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20/03/2024 | FRANCE | N°21/05002

France | France, Cour d'appel de Versailles, Ch civ. 1-4 copropriété, 20 mars 2024, 21/05002


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 72A



Ch civ. 1-4 copropriété



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 20 MARS 2024



N° RG 21/05002 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UVY2



AFFAIRE :



[S] [Y] [V]

et autre



C/

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE SISE [Adresse 2]), représenté par son syndic de copropriété en exercice, la SARL Cabinet BETTI,

et autre





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le

06 Juillet 2021 par le Juridiction de proximité de MONTMORENCY

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 11-21-441



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Yacine EL GERSSIFI,



Me Elisabeth ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 72A

Ch civ. 1-4 copropriété

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 MARS 2024

N° RG 21/05002 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UVY2

AFFAIRE :

[S] [Y] [V]

et autre

C/

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE SISE [Adresse 2]), représenté par son syndic de copropriété en exercice, la SARL Cabinet BETTI,

et autre

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Juillet 2021 par le Juridiction de proximité de MONTMORENCY

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 11-21-441

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Yacine EL GERSSIFI,

Me Elisabeth GUYOT,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [S] [Y] [V]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Yacine EL GERSSIFI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 215

Madame [D] [N]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Yacine EL GERSSIFI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 215

APPELANTS

****************

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE SISE [Adresse 2]), représenté par son syndic de copropriété en exercice, la SARL Cabinet BETTI, dont le sie`ge social se trouve [Adresse 1] à [Localité 3],représenté par son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentant : Me Elisabeth GUYOT, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 200 et Me Damien AYROLE de la SELASU AYROLE AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0786

S.A.R.L. CABINET BETTI

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Elisabeth GUYOT, Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 200 et Me Damien AYROLE de la SELASU AYROLE AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0786

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Février 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président,

Madame Séverine ROMI, Conseiller,

Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,

Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI,

****************

M. [V] et Mme [N] sont copropriétaires indivis, en vertu d'un acte notarié daté du 5 juin 2019, d'un certain nombre de lots d'un immeuble en copropriété sis [Adresse 2] à [Localité 4] (95). A la suite d'un litige concernant des travaux réalisés par eux, suivant ordonnance de référé en date du 16 octobre 2019, qui sera signifiée le 24 octobre 2019, le président du Tribunal judiciaire de Pontoise a ordonné une expertise. L'expert a déposé son rapport le 20 octobre 2020.

Saisi de contestations par M. [V] et Mme [N], le Tribunal de proximité de Montmorency a selon jugement daté du 6 juillet 2021 qui sera signifié le 18 août 2021 :

- déclaré irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par M. [V] et Mme [N] du chef de la demande reconventionnelle ;

- condamné, à proportion de leurs droits dans les lots indivis, M. [V] et Mme [N] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence sise [Adresse 2] à [Localité 4], ci-après dénommé 'le syndicat des copropriétaires', la somme de 635,76 euros au titre de charges de copropriété arrêtées au mois d'avril 2021 ;

- débouté M. [V] et Mme [N] de leurs demandes ;

- condamné M. [V] et Mme [N] à remettre en état antérieur les parties communes de l'immeuble conformément au rapport d'expertise judiciaire, en procédant à tous travaux utiles notamment respecter la destination de cave des lots n° 19 et 21 et de couloir de cave du lot n° 22 en cessant toute location, en supprimant les canalisations, passages de gaines et de réseaux divers en parties communes, et ce, sous astreinte journalière de 100 euros devant commencer à courir trois mois après la signification du jugement ;

- refusé de se réserver la compétence pour liquider l'astreinte ;

- condamné M. [V] et Mme [N] à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 700 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [V] et Mme [N] à payer à la société Cabinet Betti, syndic, celle de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [V] et Mme [N] aux dépens, en ce compris ceux de référé et les honoraires de l'expert.

Par déclaration en date du 30 juillet 2021, M. [V] et Mme [N] ont relevé appel de ce jugement, intimant tant le syndicat des copropriétaires que la société Cabinet Betti, syndic.

En leurs conclusions notifiées le 5 février 2024, ils exposent :

- que les charges de copropriété ont été payées, le syndicat des copropriétaires réclamant des sommes injustifiées telles que le coût de mises en demeure, de frais de procédure, ou de suivi annuel des impayés ; que des frais de relance ne sont dus que s'ils sont nécessaires ;

- que si des retards ont pu être constatés dans le passé, ils sont imputables au syndic qui leur a envoyé les appels de fonds à leur ancienne adresse ; qu'ils ont été confrontés, par ailleurs, à des difficultés de paiement ;

- qu'au mois de novembre 2020, leur compte était créditeur ;

- que le syndicat des copropriétaires a bénéficié d'un trop perçu ;

- que s'agissant de la demande reconventionnelle, le Tribunal de proximité de Montmorency était incompétent, cette demande, de nature indéterminée, devant être portée devant le Tribunal judiciaire de Pontoise ;

- que la prescription de 5 ans édictée à l'article 2224 du code civil est acquise ; qu'en effet ils ont acquis leur bien le 5 juin 2019, lequel se trouvait, aux dires de leur vendeur, M. [B], dans le même état que lorsqu'il l'avait lui-même acquis ; que c'est le prédécesseur de ce dernier qui avait transformé des caves en chambres ; que cela est confirmé par l'expert ; que la partie adverse est dans l'incapacité de justifier de l'état antérieur des lieux ;

- subsidiairement, qu'il n'y avait pas lieu de se pourvoir d'une autorisation de l'assemblée générale s'agissant de transformations dans les parties privatives, et non pas dans les parties communes, qui ne portaient pas atteinte à la destination de l'immeuble ni n'étaient prohibées par le règlement de copropriété ; qu'il n'existe aucun empiétement sur les parties communes ; que le règlement de copropriété prévoyait que tout copropriétaire pouvait modifier la cave lui appartenant et la diviser, de même que son appartement ;

- que la condamnation qui a été prononcée par le premier juge est disproportionnée.

M. [V] et Mme [N] demandent en conséquence à la Cour de :

- infirmer le jugement ;

- débouter le syndicat des copropriétaires de ses prétentions ;

- déclarer le Tribunal de proximité de Montmorency incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle et déclarer compétent le Tribunal judiciaire de Pontoise ; déclarer ladite demande prescrite ;

- condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Cabinet Betti à leur payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manoeuvres abusives, injustifiées et vexatoires ;

- les condamner in solidum au remboursement de la somme de 733,49 euros représentant un trop perçu au 27 avril 2021 ;

- les condamner in solidum au paiement de la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner in solidum aux dépens.

Dans leurs conclusions notifiées le 02 février 2024, le syndicat des copropriétaires et la société Cabinet Betti répliquent :

- que les sommes réclamées sont des charges ; que les frais de procédure sont également dus, l'article L 111-8 du code des procédures d'exécution prévoyant que les frais de recouvrement entrepris sans titre exécutoire mais qui sont prescrits par la loi sont dus par le débiteur ;

- que de plus, le syndicat des copropriétaires possède un titre, à savoir l'ordonnance de référé du mois d'octobre 2019 ;

- que le Tribunal a rejeté une partie des frais réclamés, à tort ; que le contrat-type annexé au du décret du 17 mars 1967 prévoit que le syndic peut percevoir des émoluments en cas de recouvrement ;

- que le montant des sommes impayées s'est accru depuis le jugement si bien que la somme de 3 944,07 euros est due au titre des charges échues au mois de juillet 2023 ;

- qu'en ce qui concerne la demande reconventionnelle, le jugement a à juste titre déclaré l'exception d'incompétence irrecevable pour avoir été soulevée, oralement, après des moyens de fond ;

- que la prescription n'est pas acquise, car l'expert a indiqué que les travaux ont été réalisés par M. [V] et Mme [N] postérieurement à la vente survenue en 2019 ; que de plus, à l'époque le délai était de 10 ans en vertu de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;

- que M. [V] et Mme [N] ont entrepris sans autorisation de l'assemblée générale de gros travaux, portant sur des éléments structurels et des parties communes ; qu'ils ont séparé en deux leur habitation, ce qui est possible, mais du fait de la modification des réseaux rendue nécessaires par le création de sanitaires au rez-de-chaussée, les parties communes ont été modifiées ;

- que l'expert a constaté que celles-ci comprennent des passages de canalisations et ont été annexées comme des parties privatives, en vue d'une transformation en habitations ;

- que les appelants ont modifié le couloir commun et annexé une cour, et ainsi modifié la destination des lieux, les frais générés par ces travaux s'étant élevés à 42 498,50 euros ;

- que s'il est possible que ces travaux soient antérieurs à la vente de 2019, l'acte de vente restait taisant sur ces travaux et faisait état de caves ;

- que l'expertise a mis en exergue les travaux réalisés par les appelants ;

- que si le règlement de copropriété permet aux copropriétaires de diviser un appartement, ils ne peuvent nullement annexer des caves, couloirs de caves et parties communes ;

- que M. [V] et Mme [N] ont donc été justement condamnés à remettre les lieux en état, alors que suivant jugement du 19 janvier 2024 le juge de l'exécution de Pontoise a liquidé à 70 000 euros l'astreinte assortissant cette condamnation.

Le syndicat des copropriétaires et la société Cabinet Betti demandent en conséquence à la Cour de :

- confirmer le jugement sauf en ce qui concerne le montant de la condamnation ;

- condamner solidairement M. [V] et Mme [N] au paiement de la somme de 3 142,04 euros au titre des frais de recouvrement ;

- les condamner solidairement au paiement de celle de 24 839,05 euros au titre des charges dues au mois de janvier 2024 ;

- les condamner solidairement à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts ;

- les condamner solidairement à payer à chacun d'eux la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner solidairement aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, qui seront recouvrés par Maître [T].

Selon ordonnance en date du 5 décembre 2023, qui n'a pas été frappée d'un déféré, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevables les conclusions de la société Cabinet Betti et du syndicat des copropriétaires à fin de radiation de l'affaire, et les a condamnés in solidum à payer à M. [V] et Mme [N] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de l'incident.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 février 2024.

A l'audience du 21 février 2024, la Cour autorisé les intimés à produire en cours de délibéré un décompte de créance actualisé.

Dans leur note en délibéré du 27 février 2024, le syndicat des copropriétaires et la société Cabinet Betti font valoir que postérieurement à l'ordonnance de clôture, les débiteurs ont procédé à deux règlements de 13 000 euros et 13 703,59 euros, si bien qu'ils ont renoncé à leurs contestations. Le syndicat des copropriétaires ne maintient sa demande en paiement qu'à concurrence de la somme de 1 827,50 euros représentant les frais nécessaires au sens de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Par message RPVA du 7 mars 2024, M. [V] et Mme [N] ont indiqué qu'effectivement les charges de copropriété étaient réglées, seule restant due une somme de 70 000 euros représentant la liquidation de l'astreinte ordonnée par le juge de l'exécution.

MOTIFS

En vertu de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 :

Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 10, sont imputables au seul copropriétaire concerné :

a) Les frais nécessaires exposés par le syndicat, notamment les frais de mise en demeure, de relance et de prise d'hypothèque à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire ainsi que les droits et émoluments des actes des huissiers de justice et le droit de recouvrement ou d'encaissement à la charge du débiteur ;

Le syndicat des copropriétaires réclame la somme de 1 827,50 euros.

M. [V] et Mme [N] contestent devoir les frais de mise en demeure du 11 septembre 2019 (soit 53 euros) motif pris de ce qu'ils n'avaient pas reçu de facture. Les sommes réclamées en principal dans cette mise en demeure (33,98 euros et 1 040,44 euros) ont fait l'objet de deux appels de fonds du 19 juin 2019, soit datés de quelques jours après l'acquisition du bien par M. [V] et Mme [N], et ils leur ont été adressés au [Adresse 2] à [Localité 4] (95) qui est leur logement dans la résidence. Les appelants affirment sans preuve ne pas les avoir reçus. Ces frais de mise en demeure doivent donc être mis à leur charge.

Les frais de sommation de payer du 2 novembre 2020 (152,25 euros) sont dus, s'agissant d'un acte d'huissier tarifé, dans lequel un arriéré de charges de 2 252,88 euros était réclamé aux appelants. Si ceux-ci contestaient devoir cette somme, ils ont a minima reconnu être débiteurs de celle de 477,38 euros dans une lettre de leur conseil du 4 novembre 2020, somme réglée le 2 novembre soit le jour de la délivrance de la sommation de payer.

Le 26 novembre 2020 M. [V] et Mme [N] ont contesté devoir les frais de mise en demeure du 23 novembre 2020, à savoir la sommation de payer et les honoraires de l'huissier. S'il résulte de ce qui va suivre que ces derniers ne sont pas dus, il n'en était pas de même des frais de sommation de payer. Cette mise en demeure n'est donc pas frustratoire.

Celle du 1er mars 2021 est également contestée. Au delà de la question des frais de relance et autres, il appert que le montant des charges proprement dites (1 875,08 euros + 152,25 euros + 709,35 euros + 33,98 euros) était d'un montant supérieur aux acomptes (250 euros + 500 euros + 250 euros). Cette mise en demeure était dès lors justifiée et son coût doit rester à la charge des débiteurs.

Il s'ensuit que les diverses mises en demeure qui ont été adressées à M. [V] et Mme [N] étaient nécessaires au recouvrement de la créance du syndicat des copropriétaires. Cela est d'autant moins contestable que les appelants ont reconnu eux-mêmes avoir été confrontés à des difficultés financières. Les impayés ont perduré, l'appel de fonds du 16 mars 2022, par exemple, démontrant que les acomptes qui ont pu être payés étaient d'un montant inférieur à celui des charges. Une nouvelle sommation de payer a d'ailleurs dû être délivrée à M. [V] et Mme [N] le 6 juillet 2022.

Concernant les frais de constitution de dossier avocat ou huissier ou de suivi de dossier contentieux ou d'impayés, ils relèvent de 1'activité du syndic relative au recouvrement des sommes dues et constituent un acte élémentaire d'administration de la copropriété.

Le fait que le contrat de syndic prévoit éventuellement une rémunération spécifique au titre d'honoraires supplémentaires n'en change pas la nature, ces frais n'étaient donc pas nécessaires au sens de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965. D'ailleurs, il est interdit aux huissiers de justice, de percevoir des honoraires à raison des activités pour lesquelles il existe un tarif (article R 444-13 I du code de commerce). Concernant les mises en demeure, la facturation prévue au contrat de syndic n'est pas opposable au copropriétaire qui n'est pas partie au contrat ; la demande en paiement au titre des frais de mise en demeure, ne saurait des lors être retenue sur cette base tarifaire, d'autant que comme dit précédemment, il n'est pas justifié d'une quelconque clause d'aggravation.

Les frais dus s'élèvent donc à :

- frais de mise en demeure exposés en 2019 : 2 x 5,02 euros ;

- frais de mise en demeure exposés en 2020 : 2 x 5,08 euros ;

- frais de mise en demeure exposés en 2021 : 5,36 euros ;

- frais de mise en demeure exposés en 2022 : 3 x 5,37 euros ;

- sommations de payer : 137,04 euros + 152,25 euros ;

soit 330,96 euros.

Les appelants seront en conséquence condamnés au paiement de pareille somme, par infirmation du jugement. Il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation solidaire de ce chef, aucune règle de solidarité légale ou conventionnelle ne pouvant recevoir application, étant rappelé qu'en matière civile la solidarité ne se présume pas.

Sur la demande de condamnation de M. [V] et Mme [N] à remettre les lieux en état :

En vertu de l'article 74 du code de procédure civile, les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public.

Au cas d'espèce, il résulte de la lecture de l'exorde du jugement dont appel, dont les mentions font foi jusqu'à inscription de faux, qu'à l'audience de première instance, M. [V] et Mme [N] n'ont soulevé l'incompétence de la juridiction qu'après avoir exposé leurs propres prétentions. Ce jugement doit être confirmé en ce qu'il a déclaré l'exception d'incompétence irrecevable.

S'agissant de la prescription, selon les dispositions de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, qui n'ont pas été modifiées, celles de l'article 2224 du code civil relatives au délai de prescription et à son point de départ sont applicables aux actions personnelles relatives à la copropriété entre copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat. Et ce texte dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

M. [V] et Mme [N] ont acquis leur bien selon acte notarié du 5 juin 2019 ; le point de départ de l'action en justice relative à la remise en état des lieux ne se situe pas à cette date, mais à celle à laquelle le syndicat des copropriétaires a eu connaissance de la modification des lieux.

Il s'avère que M. [V] et Mme [N] ont confié la réalisation d'un certain nombre de travaux à l'entreprise Paris style déco, à savoir la peinture, la pose d'un parquet massif, la pose d'un coffrage pour une canalisation, une modification de la cuisine, et la pose d'un tableau électrique et d'une prise de courant. Ces travaux ont été réalisés en 2019. L'entreprise susvisée a certifié ne pas avoir construit de murs en parpaings ni de toilettes ou salle de bains, ni avoir aménagé les caves. Les travaux réalisés par elle sont donc nécessairement antérieurs à cette date.

Un procès-verbal de constat en date du 25 juin 2019 avait relevé que M. [V] et Mme [N] étaient en train de réaliser des travaux au niveau des caves. Le rapport d'expertise indique que les transformations (bouchement par un mur en parpaings au niveau des parties communes caves et de l'accès général à celles-ci) sont relativement anciennes. Il signale toutefois qu'en comparant l'état des lieux avec l'acte d'acquisition de M. [V] et Mme [N], la partie cave a été transformée en pièces d'habitation, alors que l'appartement comporte en plus un espace dénommé cour au rez-de-chaussée. L'acte de vente de 1993 faisait référence à des caves mais nullement à des locaux d'habitation. L'expert indique aussi que les différentes pièces 'caves' et couloir commun ainsi que la cour au rez-de-chaussée sont des parties communes, et que leur destination a été modifiée par les propriétaires pour en faire des locaux d'habitation, ces transformations étant peut-être préexistantes à l'acquisition du logement par M. [V] et Mme [N] bien que l'acte de vente ne les mentionne pas. Concernant les aménagements qui ont été réalisés par ces derniers, l'expert précise qu'ils ont consisté en la séparation de la partie habitation du rez-de-chaussée surélevé et celle du rez-de-chaussée côté rue afin de les mettre en location, l'ensemble des locaux étant séparés en deux appartements distincts, et que la modification des réseaux, du fait de la création de sanitaires au rez-de-chaussée, a fortement modifié les parties communes. Enfin la terrasse donnant sur une véranda qui a été rendue privative n'apparaît pas dans l'acte d'acquisition de 2019.

Il en résulte que pour partie des travaux, il n'est pas certain qu'ils aient été exécutés avant l'acquisition du logement par M. [V] et Mme [N], alors que pour une autre partie, ce sont bien eux qui les ont fait réaliser. D'ailleurs la lettre de M. [B], précédent propriétaire, du 14 avril 2020 fait allusion à des caves qui étaient utilisées en guise de chambres. L'instance en référé a été introduite par assignation du 19 juillet 2019 soit nécessairement moins de cinq ans après ces travaux. La prescription n'est pas acquise et la fin de non-recevoir soulevée par M. [V] et Mme [N] doit être rejetée.

Les lots litigieux sont les lots n° 19, 20 et 21 situés en sous-sol, ceux portant les n° 19 et 21 étant désignés dans l'acte d'acquisition de M. [V] et Mme [N] comme des caves, avec un couloir commun les desservant. Il est démontré, par ce qui précède et par un procès-verbal de constat en date du 18 janvier 2022 qui a relevé que des réseaux électriques et d'eau alimentant l'appartement de M. [V] et Mme [N] se trouvent dans les caves, et que partie de celle-ci étaient louées par eux, que les intéressés ont réhabilité les caves de l'immeuble en vue de les louer, en empiétant sur les parties communes, et ce sans autorisation. Il s'agit là d'un véritable changement de destination des lieux, qui à l'époque étaient de simples caves comme M. [B] l'a indiqué, et qui ont été transformés en chambres. Un cloison séparative avec le lot n° 1 a été créée pour en faire un appartement destiné à la location, et une clôture a été installée, rendant de facto privative une cour commune. Des canalisations de l'immeuble ne sont plus accessibles.

Par ailleurs, c'est en vain que M. [V] et Mme [N] se prévalent du règlement de copropriété ; en effet celui-ci prévoit que chaque copropriétaire aura la faculté de diviser son appartement en deux appartements plus petits mais à la condition que les nouveaux appartements ne soient occupés que bourgeoisement ; ils ne pouvaient nullement annexer des caves, couloirs de caves et parties communes.

Il s'ensuit que c'est à juste titre que le tribunal a condamné M. [V] et Mme [N] à remettre les lieux en état ; le jugement sera confirmé de ce chef.

La société Cabinet Betti et le syndicat des copropriétaires demandent à la Cour de condamner solidairement M. [V] et Mme [N] à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros à titre de dommages et intérêts. Il s'avère qu'en cours de procédure les débiteurs ont réglé l'ensemble des charges de copropriété, seule restant due une somme au titre des frais, qui a été arrêtée par la Cour très en deçà des réclamations du syndicat des copropriétaires. En conséquence, les intimés seront déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts.

M. [V] et Mme [N], qui succombent, seront condamnés in solidum à payer à chacun des intimés la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

- INFIRME le jugement en date du 6 juillet 2021 en ce qu'il a condamné, à proportion de leurs droits dans les lots indivis, M. [V] et Mme [N] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence sise [Adresse 2] à [Localité 4] la somme de 635,76 euros au titre des charges de copropriété arrêtée au mois d'avril 2021 ;

et statuant à nouveau :

- CONDAMNE conjointement M. [S] [V] et Mme [D] [N], à proportion de leurs droits dans les lots indivis, à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence sise [Adresse 2] à [Localité 4] la somme de 330,96 euros au titre des frais ;

- CONFIRME le jugement pour le surplus ;

- DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires de la résidence sise [Adresse 2] à [Localité 4] et la société Cabinet Betti de leurs demandes de dommages et intérêts ;

- CONDAMNE in solidum M. [S] [V] et Mme [D] [N] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence sise [Adresse 2] à [Localité 4] la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE in solidum M. [S] [V] et Mme [D] [N] à payer à la société Cabinet Betti la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE in solidum M. [S] [V] et Mme [D] [N] aux dépens d'appel, qui seront recouvrés par Maître Guyot conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Raphaël TRARIEUX, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Ch civ. 1-4 copropriété
Numéro d'arrêt : 21/05002
Date de la décision : 20/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-20;21.05002 ?
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