COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 48C
1re chambre 3e section
ARRET N°
REPUTE CONTRADICTOIRE
DU 30 JUIN 2023
N° RG 22/00259 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6J5
AFFAIRE :
[X] [S]
C/
S.A. [16]
...
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 23 Novembre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de PONTOISE
N° Chambre :
N° Section : SUREND
N° RG : 11-20-2181
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Toutes les parties
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Madame [X] [S]
[Adresse 3]
[Localité 23]
assistée de Me François AJE de l'AARPI ALL PARTNERS-AJE LENGLEN LAWYERS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 413
APPELANTE - comparante
****************
S.A. [16]
[Adresse 15]
[Localité 11]
TRESORERIE [Localité 23]
[Adresse 1]
[Localité 23]
Société [17]
[Adresse 14]
[Localité 9]
S.A.S. [21]
[Adresse 5]
[Localité 13]
représentée par Me Ilhem SAKHRI, plaidant/postulant, avocat au barreau de PONTOISE, substituant Me Gaëlle LE DEUN de la SELARL LE NAIR-BOUYER ET ASSOCIES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 33
Société [20] C/O [22]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 6]
SIP [Localité 12] CENTRE
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 12]
S.A. [18]
Chez [19]
[Adresse 2]
[Localité 10]
INTIMES - non comparants, non représentés
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 Mai 2023, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Lorraine DIGOT, conseillère chargée de l'instruction de l'affaire et du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle CHESNOT, présidente,
Madame Lorraine DIGOT, conseillère,
Madame Michèle LAURET, conseillère,
Greffière, faisant fonction : Madame Virginie DE OLIVEIRA,
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 15 septembre 2020, Mme [S] a saisi la commission de surendettement des particuliers du Val-d'Oise, ci-après la commission, d'une demande de traitement de sa situation de surendettement, qui a été déclarée recevable le 3 novembre 2020.
La commission lui a notifié, ainsi qu'à ses créanciers, sa décision du 20 octobre 2020 d'orienter son dossier vers une mesure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire et, avec l'accord de la débitrice, a transmis le dossier au tribunal judiciaire.
Suivant jugement du 13 avril 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise a :
- ordonné l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire au bénéfice de Mme [S],
- désigné la SCP [B] en la personne de M. [K] [B] en qualité de mandataire judiciaire avec pour mission de procéder à la publicité du jugement au BODACC, recevoir les déclarations de créances et adresser un état des créances au greffe, dresser un bilan économique et social de la situation de la débitrice et, le cas échéant, une proposition de plan.
Me [B] a déposé son rapport le 4 octobre 2021.
Suivant jugement rendu le 23 novembre 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, déchu Mme [S] du bénéfice de la procédure de surendettement.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postée par son conseil le 22 décembre 2021, Mme [S] a interjeté appel de ce jugement, notifié par lettre recommandée dont l'avis de réception a été signé le 11 décembre 2021.
Après un renvoi ordonné par la cour pour un échange des conclusions et pièces, toutes les parties ont été convoquées par le greffe à l'audience du 26 mai 2023, par lettres recommandées avec demandes d'avis de réception postées le 23 janvier 2023.
* * *
A l'audience devant la cour,
Mme [S] est assistée par son conseil qui, développant oralement ses conclusions écrites déposées à l'audience et visées par Mme la greffière, demande à la cour de :
- dire Mme [S] recevable et bien fondée en ses demandes,
- ordonner l'ouverture et le maintien d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement,
- dire que sa situation est irrémédiablement compromise,
- ordonner l'effacement de ses dettes par une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.
La cour renvoie à ces conclusions pour le détail des moyens et arguments. En substance, le conseil de l'appelante expose et fait valoir que Mme [S] élève seule ses deux enfants âgés de 10 et 16 ans, qu'elle est employée en qualité de conseillère au Pôle emploi avec un revenu mensuel moyen de 2 161,66 euros auquel s'ajoutent les prestations servies par la caisse d'allocations familiales à hauteur de 368,81 euros par mois, qu'elle est propriétaire d'un logement de 127m2 sis à [Localité 23] et pour l'acquisition duquel elle a souscrit un prêt d'un montant de 140 000 euros le 2 juillet 2013, que le montant de l'échéance mensuelle est de 677 euros outre 37 euros au titre de l'assurance, que cet appartement devait servir de logement familial, que cependant, pour des raisons de sécurité, elle a préféré déménager avec ses enfants et le mettre en location, qu'elle a procédé à la division de cet appartement en deux logements distincts, que le premier logement est loué 806 euros par mois et le second 1 300 euros par mois provisions sur charges comprises, qu'elle-même est locataire d'un logement sis à [Localité 23] dont le loyer mensuel est de 748 euros, que le montant de ses charges fixes et variables est de 3 426,50 euros par an, que son reste à vivre est donc de 647,50 euros, que si la dette auprès de la société [18] a été réglée et si Mme [S] a repris le paiement des charges de copropriété, elle reste devoir la somme de 92 882,74 euros à ses créanciers outre l'emprunt immobilier, que le premier juge a retenu à tort que Mme [S] avait dissimulé la division de son appartement en deux logements loués séparément alors que cette information avait été portée à la connaissance de la commission, que lors de l'audience devant le premier juge, Me [B] a indiqué que Mme [S] avait des difficultés à régler les charges de copropriété alors qu'elle percevait les loyers affirmant, à tort, qu'elle ne déclarait pas ses loyers et qu'elle versait des sommes importantes à son fils sans autorisation du juge, qu'il ressort du rapport de Me [B] que les loyers ont bien été déclarés, que les virements sur le compte de son fils mineur ont pour seul objet d'éviter que les sommes ne soient saisies étant observé que ces sommes sont ensuite utilisées par Mme [S] pour régler les charges, qu'il ne s'agit en rien d'une tentative de dissimulation de ressources.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Roussillon [Adresse 8] à [Localité 23] pris en la personne de son syndic est représenté par son conseil qui, développant oralement ses conclusions écrites déposées à l'audience et visées par Mme la greffière, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et condamner Mme [S] aux dépens d'appel.
La cour renvoie à ces conclusions pour le détail des moyens et arguments. En substance, Me [N] expose et fait valoir que, suivant jugement du 19 décembre 2019, le tribunal de grande instance de Pontoise a condamné Mme [S] à payer au syndicat de copropriétaires les sommes de 34 996,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 novembre 2015 sur la somme de 8 754,58 euros et du 14 juin 2019 sur le surplus au titre des charges impayées, celles de 19 euros au titre des frais, 3 500 euros au titre de dommages-intérêts et de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, que le syndicat de copropriétaires a déclaré sa créance entre les mains de Me [B] pour la somme totale de 56 865,68 euros en tenant compte des paiements intervenus mais aussi des charges postérieures au jugement non réglées, que Mme [S] n'a pas sollicité l'accord du syndicat de copropriétaires avant de transformer son logement en plusieurs appartements, que cette division lui a permis de percevoir un second loyer qui n'a pas été déclaré, que c'est uniquement dans le cadre de l'établissement de son rapport économique et social que le liquidateur a eu connaissance de cette information, que de surcroît, Mme [S] reconnaît avoir effectué des virements au profit de son fils mineur d'un montant important ce qui s'analyse en un détournement d'actifs, que la créance d'[18] a été réglée au mépris des droits des autres créanciers, que, dans ces conditions, la déchéance est justifiée.
Aucun des autres intimés, régulièrement touchés par les courriers de convocation, ne comparaît ou n'est représenté.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Aux termes de l'article L. 761-1 du code de la consommation, est déchue du bénéfice des dispositions du livre septième relatif au traitement des situations de surendettement :
1° Toute personne qui a sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts;
2° Toute personne qui a détourné ou dissimulé ou tenté de détourner ou de dissimuler tout ou partie de ses biens ;
3° Toute personne qui, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, a aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou a procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel ou pendant l'exécution du plan ou des mesures prévues à l'article L. 733-1 ou à l'article L. 733-4.
Les cas de déchéance limitativement énumérés par cet article sont relatifs à des comportements déloyaux manifestés au cours de la procédure.
L'article L. 712-3 prévoit que cette déchéance est prononcée par la commission, par une décision susceptible de recours, ou par le juge des contentieux de la protection à l'occasion des recours exercés devant lui ainsi que dans le cadre de la procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire.
Au cas d'espèce, le premier juge a retenu la division de l'appartement en deux logements distincts loués séparément et, en conséquence, la perception d'un second loyer non déclaré.
Toutefois, quand bien même cette opération de division serait contraire au règlement de copropriété, elle ne relève pas des cas de déchéance précités, ne pouvant être définie comme un acte de disposition. Par ailleurs, le liquidateur relève, sans que la preuve contraire ne soit rapportée, que le second logement a été mis en location à compter de septembre 2021 soit postérieurement à la saisine de la commission et au jugement du 13 avril 2021 ordonnant l'ouverture d'une mesure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire. Dans ces conditions, il ne peut être reproché une fausse déclaration ou une dissimulation.
En revanche, le premier juge a également relevé que des virements avaient été effectués par la débitrice, vers le compte de son fils mineur, en janvier 2021 (1 650 euros), février 2021 (1 300 euros) et mars 2021 (1 500 euros).
Mme [S] produit aux débats des relevés de compte dont la lecture permet de constater de nouveaux virements en faveur de son fils, [V] [J] [S], les 14 novembre 2022 (1 045 euros) et 25 novembre 2022 (1 500 euros).
A la date où la cour statue c'est donc a minima une somme totale de 6 995 euros qui a été transférée du compte de Mme [S] vers celui de son fils alors qu'elle avait été déclarée recevable au bénéfice de la procédure de surendettement.
Si elle prétend qu'il s'agit simplement pour elle de 'protéger' ces sommes d'éventuelles saisies avant de les virer de nouveau sur son compte pour régler ses charges, elle n'en rapporte pas la preuve, les relevés de compte aux débats ne mentionnant aucun virement au crédit depuis le compte de [V] [J] [S].
Compte tenu du montant des sommes ainsi transférées vers le patrimoine d'un tiers au regard des facultés contributives de la débitrice, ces opérations relèvent du détournement d'actifs sanctionné par la déchéance qui a donc été prononcée à bon droit par le premier juge.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 novembre 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Pontoise,
Condamne Mme [X] [S] aux dépens,
Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe à chacune des parties par lettre recommandée avec avis de réception et que copie en sera adressée à la commission de surendettement des particuliers du Val-d'Oise.
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Isabelle CHESNOT, présidente, et par Madame Virginie DE OLIVEIRA, faisant fonction de greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La greffière, faisant fonction, La présidente,