOLISTEA conclut à l'absence de harcèlement moral et au débouté de la demande indemnitaire ce titre.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aux termes de l'article L. 1154-1 du même code : ' Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. / Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement./ Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles'.

En l'espèce, sur le harcèlement généralisé dénoncé au 1) ci-dessus, il ressort de la lettre d'observation du 6 décembre 2017 adressée par le contrôleur du travail à la société HOLISTEA, à la suite d'une enquête pour harcèlement moral, que cette autorité administrative ne conclut pas à l'existence d'un harcèlement moral contrairement à ce que soutient Mme [B], mais fait état de manière lapidaire, d'une organisation 'pouvant' dégrader les conditions de travail des salariés, en indiquant par ailleurs, en employant le conditionnel, que 'cela résulterait d'une organisation de travail imprécise et mal comprise'. Ce rapport ne fait de plus et en tout état de cause ressortir aucun défaut d'organisation personnellement subi par Mme [B]. L'appelante ne présente donc pas d'éléments de faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement sur ce point.

Sur les faits mentionnés au 2) et 3) ci-dessus, Mme [B] se borne à procéder par allégations et ne démontre pas, alors que son emploi était selon les termes du contrat 'd'attachée de formation', qu'elle occupait des fonctions 'd'encadrant clinique', ou que lui ont été enlevées des fonctions au sein de la partie clinique de la société, ce qui constituerait selon elle une modification du contrat de travail.

Sur les faits mentionnés au 4), les échanges de courriels entre Mme [B] et la société HOLISTEA produits aux débats ne font ressortir aucune pression pour l'acceptation d'un avenant au contrat de travail relatif à la qualification et à la rémunération, par ailleurs proposé à l'ensemble des salariés, et montrent même qu'à l'inverse, à la suite d'un refus de Mme [B], l'employeur a renoncé à la modification envisagée et indiqué que la relation se poursuivait sans changement.

Sur la dégradation de l'état de santé à raison des conditions de travail, Mme [B] ne verse aucune pièce médicale et se borne à produire un courriel contenant ses propres allégations ou une attestation de son père, qui n'a jamais été présent dans l'entreprise.

Dans ces conditions, Mme [B] ne présente pas des éléments de fait, qui pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

En conséquence il y a lieu de confirmer le débouté de la demande indemnitaire formée à ce titre.

Sur les dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité :

En l'espèce, Mme [B] soutient que les faits de harcèlement moral qu'elle a subis sont constitutifs d'un manquement à l'obligation de sécurité et demande l'allocation de dommages-intérêts à ce titre.

Toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aucun harcèlement moral ne ressort des débats.

De plus et en tout état de cause, Mme [B] n'établit ni même n'allègue l'existence d'un préjudice à ce titre.

En conséquence, il y a lieu de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire.

Sur les rappels de salaires et de congés payés afférents :

En l'espèce, au terme d'une augmentation confuse, Mme [B] demande, à titre principal et à titres subsidiaires, des rappel de salaire pour heures supplémentaires majorées de 25% puis 50% au motif qu'elle a accompli non pas seulement les 254,24 heures annuelles de cours découlant de son contrat de travail mais en réalité un nombre supérieur d'heures de cours alors que son contrat à temps partiel ne prévoyait pas la possibilité d'effectuer des heures complémentaires contrairement aux stipulations de la convention collective. Elle invoque également un taux horaire de 26,60 euros par application de la convention collective.

Toutefois, si le b) de l'article 4.1.2 de la convention collective, relatif au temps partiel, dans sa version applicable au litige, stipule que 'l'horaire contractuel peut être dépassé lorsqu'il est nécessaire d'envisager des accroissements ponctuels d'activité. Le contrat de travail doit alors prévoir expressément la faculté d'effectuer des heures complémentaires ayant fixé le nombre maximum', aucune disposition ne prévoit que, en l'absence d'une telle clause contractuelle, les heures de travail accomplies au delà de l'horaire à temps partiel constituent des heures supplémentaires rémunérées comme telles.

En outre, aucune stipulation de la convention collective ne prévoit que le salaire doit être calculé sur la base d'un taux horaire établi en divisant le salaire annuel par le nombre d'heures de cours et le nombre d'heures dites induites. Par ailleurs, il ressort des bulletins de salaire que la rémunération contractuelle de 1152,58 euros brut fixée par l'avenant de 2015 a été bien été retenue par l'employeur pour le calcul du salaire sur la période en litige.

Enfin et en tout état de cause, les sommes demandées à titre très subsidiaire et infiniment subsidiaire dans le dispositif des conclusions ne correspondent pas aux sommes et aux calculs produits dans la partie discussion, ce qui amène la cour à constater qu'aucun moyen intelligible n'est invoqué au soutient de ces prétentions.

Il y a donc lieu de débouter Mme [B] de l'ensemble de ses demandes de rappel de salaire pour heures supplémentaires et de congés pays afférents.

La société HOLISTEA sera seulement condamnée à payer la somme de 42,59 euros brut à titre de rappel de salaire et la somme de 4,25 euros brut au titre des congés payés afférents dont elle se reconnaît débitrice à titre d'heures complémentaires. La jugement sera en conséquence infirmé sur ce point.

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales '.

En l'espèce, Mme [B] ne démontre en rien que le défaut de mention sur des bulletins de salaire des heures complémentaires évoquées ci-dessus, pour un montant de 42,59 euros brut, seule créance salariale établie, est intentionnel.

Il y a donc lieu de confirmer le débouté de la demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Sur la validité du licenciement :

Mme [B] soutient que son licenciement est nul aux motifs que :

- il a été prononcé à titre de rétorsion d'un témoignage apporté à l'inspection du travail dans le cadre de l'enquête pour harcèlement moral qu'elle a diligentée en 2018 et de rétorsion à sa propre dénonciation auprès de l'employeur d'un harcèlement moral subi à titre personnel ;

- il est en réalité fondé sur son activité syndicale puisque la procédure a été engagée deux mois après la fin de sa période de protection consécutive à sa candidature aux élections du CSE ;

- il est en partie fondé selon les termes de la lettre sur son 'opposition aux traitements réservés aux salariés de la société HOLISTEA, ce qui n'est ni plus ni moins qu'une sanction de sa liberté d'expression'.

Elle demande en conséquence à titre principal, sa réintégration dans l'entreprise et un rappel de salaire pour la période d'éviction, qui n'est pas chiffré, ou subsidiairement, une indemnité pour licenciement nul, qui n'est pas non plus chiffrée.

La société HOLISTEA soutient que le licenciement de Mme [B] est valide et qu'il convient de débouter cette dernière de l'ensemble de ses demandes subséquentes.

Sur la nullité du licenciement au titre d'une rétorsion à un témoignage et une dénonciation en matière de harcèlement moral, aux termes de l'article L. 1152-2 du code du travail dans sa version applicable au litige : 'Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés'. Aux termes de l'article L. 1152-3 du même code : 'Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul'.

En l'espèce, il ressort des pièces versées que l'enquête pour harcèlement moral diligentée par les services de l'inspection du travail a été close le 6 décembre 2017 et Mme [B] n'allègue pas avoir témoigné dans le cadre de cette enquête. Aucun élément ne vient établir l'existence d'une enquête menée par ce service en 2018 et d'un témoignage relatif à un harcèlement moral apporté par Mme [B] dans ce cadre au cours de cette année là. De surcroît et en tout état de cause, Mme [B] n'allègue pas que son employeur aurait eu connaissance d'un tel témoignage.

Par ailleurs, Mme [B] ne verse aucune pièce démontrant qu'elle s'est personnellement plainte de faits de harcèlement moral auprès de la société HOLISTEA et indique même à l'inverse qu'elle n'a fait aucune démarche en ce sens dans un autre passage de ses conclusions (p.22).

En conséquence, Mme [B] n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de la protection prévue en matière de harcèlement moral par les dispositions mentionnées ci-dessus et à soutenir une nullité du licenciement à ce titre.

Sur le caractère discriminatoire du licenciement, au termes de l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa version applicable litige : 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif local, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français'.

En application de l'article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Aux termes de L.1132- 4 du même code : ' Toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul'.

Aux termes de l'article L. 2411-7 du code du travail : 'L'autorisation de licenciement est requise pendant six mois pour le candidat, au premier ou au deuxième tour, aux fonctions de membre élu de la délégation du personnel du comité social et économique, à partir de la publication des candidatures. La durée de six mois court à partir de l'envoi par lettre recommandée de la candidature à l'employeur./ Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de membre élu à la délégation du personnel du comité social et économique a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement'

En l'espèce, il ressort des pièces versées que si Mme [B] a été candidate comme membre titulaire aux élections au CSE le 22 mai 2019, elle ne verse aucun élément sur la date d'envoi de sa candidature et donc sur le début et la fin de sa période de protection. De plus, la procédure de licenciement est engagée le 12 février 2020, soit près de neuf mois après le début de cette activité syndicale. Aucun autre élément n'est présenté par la salariée.

Dans ces conditions, Mme [B] ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte à l'origine du licenciement.

Sur la nullité du licenciement pour violation de la liberté d'expression, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression. Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.

En l'espèce, contrairement à ce que soutient Mme [B], la lettre de licenciement ne contient aucun motif tiré de son 'opposition aux traitements réservés aux salariés de la société HOLISTEA' mais des motifs liés à des difficultés de communication personnelle avec sa hiérarchie et à une absence de suivi par l'intéressée des 'choix pédagogiques' de l'employeur. La motif tiré d'une atteinte à l'exercice de la liberté d'expression n'est donc pas établi.

Il résulte de tout ce qui précède que Mme [B] n'est pas fondée à invoquer la nullité de son licenciement.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il déboute Mme [B] de sa demande à ce titre et de ses demandes subséquentes.

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

En application de l'article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

En l'espèce, la lettre de licenciement pour insuffisance professionnelle notifiée à Mme [B] invoque en substance les faits suivants :

- des retards réguliers ;

- une tendance à ne pas suivre le déroulé de certains cours ;

- une relation avec les étudiants trop aléatoire et un défaut de clarté dans ses explications ;

- des difficultés de communication personnelle avec sa hiérarchie et une absence de suivi des choix pédagogiques de la société HOLISTEA ;

- des difficultés relationnelles avec les autres enseignants.

Alors que Mme [B] nie la réalité des faits qui lui sont reprochés, la société HOLISTEA ne verse pas la moindre pièce aux débats pour justifier de leur réalité et se contente d'allégations elliptiques.

Dans ces conditions, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il dit que le licenciement de Mme [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Par suite, Mme [B] est fondée à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle sérieuse d'un montant compris entre trois et neuf mois de salaire brut à raison d'une ancienneté de neuf années complètes au moment du licenciement, en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail. Eu égard à son âge (née en 1987), à sa rémunération moyenne s'élevant au vu des pièces versées à la somme de 1347,65 euros brut, à l'absence d'éléments sur sa situation postérieure au licenciement mis à part la continuation de son activité libérale d'ostéopathe, il y a lieu d'allouer une somme de 12 400 euros à ce titre. Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur les dommages-intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires :

En l'espèce, Mme [B] n'établit pas que la notification d'une mise à pied à titre conservatoire a eu des conséquences sur sa santé, contrairement à ce qu'elle prétend. Il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire, en l'absence de justification d'un préjudice.

Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

En l'espèce et en toutes hypothèses, Mme [B] ne justifie d'aucun préjudice à ce titre. Il y a donc lieu de confirmer le débouté de cette demande indemnitaire.

Sur les intérêts légaux :

Il y a lieu de rappeler que la créance d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée ci-dessus porte intérêts au taux légal à compter de présent arrêt et que la créance salariale porte intérêts légaux à compter de la date de réception par la société HOLISTEA de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes. Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

Sur le remboursement des indemnités de chômage :

Eu égard à la solution du litige, il y lieu confirmer le jugement entrepris sur ce point.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué sur ces deux points. En outre, la société HOLISTEA sera condamnée à payer à Mme [B] une somme de 1 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il statue sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le rappel de salaire, les intérêts légaux,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société HOLISTEA à payer à Mme [H] [B] une somme de 12'400 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Condamne la société HOLISTEA à payer à Mme [H] [B] une somme de 42,59 euros brut à titre de rappel de salaire et une somme de 4,25 euros brut au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société HOLISTEA de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes,

Condamne la société HOLISTEA à payer à Mme [H] [B] une somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société HOLISTEA aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/02388
Date de la décision : 28/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-28;22.02388 ?
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