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21/03/2024 | FRANCE | N°22/02359

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 21 mars 2024, 22/02359


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 MARS 2024



N° RG 22/02359

N° Portalis DBV3-V-B7G-VKY4



AFFAIRE :



[S] [D] [Z]





C/

S.A.R.L. AGENCE DE LA GARE











Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de BOULOGNE- BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : F20/00062



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Ivan [H]



Me Nadia BOUZIDI-FABRE







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'app...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 MARS 2024

N° RG 22/02359

N° Portalis DBV3-V-B7G-VKY4

AFFAIRE :

[S] [D] [Z]

C/

S.A.R.L. AGENCE DE LA GARE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire de BOULOGNE- BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : F20/00062

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Ivan [H]

Me Nadia BOUZIDI-FABRE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [S] [D] [Z]

née le 23 Septembre 1985 à [Localité 5] (99)

de nationalité Mauricienne

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentant : Me Ivan HECHT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0369

APPELANTE

****************

S.A.R.L. AGENCE DE LA GARE

N° SIRET : B40 179 593 5

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentant : Me Nadia BOUZIDI-FABRE, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0515 - Substitué par Me Virginie PAQUET, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Février 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE.

Mme [S] [D] [Z] a été engagée par la société agence de la gare suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 18 juillet 2018 en qualité d'assistante commerciale, niveau E3, avec le statut d'employé.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale de l'immobilier.

La salariée a fait l'objet d'arrêts de travail pour maladie à compter du 20 février 2019.

Lors de la visite de reprise le 9 mai 2019, Mme [Z] a fait l'objet d'un avis d'inaptitude à son poste par le médecin du travail avec mention que 'l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise'.

Par lettre du 20 mai 2019, Mme [Z] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 1er juin 2019.

Par lettre du 7 juin 2019, l'employeur a licencié la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par lettre du 13 juin 2019, la salariée a envoyé à son employeur un certificat d'état de grossesse.

Par lettre du 27 juin 2019, l'employeur a informé la salariée qu'il avait pris connaissance de son état de grossesse et qu'il annulait la procédure de licenciement, l'invitant à réintégrer son poste.

Par lettre du 30 juillet 2019, Mme [Z] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 9 août 2019.

Par lettre du 16 août 2019, l'employeur a licencié la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

La société employait moins de onze salariés à la date de la rupture.

Contestant son licenciement, le 19 décembre 2019 Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin de d'obtenir la condamnation de la société Agence de la gare à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse et diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Le 30 septembre 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne a refusé la prise en charge de la maladie au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par requête du 1er avril 2021, Mme [Z] a contesté devant le tribunal judiciaire d'Evry la décision de rejet de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Essonne du 11 février 2021 confirmant la décision de refus de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Par jugement du 1er juin 2021, le tribunal judiciaire d'Evry a sursis à statuer dans l'attente de l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Bourgogne Franche Comté.

Par jugement en date du 23 juin 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :

- dit que les faits de harcèlement ne sont pas probants,

- constaté que Mme [Z] n'a pas fait l'objet de harcèlement moral, que la SARL Agence de la gare n'a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat et que l'inaptitude de Mme [Z] n'est pas liée à ses conditions de travail,

- dit que le préjudice subi pour absence de visite médicale d'information et de prévention et pour absence de document unique d'évaluation des risques n'est pas démontré tant au niveau du principe que du quantum,

- dit que le contrat a été exécuté loyalement,

- confirmé la décision de rejet prise par le bureau de conciliation et d'orientation du 11 mars 2021,

- dit que la présente procédure n'est pas abusive,

- débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la SARL agence de la gare de ses demandes reconventionnelles,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Le 22 juillet 2022, Mme [Z] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 9 novembre 2023, Mme [Z] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit que les faits de harcèlement ne sont pas probants,

- constaté qu'elle n'a pas fait l'objet de harcèlement moral, que la société Agence de la gare n'a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat et que son inaptitude n'est pas liée à ses conditions de travail,

- dit que le préjudice subi pour absence de visite médicale d'information et de prévention et pour absence de document unique d'évaluation des risques n'est pas démontré tant au niveau du principe que du quantum,

- dit que le contrat a été exécuté loyalement,

- confirmé la décision de rejet prise par le bureau de conciliation et d'orientation du 11 mars 2021,

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Agence de la gare de ses demandes reconventionnelles à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, fins et prétentions,

- et statuant à nouveau :

- dire et juger que son licenciement est nul,

- en conséquence, condamner la société Agence de la gare à lui payer les sommes suivantes :

* 24 000 euros (12 mois) à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 6 000 euros bruts (6 mois) à titre d'indemnité compensatrice de préavis, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 600 euros bruts au titre des congés payés afférents, le tout assorti des intérêts au taux légal,

*1 329,46 euros à titre d'indemnité spéciale de licenciement, le tout assorti des intérêts au taux légal,

- à titre subsidiaire, dire et juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en application des articles L.1226-10 et L.1226-15 du code du travail,

- en conséquence, condamner la société Agence de la gare à lui payer les sommes suivantes :

* 24 000,00 euros (12 mois) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 6 000,00 euros bruts (3 mois) à titre d'indemnité compensatrice de préavis, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 600,00 euros bruts au titre des congés payés afférents, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 664,73 euros à titre d'indemnité de licenciement, le tout assorti des intérêts au taux légal,

- dans tous les cas, condamner la société Agence de la gare à lui payer les sommes suivantes :

* 24 000,00 euros (12 mois) à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat et harcèlement moral subi par Madame [Z] qui ont entraîné une dégradation de son état de santé et de ses conditions de travail, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 4 000,00 euros (2 mois) à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'information et de prévention, le tout assorti des intérêts au taux légal, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 12 000,00 euros (6 mois) à titre de dommages et intérêts pour absence de document unique d'évaluation des risques, le tout assorti des intérêts au taux légal, le tout assorti des intérêts au taux légal,

* 12 000,00 euros (6 mois) à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

le tout assorti des intérêts au taux légal,

* rappel de rémunération variable (pour mémoire),

* 2 000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Agence de la gare à lui communiquer, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et dans un délai de 8 jours à compter du prononcé de la décision à intervenir, les pièces justificatives suivantes nécessaires à la détermination des commissions dues:

* l'ensemble des honoraires hors taxe pour les prestations de rentrée de location réalisées directement par elle et encaissées conformément à l'annexe I figurant dans son contrat de travail pour la période de juillet 2018 à février 2019 afin de déterminer le rappel de rémunération variable dû,

* le relevé détaillé des honoraires HT pour les prestations de rentrée HT pour les prestations de rentrée de location réalisées par elle et des encaissements, conformément à l'annexe 1 du contrat de travail, pour la période de juillet 2018 à février 2019,

* le registre des locations réalisés par elle et certifiés par l'expert-comptable de l'agence de la gare pour la période de juillet 2018 à février 2019,

* toutes pièces comptables (grand livre analytique) faisant apparaître le détail des prestations de rentrée de location émanant d'elle avec le détail des affaires réalisées par elle pour la période de juillet 2018 à février 2019,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Agence de la gare de ses demandes reconventionnelles au titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, fins et prétentions,

- ordonner la délivrance sous astreinte de 200 euros par jour de retard et par document :

* le certificat de travail conforme,

* l'attestation Pôle emploi conforme,

* les bulletins de paie conformes,

- condamner la société Agence de la gare aux entiers dépens y compris les frais d'huissier de justice d'un montant de 324,09 euros (pièce n° 37) et de 204,09 euros (pièce n°49),

- intérêts au taux légal sur l'ensemble des sommes à compter de la décision à intervenir,

- capitalisation desdits intérêts en application de l'article 1154 du code civil.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 15 janvier 2024, la société Agence de la gare demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit que les faits de harcèlement moral ne sont pas probants,

- constaté que Mme [Z] n'a pas fait l'objet de harcèlement moral, qu'elle n'a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat et que l'inaptitude de Mme [Z] n'est pas liée à ses conditions de travail,

- dit que le préjudice subi pour absence de visite médicale d'information et de prévention et pour absence de document unique d'évaluation des risques n'est pas démontré tant au niveau du principe que du quantum,

- dit que le contrat a été exécuté loyalement,

- confirmé la décision de rejet prise par le bureau de conciliation et d'orientation du 11 mars 2021,

- débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- en conséquence, débouter Mme [Z] de toutes ses demandes,

- débouter Mme [Z] de ses demandes au titre d'indemnité compensatrice de préavis, congés payés afférents, d'indemnité spéciale de licenciement ou d'indemnité de licenciement, et dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail et manquement à l'obligation de sécurité de résultat et pour nullité et à défaut pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'information, pour absence de document unique d'évaluation des risques, pour exécution déloyale du contrat, de rappel de rémunération variable et de la délivrance de documents,

- à titre incident, infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle et statuant à nouveau, condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive sur le fondement de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- en tout état de cause, condamner Mme [Z] à lui payer une somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et d'appel,

- condamner Mme [Z] aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées le 8 février 2024, Mme [Z] a sollicité la révocation de l'ordonnance de clôture et l'admission de la pièce n°102.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 23 janvier 2024.

MOTIVATION

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

La salariée fait valoir que l'absence de délai raisonnable pour répondre aux conclusions adverses et à la nouvelle pièce numérotée 32 caractérise une cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture.

L'employeur indique que la cause grave n'est pas établie dès lors qu'il a communiqué des nouvelles écritures avec quelques paragraphes ajoutés et une seule pièce supplémentaire le 15 janvier 2024 et que la date de clôture fixée au 23 janvier 2024 permettait à son adversaire de répliquer.

Aux termes de l'article 803 alinéa 1 du code de procédure civile, l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue ; la constitution d'avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.

En l'espèce, les conclusions numéro 2 ont été signifiées par la société intimée le 15 janvier 2024 avec une seule nouvelle pièce. La date de clôture étant fixée le 23 janvier 2024, l'appelante disposait d'un délai suffisant pour y répliquer le cas échéant dans le délai imparti.

Par conséquent, aucune cause grave n'est caractérisée.

La demande de révocation de l'ordonnance de clôture formée par Mme [Z] sera donc rejetée.

Sur la demande de communication de pièces

La salariée sollicite la communication, sous astreinte de 200 euros par jour de retard et dans un délai de 8 jours à compter du prononcé de la décision, des pièces justificatives suivantes, nécessaires selon elle à la détermination des commissions dues :

- l'ensemble des honoraires hors taxe pour les prestations de rentrée de location réalisées directement par Mme [Z] et encaissées conformément à l'annexe 1 dans son contrat de travail pour la période de juillet 2018 à février 2019 afin de déterminer le rappel de rémunération variable dû,

- le relevé détaillé des honoraires hors taxe pour les prestations de rentrée hors taxe pour les prestations de rentrée de location réalisés par Mme [Z] et des encaissements, conformément à l'annexe 1 du contrat de travail pour la période de juillet 2018 à février 2019,

- le registre des locations réalisées par Mme [Z] et certifié par l'expert-comptable de l'Agence de la gare pour la période de juillet 2018 à février 2019,

- toutes pièces comptables (grand livre analytique) faisant apparaître le détail des prestations de rentrée de location émanant de Mme [Z] avec le détail des affaires réalisées par Mme [Z] pour la période de juillet 2018 à février 2019.

La salariée indique qu'en sus de ses fonctions d'assistante commerciale, elle a exercé dans les faits les fonctions de responsable de location à la demande de son employeur, lequel n'a pas régularisé d'avenant à son contrat de travail.

L'employeur conclut au rejet de la demande. Il fait valoir d'une part, que la gestion locative n'entre pas dans le cadre des habilitations de l'agence, et que d'autre part, la salariée ne dispose pas de la carte professionnelle requise. Il soutient que les documents n'existent pas s'agissant d'honoraires, registres et pièces comptables correspondant à des prestations de location que Mme [Z] n'a jamais exercées.

En l'espèce, la salariée n'ayant plus eu de mission de gestion locative à compter de janvier 2019 et ayant indiqué avoir reçu des primes présentées comme exceptionnelles au titre des tâches qui lui étaient confiées précédemment en la matière, sa demande de communication de pièces sous astreinte sera rejetée, comme étant formulée de façon trop générale et n'étant pas suffisamment précise. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de communication de pièces.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, 'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

En application de l'article L.1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L.1152-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée invoque les faits suivants :

- l'exercice dans les faits des fonctions de responsable location, sans régularisation d'un avenant à son contrat de travail,

- des reproches de son employeur et sa mise à l'écart,

- la parution d'une annonce en vue du recrutement sur son poste alors qu'elle se trouve en arrêt de travail,

- une dégradation de son état de santé.

S'agissant de l'exercice dans les faits des fonctions de responsable location, sans régularisation d'un avenant à son contrat de travail, la salariée produit l'annexe 1 à son contrat de travail prévoyant le versement de commissions sur les rentrées de location réalisées directement, une carte de visite de responsable location, un exploit d'huissier de justice du 25 avril 2019 de copie d'écran de l'agence immobilière faisant apparaître la salariée comme 'assistante et responsable location', des attestations de formation interne d'initiation à la gestion locative et au droit de la gestion locative des 9, 17 et 18 octobre 2018. La salariée produit également, au titre des fonctions effectivement exercées, plusieurs attestations de clients qui ont recherché une location et ont eu la salariée comme seule interlocutrice au sein de l'agence : M. [K] et M. [V], un échange de SMS le 8 novembre 2018 avec Mme [O], responsable d'agence, au titre d'une visite de location, un procès-verbal d'huissier de justice du 23 juin 2020 montrant des échanges entre la salariée et des clients au sujet de visites de location ainsi qu'avec une propriétaire d'un bien à mettre en location, un état des lieux d'entrée réalisé le 2 février 2019, un inventaire, les photographies de biens. La salariée indique que pour les cinq biens dont elle a eu la charge, elle a loué une chambre de bonne pour laquelle elle n'a pas eu de commission, elle a loué le studio de Mme [M] pour lequel elle a perçu une commission présentée comme une prime exceptionnelle de 200 euros, un deux pièces à M. [K] pour lequel elle a perçu une commission présentée comme une prime exceptionnelle de 150 euros, un appartement de M. [T] pour lequel elle a perçu une prime exceptionnelle en décembre 2018. La salariée présente donc des éléments de fait au titre de l'exécution de tâches en matière de gestion locative.

S'agissant des reproches de son employeur et de sa mise à l'écart, la salariée indique que la responsable d'agence l'a convoquée en fin d'année pour lui reprocher de façon autoritaire son manque d'anticipation et d'organisation et la décision de lui retirer la gestion locative et qu'à compter de janvier 2019, la responsabilité des locations a été confiée à un nouvel arrivant embauché en qualité d'agent commercial, qu'elle n'avait plus accès aux dossiers clients, les dossiers se trouvant dans le bureau de la directrice dont l'accès lui était refusé, et l'information ne lui étant plus donnée. La salariée présente donc des éléments de fait à ce titre.

S'agissant de la parution d'une offre d'emploi pour la remplacer, la salariée publie une annonce pour un recrutement d'assistant(e) commercial(e) du 14 février 2019 pour un poste à pourvoir au 31 mars 2019 en contrat à durée indéterminée, outre une copie écran de présentation de l'agence du 9 juillet 2019 où elle n'apparaît plus dans l'équipe de l'agence alors que la procédure de licenciement n'a pas été engagée. La salariée présente donc des éléments de fait à ce titre.

S'agissant de la dégradation de son état de santé, la salariée verse aux débats les lettres d'adressage de son médecin traitant à un spécialiste en raison de son état de stress, les certificats médicaux du docteur psychiatre [P] du 5 avril 2019 et du 28 août 2019 attestant d'un suivi psychothérapeutique et d'une dégradation de l'état de santé de Mme [Z] depuis novembre 2018 ayant nécessité un arrêt de travail depuis le 5 mars 2019, une attestation du 28 avril 2019 de Mme [J] psychanalyste, dans le cadre de l'association Souffrances au travail de prise en charge hebdomadaire depuis le 9 mars 2019, une attestation de suivi de Mme [B], psychologue clinicienne depuis le 25 février 2019.

Il s'en déduit que la salariée présente des éléments de faits, y compris la dégradation de son état de santé, qui pris dans leur ensemble, laissent supposer qu'elle a subi des faits de harcèlement moral, son employeur lui ayant confié des tâches de gestion locative qui ne figuraient pas dans son contrat de travail initial puis ayant supprimé ces tâches pour les confier à un autre, la salariée ayant découvert une annonce en vue du recrutement sur son poste pendant son arrêt de travail pour maladie.

L'employeur fait valoir que la salariée n'apporte aucun élément, ce qui est contredit par les pièces du dossier.

L'employeur indique qu'il a répondu aux nombreuses lettres et accusations de la salariée de façon motivée, ne produisant qu'une seule lettre du 5 mars 2019. Il soutient qu'une enquête interne a été menée et que M. [E], négociateur et fils de Mme [N], M. [A], négociateur ont été interrogés par la responsable d'agence et ont considéré que Mme [Z] n'avait jamais été victime de harcèlement moral, cependant, il ne produit pas de rapport d'enquête interne. L'attestation de M. [A] du 16 février 2021 faisant part d'une attitude respectueuse et attentive de la responsable d'agence, ainsi que l'attestation de M. [E] du 15 février 2021 mentionnant une attitude bienveillante de sa mère à l'égard de tous les collaborateurs et des remarques formulées de façon respectueuse à la salariée, sont insuffisantes à justifier que des tâches non prévues à son contrat de travail aient été confiées à la salariée en matière de gestion locative puis lui aient été retirées de façon autoritaire pour être confiées à un nouvel arrivant. L'employeur note un SMS du 29 novembre 2018 de remerciement de la responsable d'agence à la salariée pour son implication, ce SMS ponctuel n'apportant pas d'élément objectif sur la situation. L'employeur indique que le contrat de travail de la salariée n'a jamais été modifié ce qui ne justifie pas davantage la situation.

Enfin, l'employeur dénonce des pièces médicales qui se contentent de reproduire les déclarations de Mme [Z], ces éléments étant, selon lui, insusceptibles de démontrer un quelconque harcèlement et ne permettant pas d'établir un lien entre les symptômes constatés et des faits de harcèlement moral, le médecin du travail n'ayant jamais mentionné que l'inaptitude avait un lien avec l'activité professionnelle et la caisse ayant refusé la prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Ainsi, l'employeur ne démontre pas que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En outre, au vu des éléments médicaux, la dégradation de l'état de santé psychologique de la salariée est en lien avec ses conditions de travail et les faits de harcèlement moral subis.

Par conséquent, la salariée a subi des faits de harcèlement moral de la part de son employeur, qui pendant plusieurs mois lui a confié des tâches de gestion locative qui ne figuraient pas dans son contrat de travail initial puis les a supprimées pour les confier à un autre, la salariée ayant découvert une annonce en vue du recrutement sur son poste pendant son arrêt de travail pour maladie.

La salariée justifie avoir subi un préjudice moral consécutif aux agissements de harcèlement moral, résultant de la dégradation de son état de santé, ayant nécessité plusieurs prises en charge psychologiques et un traitement médicamenteux, qu'il convient de réparer par l'allocation de dommages et intérêts fixés à hauteur de 5 000 euros.

La société Agence de la gare sera condamnée à payer à Mme [Z] la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral consécutif aux agissements de harcèlement moral subis. Le jugement attaqué sera infirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande à ce titre.

Sur la validité du licenciement et ses conséquences

La lettre du licenciement, qui fixe les limites du litige, est libellée comme suit :

« [...]Comme nous vous l'avons expliqué lors de l'entretien, vous avez fait l'objet d'une visite médicale de reprise succédant à plusieurs arrêts-maladie au cours de ces derniers mois.

A l'issue de cette visite médicale de reprise du 9 mai 2019, après étude de poste effectuée le 6 mai 2019 par le Docteur [Y], médecin du travail, vous avez été déclarée inapte par ce dernier à votre poste avec la précision suivante : "l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise".

Par courrier du 7 juin 2019, votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement vous a été notifié.

Par courrier du 13 juin 2019, vous nous avez informés de votre état de grossesse. Par courrier du 27 juin 2019, nous vous avons donc invitée à réintégrer votre poste de travail compte tenu de la nullité de votre licenciement en application de l'article L. 1225-5 du code du travail.

A la suite de votre réintégration, le médecin du travail vous a reçu le 10 juillet 2019 en confirmant votre inaptitude « pas d'attestation validée. Inaptitude prononcée le 09 mai 2019 ».

Dans ces conditions, en application de l'article L.1226-2-1 du Code du travail, il nous est impossible de vous proposer un emploi.

En effet, votre état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise.

Par lettre du 29 juillet 2019, nous vous avons informée, conformément au même texte, des motifs qui conduisent à cette impossibilité de reclassement.

En conséquence, nous vous informons de notre décision de vous licencier en raison de votre inaptitude à occuper votre emploi, constatée le 9 mai 2019 et confirmée le 10 juillet 2019 par le médecin du travail et en raison de l'impossibilité de vous reclasser compte tenu de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que votre état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans cette entreprise.

De plus, il ressort de l'article L.1225-4 du Code du travail concernant le licenciement d'une femme enceinte que « l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. ».

En application de l'article L. 1225-4 du code du travail, il nous est en effet impossible de maintenir votre contrat de travail pour un motif étranger à votre grossesse compte tenu de votre inaptitude à votre poste et l'impossibilité de reclassement.

Cette inaptitude qui a été prononcée par le Médecin du travail ainsi que l'impossibilité de reclassement sont des causes rendant impossibles le maintien de votre contrat de travail pour un motif étranger à votre état de grossesse. Il nous est donc impossible de maintenir votre contrat de travail pour un motif sans lien avec votre grossesse.

Nous sommes donc contraints de vous licencier en raison de votre inaptitude à occuper votre emploi et en raison de l'impossibilité de vous reclasser et du fait de l'impossibilité de maintenir votre contrat de travail pour un motif étranger à votre grossesse.

Votre contrat de travail prend fin à la date d'envoi de cette lettre de licenciement, soit le 16 août 2019. Vous n'effectuerez donc pas de préavis qui ne vous sera en conséquence pas rémunéré (...). »

Sur la nullité du licenciement

Aux termes de l'article L. 1152-3 du code du travail, 'toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul'.

En l'espèce, la salariée a été licenciée pour inaptitude.

Cependant, l'inaptitude de la salariée trouve sa cause dans les faits de harcèlement moral subis, la salariée s'étant vue confier des tâches de gestion locative pendant plusieurs mois non prévues à son contrat de travail, qui lui ont été retirées pour être confiées à une autre personne de l'agence, avant de découvrir une offre d'emploi sur son poste pendant son arrêt de travail pour maladie, le lien entre la dégradation de l'état de santé de la salariée et les agissements de harcèlement moral étant établi.

Par conséquent, le licenciement de la salariée pour inaptitude intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail est nul, le licenciement ayant pour origine l'état de santé psychologique de la salariée lié aux agissements de harcèlement moral qu'elle a subis.

Sur la maladie professionnelle

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que deux conditions sont réunies :

- l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie :

- l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

Le juge n'est pas tenu par une décision de la caisse ou de la juridiction de sécurité sociale.

En l'espèce, la salariée a subi des agissements de harcèlement moral qui ont été à l'origine d'une dégradation de son état de santé à compter de fin 2018. Elle justifie d'un traitement médicamenteux et d'une prise en charge par une psychanalyste de souffrance au travail et par un psychologue du travail depuis son arrêt de travail en raison d'éléments dépressifs. Le docteur [P], psychiatre, a, le 5 avril 2019, conclu dans un certificat médical à un état dépressif pour lequel un suivi psychothérapeutique, un traitement et un arrêt de travail ont été mis en place. Il s'en déduit que l'inaptitude de la salariée a, au moins partiellement, pour origine un état dépressif réactionnel à des agissements de harcèlement moral subis dans son emploi.

La salariée a également fait parvenir par courrier recommandé du 4 juin 2019, présenté le 7 juin 2019 à l'employeur un certificat médical initial 'accident du travail / maladie professionnelle' établi le 4 juin 2019 par le docteur [P], psychiatre. Il s'en déduit qu'au moment de l'engagement de la procédure de licenciement le 30 juillet 2019, l'employeur avait connaissance de la déclaration de maladie professionnelle de la victime et était en situation d'émettre des réserves éventuelles. Il avait donc connaissance de cette origine professionnelle de la maladie.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement nul

En application des dispositions de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article, dès lors que le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois..

La salariée justifie d'une inscription à Pôle emploi du 30 août 2019 au 3novembre 2019 puis du 3 mai 2020 au 10 janvier 2022.

Il convient de lui allouer des dommages et intérêts pour nullité du licenciement à hauteur de

12 000 euros.

Sur l'indemnité compensatrice et l'indemnité spéciale de licenciement

Aux termes de l'article L. 1226-14 du code du travail, 'La rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle.'

La salariée ayant le statut d'employée a droit à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 d'une durée d'un mois, le seul fait qu'elle ait également accompli des tâches de gestion locative pendant une durée de quelques mois, outre son poste d'assistante commerciale, ne lui conférant pas le statut de cadre.

Il lui sera alloué une somme de 2 000 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis.

Sur l'indemnité légale de licenciement

L'indemnité spéciale de licenciement est due quelque soit l'ancienneté de la salariée. La salariée a donc droit à une indemnité spéciale de licenciement d'un montant de 1 083,32 euros, calculée en tenant compte d'un préavis d'un mois.

La société Agence de la gare sera donc condamnée à payer ces sommes à Mme [Z], le jugement entrepris sera infirmé sur ces points.

Sur l'obligation de sécurité

La salariée indique qu'elle a dénoncé le harcèlement moral dont elle a fait l'objet et les difficultés rencontrées avec son employeur et que celui-ci s'est contenté de s'opposer à ses accusations et n'a pas procédé à une mesure d'enquête interne, manquant à son obligation de sécurité et de prévention du harcèlement moral. Elle soutient que les agissements subis ont altéré sa santé physique et mentale.

L'employeur fait valoir que la salariée n'apporte aucun élément probant permettant de présumer un quelconque harcèlement moral. Il soutient avoir pris le soin de répondre aux lettres et accusations de la salariée et qu'une enquête a été menée, l'employeur ayant interrogé les deux négociateurs de l'agence.

Ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l'existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser.

En l'espèce, la salariée ne justifie pas avoir alerté son employeur de la situation de harcèlement moral subi avant sa lettre du 22 février 2019.

Si l'employeur ne produit pas de rapport d'enquête interne formalisé suite à l'alerte de la salariée, celui-ci démontre qu'il n'avait pas à prendre de mesure propre à faire cesser le harcèlement moral dès lors que selon le médecin du travail, l'état de santé de la salariée ne lui permettait pas de reprendre le travail.

En tout état de cause, la salariée ne justifie à ce titre d'aucun préjudice distinct.

Par conséquent, la salariée doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur l'absence de visite médicale

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'information et de prévention. Elle indique qu'elle n'a pas bénéficié de cette visite, de sorte que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité à son égard. Elle conclut qu'elle subit un préjudice compte-tenu de ses conditions de travail qu'elle n'a cessé de dénoncer auprès de la médecine du travail ainsi que de l'inspection du travail.

L'employeur conclut au débouté de la demande. Il fait valoir que la salariée ne justifie pas d'un préjudice, que les coordonnées de la médecine du travail lui ont été communiquées, qu'elle a été convoquée en vue de visites de reprise. L'employeur précise que la salariée a adressé copie de ses courriers à la médecine du travail et a pu avoir un rendez-vous dès qu'elle l'a souhaité.

L'absence de visite médicale entraîne une indemnisation pour le salarié s'il rapporte la preuve du préjudice qui en est résulté.

En l'espèce, la salariée n'a pas bénéficié de la visite médicale d'information et de prévention.

Elle déclare avoir sollicité son employeur dès le 11 février 2019 sans en justifier.

Elle justifie avoir sollicité son employeur par SMS du 25 février 2019 puis par lettre du 28 février 2019 pour obtenir un rendez-vous de pré-reprise. Or, l'employeur lui a donné les coordonnées du médecin du travail par SMS du 25 février 2019. La salariée a fait l'objet d'une convocation le 26 mars 2019 auprès du Ciamt pour une visite médicale le 3 avril 2019, dont elle a demandé la modification en raison de son arrêt de travail pour maladie, avant de bénéficier le 9 avril 2019 d'une visite médicale de pré-reprise.

Toutefois, la salariée ne démontre pas avoir subi un préjudice du fait de l'absence de visite médicale d'information et de prévention à une date antérieure à cette visite médicale de pré-reprise qui est intervenue peu après la demande en ce sens formée auprès de son employeur.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur l'absence de document unique d'évaluation des risques

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour absence de document unique d'évaluation des risques. Elle indique que l'employeur n'a pas formalisé ce document unique d'évaluation des risques professionnels et que ce manquement entraîne de fait le versement de dommages et intérêts en faveur des salariés, que la dégradation de son état de santé a été certifiée de manière unanime par les professionnels de santé.

L'employeur conclut au débouté de la demande. Il soutient que les certificats médicaux produits ne permettent pas d'établir un lien entre les symptômes et l'activité professionnelle, que le médecin du travail n'a jamais mentionné de lien entre l'inaptitude et l'activité professionnelle et que la caisse a rejeté la demande de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels. Il fait valoir que la salariée ne rapporte pas la preuve du préjudice dont elle demande réparation.

La carence de l'employeur dans l'établissement du document unique d'évaluation des risques entraîne une indemnisation du salarié s'il justifie d'un préjudice résultant de cette absence du document unique d'évaluation des risques.

En l'espèce, la salariée ne justifie pas d'un préjudice résultant de la carence de l'employeur dans l'établissement du document unique d'évaluation des risques.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Z] de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Elle indique que son contrat de travail contient une clause de rémunération variable illicite, que l'employeur a manqué à sa promesse de régulariser un contrat de responsable location, fonction qu'elle a été amenée à exercer en sus de ses fonctions d'assistante commerciale. Elle ajoute qu'elle a subi des vexations, découvrant une annonce pour la remplacer dans son poste pendant son arrêt de travail, son nom n'apparaissant plus parmi les membres de l'équipe sur le site internet de l'agence et qu'elle a exercé en toute illégalité des fonctions de responsable de location puisqu'elle n'était pas titulaire de l'attestation d'habilitation. Elle conclut que ces manquements ont accentué la dégradation de son état de santé physique et mentale.

L'employeur soutient que le contrat de travail de la salariée n'a jamais été modifié unilatéralement sans son accord. Il fait valoir que la salariée a toujours exercé des fonctions d'assistante commerciale conformément à son contrat de travail et n'a jamais exercé des tâches de responsable de location, qu'elle ne pouvait s'occuper de la gestion locative dès lors que cette activité n'entrait pas dans le cadre des habilitations de l'agence de la gare. Il relève que seuls les salariés possédant une carte de négociateur peuvent avoir cette responsabilité.

En l'espèce, la salariée ne caractérise pas de préjudice distinct de celui déjà réparé par l'allocation de dommages et intérêts au titre des agissements de harcèlement moral subi.

Elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur la procédure abusive

La présente procédure étant partiellement fondée, elle n'est pas abusive. La société Agence de la gare sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 32-1 du code de procédure civile. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la remise de documents de fin de contrat

Il convient d'ordonner la remise par la société Agence de la gare à Mme [Z] du certificat de travail, de l'attestation Pôle emploi devenu France Travail et des bulletins de paie conformes à la présente décision, sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts échus pour une année entière sera ordonnée.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Agence de la gare succombant à la présente instance, en supportera les dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'huissier de justice de 324,09 euros et de

204,09 euros. Elle devra également régler à Mme [Z] une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Agence de la gare.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Dit qu'il n'y a pas lieu à révocation de l'ordonnance de clôture,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté Mme [S] [Z] de sa demande de communication de pièces sous astreinte,

- débouté Mme [S] [Z] de ses demandes de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, pour absence de visite médicale d'information et de prévention, pour absence de document unique d'évaluation des risques, pour exécution déloyale du contrat de travail,

- débouté la société Agence de la gare de sa demande au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmé et y ajoutant :

Dit que le licenciement de Mme [S] [Z] est nul,

Condamne la société Agence de la gare à payer à Mme [S] [Z] les sommes suivantes:

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

12 000 euros à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

2 000 euros à titre d'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis,

1 083,32 euros pour indemnité spéciale de licenciement,

Ordonne la remise par la société Agence de la gare à Mme [S] [Z] du certificat de travail, de l'attestation Pôle emploi devenu France Travail et des bulletins de paie conformes à la présente décision,

Déboute Mme [S] [Z] de sa demande d'astreinte,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière,

Condamne la société Agence de la gare aux dépens de première instance et d'appel y compris les frais d'huissier de justice de 324,09 euros et de 204,09 euros,

Condamne la société Agence de la gare à payer à Mme [S] [Z] une somme de

4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Agence de la gare,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/02359
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;22.02359 ?
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