La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2023 | FRANCE | N°22/00423

France | France, Cour d'appel de Versailles, 2e chambre 2e section, 01 juin 2023, 22/00423


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 22G



2e chambre 2e section



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 01 JUIN 2023



N° RG 22/00423 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6XY



AFFAIRE :



[U] [P]





C/



[W] [L]





Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 13 Décembre 2021 par le Juge aux affaires familiales de CHARTRES

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 20/00932



Expédit

ions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 01.06.23



à :



Me Guillaume BAIS de la SCP GUILLAUME BAIS ET XAVIER TORRE, avocat au barreau de CHARTRES



Me Régine BRECHU-MAIRE, avocat au barreau de VERSAILLES



TJ CHARTRES





RÉPUBLIQUE FRANÇA...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 22G

2e chambre 2e section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 01 JUIN 2023

N° RG 22/00423 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6XY

AFFAIRE :

[U] [P]

C/

[W] [L]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 13 Décembre 2021 par le Juge aux affaires familiales de CHARTRES

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 20/00932

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le : 01.06.23

à :

Me Guillaume BAIS de la SCP GUILLAUME BAIS ET XAVIER TORRE, avocat au barreau de CHARTRES

Me Régine BRECHU-MAIRE, avocat au barreau de VERSAILLES

TJ CHARTRES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [U] [P]

né le 18 Mai 1956 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Guillaume BAIS de la SCP GUILLAUME BAIS ET XAVIER TORRE, Postulant, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000032 - N° du dossier 2020102

APPELANT

****************

Monsieur [W] [L]

né le 17 Octobre 1961 à [Localité 8] ( ÎLE DE LA RÉUNION)

de nationalité Française

Chez Monsieur [Z] [P]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentant : Me Régine BRECHU-MAIRE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 46 - N° du dossier RBM 2022

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2023 en chambre du conseil, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne THIVELLIER, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Jacqueline LESBROS, Présidente de chambre,

Monsieur François NIVET, Conseiller,

Madame Anne THIVELLIER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Berdiss ASETTATI,

FAITS ET PROC''DURE

Mme [W] [L] et M. [U] [P] se sont mariés le 30 mai 1981 devant l'officier d'état civil de Marchemaison (61), en ayant fait précéder leur union d'un contrat de mariage reçu le 7 mai 1981 par la SCP Bourguet-Leroy, notaires à Noisy le Sec, instituant entre eux le régime de la séparation de biens.

De cette union sont issus quatre enfants aujourd'hui majeurs :

-[Z], né le 4 juin 1987,

-[G], né le 20 juillet 1989,

-[D] et [E], nés le 23 janvier 1992.

Par ordonnance de non-conciliation du 28 février 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Chartres a notamment attribué la jouissance du domicile conjugal à Mme [L], à titre gratuit, au titre du devoir de secours.

Par jugement du 2 juillet 2014, le tribunal de grande instance de Chartres a notamment prononcé le divorce de M. [P] et Mme [L] et ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux.

Par arrêt du 11 février 2016, la cour d'appel de Versailles a confirmé le divorce sauf en ce qui concerne la prestation compensatoire et la contribution du père à l'un des enfants communs.

Par acte d'huissier du 9 juin 2020, M. [P] a fait assigner Mme [L] devant le tribunal judiciaire de Chartres aux fins d'obtenir la liquidation des intérêts patrimoniaux des ex-époux et la fixation de leurs droits créances.

Par jugement contradictoire du 13 décembre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Chartres a notamment :

-déclaré recevables les pièces produites par Mme [L] sous les numéros 7 et 14,

-constaté que la liquidation des intérêts patrimoniaux des époux a déjà été ordonnée, et dit n'y avoir lieu à l'ordonner à nouveau,

-ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux entre M. [P] et Mme [L],

-commis pour y procéder Me [T] [A], Notaire associé de la SCP [H] [R] [V] et [T] [A], Notaires associés,

-ordonné à Me [A] de répartir le solde de la vente pour moitié entre les mains de M. [P] et de Mme [L],

-enjoint aux parties d'apporter, dès le premier rendez-vous auprès du notaire, tous les documents nécessaires à l'établissement de leurs droits à créance, et notamment les pièces suivantes :

-le livret de famille,

-le contrat de mariage (le cas échéant),

-les actes notariés de propriété pour les immeubles,

-les actes et tout document relatif aux donations et successions,

-la liste des adresses des établissements bancaires où les parties disposent d'un compte,

-les contrats d'assurance-vie (le cas échéant),

-les cartes grises des véhicules,

-les tableaux d'amortissement des prêts immobiliers et mobiliers,

-une liste des crédits en cours,-les statuts de sociétés (le cas échéant) avec nom et adresse de l'expert-comptable,

-tout document permettant d'établir la provenance des sommes ayant servi à l'acquisition du véhicule Ford Fiesta et des fonds utilisés pour réaliser des travaux de conservation et d'amélioration dans l'immeuble commun,

-fixé la créance de M. [P] à hauteur de 2 859 euros concernant le paiement des taxes foncières relatives au bien commun,

-fixé la créance de Mme [L] à hauteur de 4 121 euros concernant le règlement des appels de fonds du syndicat de copropriétaires,

-dit que Mme [L] conservera le véhicule Clio en pleine propriété et M. [P] le véhicule Citroën C3 à charge d'établir un compte des récompenses en fonction de la valeur argus des véhicules,

-renvoyé les parties devant le notaire pour toutes les prétentions dont elles n'ont pas en l'état rapporté la preuve, et dit que faute de preuve suffisamment probante, le notaire pourra les rejeter,

-débouté M. [P] de sa demande de restitution de meubles sous astreinte,

-réservé les demandes et les dépens.

Le 20 janvier 2022, M. [P] a interjeté appel de ce jugement sur :

-la recevabilité des pièces 7 à 14 de Mme [L],

-le constat de la liquidation des intérêts patrimoniaux,

-la répartition du solde du prix de vente par moitié,

-la créance de M. [P] au titre du paiement des taxe foncière,

-la créance de Mme [L] au titre du règlement des appels de fonds du syndicat de copropriétaires,

-le rejet de la demande de restitution des meubles sous astreinte.

Dans ses dernières conclusions d'appelant du 27 septembre 2022, M. [P] demande à la cour de :

'INFIRMER le Jugement du 13 décembre 2021 sauf en ce qu'il a ordonner l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux entre Monsieur [U] [P] et Madame [W] [L] ;

CONFIMER les termes de la mission confiée au notaire ;

D''BOUTER Madame [L] de ses appels incidents ;

Statuant de nouveau sur les autres chefs du Jugement,

JUGER irrecevable les pièces communiquées par Madame [L] sous les numéros 7 et 14 et les écarter des débats ;

DIRE et JUGER que Madame [L] doit à Monsieur [P] au titre des droits à créance entre époux une somme de 44 082.19 euros ;

Au besoin, CONDAMNER Madame [L] à verser cette somme à Monsieur [P];

DIRE et JUGER que Madame [L] doit à Monsieur [P] au titre des comptes d'administration entre époux une somme de 31 733.50 euros ;

Au besoin, CONDAMNER Madame [L] à verser cette somme à Monsieur [P];

En conséquence,

PRONONCER la liquidation des intérêts pécuniaires des époux selon le tableau suivant :

Monsieur

Madame

Droits dans l'indivision

144 500 €

Droits dans l'indivision

144 500€

Créance à l'encontre de Madame

(droits à créance)

+ 44 082.19 €

Créance due à Monsieur

(droits à créance)

- 44 082.19 €

Créance à l'encontre de Madame

(compte d'administration)

+ 31 733.50 €

Créance due à Monsieur

(compte d'administration)

- 31 733.50 €

Total

220 315,69 €

Total

68 684,31 €

ORDONNER à Me [T] [A], Notaire associé de la SCP « [H] [R] [V] et [T] [A], Notaires associés », notaire instrumentaire de la vente du bien immobilier d'[Localité 6] de répartir le solde du prix de vente de la façon suivante :

- 68 684,31 euros pour Madame [L] ;

- 220 315,69 euros pour Monsieur [P].

ATTRIBUER la propriété du véhicule RENAULT CLIO immatriculé BB 746 VA à Madame [L] ;

ATTRIBUER la propriété du véhicule CITROEN C3 immatriculé 564 WJ 28 à Monsieur

[P] ;

CONDAMNER Madame [L] à remettre à Monsieur [P] les meubles suivants ou une copie des films :

- une K7 audio sur laquelle a chanté le père de Monsieur [P],

- les cassettes vidéo prises avec le caméscope des époux, (ou apparaissent les parents de Monsieur),

CONDAMNER Madame [L] à verser à Monsieur [P] une somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du CPC;

CONDAMNER Madame [L] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Guillaume BAIS, membre associé de la SCP BAIS & TORRE, conformément à l'article 699 du CPC.

Dans ses dernières conclusions d'intimée du 28 juin 2022, Mme [L] demande à la cour de:

'Confirmer le jugement rendu le 13 décembre 2021 par le Tribunal Judiciaire de Chartres affaires familiales cabinet 9 en ce qu'il a :

-Dit recevable les pièces produites par Mme [L] sous les numéros 7 et 14

-Ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage des intérêts patrimoniaux entre les ex époux [P]/[L] et commis pour y procéder Maître [T] Tardy -Plachenaud .

-Ordonné à Maître [T] [A] de procéder à la répartition du solde de la vente pour moitié entre les mains de Monsieur [U] [P] et Mme [W] [L]

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de créance de la somme de 27 582,19 euros au titre de ses prétendus investissements immobiliers ;

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de demande de créance au titre des travaux de menuiserie pour un montant de 14 500 euros.

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de créance de 5518 euros au titre de l'impôt sur le revenus 2011.

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de créance de 1396 euros au titre de la taxe d'habitation de 2012.

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de créance au titre des taxes foncières et ordures ménagères à hauteur de la somme de 5310 euros plus 3946 euros au titre de la taxe des ordures ménagères.

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de créance de 5832 € au titre de la Ford Fiesta.

-Débouté Monsieur [U] [P] de sa demande de restitution de meubles et biens personnels sous astreinte.

-Fait droit à la demande de fixation de créance de Mme [L] au titre des charges de l'association syndicale ASPACA à hauteur de 4121euros et y ajoutant condamner Monsieur [U] [P] au paiement de la somme de 2110,50 euros de ce chef.

Recevoir Madame [W] [P] en son appel incident et l'y déclarer bien fondé, Y faisant droit,

Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de Monsieur [P] à hauteur de 2859 euros au titre des taxes foncières du bien indivis ; Statuant à nouveau , dire et juger que la taxe des ordures ménagères doit être supportée par moitié .

Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] de sa demande créance de la somme de 818,80 euros correspondant à la moitié des factures d'électricité et de gaz restant dues pour la période de Juin 2011 à Février 2012 et statuant à nouveau condamner Monsieur [U] [P] au paiement de la somme de 818,80 euros de ce chef.

Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] de sa demande créance à hauteur de la moitié de la somme de 2028,21 euros soit 1014,10 euros au titre des travaux urgents de conservation concernant la chaudière, les sanitaires et l'électricité, et statuant à nouveau condamner Monsieur [U] [P] au paiement de la somme de 1014,10 euros de ce chef.

Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [W] [L] de sa demande créance au titre de l'assurance habitation soit à hauteur de la somme de 528 euros et statuant à nouveau condamner Monsieur [U] [P] au paiement de la moitié de cette somme soit 264 euros de ce chef.

Infirmer le jugement en qu'il a renvoyé les parties devant le notaire pour réactualiser les évaluations de l'indemnité d'occupation et statuant à nouveau fixer l'indemnité d'occupation due à l'indivision à la somme de 700 euros après abattement de 30% ;

Dire et juger que Mme [W] [L] est redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation totale de 27 051,61 euros.

Il est demandé aux juges de la Cour de faire droit aux demandes de Mme [W] [L] dans le cadre des omissions de statuer suivantes :

Sur la demande Mme [W] [P] de voir fixer sa créance au titre de l'abonnement de la citerne gaz à la somme la somme de 2467,64 soit la moitié à la charge de Monsieur [U] [P], il est demandé aux juges de la Cour de faire droit à cette demande et de condamner Monsieur [U] [P] au paiement de la somme de 1233,82 euros de ce chef.

Sur la demande Madame [W] [L] de fixer à 30% l'abattement à pratiquer sur la valeur de l'indemnité d'occupation, il est demandé aux juges de la Cour de faire droit à cette demande.

Débouter Monsieur [U] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions

Condamner Mr [P] au paiement de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Régine Bréchu-Maire conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 février 2023.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rejet des pièces 7 et 14 produites par l'intimée

En application de l'article 205 du code de procédure civile, les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux à l'appui d'une demande en divorce ou en séparation de corps.

M. [P] demande le rejet des pièces n°7 (attestation de [Z] [P]) et 14 (attestation de [D] [P]) en relevant qu'il s'agit d'attestations des enfants du couple venant au soutien des propos de Mme [L] sur les circonstances du divorce et qui n'ont pas leur place dans les présents débats. Il soutient que l'interdiction susvisée concerne également les procédures hors divorce contrairement à ce qu'a retenu le premier juge.

Mme [L] s'y oppose en faisant valoir que cette interdiction vise uniquement les demandes en divorce et ne s'applique donc pas à la présente procédure.

Si cette interdiction concerne effectivement les déclarations des descendants recueillies en dehors de l'instance en divorce comme l'invoque M. [P], elle ne s'applique qu'aux déclarations relatives aux griefs invoqués par les époux dans le cadre de leur procédure de divorce ou de séparation de corps et non à la procédure de liquidation / partage de leur régime matrimonial.

M. [P] est conséquence débouté de cette demande et le jugement déféré est confirmé de ce chef.

Sur le renvoi des parties devant le notaire

M. [P] demande l'infirmation des chefs du jugement sauf en ce qu'il a ordonné l'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des intérêts patrimoniaux des parties.

Chacune des parties demande à la cour de statuer sur les créances envers l'indivision et/ou l'autre parties qu'elle avait sollicité en première instance.

Le premier juge a renvoyé les parties devant le notaire pour toutes les prétentions dont elles n'ont pas en l'état rapporté la preuve, et dit que faute de preuve suffisamment probante, le notaire pourra les rejeter.

Cependant, le juge de première instance ne pouvait, sauf à méconnaître son office et violer les dispositions de l'article 4 du code de procédure civile, déléguer ses pouvoirs au notaire chargé des opérations de comptes, liquidation et partage et il lui appartenait de statuer sur le bien-fondé ou non de chacune des créances invoquées par les parties, ce qu'il n'a pas fait.

Il convient par conséquent de réformer le jugement de ce chef et de statuer sur les demandes des parties.

Sur les créances de M. [P]

M. [P] demande à la cour de fixer ses créances à l'égard de Mme [L] à la somme de 44 082,19 euros se décomposant comme suit selon ses conclusions:

*au titre de son investissement dans le bien indivis: 27 582,19 euros

*au titre du véhicule Ford Fiesta: 2 000 euros

*au titre des travaux de menuiserie réalisés dans la maison: 14 500 euros.

Les époux ont acquis les 28 septembre et 1er octobre 1993 un terrain à bâtir cadastré section F n°[Cadastre 4] lieudit '[Adresse 7]' à [Localité 6] pour une contenance de 42a 23ca au prix de 280 000 francs, sur lequel ils ont fait bâtir, pour un montant de 1 031 697 francs, une maison d'habitation ayant constitué le domicile conjugal, ce qui a représenté un coût total de 1 311 697 euros (199 966,92 euros). Ce bien a été vendu le 31 août 2019 au prix de 284 753 euros.

Conformément aux principes généraux gouvernant la charge de la preuve, l'époux séparé de biens, qui revendique une créance sur son conjoint, doit en apporter la preuve

*Au titre de son investissement dans le bien indivis

M. [P] fait valoir qu'il dispose d'une créance de 27 582,19 euros à ce titre. Il soutient avoir financé, avec des fonds personnels, l'apport initial des époux dans l'achat de ce bien d'un montant de 761 697 francs (116 119 euros) à hauteur des 2/3 alors que le bien a été acquis à hauteur de 50% chacun. Il explique que cet apport a été financé par les fonds provenant de la vente de leur premier bien immobilier, dont il était propriétaire à hauteur des 2/3, qui ont été versés sur leur compte joint, de sorte qu'il a apporté 77 412,67 euros, soit au delà de sa part qui devait être de 58 059,50 euros. Il indique que Mme [L] lui doit la différence de 19 352,72 euros qui doit être réévaluée à la somme de 27 582,19 euros par application des dispositions de l'article 1469 alinéa 3 du code civil.

Mme [L] s'oppose à cette demande. Elle soutient que M. [P] ne démontre pas avoir financé l'apport à hauteur de 19 352,72 euros de plus qu'elle. Elle relève qu'il se contente de procéder par affirmation sans justifier qu'il a investi des fonds propres provenant de la vente de leur ancien bien dans l'achat du terrain et des travaux de construction ni qu'il aurait financé plus de 50% de l'apport alors que l'acte ne contient aucune clause de remploi. Elle ajoute qu'en sa qualité de cadre de banque au Crédit du Nord s'étant occupé du financement du bien, il n'aurait pas omis de le mentionner comme pour leur première acquisition.

Les époux ont vendu le 2 mars 1992 un bien immobilier situé à [Localité 9] au prix de 1 045 000 francs (960 000 francs ont été versés au notaire et 85 000 francs directement aux parties). L'acte notarié de vente (pièce 46 de l'appelant) mentionne que cet immeuble appartient aux vendeurs en pleine propriété à hauteur de 2/3 pour M. [P] et 1/3 pour Mme [L], ce qui n'est pas contesté par les parties.

M. [P] affirme que le notaire a viré par erreur sur le compte joint des époux la somme de 700 246 francs puis un reliquat, soit un total d'environ 745 000 francs, de sorte qu'il lui revenait la somme de 496 666 francs et à Mme [L] 248 333 francs. Pour en justifier, il produit le relevé de compte du notaire (sa pièce 47). Cependant, ce relevé mentionne des écritures au profit de M. Mme [P], à savoir le:

-2 mars 1992: 32642 A M MME [U] [P] PART PRIX VTE A LANGLET: 700 000 francs,

-16 mars 1992: 33043 A M MME [P] [U] PART PRIX VTE A LANGLET DU 2 3 92: 50 000 francs

-1er octobre 1992: 49355 A M MME [P] [U] - EN COMPTE: 10 700 francs -4 février 1993: 69070 A M MME [U] [P] [U] - SOLDE DE COMPTE: 2 052,70 francs, soit un total de 868 425 francs.

Cependant, ce document ne permet pas de savoir de quelle manière ont été versés ces fonds (chèque, virement) ni sur quel compte, l'extrait du compte joint du Crédit du Nord produit par M. [P] (pièce 27) mentionnant seulement une remise de chèques de 700 246 francs le 3 mars 1992 sans autre précision.

Par ailleurs, l'offre de prêt immobilier du 21 juin 1993 pour l'acquisition du bien situé à [Localité 6] mentionne au titre du financement un apport de 747 080 euros sans précision quant à son origine et un prêt de 550 000 francs.

L'acte d'achat du terrain des 28 septembre et 1er octobre 1993 mentionne que le prix est acquitté par l'acquéreur à l'aide de ses derniers personnels sans autre précision et M. [P] ne justifie pas des modalités de règlement de cette somme (relevés de comptes, relevé du notaire...). De même, la facture de construction du pavillon ne précise pas les modalités de règlement du prix et M. [P] n'en justifie pas.

Il n'est donc pas établi que l'apport, qui serait de 761 697 francs (1 311 697 - 550 000), soit 116 119 euros selon M. [P], aurait été réglé avec le solde du prix de vente de leur précédent bien immobilier, sans tenir compte de leurs droits respectifs dans la répartition de ce prix, et que M. [P] aurait ainsi financé avec des fonds personnels une partie de l'apport de son épouse.

Il convient en conséquence de débouter M. [P] de cette demande.

*Au titre du véhicule Ford Fiesta

M. [P] demande que le prix de vente de 2 000 euros du véhicule Ford Fiesta appartenant aux époux mais qu'il a intégralement financé à hauteur de 11 664 euros, soit reversé à la 'communauté'. Il affirme rapporter la preuve de l'aliénation de ce bien contrairement à ce qu'a retenu le premier juge. Il ajoute que Mme [L] reconnaît avoir perçu la somme de 2 000 euros de cette vente qui doit être partagée par moitié.

Mme [L] indique être d'accord pour que M. [P] récupère la somme de 1 000 euros à ce titre en faisant valoir qu'elle reconnaît que ce véhicule a été vendu à leur fils au prix de 2 000 euros, ce qu'elle exposait en première instance en soutenant que c'est le prix de vente et non le prix d'achat qui doit être partagé par moitié.

En l'espèce, il apparaît que le certificat d'immatriculation du véhicule Ford Fiesta daté du 29 août 2008 est au nom des deux époux sans que M. [P] justifie du financement de ce bien par des fonds propres, le relevé de compte produit étant insuffisant à l'établir. En tout état de cause, M. [P] reconnaît en cause d'appel que Mme [L] doit rembourser la somme de 2 000 euros 'à la communauté'.

Étant relevé qu'il n'existe pas de communauté entre les époux qui sont mariés sous le régime de la séparation de biens et que le patrimoine personnel de Mme [L] s'est trouvé enrichi de fonds provenant de la vente d'un bien indivis, il convient de retenir que l'indivision, et non M. [P], est titulaire d'une créance sur Mme [L] qui sera fixée à la somme de 2 000 euros.

*Au titre des travaux de menuiserie réalisés dans la maison

M. [P] soutient qu'il détient une créance de 14 500 euros au titre des travaux de menuiserie réalisés dans la maison d'[Localité 6] qu'il a intégralement financés. Il fait valoir qu'ils ont été réglés à partir du compte joint qu'il avait alimenté depuis son compte personnel.

Mme [L] s'oppose à cette demande en faisant valoir que les factures relatives à ces travaux ont été réglées par le compte joint et que M. [P] n'établit pas les avoir financés seul.

M. [P] produit deux factures au nom des deux époux datées du 20 novembre 2008 pour la pose d'un parquet pour un montant TTC de 8 164,48 euros et la fabrication d'un escalier pour un montant TTC de 6 838,51 euros, soit la somme totale de 15 002,99 euros.

Il apparaît que des chèques pour un montant total de 15 002,99 euros ont été débités du compte joint des époux du Crédit du Nord les 9 septembre 2008 (4 500,70 euros) et le 28 novembre 2008 (5 715,33 et 4 786,96 euros). Les époux ne contestent pas qu'ils correspondent au paiement de ces travaux.

M. [P] justifie avoir effectué le 29 septembre 2008 un virement de 12 000 euros de son compte personnel du Crédit du Nord vers le compte joint des époux du Crédit du Nord (pièce 44 et 60).

Pour autant, il ne produit pas les relevés du compte joint pour la période comprise entre le 30 septembre 2008 et le 26 novembre 2008 et les captures d'écran produites (pièce 60) ne permettent pas de déterminer le solde de ce compte à ces deux dates, de sorte qu'il n'est pas établi que les fonds qu'il a versés sur le compte joint ont servi à financer les travaux.

Il convient en conséquence de débouter M. [P] de sa demande à ce titre.

Sur les demandes de M. [P] au titre des comptes d'administration entre époux

Il ressort de l'article 815-13 du code civil que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

M. [P] demande à la cour de dire que Mme [L] lui doit la somme de 31 733,50 euros au titre des comptes d'administration entre époux qu'il détaille comme suit dans ses conclusions:

*les impôts 2012 de l'année 2011: 2 759 euros

*la taxe d'habitation 2012: 698 euros

*les taxes foncières et les taxes d'ordures ménagères de 2012 à 2019: 9 247 euros

*les indemnités d'occupation: 19 029,50 euros.

*Sur les impôts 2011

En application de l'article 1536 du code civil, lorsque les époux ont stipulé dans leur contrat de mariage qu'ils seraient séparés de biens, chacun d'eux conserve l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnels.

Chacun d'eux reste seul tenu des dettes nées en sa personne avant ou pendant le mariage, hors le cas de l'article 220 du code civil.

M. [P] soutient qu'il démontre avoir réglé seul les impôts sur le revenu 2011 à hauteur de 5 518 euros contrairement à ce qu'a retenu le premier juge et que Mme [L] doit lui en régler la moitié, soit 2 759 euros.

Mme [L] s'y oppose en relevant que M. [P] ne rapporte pas la preuve qu'il aurait réglé seul cet impôt, l'avis d'imposition mentionnant un prélèvement sur le compte joint et que si tel était le cas, ce paiement relèverait de sa contribution aux charges du mariage, s'agissant d'une période antérieure à la date d'effets du divorce.

Les avis d'imposition 2011 sur les revenus 2010 et 2012 sur les revenus 2011 mentionnent un compte à débiter n°30076 02023 11832600400 au nom de M. ou Mme [P]. Il s'avère cependant que ce numéro de compte correspond au compte personnel de M. [P] ouvert au Crédit de Nord.

Pour autant, dans un régime séparatiste, l'impôt sur le revenu ne constitue pas une charge du mariage mais la charge directe des revenus personnels des époux, étrangère aux besoins de la vie familiale.

Or, M. [P], qui sollicite la fixation d'une créance à ce titre, ne communique aucun élément permettant de déterminer l'impôt dont Mme [L] aurait été redevable en cas d'imposition séparée, de sorte que la cour ne peut que le débouter de sa demande.

M. [P] est en conséquence débouté de sa demande à ce titre.

*Sur la taxe d'habitation 2012

Le règlement de la taxe d'habitation par l'indivisaire qui jouit privativement du bien a permis sa conservation de sorte qu'elle doit être remboursée par l'indivision à l'indivisaire qui l'a réglée en application de l'article 815-13 du code civil.

M. [P] soutient avoir payé seul la taxe d'habitation 2012 pour un montant de 1 396 euros alors que Mme [L] devait en régler la moitié.

Mme [L] s'y oppose en soutenant qu'elle a été réglée à partir du compte joint.

L'avis d'imposition concernant la taxe d'habitation 2011 mentionne des prélèvements mensuels de 144 euros à venir pour l'année 2012 et pour compte à débiter le numéro 11832600400 au nom de M. Ou Mme [P]. Il s'avère cependant que ce numéro de compte correspond au compte personnel de M. [P] ouvert au Crédit de Nord et qu'il avait effectivement effectué des démarches auprès du Trésor Public pour que les prélèvements soient effectués sur son compte personnel en leur fournissant son RIB en juin 2011 (pièce 29).

Il ressort de la taxe d'habitation 2012, d'un montant de 1 415 euros, que l'administration fiscale a retenu des versements effectués à hauteur de 1 296 euros et une somme restant à prélever de 244 euros que M. [P] ne justifie pas avoir réglée en l'absence de production des relevés de compte correspondants.

Il convient ainsi de retenir que M. [P] a réglé sur ses fonds personnels la somme de 1 296 euros au titre de la taxe d'habitation 2012, étant au surplus relevé que Mme [L], qui le conteste, ne produit pas les relevés du compte joint sur lequel auraient été effectués ces prélèvements.

La taxe d'habitation incombant à l'indivision, la créance de M. [P] à ce titre doit être mise à la charge de celle-ci et non de Mme [L] et sera fixée à hauteur de 1 296 euros.

*Sur les taxes foncières et les taxes d'ordures ménagères

M. [P] fait valoir qu'il a réglé la taxe foncière pour les années 2012 à novembre 2019 à hauteur de 14 548 euros incluant les taxes d'ordures ménagères d'un montant de 3 946 euros lesquelles incombaient en intégralité à Mme [L], de sorte qu'il revendique une créance de 9 247 euros à ce titre (14 548 - 3946 / 2: 5 301 euros + 3 946 euros).

Mme [L] s'oppose à cette demande en faisant valoir que M. [P] ne peut poursuivre le recouvrement de la taxe foncière 2012 comme l'a retenu le premier juge et que la taxe foncière 2019 a été payée au prorata par l'acquéreur du bien sans que M. [P] justifie du montant effectivement réglé. Elle ajoute qu'il produit des avis de dégrèvements de sorte qu'il lui incombe de verser aux débats ses relevés de compte afin de connaître précisément les sommes acquittées par lui.

M. [P] n'explicite pas en quoi la taxe d'ordures ménagères devrait être mise à la charge intégrale de Mme [L] et non de l'indivision alors que son règlement a permis sa conservation de sorte qu'elle doit être remboursée par l'indivision à l'indivisaire qui l'a réglée en application de l'article 815-13 du code civil.

Mme [L] n'expose pas les raisons pour lesquelles le paiement de la taxe foncière 2012 ne pourrait pas être mise à la charge de l'indivision. Le premier juge l'a écartée en relevant que l'ordonnance de non-conciliation était en date du 28 février 2012. Cependant, les époux étant mariés sous le régime de la séparation de biens, le règlement de la taxe foncière par l'un des indivisaires, y compris durant le mariage, l'a donc été au profit de l'indivision et peut ainsi ouvrir un droit à créance à ce titre.

Mme [L] ne conteste pas que ces taxes ont été réglées par M. [P] mais s'interroge sur le montant effectivement payés par ce dernier.

M. [P] soutient que le montant total des taxe foncière pour 2012 à 2019 s'élèvent à 14 548 euros incluant les taxes d'ordures ménagères sans détailler les montants année par année. Il produit les avis d'imposition correspondants mentionnant:

-2012: 1 745 euros

-2013: 1 885 euros

-2014: 1 901 euros

-2015: 1 918 euros

-2016: 1 936 euros

-2017: 1 938 euros

-2018: 1 957 euros

-2019: 1 996 euros,

soit un total de 15 276 euros.

Contrairement à ce qu'allègue Mme [L], M. [P] ne produit pas d'avis de dégrèvement, la pièce 33 étant une fiche de rôle de taxes foncières pour 2012, de sorte qu'il justifie du montant des taxes foncières acquittées.

Pour l'année 2019, M. [P] n'apportant aucun élément quant au montant remboursé par l'acquéreur du bien comme le veut l'usage, il sera débouté de sa demande pour cette année-là.

La taxe foncière incombant à l'indivision, la créance de M. [P] à ce titre doit être mise à la charge de l'indivision et non de Mme [L] et sera fixée à hauteur de 13 280 euros.

Le jugement déféré est infirmé de ce chef.

*Concernant les indemnités d'occupation dues par Mme [L]

En application de l'article 815-9 alinéa 2 code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l'effet des actes régulièrement passés au cours de l'indivision. A défaut d'accord entre les intéressés, l'exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.

M. [P] soutient que Mme [L] est redevable d'une indemnité d'occupation d'un montant total de 38 059 euros dont la moitié à son profit (19 029,50 euros) pour la période allant du 10 mai 2016 au 31 août 2019, date de la vente du bien, en retenant une indemnité d'occupation de 960 euros après abattement de 20% sur une valeur locative de 1 200 euros

Mme [L] demande l'infirmation du jugement déféré ayant renvoyé les parties devant le notaire pour réactualiser les évaluations de l'indemnité d'occupation, de fixer cette indemnité à la somme de 700 euros après abattement de 30% conformément à une jurisprudence constante, et de dire qu'elle est redevable d'une somme totale de 27 051,61 euros envers l'indivision à ce titre.

En l'espèce, l'ordonnance de non-conciliation a attribué à Mme [L] la jouissance gratuite du domicile pendant l'instance en divorce, de sorte que l'indemnité d'occupation n'est due qu'à partir de la date à laquelle la décision de divorce a acquis force de chose jugée.

En l'espèce, la cour d'appel de Versailles, par arrêt du 11 février 2016, a confirmé le jugement de divorce rendu le 2 juillet 2016. Il n'est pas contesté que cet arrêt a été signifié le 10 mars 2016, de sorte que le divorce est devenu définitif le 10 mai 2016 conformément aux dispositions de l'article 612 du code de procédure civile.

L'indemnité d'occupation commence donc à courir le 10 mai 2016 et s'arrête le 31 août 2019, date de la vente du bien, ce qui correspond à 39 mois et 20 jours.

Il n'y a pas lieu de retenir les deux avis de valeur locative du bien produits par M. [P] datant de 2011 en raison de leur ancienneté.

En revanche, il sera tenu compte de celle de l'agence Accord du 8 octobre 2017 faisant état d'une valeur locative comprise entre 1 100 et 1300 euros, et des deux avis produits par Mme [L] (La Galerie de l'Immobilier du 28 juin 2019 et Critères Immobilier du 22 juin 2019) mentionnant toutes deux un loyer mensuel hors charges compris entre 1 000 et 1 100 euros.

Il convient, au vu de ces éléments, de fixer la valeur locative du bien à la somme de 1 100 euros.

Il sera tenu compte d'un abattement de 20% qui est suffisant pour compenser le caractère précaire de l'occupation du bien, les revenus des parties étant indifférents pour apprécier cette compensation, de sorte que l'indemnité d'occupation sera fixée à la somme de 880 euros.

En conséquence, il sera retenue une créance de l'indivision envers Mme [L] d'un montant de 34 887 euros (39X880 + 880/31X20).

S'agissant d'une créance de l'indivision, la demande de M. [P] visant à condamner Mme [L] à lui payer cette somme est en conséquence rejetée.

Sur les demandes de Mme [L] au titre des comptes d'administration entre époux

Il ressort de l'article 815-13 du code civil que lorsqu'un indivisaire a amélioré à ses frais l'état d'un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l'équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l'aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des dépenses nécessaires qu'il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu'elles ne les aient point améliorés.

En application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

*Sur les factures de gaz et d'électricité

Le premier juge a indiqué que chacun des époux ayant, sauf preuve contraire, participé aux charges de la vie commune à hauteur de ses facultés contributives conformément à l'article 214 du code civil, il n'est fondé qu'à obtenir indemnité des dépenses faites postérieurement à la cessation de la vie commune, en précisant que la date des effets du divorce est fixée au 28 février 2012.

Il a relevé que les dépenses relatives à l'électivité et au gaz ne constituent pas des dépenses de conservation pouvant donner lieu à récompense.

Mme [L] demande que M. [P] soit condamné à lui rembourser la somme de 818,80 euros correspondant à la moitié des factures de gaz et d'électricité restant dues pour la période de juin 2011 à février 2012. Elle fait valoir que M. [P] lui a coupé les vivre à son départ du domicile conjugal en se désolidarisant du compte joint et qu'il l'a laissée régler seule ces factures correspondant aux périodes où il occupait encore le domicile conjugal alors qu'il aurait dû au moins en régler la moitié au titre de sa contribution aux charges du mariage. Elle ajoute que cette créance correspond bien à la période postérieure aux effets du divorce.

M. [P] s'oppose à cette demande en faisant valoir que Mme [L] ne démontre pas que ces factures ont été payées à partir de son compte personnel et que si tel était le cas, elle les a réglées au titre sa contribution aux charges du mariage, lui même ayant réglé de son côté d'autres charges communes.

Mme [L] produit des factures de gaz et d'électricité afférentes au domicile conjugal (pièces 19 et 20) pour la période d'octobre 2011 au 21 février 2022, soit pour une période antérieure à l'ordonnance de non-conciliation. Cependant, elle ne justifie pas de leur règlement, de sorte qu'il n'est pas établi qu'elles auraient été réglées à partir de fonds personnels.

Mme [L] est en conséquence déboutée de sa demande à ce titre.

*Sur la créance au titre des charges de l'association syndicale ASPCA

Mme [L] demande la confirmation du jugement déféré ayant fixé sa créance à ce titre à la somme de 4 121 euros et y ajoutant, de condamner M. [P] au paiement de la somme de 2 110,50 euros à ce titre.

M. [P] demande l'infirmation de ce chef du jugement en relevant que les appels de charges ne sont pas versés aux débats.

Le premier juge a fait droit à cette demande en relevant que les charges de l'association syndicale sont au seul de nom de Mme [L] et constituent des dépenses de conservation.

Le règlement des charges de copropriété par l'indivisaire qui jouit privativement du bien, à l'exclusion de celles relatives à l'entretien courant et aux consommations de fluides (eau, chauffage collectif) qui incombent à l'occupant, a permis sa conservation de sorte qu'elle doit être remboursée par l'indivision à l'indivisaire qui l'a réglée en application de l'article 815-13 du code civil.

Mme [L] produit les appels de charges de l'ASPCA, à son nom, pour la période comprise entre juillet 2011 et janvier 2019 d'un montant total de 4 121 euros. M. [P] ne conteste pas que cette somme a été réglée par Mme [L] mais fait valoir qu'il s'agit de dépenses d'entretien afférents à l'occupation du bien et non de dépenses de conservation, l'objet de l'association étant l'entretien des chaussées et des plantations des parties communes des bâtiments.

Mme [L] ne s'explique pas sur la nature de ces charges alors les appels de fonds produits ne précisent pas leur objet et ne permettent donc pas de déterminer si elles sont relatives à l'occupation privative et personnelle de l'occupant de sorte qu'elles incomberaient à Mme [L] ou s'il s'agit d'autres charges de copropriété pouvant être qualifiées de dépenses de conservation et devant ainsi figurer au passif du compte de l'indivision.

Mme [L] est en conséquence déboutée de sa demande et le jugement déféré est infirmé de ce chef.

*Sur la créance relatives à des travaux sur le bien indivis

Mme [L] demande l'infirmation du jugement déféré l'ayant déboutée de sa demande de créance à hauteur de 2 028,21 euros au titre de travaux urgents de conservation concernant la chaudière, les sanitaires et l'électricité et de condamner M. [P] au paiement de la somme de 1 014,10 euros à ce titre.

M. [P] s'y oppose en faisant valoir qu'il ne s'agit pas de travaux urgents et que Mme [L] n'a jamais sollicité son accord.

Le premier juge a considéré que les travaux dont se prévaut Mme [L] consistent en des travaux d'entretien et non d'amélioration et n'ouvre donc pas droit à créance à son profit.

Les factures produites concernent un rapport de contrôle de l'installation d'assainissement non collectif, un ramonage, un repompage, un vidange de fosse septique, le remplacement de matériel (tube aire, mitigeur évier, chicanes, jeux d'électrodes et d'un vase d'expension sur la chaudière), l'achats de matériels (tampon pour fosse allégée, chasse d'eau et robinet, et thermo douche), la remise en état de l'alarme et la réparation de l'escalier extérieur.

Il s'agit donc de dépenses relatives à l'entretien courant du bien en lien avec son occupation qui s'analysent en des dépenses d'entretien restant à la charge de l'indivisaire occupant du bien et qui n'ouvre donc pas droit à indemnité au titre de l'article 815-13 du code civil.

Mme [L] est en conséquence déboutée de cette demande.

*Sur la créance relative à l'assurance habitation

Le règlement de l'assurance habitation par l'indivisaire qui jouit privativement du bien a permis sa conservation de sorte qu'elle doit être remboursée par l'indivision à l'indivisaire qui l'a réglée en application de l'article 815-13 du code civil.

Le premier juge a indiqué que Mme [L] ne rapportait pas la preuve du montant qu'elle avançait (4 258,66 euros) et qu'il lui appartiendra de produire les pièces utiles devant le notaire.

Mme [L] demande l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de créances au titre de l'assurance habitation qu'elle a réglé à hauteur de 528 euros, et non 4 258,66 euros comme elle l'avait indiqué par erreur devant le premier juge, et de condamner M. [P] au paiement de la moitié, soit 264 euros, en faisant valoir qu'elle justifie du règlement de cette somme.

M. [P] ne répond pas expressément sur ce point.

Mme [L] produit un calendrier des prélèvements de son contrat d'assurance suite à un avenant du 7 mars 2022 pour un montant total de 528 euros, prévoyant des mensualités de 46 euros et mentionnant les références d'un compte bancaire à la Société Générale.

Cependant, elle ne produit aucun relevé de compte permettant d'établir le paiement de ces cotisations d'assurance.

Mme [L] est en conséquence déboutée de sa demande.

*Sur la créance au titre de l'abonnement de la citerne de gaz

Mme [L] demande à la cour de fixer sa créance au titre de l'abonnement de la citerne de gaz à la somme de 2 467,64 euros, demande sur laquelle le premier juge n'a pas statué et de condamner M. [P] à lui verser la somme de 1 233,82 euros à ce titre.

M. [P] ne répond pas sur ce point.

Il ressort du jugement déféré (page 3) que Mme [L] avait demandé que figurent au débit du compte d'administration de M. [P] les sommes relatives à l'abonnement de la citerne gaz et qu'il n'a pas été statué sur cette prétention.

Mme [L] produit des factures Antargaz à son nom pour un montant total de 2 467,64 euros qu'elle indique correspondre à l'abonnement de la citerne gaz. Cependant, ces factures annuelles mentionnent uniquement qu'il s'agit d'une location sans autre précision.

En l'absence d'autre élément produit, il apparaît que ces dépenses sont relatives à la consommation de fluides qui sont des dépenses d'entretien restant à la charge de l'indivisaire occupant du bien et qui n'ouvre donc pas droit à indemnité au titre de l'article 815-13 du code civil.

Mme [L] est en conséquence déboutée de sa demande à ce titre.

Sur la demande de restitution de meubles

M. [P] demande à la cour d'ordonner la restitution d'une K7 audio sur laquelle a chanté son père et des cassettes vidéos prises avec le caméscope des époux où apparaissent ses parents.

Mme [L] conclut au rejet de cette demande en faisant valoir qu'elle n'est pas en possession de ces éléments.

C'est par des motifs pertinents que les débats devant la cour n'ont pas altéré et qu'il convient d'adopter que le premier juge a rejeté cette demande en motifs que M. [P] ne rapporte pas la preuve que ces biens seraient toujours en la possession de Mme [L].

Le jugement déféré est confirmé de ce chef.

Sur les demandes relatives au prononcé de la liquidation et la répartition du prix de vente du bien indivis

M. [P] demande à la cour de prononcer la liquidation des intérêts pécuniaires des époux selon le tableau rappelé ci-dessus.

Cependant, il n'appartient pas à la cour de procéder aux opérations de liquidation et de partage des intérêts pécuniaires des époux, étant en outre relevé que le premier juge a ordonné l'ouverture de ces opérations et commis un notaire pour y procéder, de sorte qu'il y a lieu de renvoyer les parties à cette fin devant le notaire qui va poursuivre ces opérations selon ce qui est jugé par la présente décision.

En conséquence, M. [P] est débouté de cette demande.

M. [P] demande d'ordonner au notaire de répartir le solde du prix de vente entre les époux à hauteur de 220 315,69 euros à son profit et de 68 684,31 euros pour Mme [L], ce qui correspond selon lui à leurs droits respectifs dans la liquidation.

Cependant, il convient de rappeler que si les parties ont des droits équivalents sur le prix de vente du bien indivis, sa répartition dépendra de l'issue des opérations de compte qui sont en cours devant le notaire.

Il convient en conséquence de débouter M. [P] de sa demande et d'infirmer le jugement qui a ordonné au notaire de répartir le solde du prix de vente par moitié entre les mains de M. [P] et Mme [L].

Sur l'attribution des véhicules

M. [P] demande de lui attribuer la propriété du véhicule Citroën C3 et d'attribuer à Mme [L] la propriété du véhicule Renault Clio.

Cependant, il n'a pas interjeté appel du chef du jugement ayant dit que Mme [L] conservera le véhicule Clio en pleine propriété et M. [P] le véhicule Citroën C3 à charge d'établir un compte des récompenses en fonction de la valeur argus des biens.

Ainsi, faute d'effet dévolutif, la cour n'est pas saisie de ces chefs de demande sur lesquels il ne sera donc pas statué, étant en outre relevé que Mme [L] n'a pas interjeté appel incident de ces chefs.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Compte tenu de la nature familiale du litige, il convient de laisser à la charge de chaque des parties ses dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile. Les demandes des parties à ce titre sont en conséquence rejetées.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, après débats en audience publique,

INFIRME partiellement le jugement rendu le 8 octobre 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Chartres sur:

-le renvoi des parties devant le notaire pour toutes les prétentions dont elles n'ont pas rapporté la preuve, et dit que faute de preuve suffisamment probante, le notaire pourra les rejeter,

-la créance au titre des taxes foncières,

-la créance au titre des appels de fond de l'ASPCA.

Statuant de nouveau,

FIXE les créances de l'indivision envers Mme [L] comme suit:

*au titre de la vente du véhicule Ford Fiesta: 2 000 euros,

*au titre des indemnités d'occupation du biens indivis pour la période du 10 mai 2016 au 31 août 2019: 34 887 euros

FIXE les créances de M. [P] à l'encontre de l'indivision comme suit:

*au titre de la taxe d'habitation 2012: 1 296 euros,

*au titre des taxes foncières 2012 à 2018: 13 280 euros.

DÉBOUTE M. [P] de ses demandes de créances au titre de son apport dans le bien indivis et au titre des travaux réalisés dans ce bien.

DÉBOUTE M. [P] de sa demande relative aux impôts 2011.

DÉBOUTE Mme [L] de sa demande de créance au titre des factures d'électricité et de gaz, des appels de fonds de l'ASPCA, des travaux sur le bien indivis, des cotisations d'assurance et de l'abonnement à la citerne de gaz.

CONFIRME le jugement déféré en ses autres dispositions dévolues à la cour.

REJETTE toute autre demande.

DIT que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens d'appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Jacqueline LESBROS, Présidente de chambre et par Madame ASETTATI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 2e chambre 2e section
Numéro d'arrêt : 22/00423
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;22.00423 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award