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08/06/2023 | FRANCE | N°22/03227

France | France, Cour d'appel de Versailles, 6e chambre, 08 juin 2023, 22/03227


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



6e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 08 JUIN 2023



N° RG 22/03227 -

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPNK



AFFAIRE :



S.A.S. F.C.M.



C/



[D] [Y]



Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Octobre 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : RE

N° RG : R 22/00027









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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Anna MEKOUAR



Me Nicolas SANFELLE







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'a...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 JUIN 2023

N° RG 22/03227 -

N° Portalis DBV3-V-B7G-VPNK

AFFAIRE :

S.A.S. F.C.M.

C/

[D] [Y]

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 07 Octobre 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de POISSY

N° Section : RE

N° RG : R 22/00027

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Anna MEKOUAR

Me Nicolas SANFELLE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, devant initialement être rendu le 25 mai 2023 et prorogé au 08 juin 2023, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :

S.A.S. F.C.M.

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Anna MEKOUAR de la SELEURL CLAIM, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0901 substitué par Me Claire SIRQUEL-BERNEZ

APPELANTE

****************

Monsieur [D] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Nicolas SANFELLE de la SARL AVOCATS SC2 SARL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 445

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Domitille GOSSELIN,

Vu l'ordonnance rendue le 7 octobre 2022 par la formation de référé du conseil de prud'hommes de Poissy,

Vu la déclaration d'appel de la société FCM du 26 octobre 2022,

Vu les conclusions de la société FCM du 20 janvier 2023,

Vu les conclusions de M. [D] [Y] du 20 décembre 2022,

Vu l'avis de fixation à bref délai du 31 octobre 2022,

Vu l'ordonnance de clôture du 1er février 2023.

EXPOSE DU LITIGE

La société FCM, dont le siège social est [Adresse 2] à [Localité 4], est spécialisée dans l'industrie mécanique automobile. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.

M. [D] [Y], né le 21 mai 1965, a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein, par la société FCM, à compter du 20 juin 2018, en qualité de directeur industriel.

Par lettre du 11 mars 2019, M. [Y] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement qui s'est tenu le 21 mars 2019.

Par lettre du 29 mars 2019, la société FCM a notifié à M. [Y] son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Par requête reçue le 27 juin 2022, M. [D] [Y] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Poissy aux fins de voir condamner la société FCM au versement de diverses sommes indemnitaires et salariales.

La société FCM avait, quant à elle, demandé de :

- donner acte a la société FCM de son accord sur le versement de la somme de 9 040,61 euros nets avant prélèvement à la source, à titre de solde de tout compte, au bénéfice de M. [Y],

- débouter M. [Y] de sa demande de remise de documents sociaux sous astreinte comme étant sans objet,

- se déclarer incompétent pour statuer sur la demande indemnitaire de M. [Y],

- en tout état de cause, la juger mal fondée et l'en débouter,

- se déclarer incompétent pour statuer sur les demandes de remboursement des frais de logement, rappel de primes sur chiffres d'affaires,

- en tout état de cause, les juger mal fondées et l'en débouter,

- débouter M. [Y] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [Y] à verser à la société FCM 1 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance de référé rendue le 7 octobre 2022, la formation de référé du conseil de prud'hommes de Poissy a :
- ordonné à la société FCM de payer à M. [D] [Y] les sommes suivantes :

10 896,06 euros bruts soit 9 040,61 euros nets sous astreinte de 100 euros par jour conformément à l'article L.131-1 du code de procédure civile d'exécution, au titre du solde de tout compte,

1 976,89 euros au titre du rappel des avantages sur frais de logement sur la durée de la période d'essai,

3 000 euros au titre de la prime contractuelle,

1 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice économique et financier ; cette somme sera une provision sur dommages et intérêts au titre de l'article 1455 du code de procédure civile,

1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente ordonnance,

- débouté M. [D] [Y] du surplus de ses demandes,

- débouté la société FCM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que l'ordonnance de référé est exécutoire à titre provisoire,

- mis les entiers dépens de l'instance, y compris les éventuels frais d'exécution à la charge de la société FCM.

Par déclaration du 26 octobre 2022, la société FCM a interjeté appel de cette ordonnance.

L'affaire a été fixée à bref délai le 31 octobre 2022.

Aux termes de ses conclusions en date du 20 janvier 2023, la société FCM demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance de référé du conseil de prud'hommes de Poissy prononcée le 7 octobre 2022 en ce qu'elle a :

- assorti d'une astreinte de 100 euros par jour de retard le versement du solde de tout compte par la société FCM, en application de l'article L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution,

- condamné la société FCM à verser à M. [D] [Y] une somme de 1 000 euros à titre de provision à valoir sur les dommages et intérêts,

- déclaré compétente pour statuer sur les demandes en rappel d'« avantage » sur frais de logement et de prime contractuelle, sur le fondement des articles R. 1455-5 à R. 1455-7 du code du travail,

Ce faisant,

- condamné la société FCM à verser à M. [D] [Y] la somme de 1 976,89 euros à titre de rappel d'« avantage » sur frais de logement sur la durée de la période,

- condamné la société FCM à verser à M. [D] [Y] la somme de 3 000 euros à titre de rappel de prime contractuelle,

- condamné la société FCM à verser à M. [Y] une somme de 1 000 euros au titre l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

Statuant à nouveau, il est demandé à la cour de :

- débouter M. [Y] de sa demande de condamnation de la société FCM au versement de la somme de :

-1 000 euros à titre de dommages et intérêts ou de provision à valoir sur les dommages et intérêts,

- 1 976,89 euros à titre de rappel sur frais de logement,

- 3 000 euros à titre de rappel de la prime contractuelle,

- 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 2 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- des dépens de première instance et d'appel,

- débouter M. [Y] de sa demande tendant à voir condamner la FCM à supporter les dépens de l'instance,

- condamner M. [D] [Y] à verser à la société FCM la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [D] [Y] à supporter les dépens de première instance et d'appel.

Aux termes de ses conclusions en date du 20 décembre 2022, M. [D] [Y] demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance de référé rendue le 7 octobre 2022 par le conseil de prud'hommes de Poissy en ce qu'elle a :

- ordonné à la société FCM de payer à M. [Y] les sommes suivantes :

- 10 896,06 euros bruts soit 9 040,61 euros nets sous astreinte de 100 euros par jour conformément à l'article L. 131-1 du code de procédure civile d'exécution, au titre du solde de tout compte,

- 1 976,89 euros au titre de rappel des avantages sur frais de logement sur la durée de la période d'essai,

- 3 000 euros au titre de la prime contractuelle,

- 1 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice économique et financier ; cette somme sera une provision sur dommages et intérêts au titre de l'article 1455 du code de procédure civile,

- 1 000 euros au titre de l'article 700 [sic],

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente ordonnance,

- débouté la société FCM de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- mis les entiers dépens de l'instance, y compris les éventuels frais d'exécution à la charge de la société FCM,

Et y ajoutant,

- condamner la société FCM à verser à M. [Y] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société FCM aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions déposées, soutenues à l'audience et rappelées ci-dessus.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 1er février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il est rappelé :

- qu'en application des dispositions de l'article R. 1455-5 du code du travail, « dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ».

- qu'en application des dispositions de l'article R. 1455-6 du même code, « la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ».

- qu'en application des dispositions de l'article R. 1455-7 du même code, « dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ».

1- sur le paiement du solde de tout compte, la remise des documents sociaux et l'astreinte

L'appelante soutient que les diligences entreprises pour assurer le règlement du solde de tout compte au conseil de M. [Y] ne justifiait pas la mise à charge d'une astreinte de 100 euros par jour de retard.

L'intimé fait valoir que l'employeur a manqué à son obligation de paiement du salaire et de délivrance des documents sociaux, a attendu le 29 septembre 2022 après l'audience devant la formation de référé du 16 septembre 2022 pour s'exécuter, ce qui constitue un manquement grave de l'employeur à ses obligations contractuelles.

En l'absence de règles particulières énoncées par le code du travail, les règles du code civil s'appliquent, à savoir l'article 1247 dont il ressort que, sauf convention contraire, le paiement doit être fait au domicile du débiteur (l'employeur). Le salaire est donc quérable et non portable.

Il en est de même pour les documents sociaux.

En l'espèce, il est constant que le licenciement est intervenu le 29 mars 2019, le préavis exécuté par le salarié s'est achevé le 28 juin 2019.

Selon les pièces n°3-1 à 3-5 de l'appelante, cette dernière a adressé, selon ses dires par lettre simple du 1er juillet 2019, un bulletin de salaire portant sur la somme de 9 040,61 euros, soit le montant du solde de tout compte, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte, une attestation pôle emploi, le tout daté du 28 juin 2019 et un chèque n°0611516 de 9 040,61 euros établi le 29 juin 2019 sur la Banque populaire. Des photocopies de ces documents et du chèque sont produits.

L'adresse mentionnée sur les documents correspond à l'adresse inscrite sur le contrat de travail de M. [Y] (pièce n°1 des parties) et les bulletins de salaire de juin 2018 à juin 2019 (pièce n°2 intimé ; pièce 3-1 de l'appelante).

Ce n'est que le 30 octobre 2019 que le salarié s'est plaint de ne pas avoir reçu son solde de tout compte et les documents sociaux (pièce n°4 appelante ; pièce n°5 intimé) et a exigé leur envoi.

Par message du 15 novembre 2019 confirmé par une lettre recommandée avec accusé de réception du 20 novembre 2019 (pièces n°5 et 6-1 appelante), l'employeur a indiqué au salarié que l'envoi avait été fait le 1er juillet 2019. Il lui demandait de vérifier ses dossiers personnels et en cas de perte - le chèque n'ayant effectivement pas été débité -, de lui adresser une déclaration selon laquelle au cas où le chèque serait retrouvé, il ne l'encaisserait pas et indiquait qu'à réception, il procéderait à un nouvel envoi.

Il n'est pas justifié par le salarié, contrairement à ses dires, qu'il ait adressé le moindre courrier à l'employeur pendant près de trois ans et par conséquent la déclaration réclamée par l'employeur.

Cependant, l'employeur ne peut sérieusement soutenir avoir cru que tout était réglé, puisque le chèque n'avait pas été débité de son compte.

Ce n'est que par lettre du 8 juin 2022 envoyée par message électronique dont il est établi qu'il n'a pas été reçu par la société FCM (sa pièce n° 7), que M. [Y] a réclamé les documents sociaux, le paiement de l'indemnité de logement à hauteur de 500 euros par mois. de la prime semestrielle, d'une prime sur chiffre d'affaire, de frais de déplacement, de notes de frais, de frais de téléphone, l'intimé ne produisant pas lui-même ce message.

Il n'est pas contesté que le salarié s'est déplacé à l'entreprise le 1er juillet 2022 pour réclamer le paiement et les documents sociaux, l'employeur ayant refusé selon la main courante déposée par M. [Y] (sa pièce n°8) tout contact au motif que ce dernier avait déjà engagé la procédure devant le conseil de prud'hommes.

Selon le message officiel du conseil de la société FCM du 25 juillet 2022 au conseil de M. [Y], les documents de fin de contrat ont été adressés à cette date, l'employeur s'engageant à régler le solde de tout compte soit 9 040,61 euros en début septembre 2022 à la reprise de l'activité de l'équipe comptable (pièce n°11 appelante).

Sans qu'il soit nécessaire d'épiloguer sur l'auteur du renvoi d'audience - M. [Y] reconnaissant cependant que la demande émanait de lui contrairement aux termes de l'ordonnance -, sur le refus de remettre le chèque établi à l'ordre de la CARPA à l'audience du 16 septembre 2022, il est constant que le paiement de la somme de 9 040,61 euros et la remise des documents sociaux sont intervenus le 29 septembre 2022 reçus le lendemain, soit antérieurement à la date à laquelle l'ordonnance a été rendue.

Cependant, l'appelante ne demande pas l'infirmation de la décision sur la condamnation au paiement de la somme de 9 040,61 euros mais uniquement sur l'astreinte laquelle ne se justifiait pas, au regard des éléments du dossier ci-dessus.

L'ordonnance sera infirmée en ce que la formation de référé a assorti la condamnation d'une astreinte.

2- sur la prime contractuelle

L'employeur soulève une contestation sérieuse et soutient que la prime était calculée sur le salaire de base et non sur le salaire brut, qu'elle était plafonnée et soumise à l'appréciation de l'employeur en fonction de critères rappelés dans la note de service du 12 septembre 2018, qui n'étaient pas réunis au vu de l'insuffisance professionnelle. Il ajoute que la prime n'était jamais versée au cours des 6 premiers mois de présence.

Le salarié fait valoir que la prime est calculée sur le salaire brut, qu'elle n'a jamais été versée et que les critères qualitatifs ne sont pas définis. Il indique également que l'affirmation selon laquelle la prime n'est jamais versée au cours des six premiers mois n'est pas justifiée par des pièces financières ou un document relatif aux modalités de versement de la prime.

L'article 4 du contrat de travail de M. [Y] stipule :

'en contrepartie de ses fonctions, [Y] [sic] percevra une rémunération forfaitaire mensuelle brute de 6 000 euros pour un horaire hebdomadaire de 39 heures.[...]

Une prime sera également versée en mai et novembre d'un montant cumulé ne dépassant pas un demi mois de salaire brut de base. [...]'.

Selon la définition de l'INSEE du salaire mensuel de base donnée par l'employeur, 'le salaire mensuel de base (SMB) correspond au salaire brut avant déduction des cotisations sociales et avant versement des prestations sociales. Il ne comprend ni les primes ni les heures supplémentaires. Son montant correspond généralement à celui de la première ligne du bulletin de paye d'un salarié.'

Cette même définition est reprise par la direction de l'animation, de la recherche, des études et des statistiques (DARES) dépendant du ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion.

Les bulletins de salaire de M. [Y] mentionnent effectivement en première ligne 'salaire de base' 5 250,14 euros, 'heures supplémentaires à 25%' 749,86 euros, 'salaire brut' 6 000 euros.

Le fait qu'il soit mentionné un salaire de base total au dessus du salaire brut pour le même montant (6 000 euros) est indifférent au regard de la définition rappelée ci-dessus.

Le contrat de travail ne mentionne aucun critère qui serait opposable à M. [Y], la production d'une note de service du 12 septembre 2018 postérieure au contrat de travail intitulée'rappels des principes d'attribution des primes semestrielles' est insuffisante pour affirmer que le contenu de la note était opposable à M. [Y].

En effet, le contrat de travail ne reprend pas ces principes d'attribution. Il n'existe aucune annexe au contrat sur un document antérieur à la note de service précitée reprenant les principes d'attribution des primes.

Enfin, sans remettre en cause les attestations de deux salariés affirmant que 'la prime d'assiduité' n'est pas perçue 'pendant les six premiers mois', qu'elle est 'variable' et 'fixée après concertation des membres de la hiérarchie car elle tient compte de divers critères d'assiduité', il convient de constater que l'employeur n'établit pas avoir porté à la connaissance du salarié lors de l'embauche, l'ensemble de ces éléments.

En conséquence, l'obligation n'étant pas sérieusement contestable, il est dû à titre de provision une somme de 2 625,07 euros.

L'ordonnance sera infirmée sur le quantum alloué.

M. [Y] sera débouté du surplus de sa demande à ce titre.

3- sur les frais de logement

L'appelante soutient que la demande du salarié au titre de l'indemnité de logement est prescrite, s'agissant non pas d'un avantage en nature mais de frais professionnels limités à la période d'essai.

L'intimé fait valoir au contraire que les frais de logement constituent un avantage en nature, que le contrat de travail ne mentionnait pas qu'ils étaient réglés sur présentation de justificatifs, que le caractère forfaitaire de l'avantage témoigne de sa nature étrangère à un remboursement.

Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail 'toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.'

Le contrat de travail mentionne '[...] par ailleurs le logement sera pris en charge pour un maximum de 500 euros mensuels pendant toute la durée de la période d'essai.'

Si cette indemnité au titre des frais de logement est considérée comme un avantage en nature, élément de la rémunération, la prescription biennale ne s'applique pas, la prescription étant alors triennale conformément à l'article L. 3245-1 du code du travail.

Si l'indemnité est considérée au contraire comme un remboursement de frais professionnels, la prescription biennale s'applique.

En l'espèce, la clause du contrat précitée prévoit non pas la mise à disposition d'un logement ou le paiement du loyer même partiel pendant toute l'exécution du contrat de travail ce qui serait un avantage en nature assimilé à un salaire devant figurer sur le bulletin de salaire et soumis à cotisations, mais seulement un remboursement à hauteur de 500 euros des frais d'hébergement du salarié pendant la seule période d'essai, étant établi que M. [Y] avait son domicile principal dans le département de la Loire Atlantique.

Il convient de constater, avec l'évidence nécessaire en référé, que M. [Y] a saisi le conseil de prud'hommes le 27 juin 2022, d'une demande relative à l'indemnité de logement trois ans moins un jour après la rupture du contrat de travail, de sorte que son action est prescrite.

La demande est donc irrecevable.

4- sur la provision sur les dommages-intérêts pour préjudice économique et financier

L'appelante soutient qu'elle ne peut être condamnée à des dommages-intérêts distincts des intérêts moratoires que s'il est démontré qu'elle a agi avec mauvaise foi en différant le paiement et causé un préjudice supplémentaire. L'intimé n'établit pas, selon elle, la mauvaise foi de l'employeur.

L'intimé fait valoir qu'il n'a pas été réglé des sommes dues et ce malgré ses multiples relances, ce qui l'a placé dans une situation financière délicate.

Aux termes de l'article 1231-6 du code civil 'les dommages et intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de somme d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure.

Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.

Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts de l'intérêt moratoire.'

Il résulte de ce qui précède que l'employeur a dès le 1er juillet 2019 adressé au salarié le chèque en paiement du solde de tout compte et les documents sociaux alors qu'il appartenait à M. [Y] d'en prendre possession au sein de l'entreprise à la fin de son préavis.

Il est également établi que le salarié n'a eu aucune réaction suite à la réponse de l'employeur à son courrier du 8 octobre 2019 et a attendu trois années pour saisir le conseil de prud'hommes.

Au regard de ces éléments, il ne démontre pas avec l'évidence nécessaire en référé de la mauvaise foi de l'employeur qui justifierait l'allocation d'une provision sur dommages-intérêts distincts des intérêts de retard auxquels la société FCM a été condamnée.

L'ordonnance sera infirmée de ce chef.

M. [Y] sera débouté de sa demande.

5- sur les frais irrépétibles et les dépens

L'ordonnance sera confirmée de ces chefs.

Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Infirme l'ordonnance rendue le 7 octobre 2022 par la formation de référé du conseil de prud'hommes de Poissy sauf en ce qu'elle a condamné la société FCM au paiement d'une somme de 10 896,06 brut soit 9 040,61 euros nets au titre du solde de tout compte avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'ordonnance, au paiement d'une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit qu'il n'y avait lieu à assortir la condamnation au paiement du solde de tout compte d'une astreinte,

Condamne la société FCM à payer à M. [D] [Y] la somme de 2 625,07 euros à titre de provision sur prime semestrielle avec intérêt au taux légal à compter de l'ordonnance,

Déboute M. [D] [Y] du surplus de sa demande à ce titre,

Déclare irrecevable car prescrite la demande de M. [Y] au titre de frais de logement,

Déboute M. [Y] de sa demande de provision sur dommages-intérêts pour préjudice économique et financier,

Déboute les parties de leurs demandes respectives en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 6e chambre
Numéro d'arrêt : 22/03227
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;22.03227 ?
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