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29/06/2023 | FRANCE | N°23/01161

France | France, Cour d'appel de Versailles, 16e chambre, 29 juin 2023, 23/01161


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 78A



16e chambre



ARRET N°



RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE



DU 29 JUIN 2023



N° RG 23/01161 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VWGO



AFFAIRE :



[N] [F]



[O] [H] épouse [F]



C/



CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU COURS DE L'ANDLAU





TRÉSOR PUBLIC



S.A.R.L. GROUPE SEBBAN PARTICIPATIONS



Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Janvier 202

3 par le Juge de l'exécution de VERSAILLES

N° RG : 20/00116



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :



Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, avocat au barreau de VERSAILLES



Me Margaret BENITAH, avoc...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78A

16e chambre

ARRET N°

RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

DU 29 JUIN 2023

N° RG 23/01161 - N° Portalis DBV3-V-B7H-VWGO

AFFAIRE :

[N] [F]

[O] [H] épouse [F]

C/

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU COURS DE L'ANDLAU

TRÉSOR PUBLIC

S.A.R.L. GROUPE SEBBAN PARTICIPATIONS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Janvier 2023 par le Juge de l'exécution de VERSAILLES

N° RG : 20/00116

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 29.06.2023

à :

Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Margaret BENITAH, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [N] [F]

né le [Date naissance 4] 1962 à [Localité 10] (78)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 11]

Madame [O] [H] épouse [F]

née le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 12] (92)

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentant : Me Carine TARLET de la SELEURL CABINET TARLET, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 590

APPELANTS

****************

CAISSE DE CREDIT MUTUEL DU COURS DE L'ANDLAU

Association Coopérative inscrite à responsabilité limitée auprès du tribunal d'instance de Strasbourg sous le numéro I/0015

[Adresse 7]

[Localité 9]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Margaret BENITAH, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.409

INTIMÉE

TRÉSOR PUBLIC

Représenté par le Comptable du Pôle de Recouvrement Spécialisé des YVELINES

[Adresse 2]

[Localité 10]

Assignation à jour fixe signifiée à personne morale le 17.03.2023

S.A.R.L. GROUPE SEBBAN PARTICIPATIONS

Anciennement la S.A.R.L. NONO COMPANY

[Adresse 8]

[Localité 3]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Assignation à jour fixe signifiée à personne morale le 17.03.2023

INTIMÉS DÉFAILLANTS

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MICHON, Conseiller chargé du rapport et Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Florence MICHON, Conseiller,

Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO,

EXPOSÉ DU LITIGE

La Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, sise à [Localité 9] (67) poursuit la saisie immobilière, initiée par commandement du 2 juin 2020 publié le 21 juillet 2020 au service de la publicité foncière de [Localité 10] 1, volume 2020 S n°17, d'un bien sis [Adresse 5] à [Localité 11] (78), appartenant à M. [F] et Mme [H] épouse [F], en vertu d'un acte notarié du 26 octobre 2012 contenant prêt au bénéfice de la SCI Fezovi sise à [Adresse 13] (78) d'une somme de 1 200 000 euros, destinée à l'acquisition d'une résidence secondaire à [Adresse 14] (2A) garanti, notamment, par une affectation hypothécaire par M. [F] et Mme [H] épouse [F] de l'immeuble susvisé.

Statuant sur la demande d'orientation de la procédure de saisie immobilière, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles, par jugement contradictoire du 27 janvier 2023, a :

réduit à la somme de 35 000 euros le montant de la clause pénale stipulée au prêt consenti par la Caisse du Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau à M. [F] et Mme [H] épouse [F] suivant acte notarié de Maître [G] [R], notaire associé à [Localité 11], le 26 octobre 2012,

rejeté la demande de délais de paiement,

ordonné la vente forcée à l'audience du mercredi 24 mai 2023 à 9 heures 30 des biens immobiliers saisis tels que désignés au cahier des conditions de vente,

fixé le montant de la créance de la société Caisse du Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau à la somme de 414 622,42 euros arrêtée au 9 juin 2020, en principal, intérêts, frais et accessoires,

autorisé le créancier poursuivant à faire procéder à la visite des biens saisis dans les jours précédant la vente, à raison de deux visites de deux heures chacune, entre 9h et 18h, par tel huissier de son choix, assisté le cas échéant de tout expert chargé d'établir les diagnostics requis et, si nécessaire, d'un serrurier et de la force publique ou de deux témoins,

autorisé le créancier poursuivant à faire paraître la publicité de vente forcée sur internet,

dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens seront compris dans les frais taxés.

Le 17 février 2023, M. [F] et Mme [H] épouse [F] ont interjeté appel du jugement.

Dûment autorisés à cette fin par ordonnance du 7 mars 2023, les appelants ont assigné à jour fixe, pour l'audience du 17 mai 2023, le 16 mars 2023, la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, et le 17 mars 2023, le Trésor Public, représenté par le comptable du Pôle de Recouvrement Spécialisé des Yvelines, et la société Groupe Sebban Participations, ces derniers en leur qualité de créanciers inscrits, par actes délivrés à personne habilitée, et transmis au greffe par voie électronique le 30 mars 2023.

Aux termes de leurs dernières conclusions transmises au greffe le 17 mai 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, M. [F] et Mme [H] épouse [F], appelants, demandent à la cour de :

confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a réduit à la somme de 35 000 euros le montant de la clause pénale stipulée au prêt à eux consenti par la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau suivant acte notarié de Maître [G] [R], Notaire associé à [Localité 11], le 26 octobre 2012, et fixé le montant de la créance de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau en conséquence à la somme de 414 622,42 euros arrêtée au 9 juin 2020, en principal, intérêts, frais et accessoires, sous réserve d'actualisation en fonction des règlements qui seront intervenus en cours de procédure,

infirmer le jugement d'orientation contradictoire rendu en premier ressort le 27 janvier 2023 par le juge de l'exécution chargé des saisies immobilières du tribunal judiciaire de Versailles (RG 20/00116), en ce qu'il a : rejeté la demande de délais de paiement // rejeté la demande d'autorisation de vente amiable // ordonné la vente forcée (...) des biens immobiliers saisis (...) // fixé le montant de la créance la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau à la somme de 414 622,42 euros arrêtée au 9 juin 2020, en principal, intérêts, frais et accessoires // autorisé le créancier poursuivant à faire procéder à la visite des biens saisis dans les jours précédant la vente (...) // autorisé le créancier poursuivant à faire paraître la publicité de vente forcée sur internet,

Statuant à nouveau sur ces points, de :

les recevoir en leur appel et les dire bien fondés,

actualiser le montant de la créance de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau au vu des règlements accomplis en cours de procédure,

leur accorder un report de 8 mois, ou un échelonnement de 2 ans pour solder la dette,

subsidiairement, les autoriser à vendre amiablement leur bien au prix plancher de 900 000 euros, et leur accorder un délai de 4 mois pour ce faire,

En tout état de cause :

débouter la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

dire que les dépens seront compris dans les frais taxés et les frais non compris dans les dépens seront laissés à la charge de chaque partie.

Par dernières conclusions transmises au greffe le 2 mai 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, intimée, demande à la cour de :

déclarer M. et Mme [F] recevables mais mal fondés en leur appel,

confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a : rejeté la demande de délais de paiement // rejeté la demande d'autorisation de vente amiable // ordonné la vente forcée des biens immobiliers saisis tel que désignés au cahier des conditions de vente, autorisé le créancier poursuivant à faire procéder à la visite des biens saisis dans les jours précédant la vente (...), autorisé le créancier poursuivant à faire paraître la publicité de vente forcée sur internet,

infirmer le jugement en ce qu'il a : réduit à la somme de 35 000 euros le montant de la clause pénale stipulée au prêt par elle consenti, suivant acte notarié de Maître [G] [R], Notaire associé à [Localité 11], 26 octobre 2012 // fixé le montant de sa créance à la somme de 414 622,42 euros arrêtée au 9 juin 2020 en principal, intérêts, frais et accessoires,

En conséquence, statuant à nouveau,

fixer le montant de la clause pénale stipulée au prêt par elle consenti à M. et Mme [F], suivant acte notarié de Maître [G] [R], Notaire associé à [Localité 11], le 26 octobre 2012, à la somme de 76 300,80 euros,

En conséquence,

fixer sa créance à la somme de 489 689,64 euros arrêtée au 31 mars 2023 en principal, intérêts, frais et accessoires, outre les intérêts postérieurs au 31 mars 2023,

condamner conjointement et solidairement les époux [F] à lui payer la somme de 3 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner conjointement et solidairement M. et Mme [F] aux entiers dépens.

Ni le Trésor Public ni la société Groupe Sebban Participations n'ont constitué avocat.

A l'issue de l'audience de plaidoirie du 17 mai 2023, le prononcé de l'arrêt a été annoncé au 29 juin 2023 par mise à disposition au greffe de la cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle qu'en application des dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions et qu'elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, que pour autant qu'elles sont soutenues par des moyens développés dans la discussion.

Sur la clause pénale

Pour réduire comme il l'a fait le montant de l'indemnité de résiliation, fixée par le contrat de prêt à 7 % du capital restant dû, le juge de l'exécution a retenu qu'elle constituait une clause pénale, susceptible de modération en application de l'article 1152 ancien du code civil, et considéré qu'au regard du taux d'intérêts contractuel de 2,90 % l'an convenu entre les parties, des efforts de remboursement consentis par les emprunteurs depuis la déchéance du terme, et du préjudice réellement subi par le prêteur, la clause pénale apparaissait manifestement excessive, et qu'il convenait de la réduire à la somme forfaitaire de 35 000 euros.

L'intimée, appelante incidente sur ce point, estime que c'est à tort que le juge de l'exécution a ainsi réduit le montant de la clause pénale stipulée au prêt du 26 octobre 2012, sollicitée à hauteur de la somme de 76 300,80 euros. Comme elle l'a fait devant le juge de l'exécution, elle fait valoir que le taux de l'indemnité forfaitaire a été fixé par les parties, qui en sont tenues contractuellement, qu'une première procédure de saisie immobilière avait été engagée, qui a donné lieu à un jugement de caducité rendu le 10 avril 2019, que du fait de la défaillance de la SCI Fezovi, elle a dû engager une nouvelle procédure de saisie immobilière à l'encontre des garants hypothécaires, et que l'indemnité en cause couvre les frais ayant dû être engagés pour lui permettre de faire valoir sa créance.

Selon les appelants, c'est à bon droit que le premier juge a statué comme il l'a fait. L'indemnité contractuelle de 7% du capital restant dû a en effet un caractère excessif, et il existe une disproportion manifeste entre le montant conventionnellement fixé et l'importance du préjudice subi par le créancier suite à l'exigibilité anticipée des sommes, compte tenu des efforts financiers qu'ils ont réalisés.

Le contrat de prêt conclu entre la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau et la SCI Fezovi, représentée par M. [F], prévoit qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur a la possibilité d'exiger le remboursement immédiat du solde restant dû, et que l'emprunteur est alors redevable d'une indemnité égale à 7% des sommes restant dues au titre du capital restant dû ainsi que des intérêts échus et non réglés.

Une telle clause, qui prévoit que celui qui manque d'exécuter la convention doit payer une certaine somme à titre de dommages et intérêts s'analyse, ainsi que l'a à raison dit le premier juge, comme une clause pénale au sens de l'article 1152 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause.

Dès lors, le moyen soutenu par la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, tiré du fait que l'indemnité forfaitaire est prévue par le contrat est inopérant : la peine convenue entre les parties, est en effet, en application du texte susvisé, toujours susceptible de modération par le juge si elle apparaît manifestement excessive.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu qu'en l'espèce, l'application de la clause dans son intégralité était manifestement excessive, au regard du préjudice effectivement subi par le prêteur, observation faite que le préjudice qui a vocation à être indemnisé par la clause en cause est celui qui résulte pour le prêteur de l'exigibilité anticipée du prêt, qui le prive, notamment, de la perception d'une partie des intérêts escomptés.

Il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement en ce qu'il a réduit le montant de l'indemnité forfaitaire convenue entre les parties à 35 000 euros.

Sur le montant de la créance

En première instance, le montant de la créance a été fixé à la somme de 414 622,42 euros, arrêté au 9 juin 2020, au vu d'un décompte versé aux débats, non contesté, et compte tenu de la réduction de la clause pénale opérée.

La Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, sur la base d'un décompte actualisé au 31 mars 2023, demande qu'elle soit fixée à la somme de 489 689,64 euros, arrêtée au 31 mars 2023.

Les appelants se bornent, quant à eux, à solliciter l'actualisation du montant de la créance 'au vu des règlements accomplis en cours de procédure', sans toutefois contester le montant total des dits règlements retenu par l'intimée, à savoir 855 747,39 euros depuis le 9 novembre 2015.

Au vu de ce décompte, qui n'est pas utilement contesté par M. et Mme [F], et tenant compte du montant de l'indemnité forfaitaire de résiliation, qui est retenu à hauteur de 35 000 euros, le montant de la créance de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau s'établit, au 31 mars 2023, à la somme de 448 388,84 euros.

Les intérêts continuent de courir au delà de cette date, jusqu'au paiement, rappel étant fait toutefois qu'ils ne courent qu'au taux légal sur la part représentant l'indemnité forfaitaire de résiliation.

Le jugement sera donc réformé en conséquence.

Sur la demande de délais

Pour débouter M. et Mme [F] de leur demande de délais, le juge de l'exécution a notamment retenu qu'ils disposaient comme allégué d'un important patrimoine immobilier professionnel, dont la valorisation devrait effectivement leur permettre d'apurer leur dette à l'égard de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, mais que plus de 7 années s'étaient écoulées depuis la déchéance du terme, et qu'ils avaient donc déjà bénéficié des plus larges délais pour apurer leur dette, au besoin en mobilisant le patrimoine immobilier dont ils faisaient aujourd'hui état à l'appui de leur demande.

De la même manière qu'ils l'ont fait en première instance, les appelants font valoir la situation professionnelle de M. [F], gérant ou président de plusieurs sociétés, le montant de leurs revenus, qui étaient de 172 820 euros net imposable en 2021, l'importance de leur patrimoine immobilier professionnel, l'existence de divers projets d'opérations immobilières, qui sont toujours d'actualité même s'ils ont été retardés par la crise sanitaire et par des difficultés de santé rencontrées par M. [F], dont une à intervenir dans un avenir proche, qui devrait permettre de dégager une plus value d'un million d'euros pour une des sociétés dont M. [F] est le président, laquelle s'est irrévocablement engagée à virer une somme de 450 000 euros au profit de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau. Ils font également valoir qu'ils ont été indûment prélevés par l'administration fiscale, au titre de leurs impôts, à hauteur de 280 000 euros, et qu'une procédure est en cours devant la cour administrative d'appel de Versailles, après qu'ils ont eu partiellement gain de cause devant le tribunal administratif. Enfin, ils soulignent qu'ils ont déjà versé en paiement de leur dette une somme de 900 000 euros, résultant de la vente de leur villa en Corse, ainsi qu'ils s'y étaient engagés. Ils sollicitent en conséquence un report de 8 mois, ou un échelonnement de paiement, pour permettre la finalisation des opérations en cours, et leur éviter les aléas d'une vente aux enchères.

La Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau, qui remet en cause l'actualité des annonces de M. et Mme [F], et l'imminence de la réalisation des projets exposés, ainsi que des paiements annoncés, souligne que M. [F] a déjà bénéficié des plus amples délais pour régler sa dette, outre les délais de procédure, puisque le commandement de payer valant saisie a été délivré en juin 2020. Elle s'oppose en conséquence à l'octroi de délais.

En vertu de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. La décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d'intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge.

Au vu des justificatifs que produisent les appelants, la réalisation effective des diverses opérations immobilières dont ils font état apparaît à ce jour hypothétique, surtout que certaines d'entre elles sont anciennes de plusieurs années, et en tous cas, il n'est pas démontré qu'elles leur permettraient, si elles se réalisaient effectivement, de régler leur dette envers la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau dans le délai de 8 mois qu'ils sollicitent.

Le succès de leur recours contre l'administration fiscale est tout aussi hypothétique à ce stade, et en tous cas, rien dans les pièces produites ne permet d'établir avec certitude qu'ils seraient en mesure de recevoir une somme de 280 000 euros à ce titre.

Comme l'a pertinemment relevé le premier juge, M. et Mme [F] n'ont pas mobilisé leur patrimoine immobilier, excepté la vente de leur maison en Corse, pour apurer leur dette, alors qu'ils ont disposé de larges délais pour le faire.

Enfin, aucune proposition concrète n'est faite s'agissant de l'échelonnement de deux années qui est sollicité, observation faite que, compte tenu de son montant, l'apurement de la dette dans le délai maximal de 24 mois prévu par le texte susvisé suppose, de la part de M. et Mme [F], des versements mensuels de l'ordre de 18 500 euros.

Le premier juge sera donc approuvé d'avoir, comme il l'a fait, rejeté la demande de délais de paiement.

Sur la demande de vente amiable

Pour orienter comme il l'a fait la procédure, en rejetant la demande de M. et Mme [F] d'être autorisés à vendre amiablement leur bien, le juge de l'exécution a considéré qu'il existait un sérieux doute quant à la réalisation d'une telle vente dans des conditions satisfaisantes, alors que les débiteurs se bornaient à produire aux débats deux avis de valeur établis respectivement en octobre 2020 et en janvier 2022 par une seule et même agence, sans justifier de la moindre démarche accomplie depuis lors en vue de la vente.

Les appelants maintiennent devant la cour leur demande d'être autorisés à vendre amiablement leur bien, et font état de démarches récentes en ce sens.

La Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau sollicite la confirmation du jugement, remettant en cause la bonne volonté des époux [F] pour mettre en vente leur bien immobilier à l'amiable, aucune démarche n'ayant été faite.

En application de l'article R.322-15 du code des procédures civiles d'exécution, le juge doit s'assurer, lorsqu'il autorise la vente amiable, qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

Devant la cour, M. et Mme [F] se prévalent d'un mandat exclusif de vente qu'ils ont conclu pour leur maison de [Localité 11], pour un prix de 1 500 000 euros, qui correspond à l'estimation qui en a été faite le 16 octobre 2020, puis le 12 janvier 2022.

Observation faite que ce mandat a été conclu le 16 mai 2023, veille de l'audience, que sa durée n'est que d'un mois et demi, se terminant le 30 juin 2023, et qu'il a été conclu sur la base de deux évaluations faites, par le même agent immobilier, le 16 octobre 2020 puis le 12 janvier 2022, toujours pour le même montant de 1 500 000 euros, ce seul élément ne permet pas de justifier de réelles diligences des débiteurs en vue de la vente de leur bien.

En conséquence, le juge de l'exécution doit être approuvé d'avoir rejeté la demande de vente amiable présentée par les débiteurs.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. et Mme [F] qui succombent seront condamnés in solidum aux dépens de l'appel.

Ils devront en outre régler, in solidum, à la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau une somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'exposer à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par décision réputée contradictoire, en dernier ressort,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Versailles le 27 janvier 2023, sauf en ce qu'il a fixé le montant de la créance de la société Caisse du Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau à la somme de 414 622,42 euros arrêtée au 9 juin 2020, en principal, intérêts, frais et accessoires ;

Réformant le jugement sur ce point, et y ajoutant,

Fixe le montant de la créance de la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau à la somme de 448 388,84 euros, arrêtée au 31 mars 2023, en principal, intérêts, frais et accessoires ;

Rappelle que les intérêts continuent de courir au delà de cette date du 31 mars 2023, et qu'ils ne courent qu'au taux légal sur la part représentant l'indemnité forfaitaire de résiliation ;

Condamne in solidum M. [F] et Mme [H] épouse [F] aux dépens de l'appel, et à régler à la Caisse de Crédit Mutuel du Cours de l'Andlau une somme de 3 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 16e chambre
Numéro d'arrêt : 23/01161
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;23.01161 ?
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