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21/06/2023 | FRANCE | N°21/00690

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 21 juin 2023, 21/00690


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 21 JUIN 2023



N° RG 21/00690



N° Portalis DBV3-V-B7F-ULBI



AFFAIRE :



[Y] [W]





C/

S.A.S. CLIM ENERGY SYSTEM









Décision déférée à la cour : Jugement rendu

le 18 Janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : I

N° RG : F 19/00

171



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Maude BECKERS



Me Anny WILHELM







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 JUIN 2023

N° RG 21/00690

N° Portalis DBV3-V-B7F-ULBI

AFFAIRE :

[Y] [W]

C/

S.A.S. CLIM ENERGY SYSTEM

Décision déférée à la cour : Jugement rendu

le 18 Janvier 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : I

N° RG : F 19/00171

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Maude BECKERS

Me Anny WILHELM

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [Y] [W]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Maude BECKERS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 141

APPELANTE

****************

S.A.S. CLIM ENERGY SYSTEM

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Anny WILHELM, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0420 - N° du dossier [W]

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 19 Mai 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat de travail à durée déterminée du 1er octobre 2014 au 31 décembre 2014, Mme [Y] [W] a été embauchée par la société Clim Energy System en qualité d'assistante de direction, niveau 4B.

La relation de travail s'est poursuivie par contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2015 avec reprise d'ancienneté au 1er octobre 2014.

Elle était régie par la convention collective nationale des ouvriers, employés, techniciens et agents de maîtrise de l'exploitation d'équipements thermiques et de génie climatique.

Par lettre du 9 juin 2017, Mme [W] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé au 21 juin 2017.

Par lettre du 5 juillet 2017, l'employeur a licencié la salariée pour faute grave.

Contestant son licenciement, le 27 juin 2019 Mme [Y] [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Poissy afin d'obtenir la condamnation de la société Clim Energy System à lui payer des dommages et intérêts pour licenciement nul, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse ainsi que diverses sommes liées à l'exécution et à la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 18 janvier 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a :

- dit les demandes recevables,

- fixé la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l'article R. 1454-28 du code du travail à la somme de 2 557,45 euros,

- condamné la société Clim Energy System à verser à Mme [W] avec intérêts légaux à compter du 30 septembre 2019, date de réception de la convocation pour le bureau de conciliation et d'orientation par la partie défenderesse, la somme de 1 320 euros au titre de rappel de la prime conventionnelle de vacances,

- condamné la société Clim Energy System à verser à Mme [W] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [W] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Clim Energy System de sa demande reconventionnelle

- condamné la société Clim Energy System aux dépens, y compris ceux afférents aux actes et procédure d'exécution éventuels.

Le 25 février 2021, Mme [W] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par ordonnance du 14 décembre 2022, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré recevable l'appel formé par Mme [Y] [W],

- déclaré irrecevables les conclusions signifiées le 6 septembre 2022 par la société Clim Energy System,

- condamné la société Clim Energy System aux dépens,

- condamné la société Clim Energy System à payer à Mme [Y] [W] une somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 7 septembre 2022, Mme [W] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Clim Energy System au paiement de la somme de 1 320 euros à titre de prime conventionnelle de vacances, d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses autres demandes, et statuant à nouveau de :

- condamner la société Clim Energy System à lui payer les sommes suivantes :

* 1 320 euros à titre de rappel de la prime conventionnelle de vacances,

* 10 229,80 euros au titre des dommages et intérêts pour harcèlement moral,

* 10 000 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de prévention et de sécurité,

* 15 344,70 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé (6 mois) du fait du prêt de main d''uvre illicite, à titre subsidiaire, 15 344,70 euros à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d''uvre illicite,

* 1 500 euros au titre des dommages et intérêts pour sanction injustifiée (annulation de l'avertissement du 9 mai 2017),

* 2 557,45 euros au titre des rappels de salaires au titre de la mise à pied conservatoire,

* 257,75 au titre des congés-payés afférents,

- en tout état de cause :

* 7 672,35 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 767,24 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 406,60 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 5 000 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* 30 689,40 au titre de l'indemnité pour licenciement nul, à titre subsidiaire, 10 229,80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- ordonner la remise, sous astreinte de 50 euros par jour et par document : d'une attestation Pôle emploi conforme au jugement, des bulletins de paie conformes au jugement, d'un certificat de travail conforme au jugement,

- assortir les condamnations des intérêts légaux avec capitalisation,

- condamner la société Clim Energy System aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 9 mai 2023.

MOTIVATION

Il y a lieu de rappeler que par ordonnance du conseiller de la mise en état du 14 décembre 2022, les conclusions signifiées le 6 septembre 2022 par la société Clim Energy System ont été déclarées irrecevables.

Sur l'avertissement du 9 mai 2017

La salariée sollicite l'annulation de l'avertissement qui l'a sanctionnée pour des refus de travailler dans le cadre d'une mise à disposition illicite et qu'elle considère donc comme injustifié.

Aucun moyen n'a été repris par le conseil de prud'hommes pour l'employeur.

Aux termes de l'article L. 1333-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.

L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.

Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l'espèce, l'employeur a notifié à la salariée un avertissement le 15 mai 2017 lui reprochant de persister à refuser d'effectuer des taches pour le compte des sociétés Axymium et Open GTC.

En l'absence de tout justificatif fondant l'avertissement, il y a lieu de considérer que celui-ci est injustifié et de l'annuler. Le jugement sera infirmé sur ce point.

La salariée n'allègue, ni ne justifie d'aucun préjudice résultant de cet avertissement injustifié. Elle sera, par conséquent, déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur le rappel de prime conventionnelle de vacances

La salariée sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué la somme de 1 320 euros à titre de rappel de prime conventionnelle de vacances.

Aucun moyen n'a été repris par le conseil de prud'hommes pour l'employeur.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné la société Clim Energy System à payer à Mme [W] la somme de 1 320 euros à titre de rappel de prime conventionnelle de vacances sur le fondement de l'article 37 de la convention collective applicable.

Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée invoque les faits suivants :

des pressions à l'occasion d'entretiens successifs injustifiés avec la direction,

le mépris de son employeur à l'égard de ses revendications,

une surveillance par l'employeur,

une mise au placard,

un avertissement injustifié,

le refus de prise en charge de ses frais professionnels.

A l'appui du fait 1), la salariée verse aux débats des courriels des 10 et 14 avril 2017 relatifs à une convocation à entretien le 14 avril 2017 ainsi qu'une lettre du 26 avril 2017 reprenant le déroulement de l'entretien du 14 avril 2017 pendant lequel la direction de l'entreprise lui a reproché d'une part, de ne pas s'investir dans le développement des sociétés Axymium et Open GTC créées en 2015 et 2017, ainsi que d'autre part, une rupture de confiance suite à ses revendications notamment en matière salariale. Ce fait est donc matériellement établi pour un entretien le 14 avril 2017.

S'agissant du fait 2), la salariée produit plusieurs courriels dans lesquels elle rappelle avoir été embauchée pour travailler pour la société Clim Energy System et demande une discussion préalable ainsi qu'une compensation pour travailler pour les sociétés Axymium et Open GTC, son employeur ne prenant pas en compte ses revendications et lui demandant d'accomplir des tâches pour le compte de ces deux sociétés : le 28 mars 2017 pour Open GTC et le 18 avril 2017 pour Axymium. Ce fait est matériellement établi.

S'agissant du fait 5), il résulte des développements qui précèdent que la salariée a fait l'objet d'un avertissement injustifié. Ce fait est matériellement établi.

Concernant son état de santé, la salariée produit des arrêts de travail renouvelés à compter du 21 avril 2017 jusqu'au 7 août 2017, hormis une interruption du 29 avril au 2 mai 2017.

Il résulte des agissements 1), 2) et 5) y compris la dégradation de l'état de santé de la salariée que celle-ci présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres faits invoqués 3) 4) 6).

L'employeur ne justifie pas que ces agissements sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il s'en déduit que la salariée a subi des agissements de harcèlement moral dans un contexte où elle a demandé une régularisation et des contreparties pour effectuer des tâches pour le compte des sociétés Axymium et Open GTC récemment créées alors qu'elle avait été embauchée pour travailler pour la société Clim Energy System.

Il sera alloué à la salariée des dommages et intérêts à hauteur de 5 000 euros en réparation du préjudice subi résultant des agissements de harcèlement moral, somme que la société Clim Energy System sera condamnée à payer à Mme [W] en réparation.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur l'obligation de prévention et de sécurité

La salariée reproche à l'employeur d'avoir manqué à son obligation de prévention par l'absence de mesures prises pour prévenir les faits de harcèlement moral. A défaut elle demande qu'il soit fait sommation à l'employeur de communiquer tout justificatif du système de prévention du harcèlement moral, les procédures d'alerte existantes, tout justificatif du système de formation de lutte contre le harcèlement.

Le conseil de prud'hommes n'a pas fait mention de moyen juridique pour le compte de l'employeur.

L'employeur est tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en application de l'article L. 4121-1 du code du travail qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour assurer de manière effective la sécurité et protéger la santé des travailleurs. Ne méconnaît cependant pas son obligation légale l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail.

En l'espèce, la salariée ne justifie pas avoir alerté son employeur de faits de harcèlement moral. Elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts, faute de caractériser un manquement de l'employeur à son obligation de prévention.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur le travail dissimulé et le prêt de main d'oeuvre

La salariée indique qu'elle n'a pas été déclarée au sein des deux sociétés Axymium et Open GC, que ce prêt de main d'oeuvre est constitutif de travail dissimulé. Subsidiairement, elle expose que son employeur a violé les règles relatives au prêt de main d'oeuvre, qu'elle est victime de mise à disposition illicite du fait de la multiplicité de ses tâches et de ses interlocuteurs.

Le conseil de prud'hommes a retenu l'absence d'élément intentionnel, au vu d'une déclaration nominative préalable à l'embauche, de bulletins de paie conformes et d'une proposition d'avenant pour définir les tâches de la salariée.

Aux termes de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Aux termes de l'article L. 8241-2 du code du travail, les opérations de prêt de main-d'oeuvre à but non lucratif sont autorisées.

Dans ce cas, les articles L. 1251-21 à L. 1251-24, L. 2313-3 à L. 2313-5 et L. 5221-4 du présent code ainsi que les articles L. 412-3 à L. 412-7 du code de la sécurité sociale sont applicables.

Le prêt de main-d''uvre à but non lucratif conclu entre entreprises requiert :

1° L'accord du salarié concerné ;

2° Une convention de mise à disposition entre l'entreprise prêteuse et l'entreprise utilisatrice qui en définit la durée et mentionne l'identité et la qualification du salarié concerné, ainsi que le mode de détermination des salaires, des charges sociales et des frais professionnels qui seront facturés à l'entreprise utilisatrice par l'entreprise prêteuse ;

3° Un avenant au contrat de travail, signé par le salarié, précisant le travail confié dans l'entreprise utilisatrice, les horaires et le lieu d'exécution du travail, ainsi que les caractéristiques particulières du poste de travail.

A l'issue de sa mise à disposition, le salarié retrouve son poste de travail ou un poste équivalent dans l'entreprise prêteuse sans que l'évolution de sa carrière ou de sa rémunération ne soit affectée par la période de prêt.

Les salariés mis à disposition ont accès aux installations et moyens de transport collectifs dont bénéficient les salariés de l'entreprise utilisatrice.

Un salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir refusé une proposition de mise à disposition.

La mise à disposition ne peut affecter la protection dont jouit un salarié en vertu d'un mandat représentatif.

Pendant la période de prêt de main-d''uvre, le contrat de travail qui lie le salarié à l'entreprise prêteuse n'est ni rompu ni suspendu. Le salarié continue d'appartenir au personnel de l'entreprise prêteuse ; il conserve le bénéfice de l'ensemble des dispositions conventionnelles dont il aurait bénéficié s'il avait exécuté son travail dans l'entreprise prêteuse.

Le comité d'entreprise ou, à défaut, les délégués du personnel de l'entreprise prêteuse sont consultés préalablement à la mise en 'uvre d'un prêt de main-d''uvre et informés des différentes conventions signées.

Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'entreprise prêteuse est informé lorsque le poste occupé dans l'entreprise utilisatrice par le salarié mis à disposition figure sur la liste de ceux présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité des salariés mentionnée au second alinéa de l'article L. 4154-2.

Le comité d'entreprise et le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, les délégués du personnel de l'entreprise utilisatrice sont informés et consultés préalablement à l'accueil de salariés mis à la disposition de celle-ci dans le cadre de prêts de main-d''uvre.

L'entreprise prêteuse et le salarié peuvent convenir que le prêt de main-d''uvre est soumis à une période probatoire au cours de laquelle il peut y être mis fin à la demande de l'une des parties. Cette période probatoire est obligatoire lorsque le prêt de main-d''uvre entraîne la modification d'un élément essentiel du contrat de travail. La cessation du prêt de main-d''uvre à l'initiative de l'une des parties avant la fin de la période probatoire ne peut, sauf faute grave du salarié, constituer un motif de sanction ou de licenciement.

En l'espèce, la salariée ne démontre pas l'élément intentionnel du travail dissimulé. Elle doit être déboutée de sa demande d'indemnité sur ce fondement. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

La salariée a été régulièrement mise à disposition sans but lucratif par son employeur au profit de deux nouvelles sociétés Axymium et Open GC pour effectuer des tâches d'assistante de direction sans technicité particulière, tout en conservant son poste de travail au sein de l'entreprise prêteuse. Ces opérations ont eu lieu sans l'accord de la salarié, en l'absence de conventions de mise à disposition entre l'entreprise prêteuse et les entreprises utilisatrices et sans avenant au contrat de travail de la salariée.

La salariée justifie d'une charge de travail accrue, d'un stress du fait de la multiplicité de ses tâches et de ses interlocuteurs et de l'absence d'adaptation de son poste qui lui ont causé un préjudice qu'il convient de réparer par des dommages et intérêts d'un montant de 2 000 euros, somme que la société Clim Energy System sera condamnée à payer à Mme [W] en réparation. Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur la nullité du licenciement

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour licenciement nul. Elle indique qu'après avoir dénoncé un prêt de main d'oeuvre illicite pour deux autres sociétés, elle a subi un harcèlement moral, que le licenciement n'est que l'aboutissement du harcèlement moral subi, aucun des griefs de la lettre de licenciement n'étant fondé.

En application des dispositions de l'article L. 1152-3 du code du travail, le licenciement encourt la nullité dès lors qu'il trouve son origine dans un comportement de harcèlement moral.

En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que la salariée a subi des faits de harcèlement moral après s'être plainte d'une situation de prêt de main d'oeuvre au bénéfice de deux autres sociétés, sans régularisation et sans contrepartie, et des conséquences qui en résultait pour elle-même en terme de surcharge de travail et de stress.

Il s'en déduit que le licenciement est en réalité causé par la situation de harcèlement moral subie, le licenciement étant l'aboutissement du harcèlement moral subi.

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

En l'espèce, la salariée ne demande pas sa réintégration. Au vu de son âge de 45 ans au moment du licenciement et de son ancienneté de plus de deux ans, il lui sera alloué des dommages et intérêts à hauteur de 16 000 euros .

En vertu de l'article 17 de la convention collective applicable, la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis de trois mois de salaire qu'il convient de fixer à 7 672,35 euros, outre 767,24 euros au titre des congés payés afférents.

Il lui sera également alloué une indemnité légale de licenciement d'un montant de 1 406,6 euros.

La mise à pied conservatoire n'étant pas justifiée, il sera alloué à la salariée la somme de 2 557,45 euros à ce titre, outre 255,75 euros au titre des congés payés afférents.

Il convient d'ordonner la remise par la société Clim Energy System à Mme [W], d'une attestation Pôle emploi, des bulletins de paie et d'un certificat de travail conformes à la présente décision sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ces points, sauf en son débouté de la demande d'astreinte.

Sur la rupture vexatoire

La salariée sollicite des dommages et intérêt en raison du comportement inadmissible de son employeur, qui l'a d'abord totalement méprisée, lui a retiré des accès, l'a privée de certaines tâches. Elle invoque un préjudice moral important distinct de celui de la perte de son emploi pour licenciement vexatoire.

Le conseil de prud'hommes n'a mentionné aucun moyen juridique pour le compte de l'employeur.

En l'espèce, la salariée ne démontre pas l'existence d'un préjudice distinct de son préjudice moral pour harcèlement déjà réparé par l'allocation de dommages et intérêts et du préjudice résultant de la perte de son emploi déjà réparé par les sommes allouées au titre du licenciement nul.

Elle doit donc être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire. Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société Clim Energy System aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à la salariée du jour du licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

La capitalisation des intérêts échus pour une année entière sera ordonnée.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Clim Energy System succombant à la présente instance, sera condamnée aux dépens d'appel. Elle devra également régler une somme de 3 500 euros à Mme [W] en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- condamné la société Clim Energy System à payer à Mme [Y] [W] une somme de 1 320 euros au titre de la prime conventionnelle de vacances, avec intérêts légaux à compter du 30 septembre 2019,

- débouté Mme [Y] [W] de sa demande d'astreinte, de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, de sa demande de dommages et intérêts pour sanction injustifiée, de sa demande de dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

- condamné la société Clim Energy System à payer à Mme [Y] [W] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Clim Energy System aux dépens,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Annule l'avertissement du 9 mai 2017,

Dit que le licenciement de Mme [Y] [W] est nul,

Condamne la société Clim Energy System à payer à Mme [Y] [W] :

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour prêt de main d'oeuvre illicite,

16 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul,

7 672,35 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

767,24 euros au titre des congés payés afférents,

1 406,6 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

2 557,45 euros au titre de la mise à pied conservatoire,

255,75 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière,

Ordonne la remise par la société Clim Energy System à Mme [Y] [W] d'une attestation Pôle emploi, de bulletins de paie, d'un certificat de travail conformes à la présente décision,

Ordonne le remboursement par la société Clim Energy System aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à la salariée du jour du licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités,

Condamne la société Clim Energy System aux dépens d'appel,

Condamne la société Clim Energy System à payer à Mme [Y] [W] une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/00690
Date de la décision : 21/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-21;21.00690 ?
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