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07/06/2023 | FRANCE | N°21/03787

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 07 juin 2023, 21/03787


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80C



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 07 JUIN 2023



N° RG 21/03787



N° Portalis DBV3-V-B7F-U5CX



AFFAIRE :



[P], [T] [R]





C/

S.A.R.L. JIPI II









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F19/01058
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Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELEURL MINAULT TERIITEHAU



la SELASU KERYS







le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rend...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 07 JUIN 2023

N° RG 21/03787

N° Portalis DBV3-V-B7F-U5CX

AFFAIRE :

[P], [T] [R]

C/

S.A.R.L. JIPI II

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F19/01058

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL MINAULT TERIITEHAU

la SELASU KERYS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [P], [T] [R]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 N° du dossier 20210463

Représentant : Me Laurent LEGUIL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0524

APPELANTE

****************

S.A.R.L. JIPI II

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me David LEVY de la SELASU KERYS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0101

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 Avril 2023, Madame Laure TOUTENU, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY

EXPOSE DU LITIGE

Mme [P] [R] a été engagée par la société Jipi II suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 22 avril 2013 en qualité de psychologue, coefficient 330, avec le statut de cadre.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale de l'hospitalisation privée à but lucratif.

A compter du 3 février 2017, la salariée a fait l'objet d'arrêts de travail pour maladie.

Dans le cadre de la visite médicale de reprise du 4 avril 2017, le médecin du travail a rendu l'avis suivant :

'Aptitude impossible à déterminer,

Son état de santé ne lui permet pas de reprendre son poste,

Doit consulter son médecin traitant,

A revoir à l'issue'.

Lors de la visite médicale du 12 avril 2017, le médecin du travail a rendu l'avis d'inaptitude suivant: 'Inaptitude au poste et à tout poste dans l'entreprise confirmée,

Etude de poste et des conditions de travail réalisée le 10 avril 2017,

L'état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise'.

Par lettre du 9 mai 2017, Mme [R] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 19 mai 2017.

Par lettre du 24 mai 2017, l'employeur a licencié la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Contestant son licenciement, le 27 juillet 2017 Mme [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre afin d'obtenir la condamnation de la société Jipi II au paiement de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse et de diverses indemnités et sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 6 décembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a fixé la moyenne mensuelle des salaires de Mme [R] à 2 682,40 euros, a constaté que l'inaptitude n'est pas professionnelle, l'a déboutée de ses demandes au titre de l'exécution déloyale de son contrat de travail, a dit et jugé que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence, l'a déboutée de toutes ses demandes, a débouté les parties de leurs autres demandes respectives et a condamné Mme [R] aux dépens de l'instance.

Le 22 décembre 2021, Mme [R] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 10 mars 2023, Mme [R] demande à la cour de :

- infirmer, réformer ou annuler la décision déférée en ce qu'elle a fixé la moyenne mensuelle de ses salaires à la somme de 2 682,40 euros, l'a déboutée de sa demande tendant à la fixation de la moyenne de sa rémunération brute à la somme de 3 355,4 euros, subsidiairement à la somme de 2 682,4 euros, n'a pas fait droit à sa demande de voir constater que l'inaptitude est d'origine professionnelle et de ses demandes en conséquence, l'a déboutée de ses demandes au titre de l'exécution de son contrat de travail, dit et jugé que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, en conséquence, l'a déboutée de toutes ses demandes et l'a condamnée aux dépens de l'instance,

- statuant à nouveau et y ajoutant :

- à titre liminaire, fixer la moyenne de sa rémunération mensuelle brute :

* à titre principal à la somme de 3 355,40 euros bruts après réintégration des sommes dues à titre de rappel de salaire (salaire moyen 1),

* à titre subsidiaire à la somme de 2 682,40 euros bruts sans réintégration des sommes dues à titre de rappel de salaire (salaire moyen 2),

- à titre principal, dire que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement nul et condamner en conséquence la société au versement des sommes suivantes :

* 10 065 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1) ou 8 047 euros bruts (sur la base du salaire moyen 2) à titre d'indemnité de préavis (3 mois de salaire),

* 1 065 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1) ou 804,70 euros bruts (sur la base du salaire moyen 2) au titre des congés payés afférents,

* 40 264,80 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1), ou 32 188 euros nets (sur la base du salaire moyen 2) au titre des dommages-intérêts (12 mois de salaire),

- à titre subsidiaire, dire que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner en conséquence la société au versement des sommes suivantes :

* 10 065 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1) ou 8 047 euros bruts (sur la base du salaire moyen 2) au titre de l'indemnité de préavis (3 mois de salaire),

* 1 065 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1) ou 804,70 euros bruts (sur la base du salaire moyen 2) au titre des congés payés afférents,

- 32 175 euros nets au titre des dommages-intérêts,

- en tout état de cause, constater que l'inaptitude était d'origine professionnelle et, en conséquence condamner l'entreprise au versement des sommes suivantes :

* 1 934,50 euros nets à titre de rappel du prorata d'indemnité de licenciement spéciale non perçu,

* 10 065 euros bruts (sur la base du salaire moyen 1) ou 8 047 euros bruts (sur la base du salaire moyen 2) au titre de l'indemnité d'un montant équivalent à celui de l'indemnité compensatrice de préavis si l'indemnité de préavis et les congés payés y afférents ne sont pas déjà versés au titre de la nullité ou de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement,

- constater les nombreuses heures réalisées mais impayées et en conséquence condamner l'entreprise au versement des sommes suivantes :

* 25 992,39 euros bruts au titre d'un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires accomplies et non rémunérées outre 2 599,23 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

* 5 564 euros bruts au titre d'un rappel de salaire au titre de la contrepartie obligatoire en repos, outre 556,40 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

* 319,24 euros bruts au titre d'un rappel de salaire au titre des heures de nuit accomplies et non rémunérées, outre 31,92 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

* 20 132 euros nets (sur la base du salaire moyen 1) ou 16 092 euros nets (sur la base du salaire moyen 2) au titre d'une indemnité pour travail dissimulé (6 mois de salaire),

- condamner l'entreprise au remboursement de la somme de 2 266,65 euros nets indûment prélevée au titre des repas,

- condamner l'entreprise au rappel des primes de fin d'année non versées d'une somme de 2 998 euros bruts outre 299,80 euros bruts de congés payés y afférents,

- condamner l'entreprise au versement d'une somme de 3 355,40 euros nets (sur la base du salaire moyen 1) ou 2 682,40 euros nets (sur la base du salaire moyen 2) au titre des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi eu égard au refus de formation (1 mois de salaire),

- condamner l'entreprise au versement d'une somme de 10 065 euros nets (sur la base du salaire moyen 1) ou 8 047 euros nets (sur la base du salaire moyen 2) au titre des dommages-intérêts en réparation de l'exécution déloyale du contrat de travail et des préjudices qui en ont résulté (3 mois de salaire),

- condamner l'entreprise à verser la somme de 3 000 euros nets au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile (première instance et appel),

- prononcer la remise à compter du prononcé de la décision et sans délai, des documents sociaux conformes, soit le certificat de travail, l'attestation pôle emploi et le bulletin de paie dûment rectifié et prenant en compte les sommes éventuellement allouées à titre de rappel de salaire,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir pour toutes les demandes n'en bénéficiant pas de droit,

- assortir l'ensemble des condamnations prononcées des intérêts légaux, à compter de l'introduction de la demande et prononcer la capitalisation des intérêts et une astreinte de 20 euros nets par chef de condamnation et par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt, astreinte dont la cour se réservera la liquidation,

- condamner l'entreprise aux entiers dépens pouvant être recouvrés directement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 17 avril 2023, la société Jipi II demande à la cour de confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions, en conséquence, de débouter Mme [R] de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 18 avril 2023.

MOTIVATION

Sur les demandes de rabat de clôture et de rejet de conclusions et pièces

Par conclusions signifiées par voie électronique le 20 avril 2023, Mme [R] demande à la cour de rejeter les conclusions signifiées par la société Jipi II le 17 avril 2023 ainsi que les pièces numérotées 10 à 16 communiquées le 17 avril 2023, subsidiairement, de révoquer la clôture et d'admettre ses conclusions du 20 avril 2023.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 20 avril 2023, la société Jipi II demande à la cour de rejeter les demandes de Mme [R] et de déclarer irrecevables ses conclusions signifiées le 20 avril 2023.

En l'espèce, la société intimée a répliqué le 17 avril 2023, soit dans le délai qui lui avait été imparti par le conseiller de la mise en état pour conclure à l'audience du 24 mars 2023, pour une date de clôture fixée le 18 avril 2023, le principe du contradictoire et des droits de la défense a été respecté. Il n'y a donc pas lieu d'écarter les conclusions et les pièces des débats.

En outre, ne constitue pas une cause grave de révocation de l'ordonnance de clôture la signification de conclusions par la société intimée la veille de la date prévue pour la clôture, le principe du contradictoire ayant été respecté. Il convient donc de débouter Mme [R] de sa demande de rabat de l'ordonnance de clôture.

Les demandes de Mme [R] seront donc rejetées et ses conclusions signifiées le 20 avril 2023, postérieurement à la clôture, seront déclarées irrecevables.

Sur les heures supplémentaires

Sur la prescription

L'employeur soulève la prescription de la demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période antérieure au 24 mai 2014.

La salariée ne conclut pas sur ce point.

Aux termes de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

En l'espèce, la saisine de la salariée a été enregistrée par le conseil de prud'hommes de Nanterre le 27 mai 2017, de sorte que la demande antérieure au 24 mai 2014, comme sollicité, est prescrite.

Par conséquent, la demande en paiement d'heures supplémentaires sur la période d'avril 2013 au 24 mai 2014 doit être déclarée irrecevable pour cause de prescription.

Sur le fond

En application notamment de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences légales et réglementaires.

Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

La salariée indique qu'elle effectuait les missions de son poste mais également bien d'autres tâches qui ne relevaient pas de son poste en raison du manque de personnel.

Elle produit quelques pages (9/9/2016, 21/9/2016, 11/10/2016, 27/01/2017) photographiées de feuilles de présence renseignées de façon quotidienne, déplorant que l'employeur n'ait produit que les trois premiers mois de mise en place en dépit de ses demandes, montrant des heures de prise de poste vers 10h15 le matin, l'heure de fin de poste variant entre 18h10 et 19h45.

Elle verse également aux débats un décompte des heures travaillées de façon quotidienne ainsi que des heures supplémentaires qu'elle considère avoir effectuées au-delà des 35 heures hebdomadaires, avec un total mensuel et annuel, entre avril 2013 et janvier 2017, avec une distinction selon la majoration à 25% et à 50%.

Elle sollicite le paiement de 1 172,2 heures supplémentaires sur la période d'avril 2013 à janvier 2017, comprenant 22,07 heures au taux majoré à 50%, soit un montant total de 25 992,39 euros, outre les congés payés afférents.

La salariée produit également une lettre adressée à son employeur le 27 janvier 2017 dans laquelle elle dénonce une surcharge de travail, ce courrier faisant état d'heures supplémentaires et de missions importantes, ainsi que des échanges de courriels au sujet d'un groupe de parole équipe le soir. Elle verse aux débats, en outre, des attestations de trois médecins, de deux infirmières et de deux collaborateurs de la structure, témoignant de façon concordante de son engagement dans son emploi, ainsi que pour plusieurs d'entre eux d'une charge de travail très importante.

Il s'en déduit que la salariée présente des éléments suffisamment précis quant aux heures supplémentaires qu'elle considère avoir accomplies de sorte que l'employeur est en mesure d'y répondre.

L'employeur indique qu'il ne possède pas de pointeuse, que des feuilles de présence permettent de savoir quel est le personnel présent pour des questions de sécurité, mais qu'elles ne visent pas à décompter le temps de travail, en l'absence des temps de pause, du temps de repas, des interruptions pour occupations personnelles. Il produit les feuilles de présence du 26/09/2015 au 31/12/2015, critiquant le décompte de la salariée au vu d'incohérences.

L'employeur expose qu'il ne produit pas ces feuilles de présence en intégralité en raison du travail fastidieux d'anonymisation mais que celles-ci sont à disposition de la cour.

Il fait valoir que la salariée devait être présente aux côtés des résidents et de leurs familles dans la journée, les résidents dînant à 18 heures avant d'être pris en charge par les aides-soignantes. Il relève que le travail administratif de la salariée ne nécessitait pas sa présence à des horaires tardifs.

Il critique les attestations produites, celles-ci ne faisant état d'aucun fait précis et daté.

Après pesée des éléments produits par l'une et l'autre des parties, la cour a la conviction que la salariée a effectué des heures supplémentaires non rémunérées conformément aux missions qui lui étaient confiées qu'elle évalue à 6 110 euros, outre 611 euros au titre des congés payés afférents pour la période du 25 mai 2014 à janvier 2017.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ces points.

Sur la contrepartie obligatoire au repos

La salariée sollicite une somme de 5 564 euros au titre de la contrepartie obligatoire en repos outre les congés payés afférents. Elle indique qu'elle a effectué des heures supplémentaires en dépassement du contingent annuel conventionnel de 130 heures.

L'employeur conclut au débouté de la demande.

Au vu des éléments du dossier, le dépassement du contingent annuel conventionnel par la salariée n'est pas établi. Elle sera donc déboutée de sa demande au titre de la contrepartie obligatoire en repos et aux congés payés afférents.

Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur le travail de nuit

La salariée sollicite une somme de 319,24 euros au titre des heures de nuit, outre 31,92 euros au titre des congés payés. Elle indique qu'elle aurait dû percevoir une majoration conventionnelle de 10 % sur les 16 heures travaillées de nuit entre 2014 et 2016 dans le cadre d'un groupe de parole dont l'animation lui avait été demandée par l'employeur.

L'employeur conclut au rejet de la demande. Il fait valoir qu'il n'a jamais été demandé à la salariée de s'occuper du personnel dans le cadre d'un groupe de parole, cette dernière étant au service des résidents et non au service des équipes.

En vertu de l'article 82-1 de la convention collective applicable, les salariés affectés au poste de travail de nuit perçoivent pour chaque heure effectuée entre 19 heures et 8 heures une indemnité égale à 10 % du salaire horaire.

Il résulte des éléments produits au dossier que la salariée a eu la responsabilité d'animer un groupe de parole au service du personnel sur des horaires de nuit, cette mission étant conforme à son poste de travail et devant être rémunérée à défaut d'éléments probants quant à une intervention bénévole comme allégué par l'employeur.

Par conséquent, il sera fait droit à la demande de Mme [R] qui est conforme aux heures de nuit effectuées et à la majoration conventionnelle de 10 % pour un montant total de 319,24 euros, outre 31,92 euros au titre des congés payés afférents, sommes que la société Jipi II sera condamnée à payer à Mme [R].

Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

En l'espèce, le caractère intentionnel de la délivrance de bulletins de paie mentionnant un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli n'est pas établi. La salariée sera déboutée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de remboursement des sommes prélevées au titre des repas

Le principe 'à travail égal, salaire égal' s'applique au salaire de base ainsi qu'aux avantages et accessoires payés en espèce ou en nature par l'employeur.

S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal', de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.

En l'espèce, la salariée indique qu'elle n'a pas bénéficié de repas gratuits contrairement à l'ensemble des autres cadres de l'établissement. Ce faisant, elle présente des éléments susceptibles de caractériser une inégalité de traitement par rapport aux autres cadres au titre de l'avantage résultant de la prise en charge d'un repas.

L'employeur fait valoir que la salariée n'avait pas de sujétions particulières pendant le temps de repas, contrairement aux cadres infirmiers ou au personnel de direction amenés régulièrement à intervenir auprès du personnel et des résidents pendant leur repas, ce qui n'est pas le cas de la psychologue.

Il s'en déduit que l'avantage lié à la prise en charge des repas est justifié par des éléments objectifs du fait de la sujétion particulière du personnel de direction et des cadres infirmiers et ne constitue pas une atteinte au principe d'égalité. La salariée doit donc être déboutée de sa demande à ce titre.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre de la formation

La salariée sollicite des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi eu égard au refus de formation. Elle indique qu'elle n'a jamais bénéficié de formation et a essuyé des refus à ses demandes de formation en thérapie systémique/familiale et à un accès à une supervision. Elle conclut à une discrimination par rapport à ses collègues qui ont pu bénéficier de diverses actions de formation.

L'employeur conclut au rejet de la demande. Il précise que la salariée n'a pas demandé à bénéficier d'une formation en particulier.

En l'espèce, la salariée ne justifie pas de demandes de formation ainsi que du refus opposé à ces demandes comme allégué.

Elle produit les attestations de Mme [U] et de Mme [O], infirmières, qui indiquent avoir pu bénéficier de formations contrairement à Mme [R], et ce pour cette dernière de façon générale, sans mentionner de formation particulière.

En outre, la salariée n'invoque pas de motif discriminatoire de sorte que la discrimination alléguée en matière de formation n'est pas établie.

Par conséquent, la salariée doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour refus de formation, celui-ci n'étant pas avéré.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre des primes de fin d'année

La salariée sollicite le paiement de primes exceptionnelles de fin d'année pour 2 998 euros au titre des années 2014 à 2016, outre les congés payés afférents. Elle indique qu'en 2016, l'employeur ne lui a versé que 290 euros de façon discrétionnaire alors qu'elle avait perçu 350 euros les deux années précédentes et 300 euros en 2013. Elle conclut à une différence de traitement avec ses collègues cadres qui ont perçu chaque année un montant équivalent à 50 % de leur salaire.

L'employeur conclut au débouté de la demande, s'agissant d'une gratification exceptionnelle dont le montant est fixé discrétionnairement par l'employeur.

S'il appartient au salarié qui invoque une atteinte au principe 'à travail égal, salaire égal', de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.

La salariée produit l'attestation de Mme [O], cadre, indiquant avoir perçu une prime annuelle équivalent à 50 % de son salaire et avoir reçu consigne de ne pas en parler à Mme [R].

Il s'en déduit que la salariée présente des éléments susceptibles de caractériser une inégalité de traitement dans la perception d'une prime exceptionnelle de fin d'année inférieure et non à hauteur de 50 % du salaire.

L'employeur ne mentionne aucun élément objectif justifiant cette différence.

Ainsi, l'inégalité de traitement résultant du versement d'une prime exceptionnelle de fin d'année inférieure et non à hauteur de 50 % du salaire de la salariée est établie.

Par conséquent, la demande de la salariée est fondée et la société Jipi II doit être condamnée à lui régler la somme de 2 998 euros, outre 299,8 euros au titre des congés afférents au titre d'un rappel de prime exceptionnelle à hauteur de 50 % de son salaire pour les années 2014 à 2016.

Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur la validité du licenciement et ses conséquences

La salariée soutient que son licenciement est nul au motif qu'elle a subi des faits de harcèlement moral et que son inaptitude n'est que la conséquence du comportement de son employeur à son égard et du harcèlement moral subi.

L'employeur conclut au rejet de la demande.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée invoque les faits suivants:

une surcharge de travail,

un traitement différent de ses collègues cadres,

des convocations quotidiennes pour lui adresser des griefs,

une immixtion inappropriée et dangereuse pour la santé mentale des résidents concernés dans sa relation avec eux,

une dégradation de son état de santé.

A l'appui du fait 1), la salariée produit notamment une lettre adressée à son employeur le 27 janvier 2017 dans laquelle elle dénonce une surcharge de travail, quelques jours avant son arrêt de travail pour maladie, ce courrier faisant état d'heures supplémentaires et de missions importantes. Elle verse également aux débats des échanges de courriels au sujet d'un groupe de parole équipe le soir. Elle produit, en outre, des attestations de trois médecins, de deux infirmières et de deux collaborateurs de la structure, témoignant de façon concordante de son engagement dans son emploi, ainsi que pour plusieurs d'entre eux d'une charge de travail importante. Cependant, si la charge de travail de la salariée était importante et qu'il est établi qu'elle a accompli des heures supplémentaires, il n'en résulte pas qu'elle a connu une véritable surcharge de travail eu égard aux responsabilités et au champ de compétence d'un poste de psychologue dans l'établissement exploitant une maison de retraite médicalisée.

S'agissant du fait 2), la salariée fait état d'un refus de formation, de la non-prise en charge de ses repas, du versement d'une prime de fin d'année inférieure à celle de ses collègues cadres, de l'absence de rémunération de ses heures de nuit. Au vu des développements qui précèdent, la salariée n'a pas fait l'objet d'un refus de formation ou d'une absence de prise en charge indue de ses repas. Elle a subi l'absence de rémunération du supplément conventionnel des heures de nuit sans qu'une différence de traitement soit établie sur ce point. Elle a connu une différence de traitement dans l'allocation d'une prime de fin d'année inférieure aux autres cadres de l'établissement. La différence de traitement est donc avérée s'agissant de la prime de fin d'année.

S'agissant du fait 3), la salariée indique avoir été convoquée les 27, 28 janvier, 2 février 2017 par Mme [X] sans motif valable, mais ne produit aucun élément objectif à l'appui de ses allégations, la seule lettre du 3 février 2017 envoyée à son employeur et concomitante à son arrêt de travail pour maladie ne permettant pas de retenir ce fait.

S'agissant du fait 4), la salariée fait état le 31 janvier 2017 de l'annulation d'une sortie prévue avec une résidente, dans le but de la décrédibiliser et de l'intervention de sa hiérarchie au sujet d'une demande de changement de chambre d'une résidente la mettant en porte à faux. Cependant, elle produit à l'appui de son affirmation sa lettre du 3 février 2017 envoyée à son employeur et concomitante à son arrêt de travail pour maladie outre un courriel au sujet d'un changement de chambre, insuffisants à étayer les faits allégués. Ceux-ci doivent donc être écartés.

Concernant son état de santé 5), la salariée produit des certificats médicaux faisant état d'une dégradation de son état de santé et d'un syndrome anxio-dépressif, sans que le lien entre les conditions de travail de la salariée et son état de santé soit établi.

Au vu de l'ensemble de ces éléments, la salariée présente un seul fait 2) qui, isolé, ne permet pas de présumer un harcèlement moral.

Par conséquent, en l'absence d'agissements de harcèlement moral subis par la salariée, elle doit être déboutée de sa demande en nullité du licenciement sur ce fondement et de sa demande subséquente en dommages et intérêts pour nullité du licenciement.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ces points.

Sur l'origine de l'inaptitude

La salariée indique que son inaptitude est d'origine professionnelle puisqu'elle n'est que la conséquence du comportement de son employeur à son égard et du harcèlement moral subi durant la relation de travail.

L'employeur conclut que la salariée tente vainement d'établir un lien qui n'existe pas entre ses conditions de travail et son inaptitude. Il note que le médecin du travail n'a pas retenu de lien entre l'état de santé de la salariée et ses conditions de travail. Il critique les certificats médicaux produits par la salariée, l'un de ces certificats étant un faux et les médecins n'ayant pas été témoins de la prétendue souffrance au travail.

Lors de son avis du 12 avril 2017, le médecin travail a rendu l'avis d'inaptitude suivant : 'Inaptitude au poste et à tout poste dans l'entreprise confirmée,

Etude de poste et des conditions de travail réalisée le 10 avril 2017,

L'état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise'.

Ainsi, le médecin du travail n'a pas établi de lien entre l'état de santé de la salariée et ses conditions de travail, cette dernière n'ayant pas subi d'agissements de harcèlement moral.

En outre, les certificats médicaux et le certificat du psychothérapeute produits par la salariée, relatant les doléances de la salariée sans connaissance concrète de la réalité de son poste de travail et de ses conditions de travail, ne permettent pas d'établir ce lien entre les conditions de travail de la salariée et son état de santé.

Au surplus, aucun manquement à l'obligation de sécurité n'est établi à l'encontre de l'employeur, la salariée n'ayant pas alerté l'employeur sur sa situation avant sa lettre du 27 janvier 2017 peu avant son arrêt de travail pour maladie.

Il s'en déduit que l'inaptitude de la salariée est d'origine non-professionnelle. Elle doit donc être déboutée de sa demande de rappel d'indemnité de licenciement spéciale, de l'indemnité d'un montant équivalent à celui de l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ces points.

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences

La salariée fait valoir que l'employeur n'a pas été dispensé de rechercher un reclassement par l'avis du médecin du travail, qu'il ne verse d'ailleurs aucune pièce montrant la réalité de ses échanges avec le médecin, et qu'il n'a, à tort, procédé à aucune recherche de reclassement au sein de l'établissement dans lequel elle travaillait ainsi qu'au sein des autres établissements du groupe.

L'employeur indique que le médecin du travail a conclu à l'inaptitude de la salariée à tout poste dans l'entreprise et a ainsi exonéré l'employeur de toute recherche de reclassement.

Aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.

Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel lorsqu'ils existent, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Aux termes de l'article L. 1226-2-1 du code du travail, lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.

La recherche doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel.

En l'espèce, lors de la visite médicale du 12 avril 2017, le médecin travail a rendu l'avis d'inaptitude suivant: 'Inaptitude au poste et à tout poste dans l'entreprise confirmée,

Etude de poste et des conditions de travail réalisée le 10 avril 2017,

L'état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi dans l'entreprise'.

Ainsi, la mention du médecin du travail ne prévoit pas que l'état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, mais qu'il fait obstacle à un emploi dans l'entreprise uniquement.

Or, l'employeur ne justifie pas avoir effectué une recherche effective de reclassement au sein des maisons de retraite qu'il gérait, comprenant outre la société Jipi II, la résidence d'Eglantine, la SCI J. P. K Bussy, le trèfle bleu, même constituées sous la forme de sociétés indépendantes.

Par conséquent, le licenciement de la salariée est dénué de caractère réel et sérieux.

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l'employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9.

La salariée étant âgée de 33 ans et ayant une ancienneté de plus de quatre ans lors du licenciement, il lui sera alloué des dommages et intérêts d'un montant de 17 000 euros.

La salariée a droit à une indemnité de préavis de trois mois, qu'il convient de fixer à 8 047 euros, outre les congés payés afférents à hauteur de 804,7 euros, ce quantum n'étant pas contesté par la société intimée.

Il convient d'ordonner la remise par l'employeur à Mme [R] des documents sociaux conformes, soit le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi et le bulletin de paie, sans qu'il y ait lieu de prononcer de délai.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ces points.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

La salariée sollicite une somme de 10 065 euros nets, subsidiairement 8 047 euros nets, à titre de dommages et intérêts en réparation de l'exécution déloyale du contrat de travail et des préjudices qui en ont résulté. Elle indique qu'elle a subi une attitude déloyale de l'employeur qui l'a surchargée de travail, lui a refusé un accès à la formation, lui a décompté ses repas, ne lui a versé qu'une prime de fin d'année minime, l'a harcelée. Elle conclut qu'elle a subi un état dépressif réactionnel sévère.

L'employeur conclut au débouté de la demande. Il fait valoir que la salariée invoque les mêmes faits que tous ses chefs de demandes, multipliant les faits pour tenter de donner l'illusion de sérieux à un dossier vide.

En l'espèce, au vu des développements qui précèdent, l'employeur n'a pas refusé l'accès à la formation à la salariée, ne lui a pas indûment décompté ses repas et la salariée n'a pas subi de faits de harcèlement moral.

Le fait que la salariée ait subi une différence de traitement dans le versement de la prime de fin d'année est déjà réparé par le versement d'un rappel de salaire, la salariée ne justifiant pas d'un préjudice distinct du préjudice financier déjà réparé.

La salariée a connu une charge de travail importante, toutefois, le lien de causalité entre cette charge de travail importante et la dégradation de son état de santé n'est pas établi.

La salariée doit donc être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société Jipi II aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme [R] du jour du licenciement au jour du présent arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur le cours des intérêts

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Il n'y a pas lieu de faire courir le point de départ des intérêts à une date antérieure comme sollicité.

Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts pour les intérêts échus pour une année entière.

Sur la demande d'astreinte

Il n'y a pas lieu d'ordonner le prononcé d'une astreinte par chef de condamnation comme sollicité.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Jipi II succombant à la présente instance, en supportera les dépens de première instance et d'appel. Il y a lieu de dire que la Selarl Minault Teriitehau, agissant par Maître Stéphanie Teriitehau pourra les recouvrer directement pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile. La société Jipi II devra également régler à Mme [R] une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Il n'y a pas lieu de dire que cette somme est en 'nets' comme demandé.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Déboute Mme [P] [R] de ses demandes de rabat de clôture et rejet des conclusions adverses,

Déclare irrecevables les conclusions de Mme [P] [R] signifiées le 20 avril 2023,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

- débouté Mme [P] [R] de sa demande au titre du coût des repas, de sa demande au titre de la contrepartie obligatoire au repos, de sa demande pour défaut de formation, de sa demande au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, de sa demande au titre du travail dissimulé, de ses demandes indemnitaires consécutives à l'inaptitude d'origine professionnelle, de sa demande de dommages et intérêts pour nullité du licenciement,

- constaté que l'inaptitude n'est pas d'origine professionnelle,

L'infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Dit que le licenciement de Mme [P] [R] est sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Jipi II à payer à Mme [P] [R] les sommes suivantes :

6 110 euros à titre d'heures supplémentaires,

611 euros au titre des congés payés afférents,

319,24 euros au titre des heures de nuit,

31,92 euros au titre des congés payés afférents,

2 998 euros au titre des primes exceptionnelles de fin d'année,

299,8 euros au titre des congés payés afférents,

17 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

8 047 euros à titre d'indemnité de préavis,

804,7 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que les créances salariales et assimilées produisent des intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes et les créances indemnitaires produisent des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus pour une année entière,

Déboute Mme [P] [R] de sa demande d'astreinte,

Ordonne la remise par la société Jipi II à Mme [P] [R] des documents sociaux conformes, soit le certificat de travail, l'attestation Pôle emploi et le bulletin de paie,

Ordonne le remboursement par la société Jipi II à l'organisme Pôle Emploi concerné des indemnités de chômage versées à Mme [P] [R] dans la limite de six mois d'indemnités,

Condamne la société Jipi II aux dépens de première instance et d'appel et dit que la Selarl Minault Teriitehau, agissant par Maître Stéphanie Teriitehau pourra les recouvrer directement pour ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Condamne la société Jipi II à payer à Mme [P] [R] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03787
Date de la décision : 07/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-07;21.03787 ?
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