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25/03/2024 | FRANCE | N°21/02910

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-3, 25 mars 2024, 21/02910


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-3



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 MARS 2024



N° RG 21/02910 -

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYOQ



AFFAIRE :



S.A.S. ACTION FRANCE



C/



[Z] [C]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : C

N° RG : 20/00229
>

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Alexandra LORBER LANCE de la SELARL CAPSTAN LMS



Me Salif DADI





le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-3

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 MARS 2024

N° RG 21/02910 -

N° Portalis DBV3-V-B7F-UYOQ

AFFAIRE :

S.A.S. ACTION FRANCE

C/

[Z] [C]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 09 Septembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : C

N° RG : 20/00229

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Alexandra LORBER LANCE de la SELARL CAPSTAN LMS

Me Salif DADI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, initialement fixé au 21 mars 2024 puis prorogé au 25 mars 2024, les parties ayant été avisées dans l'affaire entre :

S.A.S. ACTION FRANCE

N° SIRET : 753 308 238

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représentant : Me Alexandra LORBER LANCE de la SELARL CAPSTAN LMS, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0020

Représentant : Me Mourad BOURAHLI de la SELARL CAPSTAN NORD EUROPE, Plaidant, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0053

APPELANTE

****************

Madame [Z] [C]

née le 31 Octobre 1994 à [Localité 2] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me Salif DADI, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0912

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Janvier 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseiller chargé du rapport en présence de Monsieur [G], élève avocat.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence SINQUIN, Président,

Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseiller,

Madame Michèle LAURET, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI,

FAITS ET PROCÉDURE

La société par actions simplifiées Action France a été immatriculée au RCS de Paris sous le n°753 308 238. Elle exerce une activité d'opérations relatives à la vente au détail de produits de supermarché.

Mme [C] a été embauchée en qualité d'employée de magasin par contrat à durée indéterminée à temps partiel en date du 4 novembre 2019.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale de commerce en détail non alimentaire.

Par LRAR du 2 juillet 2020, la société Action France a convoqué Mme [C] à un entretien préalable avec mise à pied conservatoire. L'entretien s'est tenu le 10 juillet 2020.

Par LRAR du 30 juillet 2020, la société Action France a notifié à Mme [C] son licenciement pour faute grave en ces termes':

«' Entre le 28 mai 2020 et le 24 juin 2020, vous avez quitté le magasin avec des articles non payés ou avez permis à vos collègues de quitter le magasin avec des articles non payés principalement lors des achats du personnel le soir et occasionnellement en pleine journée.

En effet, nous constatons que vous avez quitté le magasin avec des articles non payés.

A titre d'exemples non exhaustifs :

- Le 28 mai 2020 vous vous présentez en caisse. Madame [M] [K]. employée de magasin enregistrée sous le nom de Monsieur [S] [F], Adjoint Responsable de Magasin, omet de scanner un article d'un montant de 14,97 euros. Vous partez pourtant avec cet article.

- Cette opération se renouvelle lors des transactions :

o du 13 juin 2020 : Vous vous présentez à la caisse de Madame [H] [I], employée de magasin,

enregistrée sous le nom de Madame [A] [J], Adjoint Responsable de Magasin. Elle procède au remboursement injustifié d'un montant de 9,95 euros et omet de scanner lors d'une deuxième transaction des articles cl'un montant de 3,68 euros.

o Le 24 juin 2020 : vous vous présentez à la caisse de Madame [M] [K], employée de magasin, en enregistrée sous le nom de Monsieur [S] [F] . Elle omet de scanner des articles d'un montant de 10,47 euros.

De plus, nous relevons des anomalies dans votre activité caisse.

A titre d'exemples non exhaustifs :

- Le 13 juin 2020 Madame [P] [I], employée de magasin se présente à votre caisse. Vous êtes enregistrée en caisse sous le nom de Madame [A] [J], Adjoint Responsable de Magasin. Vous omettez de scanner des articles en faveur de Madame [P] [I]. La valeur des articles non scannés est de 3,68 euros.

- Vous renouvelez l'opération le 20 juin 2020 à trois reprises en faveur de deux de vos collègues Madame [X] [W] et Madame [M] [K]. La valeur des articles non scannés est de 2,26 euros (1ère transaction), 7,79 euros (2ème transaction) et 27 euros (3ème transaction).

Le 13 juin 2020, Madame [A] [J], Adjoint Responsable de Magasin se présente à votre caisse. Vous êtes enregistrée en caisse sous son nom. Vous enregistrez des remboursements injustifiés à hauteur de 34,45 euros. Vous renouvelez cette opération le même jour avec une de vos collègues Madame [U] [R], employée de magasin. Le montant des remboursements injustifiés s'élève à 5,99 euros.

Par ailleurs, le 23 juin 2020 vous avez dissimulé des articles dans une valise et les avez mis dans le bureau.

Au total :

- Vous avez bénéficié de la complaisance de vos collègues à hauteur de 37,65euros auxquels s'ajoute la valeur de 8 articles non identifiés.

- Vous avez fait bénéficier de votre complaisance à hauteur de 78,91euros auxquels s'ajoute la valeur de 2 articles non identifiés.

- Vous avez détourné de la marchandise à hauteur de 34,93euros auxquels s'ajoute la valeur de nombreux articles non identifiés.

Outre ses manquements nous constatons que les règles en matière d'utilisation des caisses ne sont pas respectées puisque vous utilisez le compte de vos collègues pour votre propre activité caisse.

Or, conformément aux règles internes en matière de codes de connexion qui vous ont été communiquées notamment lors de votre prise de poste, « avant de commencer à travailler chaque employé doit se connecter avec son code personnel ''.

Force est de constater que vos actes constituent des actes volontaires et frauduleux.

En agissant ainsi vous vous êtes placée en infractions graves aux dispositions réglementaires et à vos obligations contractuelles.

Au-delà du préjudice financier, de tels faits démontrent un manque incontestable de loyauté et d'honnêteté incompatibles avec la poursuite de nos relations contractuelles.'»

Par requête introductive en date du 22 septembre 2020, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy.

Par jugement du 9 septembre 2021, auquel renvoie la cour pour l'exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Poissy a':

- dit et jugé que le licenciement de Madame [Z] [C] est un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la S.A. ACTION FRANCE à verser à Madame [Z] [C] avec intérêts

légaux à compter du 25 Septembre 2020, date de réception de la convocation pour le Bureau de

Conciliation et d'orientation par la partie défenderesse, les sommes suivantes :

° Mille quatre cent trente-huit euros et quarante-quatre centimes (1 438,44 euros) au titre d'indemnité compensatrice de préavis,

° Cent quarante-trois euros et quatre-vingt quatre centimes (143,84 euros) au titre des congés payés afférents,

° Trois cent cinquante-neuf euros et soixante et un centimes (359,61 euros) au titre de l'indemnité légale de licenciement,

° Mille quatre cent trente-huit euros et quarante-quatre centimes (1 438,44 euros) au titre de rappel de salaire de la mise à pied conservatoire,

° Cent quarante-trois euros et quatre-vingt quatre centimes (143,84 euros) au titre des congés payés afférents,

- rappelé que l'exécution est de droit à titre provisoire sur les créances visées à l'article R.1454-14 alinéa 2 du code du travail.

- fixé la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l'article R. 1454-28 du Code du travail à la somme de 1438,44 euros (mille quatre cent trente huit euros et quarante quatre centimes) bruts ;

- condamné la S.A. ACTION FRANCE à verser à Madame [Z] [C] avec intérêts légaux à compter du prononcé du présent jugement la somme de :

° Mille quatre cent trente-huit euros et quarante-quatre centimes (1 438,44 euros) au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la S.A. ACTION FRANCE à verser à Madame [Z] [C], la somme de :

° Mille euros (1 000,00euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouté Madame [Z] [C] du surplus de ses demandes.

- débouté la S.A. ACTION FRANCE de sa demande reconventionnelle.

- ordonné à la S.A. ACTION FRANCE de remettre à Madame [Z] [C] l'attestation pôle emploi rectifiée prenant en compte les éléments du présent jugement, sous astreinte de cinquante euros (50 euros) par jour de retard à compter du quinzième jours suivant la notification du jugement.

- dit que le Conseil de prud'hommes se réserve le droit de liquider l'astreinte.

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision en application de l'article 515 du Code de procédure civile.

- condamné la S.A. ACTION FRANCE aux dépens y compris ceux afférents aux actes et procédure d'exécution éventuels.

La société Action France a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe du 4 octobre 2021.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 20 décembre 2023.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 15 novembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la société Action France demande à la cour de':

- Réformer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement de Madame [Z] [C] sans cause réelle et sérieuse et a fait droit aux demandes indemnitaires formulées par Madame [C] au titre de la rupture de son contrat de travail ;

- Juger que le licenciement pour faute grave de Madame [Z] [C] est valablement fondé en droit et en fait ;

- Débouter Madame [Z] [C] des réclamations financières qu'elle formule au titre de la rupture de son contrat de travail ;

- Condamner Madame [Z] [C] à lui verser une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 7 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [C] demande à la cour de':

- Recevoir Madame [C] en ses demandes et l'y déclaré bien fondée ;

Et y faisant droit, il est demandé à la Cour de :

- Confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions

- Y ajoutant, condamner la société ACTION à verser à Madame [C] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la faute grave

L'employeur fait valoir que les griefs invoqués dans la lettre de licenciement sont réels et sérieux et présentent une gravité telle qu'ils justifiaient le licenciement pour faute grave. Il précise qu'ils sont parfaitement établis par le rapport photographique produit aux débats et le renvoi de la salariée devant le tribunal correctionnel de Nanterre par le parquet des chefs de l'infraction de vol.

La société, se fondant sur plusieurs arrêts de la cour de cassation, souligne que les images issues de la vidéo ne sont pas illicites car l'information du CSE n'était pas requise, puisque le système de vidéo-protection a été mis en place non pas pour contrôler l'exécution par les salariés de leurs prestations de travail, mais pour prévenir et lutter contre les atteintes aux personnes et aux biens.

L'employeur ajoute que le moyen de preuve des fraudes issu des extraits de la vidéo-protection ne pouvait être déclaré illicite par les premiers juges sur le fondement de la seule absence de consultation du CSE, mais devait être soumise au contrôle de proportionnalité entre le droit de la preuve et la protection de la vie privée des salariés. Il précise qu'en l'espèce les salariés ne sont pas sous surveillance puisque les caméras se trouvent dans un lieu accessible au public, qu'elles ont pour objet de prévenir les agressions, que les salariés sont informés de ce système et que celui-ci a été autorisé par la préfecture.

La salariée réplique que les premiers juges ont considéré que les images issues de la vidéo-surveillance constituaient un mode de preuve irrecevable en l'absence de consultation du CSE, en rappelant que l'employeur ne pouvait pas utiliser la vidéo-protection pour constater des faits de vol en détournant l'usage qui a été déclaré, et ainsi surveiller les faits et gestes des salariés. Elle souligne que l'employeur ne peut utilement invoquer la jurisprudence de la cour européenne des droits de l'homme, qui a retenu que l'employeur pouvait installer un système de vidéo-surveillance sans en informer préalablement les salariés en cas de soupçons de vol, puisque tel n'était pas le cas en l'espèce, la surveillance ayant été installée en 2017, soit avant les allégations de vols faites en 2020, de sorte qu'elle est attentatoire aux libertés individuelles des salariés.

Mme [C] ajoute à titre subsidiaire que les griefs invoqués par l'employeur ne sont pas établis par les pièces produites aux débats puisque les photographies ne démontrent pas les vols allégués, seuls les commentaires figurant sous les photos permettant de les établir.

****

Il résulte de l'article L.1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Le motif inhérent à la personne du salarié doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.

L'article L.1235-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Enfin, la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et qui justifie la rupture immédiate de son contrat de travail, sans préavis ; la charge de la preuve pèse sur l'employeur.

Au cas présent, l'employeur reproche à la salariée dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, des vols de marchandises. Il se fonde pour ce faire sur un rapport photographique tiré du système de vidéo-protection installé dans le magasin (pièce 8) et sur un listing d'opérations frauduleuses sur lequel la société a ajouté le nom des salariés liés aux transactions au moyen de la vidéo-protection (pièces 7.1 à 7.71), dont la salariée soulève l'illicéité.

Il convient en premier lieu d'examiner le moyen tiré de l'illicéité des moyens de preuve issus d'un système vidéo, qui sont produits devant la cour.

Selon l'article L. 1222-4 du code du travail ': « Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance ».

En vertu de l'article L. 2312-37 du code du travail, «'Outre les thèmes prévus à l'article L 2312-8, le comité social et économique (CSE) est consulté dans les conditions définies à la présente section dans les cas suivants':

1° Mise en 'uvre des moyens de contrôle de l'activité des salariés (...)'».

Et selon l'article L. 2312-38 de ce code, «'le CSE est informé, préalablement à leur introduction dans l'entreprise, sur les traitements automatisés de gestion du personnel et sur toute modification de ceux-ci.

Le comité est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en 'uvre dans l'entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés'».

Il résulte de ces textes que la surveillance opérée par l'employeur des activités des salariés doit faire l'objet d'une information individuelle des salariés, qu'elle doit être complétée par une information et consultation du comité social et économique. Enfin, la mise en place d'un procédé de vidéosurveillance dans des lieux ouverts au public n'est permise que pour certaines finalités et nécessite une autorisation du préfet du département (L. no 95-73 du 21 janv. 1995, art. 10).

En l'espèce, les pièces produites aux débats établissent que le système de vidéo-protection utilisé dans l'ensemble du magasin Action de [Localité 3] a été autorisé par le préfet du département en février 2017, a fait l'objet d'une information individuelle de la salariée aux termes de l'article 15 du contrat de travail, et que des panneaux d'affichage situés dans l'enceinte du magasin informaient les salariés comme la clientèle que le dispositif de surveillance du magasin donnait lieu à la collecte de données personnelles en application du règlement général de la protection des données. En revanche, il n'est pas contesté par l'employeur que le système de vidéo-protection n'a pas été soumis à l'information et à la consultation du comité social et économique.

La société Action soutient que cette information n'était pas requise s'agissant d'un moyen de vidéo-protection destiné à la surveillance de la sécurité et des personnes au sein du magasin, accessible au public et non d'un système dédié à la surveillance des salariés.

Il ressort des pièces produites aux débats que le système de vidéo-protection a été installé dans le magasin Action de [Localité 3] pour assurer la sécurité du magasin et de la clientèle. En effet, les caméras étaient installées dans la surface accessible au public, c'est-à-dire dans les allées du magasin, à la sortie de celui-ci et au niveau des caisses, de manière à observer les allers et venues et les achats des clients, et non pour surveiller les activités des salariés sur un poste de travail déterminé, les photographies des enregistrements produites aux débats démontrant que les caméras n'étaient pas positionnées derrière les caisses afin de contrôler les manipulations effectuées par les salariés, mais devant les caisses afin d'identifier les auteurs d'éventuelles infractions. Dès lors, ce système ne constituant pas un dispositif de surveillance des salariés, la société Action n'était pas tenue d'informer et de consulter le comité social et économique sur l'utilisation de ce dispositif.

Il en résulte que le système de vidéo-protection n'ayant pas été utilisé par la société Action France pour contrôler Mme [C] dans l'exercice de ses fonctions, mais afin de préserver la sécurité du magasin, le moyen de preuve est donc licite.

Les pièces produites aux débats par l'employeur, tenant au mail adressé le 30 juin 2020 par Mme [L], responsable de la sécurité de la société Action France, complété par le dépôt de plainte de cette dernière pour des faits de vols effectué le 20 juillet 2020 devant les services de police, à la suite duquel Mme [C] a été convoquée devant le tribunal judiciaire de Versailles le 4 avril 2024, ainsi que le rapport détaillé figurant les listes de transactions frauduleuses corroborées par les images issues de la vidéo-protection, établissent la matérialité des grief allégués dans le cadre de la lettre de licenciement. Il en résulte en particulier qu'en juin 2020 Mme [C], salariée de la société Action France a, à plusieurs reprises, détourné des articles à son profit sans passer en caisse, ou malgré le fait que ces achats aient été annulés. Ces faits constituent une faute grave rendant impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise pendant le préavis, de sorte que le licenciement prononcé est bien fondé.

Ainsi, par voie d'infirmation du jugement entrepris, il convient de dire que le licenciement de la salariée est fondé sur une faute grave. En conséquence, la salariée sera déboutée de l'intégralité de ses demandes formulées au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement et de rappel de salaire sur la mise à pied du 2 au 30 juillet 2020 et les congés payés afférents, et la remise de l'attestation pôle emploi conforme, par voie d'infirmation de la décision entreprise.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il convient d'infirmer les dispositions du conseil des prud'hommes au titre des dépens et des frais irrépétibles, de condamner Mme [C] aux dépens de première instance et d'appel, et de débouter les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, l'équité ne justifiant pas d'en faire application.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement du conseil des prud'hommes de Poissy du 9 septembre 2021,

Statuant à nouveau,

Y ajoutant,

Dit que le licenciement de Mme [C] repose sur une faute grave,

Déboute Mme [C] de l'intégralité de ses demandes,

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne Mme [C] aux dépens de première instance et d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Laurence SINQUIN, Président et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-3
Numéro d'arrêt : 21/02910
Date de la décision : 25/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-25;21.02910 ?
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