La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2023 | FRANCE | N°22/01740

France | France, Cour d'appel de Versailles, 5e chambre, 06 juillet 2023, 22/01740


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A



5e Chambre











ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 06 JUILLET 2023



N° RG 22/01740 -

N° Portalis

DBV3-V-B7G-VHJO



AFFAIRE :



S.A.S.U. [5]

[5]





C/

CPAM DU VAL-D'OISE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mai 2022 par le Pole social du TJ de PONTOISE

N° RG : 18/01871





Copies

exécutoires délivrées à :



Me Florence GASTINEAU

Me Mylène BARRERE





Copies certifiées conformes délivrées à :



S.A.S.U. [5]



CPAM DU VAL-D'OISE







le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 89A

5e Chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JUILLET 2023

N° RG 22/01740 -

N° Portalis

DBV3-V-B7G-VHJO

AFFAIRE :

S.A.S.U. [5]

[5]

C/

CPAM DU VAL-D'OISE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Mai 2022 par le Pole social du TJ de PONTOISE

N° RG : 18/01871

Copies exécutoires délivrées à :

Me Florence GASTINEAU

Me Mylène BARRERE

Copies certifiées conformes délivrées à :

S.A.S.U. [5]

CPAM DU VAL-D'OISE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant , fixé au 01 juin 2023, puis prorogé au 06 juillet 2023, les parties en ayant été avisées dans l'affaire entre :

S.A.S.U. [5]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Florence GASTINEAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0084 - N° du dossier [R] substituée par Me Maria BEKMEZCIOGLU, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

CPAM DU VAL-D'OISE

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Mylène BARRERE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D2104

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller chargé d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvia LE FISCHER, Présidente,

Madame Marie-Bénédicte JACQUET, Conseiller,

Madame Rose-May SPAZZOLA, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Juliette DUPONT,

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 22 mai 2017, la société [5] (la société) a déclaré, auprès de la caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise (la caisse), un accident survenu le 19 mai 2017 au préjudice d'une de ses salariés, Mme [J] [R] (la salariée), agent de service, dans les circonstances suivantes :

'Date : 19/05/2017 Heure 9H30

Activité de la victime lors de l'accident :d'après ses dires, elle aurait glissé dans les escaliers

Nature de l'accident : chute dans les escaliers

Siège des lésions : membres inférieurs, autres parties précisées non classées ailleurs

Nature des lésions : douleur

Horaire de travail de la victime le jour de l'accident : de 9h00 à 15h00.'

Le certificat médical initial du 23 mai 2017 fait état de 'douleurs du bassin- coude droit-épaule droite- genou gauche- pied gauche' et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 31 mai 2017.

La caisse a informé la société d'un délai complémentaire d'instruction le 26 juin 2017, puis de la clôture de l'instruction et de la possibilité de consulter le dossier le 1er août 2017.

Le 18 août 2017, la caisse a pris en charge l'accident déclaré au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Le 12 septembre 2017, la caisse a informé la société de la prise en charge d'une nouvelle lésion imputable à l'accident du travail au vu du certificat médical en date du 31 mai 2017 faisant état de 'douleurs du bassin, du coude droit, de l'épaule droite, de genou gauche, pied gauche et droit'.

Par courrier du 17 octobre 2017, la société a saisi la commission de recours amiable en contestation du caractère professionnel de l'accident de la salariée ainsi que la durée des arrêts de travail qui lui ont été rattachés.

Le 4 décembre 2017, la société a saisi d'un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pontoise, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise, qui par jugement contradictoire en date du 2 mai 2022, a :

- jugé opposables à la société l'accident de travail dont la salariée a été victime le 19 mai 2017 ainsi que la nouvelle lésion du 31 mai 2017, et par voie de conséquence les arrêts de travail et les soins prescrits qui ont été pris en charge par la caisse au titre du risque professionnel et ce jusqu'au 31 mars 2019, date de consolidation de l'état de la victime ;

- condamné la société aux dépens ;

- condamné la société à verser 500 euros à la caisse au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 1er juin 2022, la société a interjeté appel et les parties ont été convoquées à l'audience du 11 avril 2023.

Par conclusions écrites, déposées et soutenues à l'audience, auxquelles il est renvoyé pour l'exposé des moyens, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour :

- de déclarer son recours recevable et bien fondé ;

En conséquence,

- de réformer la décision entreprise ;

A/ A titre principal, sur les manquements de la caisse à son obligation d'information :

- de déclarer, dans le cadre des rapports caisse/employeur, la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'accident déclaré par la salariée le 19 mai 2017 inopposable à l'employeur, la caisse ayant manqué au respect du contradictoire ;

B/ A titre subsidiaire, sur la matérialité du fait accidentel :

- de déclarer, dans le cadre des rapports caisse/employeur, la décision prise par la caisse de reconnaître le caractère professionnel de l'accident déclaré par la salariée le 19 mai 2017 inopposable à l'employeur, la matérialité du fait accidentel n'étant pas justifiée ;

C/ A titre plus subsidiaire encore, sur la durée des arrêts de travail :

- d'ordonner la mise en 'uvre d'une expertise médicale judiciaire afin de :

Déterminer les lésions directement imputables à l'accident déclaré par la salariée,

Déterminer l'existence d'une éventuelle pathologie antérieure ou indépendante,

Déterminer la durée d'arrêts de travail en relation directe avec l'accident en dehors de tout état antérieur ou indépendant,

Déterminer la date de consolidation des lésions en relation directe avec l'accident en dehors de tout état antérieur ou indépendant,

Faire injonction au service médical de la caisse de communiquer à l'expert l'ensemble des pièces médicales en sa possession ainsi qu'au médecin conseil de la société, le docteur [G].

La société expose qu'elle a reçu, après la décision de la caisse, les pièces en copie de façon incomplète et qu'elle n'a pas pu faire valoir ses observations, la caisse n'ayant pas respecté le principe du contradictoire.

Elle conteste la matérialité des faits, en l'absence de tout témoin, n'ayant été avertie de l'accident qu'en toute fin de service et le certificat médical initial ayant été établi plus de quatre jours après les faits prétendus.

Elle ajoute que la salariée a accepté une expertise et que l'expert a constaté des états antérieurs essentiellement dégénératifs. En présence d'un litige d'ordre médical, elle sollicite une expertise.

Par conclusions écrites, déposées et soutenues auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- de condamner la société aux entiers dépens ;

- de débouter la société de toutes ses demandes.

La caisse affirme qu'elle a respecté les obligations d'information qui lui incombe et qu'elle n'est pas obligée d'envoyer une copie du dossier à l'employeur.

Elle précise que les blessures de la salariée se sont avérées invalidantes au fur et à mesure de la journée, qu'on ne peut reprocher à un salarié de n'avoir pas cessé immédiatement son travail qu'elle exerce seule. Elle invoque la présomption d'imputabilité des lésions au travail en l'absence de cause étrangère ou d'un état antérieur évoluant pour son propre compte.

Concernant les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les parties sollicitent chacune l'octroi d'une somme de 2 000 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le respect du contradictoire :

L'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que, dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

En l'espèce, par courrier du 1er août 2017, réceptionné par la société le 3 août 2017 selon l'avis de réception de ce document, la caisse a informé l'employeur que l'instruction du dossier était maintenant terminée et que préalablement à la prise de décision devant intervenir le 18 août 2017, il avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier. La société a donc disposé d'un délai de dix jours francs au moins pour consulter le dossier.

Le 11 août 2017, la société a demandé à la caisse que les pièces du dossier lui soient adressées par courrier et la caisse a procédé, par courrier du 5 septembre 2017, à l'envoi des pièces, à savoir : déclaration d'accident du travail, certificats médicaux, questionnaires.

La caisse justifie ainsi qu'elle a mis à la disposition de la société l'ensemble des pièces du dossier.

La société n'ayant pas renvoyé le bordereau signé comme le demandait la caisse dans son courrier du 5 septembre 2017, elle ne peut prétendre que le dossier soumis à consultation était incomplet.

L'information a été donnée par la caisse à la société de la fin de la procédure d'instruction et de la possibilité de consulter le dossier pendant un délai de dix jours à compter de la date d'envoi de cet avis, de sorte que la société a été mise en mesure de prendre connaissance des éléments susceptibles de lui faire grief et de faire valoir ses observations avant la décision, peu important la communication de la copie des pièces du dossier.

La caisse a, dès lors, respecté son obligation d'information.

Sur la matérialité de l'accident :

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose que, est considéré comme accident, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

En l'espèce, il ressort de la déclaration d'accident du travail que l'employeur a été informé des faits invoqués par la salariée à 15 heures, à la fin de son service alors que l'accident se serait déroulé à 9h30. La déclaration fait mention d'une chute dans les escaliers et de douleurs dans les membres inférieurs.

L'employeur a été informé rapidement de l'accident, dès la fin des heures de travail de la salariée, à laquelle on ne peut reprocher d'avoir poursuivi ses activités professionnelles, en l'absence de fracture ou d'impossibilité totale de travail.

L'absence de témoin s'explique également par la nature du travail de la salariée qui effectuait des ménages dans les escaliers d'un immeuble, qui est son lieu de travail habituel.

Le 19 mai 2017 étant un vendredi, le certificat médical initial établi le 23 mai 2017 n'est pas particulièrement tardif compte tenu des difficultés à obtenir un rendez-vous chez son médecin traitant. Au demeurant, les constatations réalisées par le médecin sont cohérentes avec l'accident invoqué.

La société ne justifie pas que la salariée a travaillé le 22 mai 2017.

Il est donc établi par la caisse l'existence d'un fait accidentel, survenu aux temps et au lieu du travail, et dont il est résulté une lésion.

En conséquence, c'est à juste titre que la caisse a pris en charge l'accident déclaré par la salariée au titre de la législation sur les risques professionnels.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré opposable à la société l'accident du travail dont la salariée a été victime le 19 mai 2017.

Sur la demande d'inopposabilité de l'ensemble des arrêts de travail :

Il résulte des articles L. 411-1 du code de la sécurité sociale et 1353 du code civil que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédent soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et qu'il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

En l'espèce, il ressort de la déclaration d'accident du travail que la victime est tombée dans les escaliers le 19 mai 2017.

Les attestations de paiement des indemnités journalières démontrent que la salariée a été arrêtée de façon ininterrompue du 24 mai 2017 au 31 mars 2019, date de consolidation de l'état de la victime, avec séquelle non indemnisable.

Par ailleurs, le certificat médical initial et les certificats médicaux postérieurs, et notamment celui du 31 mai 2017 qui constate l'existence de nouvelles lésions font mention de plusieurs localisations de douleurs (bassin, coude droit, épaule droite, genou gauche, pied gauche et droit).

Si le certificat médical du 31 mai 2017 fait état d'une douleur supplémentaire au pied droit, la déclaration d'accident du travail mentionne également, de façon générale, des douleurs au niveau des membres inférieurs.

La présomption d'imputabilité a donc vocation à s'appliquer jusqu'à la date de consolidation de l'état de santé de l'intéressée.

De son côté, la société produit l'avis technique du 1er mars 2022 du docteur [G], qui écrit : 'Aucune lésion spécifique retrouvée sur les divers certificats qui soit en relation avec un fait traumatique.

Un bilan I.R.M. exhaustif est réalisé en juillet 2018 qui ne met en évidence aucune lésion traumatique mais uniquement des phénomènes dégénératifs au niveau des membres inférieurs du rachis et de l'épaule droite.

Il faut rappeler d'ailleurs un antécédent d'accident de travail le 30 juin 2016 ayant généré des douleurs au niveau des deux membres inférieurs, du bassin, de la hanche et des genoux, qui avait entraîné un arrêt de travail de près de trois mois sans qu'il soit précisé de séquelles.

L'accident du 19 mai 2017 peut uniquement donc avoir entraîné des phénomènes douloureux sans aucune lésion spécifique, et ne peut justifier d'un arrêt de travail de plus de deux mois.

Les arrêts de travail ultérieurs sont en relation uniquement avec l'évolution naturelle des phénomènes dégénératifs polyfocaux et sont donc liés à une cause totalement étrangère à l'activité professionnelle. '

Les considérations du médecin mandaté par la société, reposant, pour partie, sur de simples suppositions, ne sont pas objectivement étayées et ne sont pas de nature à renverser la présomption d'imputabilité. Par ailleurs, cet avis médical n'est pas suffisamment circonstancié pour justifier la mise en oeuvre d'une expertise.

En conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions et la demande d'expertise présentée par la société sera rejetée.

Sur les dépens et les demandes accessoires :

La société, qui succombe à l'instance, est condamnée aux dépens d'appel et condamnée à payer à la caisse la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle sera corrélativement déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Rejette la demande d'expertise ;

Condamne la société [5] aux dépens d'appel ;

Condamne la société [5] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-d'Oise la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la société [5] de sa demande d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame LE FISCHER Sylvia, Présidente, et par Monsieur GODIOT Mickael, Greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER, La PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 22/01740
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.01740 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award