La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/03/2024 | FRANCE | N°22/02106

France | France, Cour d'appel de Versailles, Chambre sociale 4-5, 14 mars 2024, 22/02106


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



Chambre sociale 4-5



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 14 MARS 2024



N° RG 22/02106

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJKY



AFFAIRE :



[J] [L] épouse [H]





C/

S.A.S. ATOS INTERNATIONAL











Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Section : E

RG : 22/00049



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Agnès LASKAR



SELARL KÆM'S AVOCATS







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-5

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 14 MARS 2024

N° RG 22/02106

N° Portalis DBV3-V-B7G-VJKY

AFFAIRE :

[J] [L] épouse [H]

C/

S.A.S. ATOS INTERNATIONAL

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 Juin 2022 par le Conseil de Prud'hommes Formation paritaire d'ARGENTEUIL

N° Section : E

N° RG : 22/00049

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Agnès LASKAR

SELARL KÆM'S AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATORZE MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [J] [L] épouse [H]

née le 26 Avril 1964 à [Localité 5]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 1]/FRANCE

Représentant : Me Agnès LASKAR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0710

APPELANTE

****************

S.A.S. ATOS INTERNATIONAL

N° SIRET : 412 19 0 9 77

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me Blandine DAVID de la SELARL KÆM'S AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R110

Représentant : Me Martin PERRINEL de la CMS FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : NAN 1701

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Janvier 2024 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Monsieur Nabil LAKHTIB,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [J] [U] [L] a été engagée par la société Atos International suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 3 juin 2013 en qualité de « project manager officer », position 2.2, coefficient 130, avec le statut de cadre, avec reprise d'ancienneté au 24 juin 1985.

Mme [L] a exercé plusieurs mandats :

- déléguée du personnel et membre suppléante au comité d'entreprise d'Atos International à compter d'octobre 2015,

- déléguée syndicale à compter de novembre 2015.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs conseils et des sociétés de conseils dite Syntec.

Le 23 juin 2017 , Mme [L] a saisi le conseil de prud'hommes d'Argenteuil afin d'obtenir la condamnation de la société Atos international au paiement de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, pour discrimination syndicale et pour préjudice moral.

Par lettre du 12 février 2018, Mme [L] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 5 mars 2018.

Par décision du 25 mai 2018, l'inspectrice du travail a autorisé le licenciement de Mme [L].

Par lettre du 30 mai 2018, l'employeur a licencié la salariée pour faute grave.

Mme [L] a saisi Mme la ministre du travail d'un recours hiérarchique en contestation de l'autorisation de licenciement de l'inspectrice du travail, qui a été rejeté à défaut de réponse dans le délai de quatre mois.

Par décision explicite de rejet du 19 mars 2019, Mme la ministre du travail a rejeté le recours hiérarchique de Mme [L] et confirmé la décision de l'inspectrice du travail.

Le 28 mai 2019, Mme [L] a saisi le conseil de prud'hommes d'Argenteuil d'une demande en contestation de son licenciement.

Les deux instances ont fait l'objet d'une jonction.

Par décision du 12 novembre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a confirmé le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui avait rejeté les requêtes de Mme [L] en contestation de l'autorisation de licenciement de l'inspectrice du travail et des décisions de Mme la ministre du travail.

Par jugement en date du 21 juin 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- débouté Mme [L] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société Atos international de sa demande reconventionnelle fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les dépens à la charge de Mme [L].

Le 4 juillet 2022, Mme [L] a interjeté appel à l'encontre de cette décision.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 31 mars 2023, Mme [L] demande à la cour de réformer le jugement et statuant à nouveau, de :

- condamner la société Atos international à lui payer les sommes suivantes:

* 100 000 euros au titre des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 80 000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,

* 50 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral,

- ordonner le versement des intérêts au taux légal sur les salaires et sommes afférentes sollicités sur le fondement des dispositions de l'article 1231-6 du code civil à compter de la saisine de la juridiction et pour les dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1231-7 du code civil à compter du jugement à intervenir,

- ordonner la capitalisation des intérêts,

- condamner le défendeur aux éventuels dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 14 janvier 2024, la société Atos international demande à la cour de  confirmer le jugement en l'intégralité de ses dispositions et, y ajoutant, de condamner Mme [L] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de l'instruction est intervenue le 16 janvier 2024.

MOTIVATION

Sur la discrimination syndicale

La salariée soutient qu'elle a été victime de discrimination syndicale constituée par :

- une exclusion et un isolement professionnel, depuis son élection en octobre 2015,

- une entrave à l'exercice de ses mandats.

L'employeur fait valoir d'une part, que l'argumentation se heurte au principe de séparation des pouvoirs et à l'autorité de chose jugée attachée aux décisions des juridictions administratives ayant statué sur l'autorisation de licenciement de la salariée, d'autre part, qu'elle est infondée.

Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, 'aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français'.

En application de l'article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Il est constant que la salariée a exercé plusieurs mandats syndicaux.

Le juge judiciaire est compétent pour statuer sur une demande en réparation du préjudice subi en raison d'un harcèlement dont a été victime la salariée protégée, ainsi que pour apprécier les éventuelles fautes commises par l'employeur pendant la période antérieure au licenciement, comme l'existence d'une discrimination syndicale. Le moyen tiré de l'incompétence de la cour en raison du principe de la séparation des pouvoirs doit être, par conséquent, rejeté.

S'agissant du fait d'exclusion et d'isolement professionnel, la salariée déclare que concomitamment à ses premiers mandats syndicaux en octobre 2015, son activité lui a été retirée et qu'elle s'est retrouvée sans poste, l'équipe risques dont elle faisait partie étant démantelée, des invitations à des réunions sur la gouvernance des risques étant annulées successivement, l'application de gestion de risques 'Early Warnings' relative à 3 500 contrats permettant de faire du reporting lui étant retirée tout en restant au service informatique interne. Elle indique avoir usé de son droit d'alerte en mars 2016 sur l'absence de poste de toute l'ancienne équipe, ignorant qu'elle pouvait s'inclure dans ce droit d'alerte, puis avoir le 24 mars 2017 écrit à son employeur pour l'alerter sur son propre isolement et son absence de poste. Elle produit un compte-rendu d'entretien du 6 avril 2017 de M. [N], conseiller du salarié pour le département du Val d'Oise, avec Mme [F], responsable des ressources humaines, dans lequel la salariée dénonce l'absence de responsable hiérarchique et l'absence de poste, la responsable des ressources humaines s'engageant à lui proposer un poste et un rattachement hiérarchique à un responsable. Elle verse également aux débats un compte-rendu d'entretien du 15 mai 2018 de M. [N], avec Mme [A], inspectrice du travail, dans lequel la salariée dénonce le fait qu'elle ne pouvait plus travailler sur l'application de reporting et qu'à partir du moment où elle a usé de son droit d'alerte, elle n'avait plus d'activité. La salariée produit, notamment, l'attestation de M. [R], 'risk manager', confirmant le démantèlement de l'équipe risques depuis novembre 2015, l'alerte en mars 2016, l'implication du service des ressources humaines, le fait que l'employeur ait cherché à isoler la salariée depuis ses mandats syndicaux et n'ait pas réglé la situation depuis. Ainsi, la salariée présente des éléments de fait au titre de son exclusion et de son isolement professionnel.

S'agissant du fait d'entrave à l'exercice syndical, la salariée soutient que la clé du local syndical ne lui a été remise que le 24 février 2017, qu'elle a essuyé un refus de participer à une réunion de délégués du personnel par 'conference call' alors que cette option existe et que d'autres syndicats ont pu en bénéficier, qu'elle s'est vu refuser le bénéfice d'un interprète dont elle avait besoin dans le cadre d'un droit d'alerte en 2016 concernant l'un de ses collègues dont le responsable parlait anglais et ne parlait pas français, elle-même maîtrisant mal l'anglais. Elle ajoute que l'employeur a régulièrement exercé une discrimination syndicale, M. [Y] étant en situation d'intercontrat depuis 2002, M. [M] ayant obtenu des dommages et intérêts pour discrimination syndicale. Cependant, la salariée ne vise pas de pièces étayant ces éléments de sorte qu'ils ne peuvent être retenus et doivent être écartés.

Il s'en déduit que la salariée présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale directe ou indirecte, au titre de son exclusion et de son isolement professionnel, de sorte qu'il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

L'employeur indique que la salariée a été reçue à de multiples reprises par le service des ressources humaines qui a proposé de l'accompagner dans le cadre du développement de ses activités professionnelles. Il ajoute que la salariée a perdu son responsable M. [H], licencié en août 2015 pour faute grave, et que la 'business line' à laquelle elle appartenait a fait l'objet d'une réorganisation. Il ressort en effet du dossier que M. [H], cadre dirigeant, partenaire dans le cadre d'un pacte civil de solidarité avec la salariée, devenu son époux depuis, a été licencié pour faute grave le 6 août 2015, l'employeur lui reprochant d'avoir fait transférer Mme [L] dans son département puis de l'avoir favorisée en lui octroyant des avantages, la cour d'appel de Versailles ayant cependant le 5 juillet 2018 confirmé le jugement du conseil de prud'hommes qui a considéré que le licenciement de M. [H] n'était pas fondé.

L'employeur relève que le droit d'alerte exercé par la salariée concernait trois salariés membres du service dont elle-même faisait partie, mais qu'elle ne s'est pas incluse dans ce droit d'alerte alors que si elle s'était considérée dans une situation de discrimination syndicale, elle n'aurait pas manqué de dénoncer sa situation. Il produit l'attestation de Mme [X], responsable des ressources humaines du 11 décembre 2017, de Mme [Z], directrice des ressources humaines du 15 décembre 2017, indiquant de façon concordante que la salariée ne s'était pas incluse dans la liste des salariés concernés par le droit d'alerte et considérait qu'elle n'était pas concernée, Mme [X] ayant organisé un rendez vous le 9 juin 2016 avec Mme [B] en charge de la mobilité interne pour faire le point sur sa situation.

L'employeur indique enfin que la salariée s'est vu proposer à plusieurs reprises un poste de 'project manager officer' de projets marketing au sein de la division 'B&PS' sachant que jusqu'alors elle occupait un poste de 'project manager officer' au sein de l'équipe 'Risk & project excellence' et que ce nouveau poste ne présentait pas de modification du lieu de travail, des horaires de travail, de la qualification de la salariée, de sa rémunération. Il produit une lettre du 4 septembre 2017 avec une proposition de prise de fonction au 14 septembre 2017 à ce poste, ainsi que des échanges avec la salariée montrant que cette dernière n'était pas intéressée par ce poste : lettres du 11 septembre 2017, du 21 septembre 2017, du 7 octobre 2019, outre une fiche de poste confirmant que le nouveau poste n'impliquait pas de changement du contrat de travail.

Au vu de ces éléments, le fait que la salariée ait eu une activité professionnelle réduite à compter de fin 2015 s'explique par la réorganisation qui a touché son service et donc également trois autres salariés qui n'exerçaient pas de mandat syndical et qui a fait suite au licenciement de son partenaire M. [H]. En outre, la salariée ne s'étant pas incluse dans son droit d'alerte de mars 2016 au profit des trois autres salariés de son service, elle ne se considérait elle-même pas sans travail et dans une situation d'isolement. Enfin, postérieurement à l'alerte de la salariée du 24 mars 2017 , l'employeur lui a proposé un poste avec un rattachement hiérarchique. Il s'en déduit que les décisions de l'employeur sont justifiées par des éléments étrangers à toute discrimination.

Par conséquent, il n'est pas établi que la salariée ait subi une discrimination syndicale. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, 'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel'.

En application de l'article L.1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L.1152-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée invoque les faits suivants :

- l'absence de fourniture de travail, une mise à l'écart avec absence d'entretien d'évaluation, absence de responsable hiérarchique, absence d'objectif,

- la dégradation de son état de santé.

S'agissant de l'absence de fourniture de travail, la salariée présente les mêmes faits que ceux présentés à l'appui de sa demande au titre de la discrimination.

S'agissant de la dégradation de son état de santé, la salariée produit la copie de son dossier médical à la médecine du travail faisant état lors de la visite du 27 juillet 2015 d'un état d'anxiété important et d'éléments de dépression, de relations difficiles avec le service des ressources humaines, lors de la visite du 22 mai 2017, du fait qu'elle est stressée en l'absence de poste, qu'elle n'a pas de supérieur hiérarchique, lors de la visite du 30 mai 2017 qu'elle a maigri et qu'elle présente des troubles du sommeil. Elle verse également aux débats deux ordonnances de traitements médicamenteux des 3 février 2016 et 7 juin 2017 du docteur [E], médecin généraliste, ainsi qu'un arrêt de travail du 27 septembre 2017 au 15 octobre 2017.

Il s'en déduit que la salariée présente des éléments de fait, l'absence de fourniture de travail et une mise à l'écart progressive, y compris la dégradation de son état de santé, qui pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

L'employeur fait valoir que dans un premier temps, la salariée s'est déclarée suffisamment occupée et a refusé que l'on s'intéresse à son niveau d'activité professionnelle, les services des ressources humaines l'ayant sollicitée à de multiples reprises, puis que dans un deuxième temps, elle s'est vu proposer à de multiples reprises, un poste de 'project manager officer' correspondant à son profil et à ses compétences et au poste qu'elle occupait en dernier lieu, cette affectation constituant une simple modification de ses conditions de travail, sans modification de son lieu de travail, de ses horaires de travail, de sa qualification et de sa rémunération. Il est ainsi établi que la salariée qui a alerté sur la réduction d'activité pour les trois autres salariés de son service en mars 2016, ne s'est pas plainte de sa situation professionnelle et a refusé un accompagnement de la part du service des ressources humaines. Il est également avéré que l'employeur a, postérieurement à l'alerte du 24 mars 2017 de la salariée, proposé à cette dernière et à plusieurs reprises un poste correspondant aux compétences et à l'expérience de la salariée et n'impliquant qu'une simple modification de ses conditions de travail que celle-ci a refusé. Ainsi, l'employeur justifie que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Au surplus, le lien de causalité n'est pas établi entre la dégradation de l'état de santé de la salariée et ses conditions de travail.

Au vu de ces éléments, la salariée n'a pas subi de faits de harcèlement moral.

Au surplus, l'employeur n'a pas fait preuve de déloyauté dans l'exécution du contrat de travail.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Sur le préjudice moral

La salariée sollicite la somme de 50 000 euros pour préjudice moral. Elle indique que l'employeur l'a maintenue dans une situation professionnelle depuis deux ans qui a eu des conséquences sur sa santé physique et son équilibre psychologique.

Elle soutient avoir été licenciée pour faute après avoir demandé des explications sur un poste qui lui a été soudainement proposé, poste inexistant et qui ne correspondait pas à ses aptitudes.

L'employeur fait valoir que d'une part, la salariée n'a fait l'objet d'aucune discrimination, que d'autre part, il n'a pas manqué à son obligation de lui fournir du travail, que de surcroît cette demande fait double emploi avec les précédentes, le préjudice allégué n'étant pas justifié.

En l'espèce, la salariée invoque un licenciement injustifié, or, le juge judiciaire ne peut, lorsqu'une autorisation de licenciement a été accordée et est devenue définitive, apprécier le caractère réel et sérieux du licenciement.

En outre, il résulte des développements qui précèdent et des éléments portés à l'appréciation de la cour que la salariée n'a pas subi de harcèlement moral ou de discrimination, que l'employeur n'a pas manqué à son obligation de fournir du travail à la salariée, la salariée n'ayant alerté l'employeur en mars 2016 que de la situation des trois autres salariés de son service, puis l'employeur ayant, suite à l'alerte du 24 mars 2017 de la salariée, proposé un poste de travail à la salariée que cette dernière a refusé.

Au surplus, le préjudice moral allégué n'est pas caractérisé, le lien n'étant pas établi entre la dégradation de l'état de santé de la salariée et ses conditions de travail.

Par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [L] succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Et y ajoutant :

Condamne Mme [J] [L] épouse [H] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Thierry CABALE, Président, et par Monsieur Nabil LAKHTIB, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : Chambre sociale 4-5
Numéro d'arrêt : 22/02106
Date de la décision : 14/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-14;22.02106 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award