COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80B
Chambre sociale 4-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 28 MARS 2024
N° RG 21/03885 -
N° Portalis DBV3-V-B7F-U5P5
AFFAIRE :
S.A.S. G P X
C/
[I] [B]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Octobre 2021 par le Conseil de Prud'hommes de BOULOGNE BILLANCOURT
N° Section : E
N° RG : F 19/01192
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Martine DUPUIS
Me Haïba OUAISSI
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT HUIT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
S.A.S. G P X
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et Me Stephen MONOD de l'ASSOCIATION MONOD AMAR BOUDRANT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0135
APPELANTE
****************
Madame [I] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Haïba OUAISSI de la SELARL CASSIUS AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E2127 substitué par Me Amélie VIDAL, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 16 Janvier 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Domitille GOSSELIN,
Vu le jugement rendu le 21 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt,
Vu la déclaration d'appel de la société GPX du 29 décembre 2021,
Vu les conclusions de la société GPX du 18 décembre 2023,
Vu les conclusions de Mme [I] [B] du 11 décembre 2023,
Vu l'ordonnance de clôture du 20 décembre 2023.
EXPOSE DU LITIGE
La société GPX, dont le siège social est situé [Adresse 3] à [Localité 6], est spécialisée dans l'achat, la vente, l'importation, l'exportation, les études et la fabrication de tous produits ou services ainsi que les installations concernant la sécurité et la défense des personnes et des biens privés ou publics.
La société GPX appartient au groupe Visiom, composé de :
- la société Visiom développement, société holding,
- la société Vimage, qui est un atelier de décoration et de dessin,
- la société Adecom, qui a pour activité la communication,
- la société Caps training, spécialisée dans la formation notamment en matière de sécurité,
- la société DSOA, qui a pour activité l'achat et la ventes de produits de sécurité.
La société GPX applique la convention collective de la métallurgie et emploie moins de 11 salariés.
Mme [I] [B], née le 28 février 1974, a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée du 28 janvier 2013, par la société GPX, en qualité d'assistante commerciale, moyennant une rémunération annuelle initiale de 38 000 euros.
Par courrier en date du 7 septembre 2018, la société GPX a convoqué Mme [B] à un entretien préalable qui s'est déroulé le 14 septembre 2018.
Par courrier en date du 1er octobre 2018, la société GPX a notifié à Mme [B] son licenciement pour motif économique dans les termes suivants :
« Au cours de notre entretien du 7 septembre, nous avons évoqué la possibilité d'un licenciement économique et vous avons remis les documents relatifs au CSP, conformément à la législation.
Nous sommes au regret de vous informer de notre décision de procéder à votre licenciement économique pour les motifs suivants.
L'entreprise rencontre des difficultés économiques depuis 3 ans avec une baisse croissante de ses résultats. Nous avons cependant tenu à maintenir votre salaire, grâce au financement du groupe Visiom. A présent, nos résultats 2017, avec un chiffre d'affaires égal à 345 220 euros, ne permettent plus cette prise en charge et nous contraignent à supprimer votre emploi de responsable administration des ventes.
Nous avons recherché la disponibilité d'un poste au sein du groupe, pouvant correspondre à votre profil. Au cours de nos différents entretiens, le poste suivant vous a été proposé :
- responsable gestion des pièces détachées de Visiom.
Vous avez choisi de décliner cette offre.
A l'issue de notre entretien préalable du 7 septembre, vous disposiez d'un délai de réflexion de 21 jours calendaires à compter de la remise des documents d'information, soit jusqu'au 6 octobre 2018, pour adhérer au contrat de sécurisation professionnelle.
Le 25 septembre, nous avons reçu votre notification d'acceptation du CSP. Nous en prenons bonne note et accomplirons les démarches nécessaires auprès de Pôle emploi. Par conséquent, votre contrat de travail sera rompu le 6 octobre 2018 par commun accord sans effectuer le préavis de trois mois. Vous recevrez cependant l'indemnité de licenciement prévue par la convention collective de la métallurgie.
En application de l'article L. 1235-7 du code du travail, vous disposez, à compter de la notification de la présente lettre, d'un délai de 12 mois pour contester la régularité et la validité de votre licenciement ».
Par requête reçue au greffe le 6 septembre 2019, Mme [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt des demandes suivantes :
- déclarer Mme [B] recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- constater les faits de harcèlement moral,
- constater l'absence de juste cause économique de licenciement,
- constater le non-respect de l'obligation préalable de reclassement,
- constater que le véritable motif de licenciement n'est pas celui renseigné dans la lettre de licenciement,
- constater l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement,
- constater le non-respect des critères d'ordres des licenciements pour motif économique,
- constater le manquement à l'obligation d'adaptation,
- constater le non-respect de l'obligation de sécurité 'de résultat' (articles L. 4121-1 et suivants du code du travail),
En conséquence, condamner la société GPX à payer à Mme [B] les sommes suivantes :
A titre principal,
- indemnité pour licenciement nul : 72 864,72 euros,
- dommages et intérêts pour harcèlement moral : 15 000 euros,
à titre subsidiaire,
- indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 24 288,24 euros,
En tout état de cause,
- dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité : 10 000 euros,
- dommages et intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation : 7 500 euros,
- dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 5 000 euros,
- article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros.
La société GPX avait, quant à elle, demandé à ce que Mme [B] soit déboutée de toutes ses demandes, fins et conclusions et à laisser les dépens à sa charge.
Par jugement contradictoire rendu le 21 octobre 2021, la section encadrement du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :
- dit et jugé que le licenciement pour motif économique de Mme [B] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société GPX à régler à Mme [B] :
. la somme de 24 288 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
. débouté Mme [B] de ses autres demandes,
. débouté la société GPX de ses demandes 'reconventionnelles',
- ordonné d'office, en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société GPX aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme [B] dans la limite de 6 mois d'indemnités,
- laissé les dépens de l'instance à la charge de la société GPX.
Par déclaration du 29 décembre 2021, la société GPX a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 18 décembre 2023, la société GPX demande à la cour de :
- réformer le jugement RG F 19/01192 du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 21 octobre 2021 en ce qu'il a :
- dit et jugé que le licenciement pour motif économique de Mme [B] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société GPX à régler à Mme [B] :
- la somme de 24 288 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société GPX de ses demandes reconventionnelles,
- ordonné d'office en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société GPX aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme [B] dans la limite de 6 mois d'indemnités,
- laissé les dépens de la [présente] instance à la charge de la société GPX,
- confirmer le jugement RG F 19/01192 du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 21 octobre 2021 en ce qu'il a débouté Mme [B] de ses demandes tirées des griefs de harcèlement moral, licenciement nul, manquement à l'obligation de sécurité, à l'obligation d'adaptation et à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,
En conséquence, statuant à nouveau des chefs de jugement infirmés,
- juger que le licenciement du 6 octobre 2019 de Mme [B] a été prononcé par la société GPX pour un motif économique constitutif d'une cause réelle et sérieuse,
- juger n'y avoir lieu à remboursement par la société GPX aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme [B] dans la limite de six mois d'indemnités,
- débouter Mme [B] de toutes ses demandes, fins, moyens et conclusions d'intimée principale et d'appel incident en ce que dirigées à l'encontre de la société GPX,
- condamner Mme [B] aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 11 décembre 2023, Mme [I] [B] demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
- fixer la rémunération brute mensuelle moyenne de Mme [B] à 4 827,97 euros,
y faisant droit,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- dit et jugé que le licenciement de Mme [B] ne reposait pas sur un motif légitime,
- condamné la société GPX à régler à Mme [B] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté la société GPX de ses demandes reconventionnelles,
- ordonné d'office en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, le remboursement par la société GPX aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme [B] dans la limite de 6 mois d'indemnités,
- laisser [sic] les dépens de la première instance à la charge de la société GPX,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté Mme [B] [de] sa demande en requalification du licenciement litigieux en licenciement nul,
- débouté Mme [B] de ses autres demandes,
et statuant à nouveau,
à titre principal,
- que la cour requalifie le licenciement de Mme [B] en licenciement nul,
- que la cour condamne la société GPX à verser à Mme [B] les sommes suivantes :
. indemnité pour licenciement nul : 48 576,48 euros,
. dommages et intérêts pour harcèlement moral : 15 000 euros,
à titre subsidiaire,
- que la cour requalifie le licenciement de Mme [B] en licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
- que la cour condamne la société GPX à verser à Mme [B] la somme suivante :
. indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 24 288,24 euros,
en tout état de cause,
- que la cour condamne la société GPX à verser à Mme [B] les sommes suivantes :
. dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité : 10 000 euros,
. dommages et intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation : 7 500 euros,
. dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 5 000 euros,
. article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros,
. assortir les condamnations de l'intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes (au 5 septembre 2019),
. condamnation aux entiers dépens lesquels incluront les éventuels frais d'exécution de la décision à intervenir.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l'audience et rappelées ci-dessus.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 20 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
L'appelante conteste le jugement qui a considéré que le motif économique du licenciement de Mme [B] n'était pas établi et l'obligation de reclassement non respectée, l'intimée est appelante incidente au motif notamment que du fait des faits de harcèlement subi, son licenciement est nul.
Il convient en conséquence d'examiner en premier lieu les faits de harcèlement moral allégués, lesquels s'ils sont avérés, ont pour conséquence la nullité du licenciement, le licenciement pour motif économique n'étant examiné que dans le cas où les faits de harcèlement moral ne sont pas établis.
1- sur le harcèlement moral
Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L'article L. 1152-2 dudit code dans sa version applicable à la présente espèce dispose qu'aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, le juge doit :
- examiner la matérialité de tous les éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits,
- apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail,
- dans l'affirmative, apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
En l'espèce, Mme [B] invoque les faits suivants :
- elle a été victime du comportement de son supérieur hiérarchique qui l'a mise à l'écart. Ses prérogatives professionnelles lui ont été retirées car elle a alerté l'employeur et la responsable financière sur des irrégularités portant sur les notes de frais de son supérieur. Elle produit une attestation de Mme [L], salariée du cabinet d'expertise-comptable, se trouvant dans le même immeuble que la société GPX qui indique 'que le seul travail que lui donnait M. [N] [le directeur commercial, supérieur hiérarchique de Mme [B]] c'était pour ses notes douteuses'. Or, Mme [L] qui n'appartient pas à la société GPX ne fait que répéter, plus de deux ans après le licenciement, les dires de Mme [B], n'ayant pas été témoin des irrégularités dont fait état cette dernière (sa pièce n°14).
Le fait n'est pas matériellement établi.
- elle a été la seule salariée à ne pas recevoir sa prime trimestrielle de 500 euros en juin 2018. Elle produit (sa pièce n°16) un échange avec Mme [E], responsable des ressources humaines de la société holding Visiom justifiant de sa réclamation mais également la réponse de Mme [E] qui indique qu'il s'agit d'une anomalie comptable et que cette rémunération variable lui sera bien versée avec le salaire du mois d'août 2018, le bulletin de salaire correspondant mentionnant effectivement une prime sur objectif de 500 euros.
Le fait n'est pas matériellement établi.
- l'employeur ne lui fournissait plus de travail, malgré sa demande. Elle produit quatre messages échelonnés de novembre 2017 à septembre 2018 :
. un message adressé à Mme [E] du 13 novembre 2017 faisant état de son 'bore out'et indiquant qu'elle ne peut 'accepter de ne rien faire alors que certains sont débordés' (sa pièce n°4),
. un message du 23 mars 2018 également adressé à Mme [E] laquelle s'inquiète de l'absence de la salariée, et d'où il ressort que Mme [B] est en arrêt de travail. Elle expose qu'elle a informé l'employeur depuis octobre/novembre 2017 de son manque d'activité, ce qui lui cause une grande souffrance, que ce dernier lui a proposé de venir en support du service technique pour DSOA, tâches réduites qu'elle juge ne pas être à la hauteur de son poste et de ses compétences et qui ne l'occupent pas à plein temps. Elle se dit en état de 'désespérance' et informe Mme [E] qu'elle prend rendez-vous avec le médecin du travail (sa pièce n°5).
. un message du 2 août 2018 adressé notamment à M. [F] président de la société GPX aux termes duquel Mme [B] indique avoir proposé à l'employeur d'aider le gérant de Caps training 'à remettre ses dossiers papiers et informatique à jour pour redémarrer l'activité. A priori [D] aurait eu un refus de la part de [J] [N] pour que je vienne l'aider. En connaissez-vous les raisons'' (sa pièce n°6).
. un message du 4 septembre 2018 adressé également à M. [F] faisant suite à un entretien 'pour faire le point sur ma situation au travail'. Elle mentionne notamment 'comme je vous l'ai dit je ne peux pas continuer à rester à ne rien faire à mon poste. Cela n'est pas acceptable et nuit à ma santé. Je vous ai dit que je vous laisse encore un mois pour voir si vous trouvez une solution sinon nous devrons nous séparer. Aujourd'hui vous m'annoncez que vous n'avez pas d'autres choix que de me proposer un licenciement économique. A votre demande nous nous revoyons donc ce jeudi pour faire le point sur cette décision et la procédure à suivre' (sa pièce n°7). Ce message précède de peu la convocation en date du 7 septembre 2018 à l'entretien préalable au licenciement pour motif économique.
Le fait est matériellement établi.
- elle fait état également d'un comportement misogyne de la part de M. [N], son supérieur hiérarchique. Mme [L], salariée du cabinet d'expertise comptable, dans son attestation précitée, affirme qu'elle a vu Mme [B] en larmes à plusieurs reprises du fait 'du comportement misogyne' du directeur commercial 'parce qu'il refusait de lui donner du travail'. Elle ajoute qu'il'avait même refusé que Mme [B] aille à un salon alors qu'habituellement elle y était conviée'. Mme [L] n'a pas été témoin des faits qu'elle avance mais répète les propos de Mme [B].
L'allégation est à rapprocher de la lettre du 27 juin 2018 du délégué du défenseur des droits adressée à l'employeur, faisant état que Mme [B] avait alerté la société GPX 'sur sa souffrance au travail qui serait dû [sic] à des faits de harcèlement discriminatoire à caractère sexiste. Elle se retrouverait très régulièrement sans tache [sic] à accomplir dans une situation humiliante et sous l'autorité hiérarchique qui utiliserait l'intimidation' (sa pièce n°10).
L'absence de fourniture de travail est établie par les mails susmentionnés. Mme [B] ne justifie pas avoir signalé à l'employeur un comportement répréhensible de M. [N] à son égard. Cependant, la lettre du délégué du défenseur, proposant une médiation, n'a fait l'objet d'aucune réponse de la part de la société GPX.
Le fait est matériellement établi.
- Mme [B] fait grief également à son supérieur hiérarchique d'avoir imité sa signature sur une lettre adressée à la gendarmerie royale du Maroc à envoyer en télécopie (sa pièce n°19). Outre que cette lettre préparée par Mme [B] se bornait à demander la confirmation d'un rendez-vous avec M. [N], la salariée dès le lendemain de l'envoi s'est plainte auprès de la RH par un message où elle indique que son supérieur a de lui-même reconnu avoir envoyé la lettre et signé à sa place, et suite aux propos de Mme [B] lui disant qu'il n'avait pas le droit de le faire, s'est excusé en disant qu'il n'y avait personne le jour de l'envoi [la salariée s'étant absentée le même jour pour raison personnelle].
Le message adressé à Mme [E] mentionne son absence de confiance en [J] [N], son intention de déposer une main courante 'afin de me protéger en cas d'autres abus en mon nom ou à mon égard'.
Le fait n'est pas constitutif d'un harcèlement mais d'une simple erreur du supérieur hiérarchique, sans conséquence, s'agissant d'une prise de rendez-vous pour lui-même.
- elle produit un certificat de son médecin généraliste du 5 avril 2018 qui indique la suivre 'depuis le mois de mars 2018 pour un état anxiodépressif qu'elle rapporte lié à son travail' (sa pièce n°8), un certificat d'une psychologue clinicienne attestant l'avoir reçue 'dans le cadre d'un suivi psychothérapeutique mis en place du 10 avril 2018 au 4 octobre 2018 pour cause de difficultés et un vécu de souffrance sur son lieu de travail' (sa pièce n°8-1).
Les éléments matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement.
Pour établir que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, l'employeur fournit les explications suivantes :
- rien ne permet d'établir que M. [N] ait sollicité le remboursement de factures illicites ni a fortiori que Mme [B] ait dénoncé ces pratiques.
- rien ne permet non plus d'affirmer que ce n'est pas Mme [B] qui a signé la lettre du 10 janvier 2018 produite in extremis et soustraite frauduleusement des livres de la société, le mail du 11 janvier 2018 tiré d'une chaîne de courriels dont le premier est occulté, ne prouvant quoi que ce soit, ce fait n'ayant pas été évoqué dans les écritures de la première instance.
- il n'est pas contesté que les tâches de Mme [B] se sont réduites jusqu'à contraindre l'employeur à la licencier pour motif économique du fait d'une baisse importante d'activité de GPX tout comme la baisse de l'activité des sociétés DSOA et Caps training dans le domaine de la sécurité (ses pièces n°25, 26, 43 et 46). Les pertes de ces trois sociétés entre 2017 et 2018 sont justifiées par les comptes de résultats, celles de GPX augmentant de plus de 30 000 euros, celles de Caps training étant multipliées par deux comme celles de DSOA (ses pièces n°25, 44 et 46). L'employeur indique que face à ses difficultés économiques, il a toujours confié à la salariée les tâches qu'il pouvait lui donner.
- à chaque fois que Mme [B] s'est plainte de sa situation, l'employeur était à l'écoute, comme en attestent les mails de la salariée laquelle le 15 décembre 2017 (pièce n°28 appelante), suite à un entretien avec Mme [E], RH écrivait : 'je tiens à te dire un grand merci pour ton écoute et ta réactivité par rapport à ma situation au travail', puis le 5 juillet (pièce n°29) suite à un entretien avec le président de la société Visiom, 'je tiens à vous remercier pour cet entretien et pour votre écoute. J'apprécie beaucoup de discuter avec vous'. La salariée n'a jamais prétendu être victime d'un harcèlement discriminatoire à caractère sexiste, le terme étant utilisé pour la première fois par le délégué du défenseur des droits, les messages adressés ci-dessus en décembre 2017 et juillet 2018 démontrant l'absence de toutes pratiques d'intimidation mais étant au contraire la preuve d'une grande écoute.
- Mme [L], salariée de l'expert-comptable Audexium conseils, atteste de faits qu'elle n'a pas elle-même constatés. Il résulte de l'attestation de M. [W] gérant de cette société (sa pièce n°39), que Mme [L] n'a jamais été affectée à la moindre tâche pour GPX, qu'elle ne faisait que passer dans les locaux de cette dernière pour y prendre le courrier du cabinet d'expertise-comptable qui arrivait dans la boîte postale de GPX, qu'elle se contente de répéter ce que Mme [B] lui a demandé de raconter. Ainsi, contrairement à ce qu'affirme Mme [L], Mme [B] n'a jamais été remplacée à son poste comme le démontre le livre d'entrées et de sorties du personnel (sa pièce n°1), et l'absence de paiement de la prime trimestrielle en juin 2018 résulte d'une erreur comptable qui a été régularisée.
- s'agissant des certificats médicaux produits par l'intimée, le fait que Mme [B] ait été affectée par sa situation professionnelle ne signifie pas que celle-ci ait été la conséquence d'un harcèlement. En effet, Mme [B] a été en arrêt de travail du 22 mars au 21 mai 2018. A sa demande, elle a été reçue par le médecin du travail le 10 avril 2018 (pièce n°15 appelante) qui ne signale pas de difficultés particulières, puis à nouveau le 3 juillet 2018 avec l'indication 'peut travailler sur son poste' (pièce n°14 appelante), ce qui aurait été impossible en cas de suspicion de harcèlement.
L'employeur justifie ainsi de faits objectifs sans lien avec un quelconque harcèlement, l'absence de fourniture de travail, qu'il reconnait, résultant de la situation économique de la société GPX comme celles des sociétés DSOA et de Caps training dans le même secteur d'activité de la sécurité. Les lettres adressées aux autres sociétés du groupe Visiom à compter du 2 juillet 2018 avant tout licenciement et les réponses négatives de celles-ci établissent que l'employeur a tenté de remédier à la situation de Mme [B], sans qu'il puisse en être déduit l'existence d'un harcèlement. De même, l'absence de tout harcèlement est confirmée par celle de tout signalement par le médecin du travail en avril puis en juillet 2018, ainsi que sa décision de déclarer apte la salariée à reprendre son poste.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré l'absence de harcèlement moral et a débouté Mme [B] de ses demandes à titre de dommages-intérêts pour le préjudice subi du fait d'un harcèlement moral et à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul.
2- sur le licenciement économique
L'appelante soutient que l'existence de difficultés économiques frappant le secteur de la sécurité du groupe Visiom est acquise au regard des pertes respectives des sociétés GPX, DSOA et Caps straining ; que le poste de Mme [B] a bien été supprimé lors du départ de celle-ci ; qu'elle n'a pas été remplacée à ce poste, les deux embauches signalées correspondant à des postes de technicien de maintenance sans rapport avec le poste commercial de la salariée et ses compétences. Elle expose également avoir dès le 2 juillet 2018 avant le licenciement entrepris des recherches de reclassement qui n'ont pas abouti ; qu'elle a proposé cependant un poste de responsable gestion des pièces détachées que la salariée a refusé.
L'intimée fait valoir que la lettre de licenciement précise que le groupe Visiom était en parfaite santé, puisque son salaire a été maintenu grâce au financement du groupe ; que le chiffre d'affaires de la société GPX a doublé entre 2017 et 2018 ; que s'agissant de l'obligation de reclassement, elle indique qu'elle n'a reçu aucune proposition de reclassement avant la notification de son licenciement contrairement à ce qu'indique la lettre de licenciement.
Aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail 'constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l'année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d'au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4° A la cessation d'activité de l'entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.
Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.
Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées au présent article, à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants et de la rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 et suivants.'
En l'espèce, il est établi que la société GPX appartient au groupe Visiom, au même titre que les sociétés Visiom développement, Vimage, DSOA, Caps training et Adecom, toutes établies sur le territoire national (pièces n°40 à 45 appelante).
Le motif économique doit donc s'apprécier au niveau du groupe Visiom.
S'agissant du secteur d'activité, selon les pièces produites, la société Visiom développement est une holding dont l'activité est 'la prise d'intérêt et participations dans toutes entreprises, GIE ou sociétés françaises ou étrangères' (pièce n°47 appelante) ; l'activité de la société Vimage est 'la création et la gestion d'un atelier de décoration et de dessin' (pièce n°41 appelante) ; la société Adecom a pour activité 'la création de projets de communication, conseils opérations de formation' (pièce n°42).
Au regard du secteur d'activité de l'employeur tel que rappelé supra, seules les sociétés DSOA (pièce n°45 appelante) et Caps training (pièce n°43 appelante) appartiennent au même secteur d'activité, celle de la sécurité.
Le motif économique invoqué doit donc s'apprécier au niveau de ce secteur.
La lettre de licenciement fait état de difficultés rencontrées par l'entreprise depuis trois ans avec une baisse croissante de ses résultats qui l'obligent à supprimer le poste de responsable administration des ventes de Mme [B].
Elle produit les liasses fiscales 2017 et 2018 de la société mentionnant entre 2016 et 2017, une perte de chiffre d'affaires de près de 270 000 euros et un résultat négatif en nette augmentation de près de 90 000 euros (sa pièce n°26), et entre 2017 et 2018, une perte de chiffre d'affaires de 150 000 euros et un résultat négatif en augmentation de plus de 30 000 euros (sa pièce n°25).
Au regard de l'effectif de l'entreprise, soit moins de 11 salariés (pièces n°1 et n°25 appelante), les difficultés économiques de la société GPX sont établies, le fait que la société Visiom développement ait dû prendre en charge les salaires de Mme [B] confirme cette situation et ne constitue pas la reconnaissance d'une situation florissante comme l'allègue l'intimée.
Les comptes de la société DSOA pour les années 2017/2018 établissent également une perte du chiffre d'affaires de près de 25 000 euros et un résultat négatif sur les deux années en augmentation de plus de 64 000 euros (sa pièce n°46).
Les comptes de la société Caps training, qui ne compte qu'un salarié, avec un chiffre d'affaires très bas (50 485 euros en 2017, 36 432 euros en 2018) présente également une perte de résultat en 2018 de moins 19 090 euros contre moins 9 889 euros en 2017.
Au regard de ces éléments les difficultés économiques de la société GPX sont établies, comme celles des deux sociétés du groupe évoluant dans le même secteur d'activité.
En outre, le poste de Mme [K] a bien été supprimé comme en atteste le livre d'entrées et de sorties du personnel (pièce n°1 appelante).
S'agissant de l'obligation de reclassement, l'article L. 1233-4 du code du travail dispose que 'le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.
Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure.
L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.'
En l'espèce, l'employeur, produit des demandes faites aux entreprises du groupe à compter du 2 juillet 2018 et les réponses négatives de celles-ci, soit antérieurement à l'engagement de la procédure de licenciement (pièces n°10 à 13 ; 30 et 32 appelante).
La lettre de licenciement fait mention d'un poste de 'responsable gestion des pièces détachées de Visiom' que la salariée aurait refusé.
L'employeur allègue que celle-ci a reconnu avoir refusé le poste lors de l'entretien préalable et a même effectué un essai de quelques jours auquel elle n'a pas donné suite. Il affirme que le poste a été affiché dans les locaux de la société.
Or, il ne produit aucune lettre adressée à la salariée lui proposant un tel poste, comme l'exige l'article L. 1233-4 in fine.
L'obligation de reclassement de l'employeur n'ayant pas été respectée, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.
En conséquence, le jugement sera confirmé par substitution de motifs.
S'agissant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'appelante fait valoir à titre subsidiaire que la salariée a bénéficié d'un contrat de sécurisation professionnelle lui assurant 75% de son salaire du 6 octobre 2018 au 2 septembre 2019 ; qu'elle a été embauchée à compter du 2 septembre 2019 pour un salaire annuel de 40 000 euros ; que l'indemnité doit être limitée à 1,5 mois de salaire conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail applicable aux entreprises de moins de 11 salariés ; que la moyenne des douze derniers mois de rémunération est de 3 402,04 euros.
L'intimée soutient que sa rémunération brute moyenne mensuelle est de 4 827,97 euros ; qu'elle n'a pas retrouvé d'emploi équivalent ; qu'elle a subi un important préjudice moral, financier et professionnel.
Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail 'si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau ci-dessous.
[...]
En cas de licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les montants minimaux fixés ci-dessous sont applicables, par dérogation à ceux fixés à l'alinéa précédent [...]'
Pour une ancienneté de six ans, dans une entreprise de moins de 11 salariés, l'indemnité maximale due au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse est de 1,5 mois.
Mme [B], après avoir perçu 75% de son salaire pendant un an, a retrouvé à l'expiration de cette période un emploi en tant qu'assistante commerciale ADV bilingue pour un salaire fixe annuel brut de 40 000 euros (sa pièce n°18).
Selon l'attestation Pôle emploi et les bulletins de salaire produits (pièces n°5 et 24 appelante), le salaire mensuel moyen brut est 3 872,57 euros.
L'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sera fixée à la somme de 5 808,85 euros conformément au barème ci-dessus et à l'ancienneté de Mme [B].
La société GPX sera condamnée à payer ladite somme avec intérêts au taux légal à compter du jugement.
Le jugement sera infirmé de ce chef.
Mme [B] sera déboutée du surplus de sa demande à ce titre.
3- sur les autres demandes
- dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité
L'intimée, appelante incidente, soutient qu'elle a été confrontée à des faits de harcèlement moral ce qui a eu pour conséquence une dégradation de son état de santé ; qu'il appartenait a minima à l'employeur de faire diligenter une enquête interne ; que ce dernier a manqué à son obligation de sécurité de résultat [sic].
L'appelante fait valoir que le grief de harcèlement moral n'est pas établi.
En l'espèce, il n'a été retenu à l'encontre de l'employeur aucun fait de harcèlement moral qui aurait justifié une enquête, l'insuffisance des tâches confiées résultant de difficultés économiques de l'employeur.
L'employeur justifie que la salariée a été reçue par la direction à chaque demande de sa part, qu'elle a bénéficié de deux rendez-vous avec le médecin du travail, et notamment en juillet 2018, où ce dernier a considéré qu'elle était apte à reprendre son poste.
Conformément à l'article L. 4121-1 du code du travail, en l'absence de faits de harcèlement moral, l'employeur a pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de Mme [B].
Le jugement sera confirmé de ce chef.
- dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
L'intimée, appelante incidente, soutient que l'employeur a fait montre de la plus grande déloyauté dans l'exécution du contrat de travail, qu'il a imité sa signature. Elle lui reproche également de l'avoir obligée à récupérer ses effets personnels dans des conditions particulières dès lors que sa remplaçante occupait son bureau.
L'appelant se borne à demander le débouté de la demande de la salariée, en l'absence de harcèlement moral.
Il résulte de ce qui précède que le reproche résultant de l'imitation de la signature de la salariée n'a pas été retenu comme un fait de harcèlement moral mais comme une simple erreur du directeur commercial dont ce dernier s'est excusé selon les dires de Mme [B], la lettre signée étant en outre une simple demande de rendez-vous du supérieur hiérarchique de la salariée auprès d'un client, et ce en l'absence de celle-ci.
Ce fait, à le supposer établi puisqu'il ne repose que sur les dires de la salariée, ne peut être considéré comme la preuve d'une exécution déloyale du contrat de travail.
S'agissant des effets personnels, l'attestation de Mme [L] qui indique que 'la direction s'est permise de réunir les effets personnels de Mme [B] en fouillant dans son bureau et l'avait déjà remplacée par une autre personne', n'a aucune force probante comme rappelé supra.
Outre que les propos divergent de ceux relatés dans les écritures de l'intimée, Mme [L] n'a pu être témoin de tels faits alors qu'elle ne travaillait pas au sein de la société GPX.
De même, Mme [B] n'a pas été remplacée à son poste, la circonstance qu'une personne occupe un bureau désormais vide en raison du départ de la salariée, ne pouvant être considérée comme un acte déloyal.
Le jugement sera confirmé de ce chef en ce que le conseil de prud'hommes a débouté Mme [B] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.
- dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation
L'intimée, appelante incidente, soutient au visa de l'article L. 6321-1 du code du travail, qu'elle n'a bénéficié d'aucune action de formation depuis son embauche ; que malgré sa demande, la formation réclamée ne lui a pas été accordée.
L'appelante fait valoir qu'elle a encouragé la salariée à rechercher une formation managériale dans le domaine gestion/administration, n'ayant pu agréer le programme sur une année demandé par Mme [B] qui s'adressait à des personnes envisageant de créer une entreprise sans aucun rapport avec le poste de la salariée. Il ajoute que sur la demande de formation à effet au 1er juillet ou 1er octobre 2016, les conséquences du refus sont prescrites au visa de l'article L. 1471 du code civil [sic].
Aux termes de l'article L. 6321-1 du code du travail, 'l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, y compris numériques, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme, notamment des actions d'évaluation et de formation permettant l'accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret. Il peut également proposer aux salariés allophones des formations visant à atteindre une connaissance de la langue française au moins égale à un niveau déterminé par décret [...]'
Contrairement à ce qu'affirme l'employeur, la demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation n'est pas prescrite, s'agissant d'un manquement allégué se poursuivant jusqu'à la date de la rupture du contrat de travail.
En l'espèce, sans qu'il soit nécessaire d'entrer dans les détails de l'argumentation des parties sur la demande de Mme [B] relative à la formation d'une année intitulée 'école des managers-chef d'entreprise développeur de PME', apparaissant effectivement inadéquate au regard du poste commercial occupé (pièces n°35 et 36 appelante), il appartient à l'employeur de démontrer qu'il a proposé à la salariée des formations tout au long de l'exécution du contrat de travail.
Or, la lettre de l'employeur adressée à la salariée le 17 août 2016 refusant le programme de l'école des managers au motif de son inadéquation mais indiquant 'nous vous encourageons à rechercher une formation managériale dans le domaine gestion/administration qui nous semble plus adaptée à votre profil et à notre organisation', à laquelle Mme [B] n'aurait donné aucune suite, est insuffisante pour justifier de l'obligation d'adaptation au poste de travail par la formation à la charge de l'employeur (pièce n°37 appelante).
Il en est de même de l'envoi par les ressources humaines à la salariée du relevé des droits acquis au titre du DIF [droit individuel à la formation] remplacé par le compte personnel de formation en janvier 2015, soit plus de trois ans avant la rupture du contrat de travail (pièce n°38 appelante).
Il résulte de l'entretien annuel d'évaluation de 2015 que Mme [B] souhaitait 'avoir une meilleure maîtrise de la gestion d'entreprise, d'avoir des compétences plus larges, monter en compétence et de valider des acquis et expériences par un diplôme' (pièce n°15 intimée). Elle affirme sans être utilement contestée qu'elle n'a pas eu d'autres entretiens annuels d'évaluation pendant toute la durée de l'exécution du contrat de travail.
En effet, l'employeur ne produit pas de compte-rendu d'entretien et ne justifie pas avoir proposé à la salariée de suivre une formation.
La société GPX a donc manqué à son obligation d'adaptation et de formation à l'égard de Mme [B].
Par infirmation du jugement, l'employeur sera condamné à payer à Mme [B] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation, et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
4- sur le remboursement des indemnités chômage aux organismes concernés
L'article L. 1235-5 du code du travail dispose que 'ne sont pas applicables au licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise et au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés, les dispositions relatives au remboursement des indemnités de chômage, prévues à l'article L. 1235-4, en cas de méconnaissance des articles L. 1235-3 et L. 1235-11.'
La société GPX ayant moins de onze salariés, le jugement sera infirmé en ce que le conseil de prud'hommes l'a condamnée au remboursement des indemnités de chômage dans la limite de six mois d'indemnités.
5- sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera confirmé de ces chefs.
La société GPX sera condamnée à payer à Mme [B] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.
Elle sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux dépens d'appel, lesquels sont ceux visés à l'article 695 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement rendu le 21 octobre 2021 par le conseil de prud'hommes de Boulogne- Billancourt sauf en ce qu'il a :
- condamné la société GPX à payer à Mme [I] [B] la somme de 24 288 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société GPX à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à Mme [I] [B] dans la limite de six mois d'indemnité,
- débouté Mme [I] [B] de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'adaptation,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne la société GPX à payer à Mme [I] [B] la somme de 5 808,85 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ce avec intérêts au taux légal à compter du jugement,
Condamne la société GPX à payer à Mme [I] [B] la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation d'adaptation, et ce avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
Déboute Mme [I] [B] du surplus de ses demandes à ces titres,
Condamne la société GPX à payer à Mme [I] [B] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel,
Déboute la société GPX de sa demande à ce titre,
Condamne la société GPX aux dépens d'appel, lesquels sont ceux visés à l'article 695 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,