COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 20 JUIN 2023
N° RG 21/07160 - N° Portalis DBV3-V-B7F-U3WL
AFFAIRE :
M. [J] [Y]
C/
Mme [V], [M] [Z]
LE PREFET DES HAUTS DE SEINE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Avril 2021 par le Tribunal de proximité de VANVES
N° RG : 11-20-232
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 20/06/23
à :
Me Hofée SEMOPA
Me Tristan BORLIEU
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Monsieur [J] [Y]
né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 8]
Présent à l'audience
Représentant : Maître Hofée SEMOPA, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 706
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/008202 du 15/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de VERSAILLES)
APPELANT
****************
Madame [V], [M] [Z]
née le [Date naissance 4] 1973 à [Localité 11]
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 6] / FRANCE
Représentant : Maître Tristan BORLIEU de la SCP GLP ASSOCIES, Postulant et Plaidant, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 744
INTIMEE
****************
LE PREFET DES HAUTS DE SEINE
Préfecture des Hauts de Seine
[Adresse 3]
[Localité 7]
Assigné à personne morale
PARTIE INTERVENANTE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 08 Février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé en date du 9 août 2010, Mme [V] [Z] a donné en location meublée à M. [J] [Y] une chambre de 12 m² et des parties communes de 23 m² situées [Adresse 9], 4ème étage, porte droite à [Localité 8].
Par acte de commissaire de justice délivré le 7 mai 2012, Mme [Z] a fait signifier à M. [Y] un congé pour reprise.
Par acte de commissaire de justice en date du 26 juillet 2012, M. [Y] a assigné Mme [Z] à comparaître devant la juridiction de proximité de Vanves aux fins notamment de voir requalifier le bail en bail non meublé.
Par jugement du 4 avril 2013, le tribunal d'instance de Vanves a :
- requalifié le contrat conclu entre Mme [Z] et M. [Y] en bail soumis aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989,
- déclaré nul le congé pour reprise que Mme [Z] a fait délivrer le 7 mai 2012 à M. [Y],
- enjoint à Mme [Z] de réaliser des travaux de reprise des désordres relevés ainsi que des peintures affectées au plomb dans le local situé [Adresse 9] à [Localité 8] dans le délai de 40 jours suivant la signification de la décision, et sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé ce délai.
Par acte de commissaire de justice en date du 8 février 2019, Mme [Z] a fait délivrer à M. [Y] un congé pour vendre.
Par acte de commissaire de justice délivré le 28 octobre 2019, Mme [Z] a assigné M. [Y] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves aux fins d'obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :
- la validation du congé,
- l'expulsion de M. [Y] et celle de tous les occupants de son chef,
- le transport et la séquestration du mobilier,
- la condamnation de M. [Y] au paiement de la somme de 12 436 euros correspondant au montant des loyers et charges impayés arrêtés au mois d'octobre 2019 inclus, outre les intérêts au taux légal à compter de la délivrance du congé en date du 8 février 2019,
- la condamnation de M. [Y] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer actuel, soit la somme de 498,52 euros à compter du 10 août 2019, outre les intérêts au taux légal à compter de la délivrance du congé en date du 8 février 2019,
- la condamnation de M. [Y] au paiement de la somme de 8 000 euros de dommages et intérêts au visa de l'article 1231-6 du code civil en raison du préjudice moral subi avec intérêts au taux légal à compter du 8 février 2019, date du congé,
- le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Par jugement contradictoire du 15 avril 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves a :
- validé le congé délivré à M. [Y] le 8 février 2019 par Mme [Z] pour le logement situé à [Adresse 9] à effet du 9 août 2019,
- constaté que M. [Y] occupe les lieux sans droit ni titre depuis cette date,
- ordonné son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec, si besoin, le concours de la force publique et l'assistance d'un serrurier, à défaut de libération volontaire des lieux à compter de la signification de la décision,
- rappelé que cette expulsion ne pourra être poursuivie qu'à l'expiration d'un délai de deux mois suivant la délivrance d'un commandement d'avoir à libérer les lieux,
- dit que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis, aux frais de M. [Y], en un lieu de leur choix, et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier de justice chargé de l'exécution, avec sommation à M. [Y] d'avoir à les retirer dans le délai d'un mois,
- condamné M. [Y] à verser à Mme [Z] une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant du loyer courant majoré des charges, à compter du 10 août 2019 et jusqu'à la libération effective des lieux,
- condamné M. [Y] à payer à Mme [Z] la somme de 17 400,28 euros au titre des loyers et indemnités d'occupation impayés arrêtés au 1er janvier 2021, avec intérêts au taux légal à compter du 28 octobre 2019, date de l'assignation,
- condamné Mme [Z] à rembourser à M. [Y] la somme de 797,07 euros au titre des factures EDF,
- condamné M. [Y] à verser à Mme [Z] la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté Mme [Z] du surplus de ses demandes,
- débouté M. [Y] du surplus de ses demandes,
- condamné M. [Y] aux dépens,
- prononcé l'exécution provisoire de la décision.
Par déclaration reçue au greffe le 1er décembre 2021, M. [Y] a relevé appel de ce jugement.
Par acte de commissaire de justice délivré le 18 octobre 2022 par remise à personne morale, M. [Y] a assigné le préfet des Hauts-de-Seine en intervention forcée.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 3 novembre 2022.
Par ordonnance du 18 janvier 2023, le conseiller de la mise en état a :
- révoqué l'ordonnance de clôture du 3 novembre 2022,
- renvoyé l'affaire à l'audience de plaidoiries du 8 février 2023 pour clôture et plaidoiries.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 27 janvier 2023, M. [Y] demande à la cour :
- de le recevoir en ses demandes et l'y déclarer bien fondé,
- de débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,
à titre principal,
- d'infirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves du 15 avril 2021 en ce qu'il l'a condamné à verser à Mme [Z] la somme de 17 400, 28 euros au titre de l'arriéré locatif courant jusqu'au 1er janvier 2021,
statuant à nouveau,
- de débouter Mme [Z] de toutes ses demandes de condamnation à son encontre au titre d'un arriéré locatif,
à titre subsidiaire, en cas de confirmation de sa condamnation au titre de l'arriéré locatif,
- de condamner le préfet des Hauts-de-Seine à prendre en charge l'intégralité de sa condamnation,
en tout état de cause,
- de confirmer le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves du 15 avril 2021 en ce qu'il a fait droit à sa demande de remboursement des factures EDF mais infirmer le jugement sur le montant de 797,07 euros auquel il a condamné Mme [Z] à le rembourser sur le fondement du contrat de bail,
en conséquence,
- de condamner Mme [Z] à lui rembourser la somme de 2 412,48 euros au titre du remboursement des factures d'électricité en application du contrat de bail,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de dommages-intérêts,
statuant à nouveau,
- de condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 34 675 euros à titre de dommages-intérêts,
- d'ordonner la compensation des sommes dues par les parties,
- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à verser à Mme [Z] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- de condamner Mme [Z] à verser à Me Semopa la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,
- de condamner Mme [Z] aux entiers dépens y compris les éventuels frais d'exécution de l'arrêt à intervenir.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 30 mai 2022, Mme [Z] demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
* a validé le congé délivré à M. [Y],
* a constaté que M. [Y] occupait les lieux sans droit ni titre depuis le 9 août 2019,
* a ordonné l'expulsion de M. [Y] à défaut de libération volontaire des lieux,
* a condamné M. [Y] à lui verser une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant des loyers majorés des charges à compter du 10 août 2019 jusqu'à la libération effective des lieux,
* a condamné M. [Y] à lui payer la somme de 17 400,28 euros au titre des loyers et indemnités d'occupation impayés arrêtés au 1er janvier 2021,
* a condamné M. [Y] à verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* a condamné M. [Y] aux dépens,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il :
* l'a condamnée à rembourser à M. [Y] la somme de 797,07 euros au titre des factures EDF,
* l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts,
statuant à nouveau :
- condamner M. [Y] au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts,
en cause d'appel :
- condamner M. [Y] au paiement de la somme de 4 860,47 euros au titre de l'indemnité d'occupation pour la période courant du 1er février 2021 au 22 décembre 2021,
- débouter M. [Y] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [Y] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [Y] aux entiers dépens.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 8 février 2023.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION.
M. [Y] ne remet pas en cause, dans le cadre de la procédure d'appel, les dispositions du jugement ayant validé le congé et ayant prononcé son expulsion avec toutes les conséquences subséquentes qui ne peuvent donc qu'être confirmées.
Sur l'appel de M. [Y].
M. [Y] qui a quitté les lieux le 1er avril 2021, ne poursuit l'infirmation du jugement qu'en ses dispositions l'ayant condamnée au paiement de l'arriéré locatif, l'ayant débouté de sa demande de dommages-intérêts, ainsi que sur le montant de la condamnation de la bailleresse au remboursement des factures d'électricité.
- sur le montant de l'arriéré locatif.
Au soutien de son appel, M. [Y] reproche au premier juge de l'avoir condamné au paiement de l'arriéré locatif, faisant principalement valoir que Mme [Z] a procédé par des manoeuvres frauduleuses pour empêcher la CAF de lui verser les allocations logement auxquelles il avait droit, qu'en effet, en s'abstenant de communiquer les documents indispensables au versement des allocations familiales par la CAF, le propriétaire a volontairement fait en sorte que le locataire ne soit plus en mesure de payer la totalité de son loyer, qu'il a toujours continué de verser la somme de 166 euros qu'il a toujours versée en sus de la somme que lui allouait la CAF.
Mme [Z] réplique que M. [Y] n'a effectivement versé à compter du mois de février 2016 que la somme de 166 euros, alors que le loyer révisé est de 498,52 euros, qu'il restait donc chaque mois un arriéré de 332,52 euros, de sorte qu'au 1er janvier 2021, la dette locative s'élevait à la somme de 17 400,28 euros au paiement de laquelle le locataire a été condamné, que la dette s'explique par la suspension du versement des APL liée au défaut de paiement des loyers par M. [Y].
Sur ce,
L'article 1353 du code civil dispose que 'celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation'.
Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile 'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention'.
M. [Y] qui admet ne pas être à jour de ses loyers, ne démontre pas que la suspension de ses APL aurait pour origine un manquement imputable à faute à Mme [Z]. En revanche, celle-ci a effectivement signalé à la CAF que M. [Y] ne s'exécutait pas de toutes ses obligations contractuelles relatives au paiement intégral de ses loyers en s'abstenant de régler l'indexation annuelle légale, ainsi qu'il ressort des enquêtes adressées par la CAF des Hauts de Seine qu'elle a renseignées les 17 décembre 2014 et en 2016, et du courrier qu'elle lui a adressé le 10 août 2015.
Il s'ensuit que c'est à juste titre que le premier juge a condamné M. [Y] à lui payer la somme de 17 400,28 euros au titre des loyers et indemnité d'occupation impayés arrêtés au 1er janvier 2021. Le jugement dont appel doit être confirmé sur ce point, étant ajouté que le locataire doit être déclaré irrecevable en sa demande subsidiaire tendant à voir condamner le Préfet des Hauts de Seine à le garantir du montant de cette condamnation.
Mme [Z] doit être déclarée bien fondée en cause d'appel à actualiser en cause d'appel, sa demande au titre de sa créance locative, M. [Y] étant condamné à lui verser la somme de 4 465,41 euros au titre des indemnités d'occupation égales au montant du loyer, outre les provisions sur charges, de février 2021 à décembre 2021, l'appelant ne justifiant pas avoir libéré les lieux le 1er avril 2021, ainsi qu'il le prétend.
- sur le montant du remboursement des factures d'électricité.
M. [Y] poursuit la confirmation du jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Vanves du 15 avril 2021 en ce qu'il a fait droit à sa demande de remboursement des factures EDF mais de l'infirmer sur le montant de 797,07 euros au paiement duquel Mme [Z] a été condamnée, faisant valoir que le contrat de bail prévoyait que les abonnements et consommations d'électricité, de gaz et de téléphone ainsi que la taxe d'habitation à la charge du locataire seraient de 33,33%. Il indique avoir réglé la somme totale de 7238,15 euros au titre de la facture EDF, de sorte que Mme [Z] doit être condamnée à lui verser la somme de 2 412,48 euros correspondant à 1/3 de du montant de l'ensemble des factures.
Mme [Z] réplique que le juge des contentieux de la protection s'est basé sur le bail initial pour faire droit à la demande de M. [Y], alors que ce dernier a violé les dispositions du contrat en occupant seul l'appartement et en lui interdisant l'accès aux lieux.
Sur ce,
Aux termes du contrat de bail, il est effectivement prévu que les abonnements et consommations d'électricité, de gaz et téléphone, ainsi que la taxe d'habitation seront pris en charge à 33,33% par le locataire en fonction du relevé du compteur lors de l'état des lieux d'entrée et de sortie.
M. [Y] sollicite la condamnation de Mme [Z] au remboursement partiel des sommes qu'il a versées, sans pour autant contester que la propriétaire n'a jamais vécu dans les lieux.
Mme [Z] verse plusieurs mains courantes déposées en mai 2013 au commissariat de [Localité 12] aux termes desquelles elle déclare ne plus pouvoir accéder à son appartement, M. [Y] ayant fait procéder à l'installation d'un verrou supplémentaire sur la porte d'entrée de l'appartement.
Il ressort également d'un document intitulé 'événement de main courante' daté du 18 juin 2013 que les gardiens de la paix du commissariat de [Localité 12] ont été requis le jour même pour un différend entre un locataire et un propriétaire, que sur place, ils ont dû séparer deux personnes qui se disputaient, qu'interrogée, Mme [Z] leur indique avoir fait appel à leurs services car le locataire de l'appartement dont elle est propriétaire refuse de la laisser rentrer afin de lui permettre d'effectuer, en présence d'un entrepreneur, une évaluation des travaux nécessaires dans son appartement qu'elle doit effectuer en vertu d'une décision rendue un mois auparavant, que de son côté, M. [Y] leur a indiqué louer l'intégralité de l'appartement.
Il s'ensuit que Mme [Z] n'a jamais partagé l'appartement dont elle est propriétaire avec M. [Y], étant observé par ailleurs que la seconde chambre de l'appartement a été occupée pendant un temps, par une autre personne qui est partie sans payer et sans laisser d'adresse, Mme [Z] déclarant ayant préféré vivre chez une amie à proximité pendant que les deux hommes louaient chacun une chambre à son domicile.
En conséquence, M. [Y] qui admet avoir loué et occupé seul l'appartement, alors que l'assiette du bail ne comportait qu'une chambre, outre l'usage des parties communes de l'appartement, doit être débouté de sa demande de remboursement des abonnements et consommations afférentes. Le jugement est infirmé sur ce point.
- sur la demande de dommages-intérêts.
M. [Y] sollicite la condamnation de Mme [Z] à lui verser la somme de 34 675 euros à titre de dommages-intérêts pour mise à disposition d'un appartement indécent et pour refus de procéder aux travaux de mise aux normes, et exécution de mauvaise foi du contrat de bail.
Mme [Z] réplique que le logement n'a, à aucun moment, été indécent, ni déclaré insalubre, que le commissaire de justice qui a effectué le 16 juin 2011 un constat à la demande de M. [Y], a seulement relevé quelques écaillements de peinture et anomalies électriques, soulignant que d'après le locataire, la peinture serait au plomb. Mme [Z] indique n'avoir pu faire réaliser qu'en juillet 2013 les travaux prescrits par le tribunal de proximité de Vanves, dans son ordonnance du 4 avril 2013, en raison des difficultés rencontrées avec le locataire, et avoir fait établir le 22 juillet 2013 un constat par commissaire de justice, lequel fait état que l'ensemble des peintures a été refait à neuf, que les éléments d'équipement sont en bon état, y compris les WC et la chasse d'eau, ce qui contredit l'attestation rédigée par M. [T], produite par M. [Y]. Mme [Z] ajoute que l'état des lieux que M. [Y] a fait établir en 2020 tend à démontrer qu'il est lui-même à l'origine des dégradations constatées.
Sur ce,
L'article 1719 du code civil dispose: ' le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière de délivrer au preneur la chose louée et, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d'habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l'expulsion de l'occupant'.
Aux termes de l'article 1720 du même code, 'le bailleur est tenu de délivrer la chose en bon état de réparations de toute espèce. Il doit y faire, pendant la durée du bail, toutes les réparations qui peuvent devenir nécessaires, autres que les locatives'.
L'article 6 de la loi d'ordre public du 6 juillet 1989 dispose notamment que ' le bailleur est obligé :
a) de délivrer au locataire le logement en bon état d'usage et de réparation ainsi que les éléments mentionnés au contrat de location en bon état de fonctionnement, toutefois, les parties peuvent convenir par une clause expresse des travaux que le locataire exécutera ou fera exécuter et des modalités de leur imputation sur le loyer (.....).
b) d'assurer au locataire la jouissance paisible du logement et sans préjudice des dispositions de l'article 1721 du Code civil, de le garantir des vices ou défauts de nature à y faire obstacle, hormis ceux qui consignés dans l'état des lieux, qui auraient fait l'objet de la clause expresse mentionnée ci-dessus.
c) d'entretenir les locaux en état de servir à l'usage prévu par le contrat et d'y faire toutes les réparations autres que locatives, nécessaires au maintien en état et à l'entretien normal des locaux loués'.
Il incombe, par ailleurs, au bailleur de délivrer au locataire un logement en bon état d'usage, de réparation et qui réponde aux normes de décence prescrites par les articles 1 et 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 relatifs aux caractéristiques du logement décent étant rappelé que cette obligation a un caractère d'ordre public.
Il s'ensuit que le bailleur a l'obligation de maintenir le logement dans cet état décent et non dangereux pour le locataire, dès lors qu'il a été informé de sa dégradation à la suite d'événements non imputables au locataire.
En l'espèce, M. [Y] invoque le trouble de jouissance résultant du caractère indécent des lieux pris à bail.
Du procès-verbal de constat établi le 16 juin 2011 par Me [G] [H], commissaire de justice, il ressort que l'ensemble des murs ainsi que le plafond de la chambre louée présentent des peintures écaillées et craquelées, que dans l'entrée, l'éclairage est assuré par une douille pendante rattachée à des fils électriques béants, la colonne de la vasque de la salle de bains est cassée, la vasque est en outre descellée, des fuites sont visibles au niveau des tuyauteries du ballon d'eau, la porte palière est voilée et le bloc serrure est maintenu par une vis, une partie de l'éclairage de la cuisine est assurée par une douille avec ampoule et fils électriques béants en applique, le mur situé à l'arrière de l'évier est endommagé.
Contrairement à ce que soutient M. [Y], Mme [Z] justifie avoir exécuté le jugement rendu le 4 avril 2013 par le tribunal d'instance de Vanves, en procédant aux travaux de reprise des désordres affectant les lieux loués et ce, en juillet 2013. Postérieurement à la réalisation des travaux, elle a fait établir le 22 juillet 2013 un procès-verbal de constat par la SCP Cochin Nunes, commissaires de justice, duquel il ressort que l'ensemble des peintures est à l'état neuf, et que les éléments d'équipement sont en bon état, y compris les WC et la chasse d'eau.
Néanmoins, la cour observe que le commissaire de justice mandaté par Mme [Z] s'est borné à faire des constatations visuelles, c'est ainsi qu'il ne mentionne pas avoir vérifié si la douche ou les WC sont en état de fonctionnement en procédant à des essais.
Aux termes du procés-verbal de constat qu'il a dressé le 15 octobre 2020 à la requête de M. [Y], le commissaire de justice indique que la porte palière présente un jeu, qu'elle est voilée en partie supérieure, qu'elle ne comporte pas de bouton permettant de faire pénétrer le pêne, à l'exception d'une simple vis, qu'une pièce de 5 centimes sert de cale dans la serrure, que par ailleurs une seule vis sur trois est présente, que dans les WC, après avoir tiré la chasse, il a constaté qu'il faut attendre 25 mn pour le réservoir d'eau se remplisse, que la chasse ne permet pas d'évacuer toutes les déjections, que l'installation électrique de l'ensemble de l'appartement n'est pas relié à la terre, que le ballon d'eau chaude présente des traces de ruissellement et que de l'eau tombe en goutte à goutte dans un récipient.
S'agissant de la part de responsabilité de M. M. [Y] dans la survenance des désordres affectant les parties sont en désaccord, le bailleur soutenant qu'elles sont imputables au locataire durant son occupation des lieux. Cependant, la cour observe que Mme [Z] se borne à procéder par voie d'affirmations sans produire la moindre pièce probante de nature à justifier son argumentation. En tout état de cause, les désordres qui sont incontestables, caractérisent un manquement du bailleur à son obligation de résultat d'assurer à son locataire une jouissance paisible des lieux donnés à bail.
Pour autant, M. [Y] n'est pas fondé en sa demande tendant à voir condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 34 675 euros à titre de dommages-intérêts pour mise à disposition d'un appartement indécent et absence de travaux de mise aux normes. En effet, une telle demande dont le locataire n'explique d'ailleurs pas le montant, reviendrait à faire jouer l'exception d'inexécution qui n'est pas justifiée en l'espèce, l'appartement n'étant pas inhabitable, puisque M. [Y] l'a habité du 9 août 2010 jusqu'au 1er avril 2021, soit durant près de 11 ans.
Il s'ensuit que compte tenu de la durée du trouble, de son intensité, mais également et surtout du fait du refus du locataire de laisser l'accès aux lieux loués, de la réalisation par la bailleresse de travaux de peinture en 2013, la cour estime devoir allouer à M. [Y] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnisation de son trouble de jouissance.
Mme [Z] doit donc être condamnée au paiement de cette somme, le jugement étant infirmé sur ce point.
Sur la demande reconventionnelle de Mme [Z] au paiement de dommages-intérêts.
Mme [Z] sollicite la condamnation de M. [Y] à lui verser la somme de 10 000 euros à titre d'indemnisation du préjudice moral qu'elle prétend avoir subi du fait de l'appropriation par le locataire de l'intégralité des lieux, alors qu'elle ne lui a loué qu'une chambre avec faculté d'utiliser les parties communes de l'appartement, et ce, alors qu'elle paie les mensualités du crédit qu'elle a souscrit pour l'acquérir; que les montants mensuels des loyers versés par le locataire ne couvre pas ainsi qu'en raison de l'état très sale des lieux, lors de leur libération.
Eu égard aux éléments du dossier, Mme [Z] caractérise le préjudice moral qu'elle allègue qui sera suffisamment indemnisé par l'allocation de la somme de 3 000 euros.
Sur la compensation.
Il y a lieu de prononcer la compensation entre les montants des condamnations réciproques des parties.
Sur les mesures accessoires.
M. [Y] doit être condamné aux dépens de la procédure d'appel, les dispositions du jugement contesté relatives aux dépens de première instance étant, par ailleurs, confirmées.
Il y a lieu de faire droit à la demande de Mme [Z] au titre des frais de procédure par elle exposés en cause d'appel en condamnant M. [Y] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS.
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement rendu le 15 avril 2021 par le tribunal de Proximité de Vanves en ses dispositions non contestées ayant validé le congé et ayant prononcé l'expulsion de M. [Y] avec toutes les conséquences subséquentes sur le sort des meubles et la fixation du montant de l'indemnité d'occupation,
Confirme le jugement rendu le 15 avril 2021 par le tribunal de Proximité de Vanves en sa disposition ayant condamné M. [Y] à verser à Mme [Z] la somme de 17 400,28 euros au titre des loyers et indemnité d'occupation impayés arrêtés au 1er janvier 2021, ainsi qu'en celles relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,
Déclare M. [Y] irrecevable en sa demande subsidiaire tendant à voir condamner le Préfet des Hauts de Seine à le garantir du montant de cette condamnation,
Déclare Mme [Z] bien fondée en cause d'appel à actualiser sa demande au titre de sa créance locative et condamne en conséquence M. [Y] à lui verser la somme de 4 465,41 euros au titre des indemnités d'occupation égales au montant du loyer, outre les provisions sur charges, de février 2021 à décembre 2021,
Infirme le jugement rendu le 15 avril 2021 par le tribunal de Proximité de Vanves en ses autres dispositions,
Statuant à nouveau des chefs infirmés,
Déboute M. [Y] de sa demande de remboursement des factures d'électricité,
Condamne Mme [Z] à verser à M. [Y] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnisation de son trouble de jouissance,
Condamne M. [Y] à verser à Mme [Z] la somme de 3 000 euros à titre d'indemnisation de son préjudice moral,
Prononce la compensation entre les montants des condamnations réciproques des parties,
Y ajoutant,
Condamne M. [Y] à verser à Mme [Z] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [Y] aux dépens d'appel qui seront recouvrés selon les dispositions concernant l'aide juridictionnelle.
- prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,