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14/03/2024 | FRANCE | N°23/05736

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1-6, 14 mars 2024, 23/05736


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78B



Chambre civile 1-6



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 MARS 2024



N° RG 23/05736 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WAXZ



AFFAIRE :



[Y] [X]



[O] [U] épouse [X]



C/



S.A. BPVF



S.D.C. [Adresse 12]



S.A.S. IMMOBILIERE GSR ET ASSOCIES



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juin 2023 par le Juge de l'exécution de NANTERRE
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Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 14.03.2024

à :



Me Aurélie JANEAU de la SELARL JANEAU AVOCAT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE



Me Virginie DESPORT-AUVRAY, avocat au barreau de VERSAILLES, ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78B

Chambre civile 1-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 MARS 2024

N° RG 23/05736 - N° Portalis DBV3-V-B7H-WAXZ

AFFAIRE :

[Y] [X]

[O] [U] épouse [X]

C/

S.A. BPVF

S.D.C. [Adresse 12]

S.A.S. IMMOBILIERE GSR ET ASSOCIES

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Juin 2023 par le Juge de l'exécution de NANTERRE

N° RG : 21/00155

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 14.03.2024

à :

Me Aurélie JANEAU de la SELARL JANEAU AVOCAT, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Me Virginie DESPORT-AUVRAY, avocat au barreau de VERSAILLES,

Me Stéphane DUNIKOWSKI, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE,

Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [Y] [X]

né le [Date naissance 3] 1954 à [Localité 16] (Iran)

de nationalité Iranienne

[Adresse 8]

[Localité 13]

Madame [O] [U] épouse [X]

née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 15] (Iran)

de nationalité Iranienne

[Adresse 8]

[Localité 13]

Représentant : Me Aurélie JANEAU de la SELARL JANEAU AVOCAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 385

APPELANTS

****************

S.A. BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE (BPVF)

N° Siret : 549 800 373 (RCS Versailles)

[Adresse 9]

[Localité 7]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Virginie DESPORT-AUVRAY, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 361 - N° du dossier 23/045

S.D.C. DU [Adresse 12] A [Localité 18]

Représenté par son syndic, la société Gestion et Transaction de France GTF

N° Siret : 572 023 373 (RCS Paris)

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentant : Me Stéphane DUNIKOWSKI, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 320 - N° du dossier 21.090, substitué par Me Cynthia JOLLY, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. IMMOBILIERE GSR ET ASSOCIES

N° Siret : 977 620 210 (RCS Evry)

[Adresse 2]

[Localité 11]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189 - N° du dossier S230267, substitué par Me Vincent PËRRAUT, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 Février 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller chargé du rapport et Madame Florence MICHON, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Banque Populaire Val de France a entrepris de poursuivre le recouvrement de sa créance par la saisie immobilière du bien de ses débiteurs M [Y] [X] et Mme [O] [U] épouse [X], initiée par commandement du 3 août 2021publié le 31 août 2021 au service de la publicité foncière de [Localité 19] 2ème Bureau volume 2021 S numéro 43.

Le jugement d'orientation du 30 juin 2022 a notamment autorisé les débiteurs saisis à procéder à la vente amiable de l'immeuble saisi et fixé l'audience de rappel au 20 octobre 2022, date à laquelle un renvoi pour y parvenir a été accordé au 16 février 2023. A défaut de vente amiable régularisée à cette date, le juge de l'exécution de Nanterre, a, par jugement 16 mars 2023, ordonné la vente forcée à l'audience d'adjudication du 29 juin 2023 à 14h30.

Le jour de l'audience, M et Mme [X] ont déposé par avocat des conclusions à fins de report de l'adjudication à raison des incidents susceptibles de perturber les enchères en marge de la manifestation organisée à proximité immédiate du tribunal, à la suite du décès d'un jeune ayant sensibilisé l'opinion publique.

Statuant sur le siège, le juge de l'exécution de Nanterre a par jugement contradictoire en premier ressort du 29 juin 2023 :

Débouté M [X] et Mme [U] épouse [X] de leur demande de report de la vente forcée ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamné M [X] et Mme [U] épouse [X] aux dépens ;

Adjugé à la société Immobilière GSR et Associés, représentée par Me Vanessa Tran-Thien, moyennant le prix de trois cent trente mille Euros (330 000 euros) outre les charges dont les frais taxés, les lots n° 189, 214, 700 et 901 de l'état descriptif de division de l'immeuble sis à [Localité 14] (92), dans un ensemble immobilier [Adresse 4], précision faite que l'adresse postale est le [Adresse 10], cadastrée section I, n° de plan 127, contenance 2ha 58ares, les biens étant plus amplement désignés dans le cahier des conditions de vente déposé au greffe.

Le 30 juillet 2023, M et Mme [X] ont interjeté appel du jugement, en intimant le créancier poursuivant, l'adjudicataire et le syndicat des copropriétaires du [Adresse 12] à [Localité 18] en qualité de créancier inscrit.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 15 novembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les appelants demandent à la cour de :

déclarer leur appel recevable et fondé ;

les déclarer recevables et fondés en leurs demandes ;

y faisant droit,

réformer le jugement rendu le 29 juin 2023, en ce qu'il a :

Débouté M [X] et Mme [U] épouse [X] de leur demande de report de la vente forcée ;

Adjugé à la SAS Immobilière GSR et Associés représentée par Me Vanessa TRAN THEN moyennant le prix de 330.000 euros [le bien saisi] ;

en conséquence, et statuant à nouveau :

dire et juger que la vente forcée aurait dû être reportée en raison de la force majeure ;

annuler l'adjudication constatée à l'égard de la SAS Immobilière GSR et Associés ;

renvoyer l'audience d'adjudication devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre à une date ultérieure ;

En toute hypothèse :

condamner la Banque Populaire Val de France à payer aux époux [X] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 28 novembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Banque Populaire Val de France intimée demande à la cour de :

déclarer irrecevable l'appel formé à l'encontre de la décision d'adjudication,

confirmer en toutes ses dispositions la décision attaquée,

condamner M et Mme [X] au paiement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M et Mme [X] aux entiers dépens.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 12 décembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 12] à [Localité 18], créancier inscrit, intimé, demande à la cour au visa de l'article R.322-60 du code des procédures civiles d'exécution de :

déclarer irrecevable l'appel formé par M et Mme [X] à l'encontre du jugement [dont il s'agit],

A titre subsidiaire,

infirmer le jugement,

Statuant à nouveau,

annuler l'adjudication intervenue le 29 juin 2023 et prononcée au profit de la société Immobilière GSR et Associés,

renvoyer l'audience d'adjudication devant le juge de l'exécution de Nanterre à une date ultérieure,

En tout état de cause,

condamner M et Mme [X], ou tout succombant à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 12] à [Localité 18] la somme de 5 000 euros, et ce pour contribution aux frais irrépétibles, par application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M et Mme [X], ou tout succombant, aux entiers dépens d'appel, dont recouvrement au profit de Maître Stéphane Dunikowski, avocat aux offres de droit, et ce dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 13 décembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la SAS Immobilière GSR et Associés, adjudicataire, intimée, demande à la cour de :

déboutant M [X] et Mme [U] épouse [X] de toutes leurs demandes, fins et conclusions, confirmer le jugement dont appel,

reconventionnellement, les condamner in solidum à lui payer, outre les dépens d'appel dont distraction au profit de Maître Marion Cordier, la somme de 2 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 janvier 2024.

L'audience de plaidoirie a été fixée au 7 février 2024 et le prononcé de l'arrêt au 14 mars 2024, par mise à disposition au greffe de la cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions, pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion et ne répond par voie de conséquence aux moyens que pour autant qu'ils donnent lieu à une prétention correspondante figurant au dispositif des conclusions.

Sur la recevabilité de l'appel

Le créancier poursuivant et le créancier inscrit ont soulevé l'irrecevabilité de l'appel, en application de la règle selon laquelle le jugement d'adjudication qui ne statue pas sur une contestation, n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation pour excès de pouvoir. La Banque Populaire conclut à l'irrecevabilité du recours en ce qu'il porte sur l'adjudication. Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 12] à [Localité 18] fait valoir qu'il serait de jurisprudence constante que le fait de solliciter le report de l'audience d'adjudication ne constitue pas une contestation de sorte que le jugement qui statue sur la demande de remise et prononce l'adjudication n'est susceptible d'aucun recours hormis le pourvoi en cassation pour excès de pouvoir.

Les appelants n'ont pas répondu sur ce point.

Aux termes de l'article R 322-60 du code des procédures civiles d'exécution, « le jugement d'adjudication est notifié par le créancier poursuivant aux créanciers inscrits, à l'adjudicataire, ainsi qu'à toute personne ayant élevé une contestation tranchée par la décision.

Seul le jugement d'adjudication qui statue sur une contestation est susceptible d'appel de ce chef dans un délai de 15 jours à compter de sa notification ».

Les arrêts de la 2e chambre civile de la Cour de cassation sur lesquels le syndicat des copropriétaires fonde son moyen (8 avril 2004 pourvoi n°02-15.356 et 14 avril 2022 pourvoi n°21-11.988) sont cependant sans portée utile puisqu'ils ont été rendus sous l'empire de l'article 703 de l'ancien code de procédure civile, dans des espèces excluant l'application de la règle nouvelle posée par l'article R322-60 du code des procédures civiles d'exécution.

La solution dégagée par l'arrêt du 12 avril 2018 (pourvoi n°17-15.418) dont se prévaut également le syndicat des copropriétaires, au visa des articles 605 du code de procédure civile et R322-60 précité va à l'encontre de sa démonstration puisque la Cour de cassation décide que le juge qui prononce l'adjudication ordonnée après avoir refusé le report de la vente sur le fondement de l'article R322-28 du code des procédures civiles d'exécution ne commet pas un excès de pouvoir et qu'il ne méconnaît pas le droit à un recours effectif garanti par l'article 6§1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales contre sa décision de refus du report, puisque l'infirmation par la cour d'appel de la décision de rejet du report des enchères entraînerait l'anéantissement par voie de conséquence du jugement d'adjudication.

Il en découle que le jugement d'adjudication qui rejette une demande de remise de la vente en application de l'article R 322-28 du code des procédures civiles d'exécution comme c'est le cas en l'espèce, est susceptible d'appel de ce seul chef.

La société Banque Populaire Val de France indique à ses conclusions qu'elle a fait signifier le jugement du 29 juin 2023 à M et Mme [X] par actes du 18 août 2023, pour faire courir le délai d'appel, et le 22 août 2023 pour faire courir le délai de pourvoi en cassation. L'appel ayant été interjeté dès le 30 juillet 2023 est donc recevable mais seulement du chef de la décision qui a débouté M [X] et Mme [U] épouse [X] de leur demande de report de la vente forcée.

La prétention tendant à annuler l'adjudication constatée à l'égard de la SAS Immobilière GSR et Associés et renvoyer l'audience d'adjudication devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre à une date ultérieure est quant elle irrecevable.

Sur la demande de report de l'adjudication

L'article R322-28 du code des procédures civiles d'exécution dispose que la vente forcée ne peut être reportée que pour un cas de force majeure ou sur la demande de la commission de surendettement formée en application des articles L722-4 ou L721-7 du code de la consommation.

En l'espèce, suivant conclusions notifiées le 29 juin 2023, les époux [X] avaient demandé le report de la vente forcée pour cause de force majeure, en invoquant la 'marche blanche' et la 'marche de la révolte' devant se tenir à [Localité 17] devant la Préfecture le 29 juin 2023 à 14 h, soit à proximité immédiate et dans le même temps que l'audience d'adjudication, et ce, à la suite du décès d'un jeune de 17 ans le 27 juin 2023, et en faisant valoir que cet événement constituait un cas de force majeure, en ce qu'il allait avoir pour effet de perturber le déroulement normal des enchères en limitant l'accès au tribunal, avec un prix de vente qui risquait de s'en ressentir. Devant la cour, ils ajoutent que le magistrat tenant l'audience n'a pas tenu compte des circonstances de force majeure connues ce jour-là, un message de la présidence de la juridiction en ce sens ayant été relayé auprès de la Présidente de la commission des ventes du barreau des Hauts de Seine, pour inviter les avocats à envoyer des « conclusions de force majeure » .

La Banque Populaire Val de France, représentée par son conseil, s'était opposée au report de la vente forcée essentiellement d'une part parce que les éléments de la force majeure n'étaient selon elle pas réunis et d'autre part compte tenu des mandats détenus par des avocats d'ores et déjà présents au tribunal et du fait que les enchérisseurs éventuels avaient tout le loisir de venir au tribunal. Devant la cour, elle développe le fait que pour revêtir les caractères de la force majeure, l'événement doit être imprévisible, que la marche blanche ayant été annoncée la veille au soir de l'audience, les époux [X] ne s'étaient fondés que sur cette caractéristique, et que le caractère insurmontable faisait défaut puisque l'audience s'est tenue, et que le juge a motivé sa décision en relevant que des justiciables étaient présents dans la salle d'audience, et que les 9 enchérisseurs intéressés par cette vente avaient donné mandat à des avocats déjà présents au tribunal, que de nombreux avocats ont accédé à la salle d'audience, de sorte que les enchères ne pouvaient pas être impactées par la manifestation en cours.

La société Immobilière GSR et associés soutient que la manifestation du 29 juin n'était pas imprévisible puisqu'elle a été annoncée la veille, et que par anticipation les autorités judiciaires ont communiqué sur les audiences qui étaient maintenues sauf en cas d'émeute, qui n'ont pas eu lieu cet après-midi-là; que le critère d'irrésistibilité fait défaut puisque l'accès à l'annexe du tribunal qui accueille les audiences d'adjudication n'a pas été entravé; que la teneur du message dont se prévalent les appelants tendait seulement à avertir les avocats que le juge de l'exécution se réserverait la possibilité d'ordonner le report des enchères pour force majeure si les conditions de leur bon déroulement ne lui avaient pas paru réunies, ce qui n'a pas été le cas. Elle fait observer que la liberté des enchères, qui ne peuvent être portées que par avocat, n'a pas été affectée, que les époux [X] n'ont nullement justifié de la valorisation de leur bien pour soutenir qu'il se serait mal vendu, et que la dernière enchère à 330 000 euros ne s'est pas avérée trop faible puisque personne n'a inscrit de déclaration de surenchère dans le délai de 10 jours.

Pour constituer un cas de force majeure, l'événement doit réunir les caractères d'extériorité, d'imprévisibilité et d'irrésistibilité. En l'espèce, seul le dernier fait réellement débat.

Le message de la présidence du tribunal relatif au service des saisies immobilières, diffusé dans la matinée du 29 juin 2023 avait pour objet d'informer les avocats du principe du renvoi d'office des affaires inscrites à l'audience d'orientation, de la mise en délibéré des affaires venant sur rappel de vente amiable en invitant les avocats à conclure tout en les autorisant à déposer leurs dossiers dans les prochains jours, et de les prévenir du principe du maintien de l'audience de vente forcée, en connaissance des potentielles difficultés d'accès au tribunal, en les alertant sur le fait qu'elles feraient « le cas échéant » l'objet d'un report pour force majeure.

Dans les faits, cette audience s'est bel et bien tenue, devant un magistrat et son greffier, et en présence d'un nombre d'avocats suffisant pour recueillir les mandats des enchérisseurs intéressés, qui quant à eux, devaient nécessairement se faire représenter de sorte qu'ils n'avaient pas l'obligation de se déplacer ce jour-là. M et Mme [X] ne démontrent pas en quoi la manifestation a présenté un caractère insurmontable pour la tenue des enchères.

Le juge de l'exécution a mis en évidence la circonstance que pour la vente du bien de M et Mme [X], 9 enchérisseurs étaient représentés par avocats dûment mandatés à cet effet, ce qui suffit à écarter le critère d'irrésistibilité.

M et Mme [X] critiquent en réalité le montant du prix d'adjudication qu'ils estiment insuffisant au regard de la valeur vénale du bien. Mais ils ne produisent pas d'évaluation de ce bien, ni ne démontrent en quoi la manifestation a pu empêcher les enchères d'atteindre un montant supérieur, l'adjudicataire faisant opportunément remarquer qu'après l'adjudication pour 330 000 euros, aucune surenchère n'a été inscrite dans le délai de 10 jours suivant ces événements.

Dans ces conditions, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté M [X] et Mme [U] épouse [X] de leur demande de report de la vente forcée.

Ces derniers supporteront les dépens d'appel, mais aucune considération d'équité ne commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque au stade de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision contradictoire en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable du chef de la décision qui a débouté M [X] et Mme [U] épouse [X] de leur demande de report de la vente forcée ;

Déclare irrecevable la prétention tendant à annuler l'adjudication constatée à l'égard de la SAS Immobilière GSR et Associés et renvoyer l'audience d'adjudication devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Nanterre à une date ultérieure ;

CONFIRME la décision entreprise en toutes ses dispositions susceptibles d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M [X] et Mme [U] épouse [X] aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions posées par l'article 699 alinéa 2 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre civile 1-6
Numéro d'arrêt : 23/05736
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;23.05736 ?
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