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31/05/2023 | FRANCE | N°22/00279

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 31 mai 2023, 22/00279


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 31 MAI 2023



N° RG 22/00279



N° Portalis DBV3-V-B7G-U7EL



AFFAIRE :



S.E.L.A.S. MJS PARTNERS Maître [U] [E] es qualité de Mandataire liquidateur de la Société MORY GLOBAL

...



C/

[S] [B] épouse [O]

...



L'AGS CGEA IDF EST





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Dé

cembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Section : C

N° RG : 20/00342



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Anne NACHBAR



la SELARL GOLDMANN



SELARL SIMON ASSOCIES







le...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 31 MAI 2023

N° RG 22/00279

N° Portalis DBV3-V-B7G-U7EL

AFFAIRE :

S.E.L.A.S. MJS PARTNERS Maître [U] [E] es qualité de Mandataire liquidateur de la Société MORY GLOBAL

...

C/

[S] [B] épouse [O]

...

L'AGS CGEA IDF EST

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 06 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Section : C

N° RG : 20/00342

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Anne NACHBAR

la SELARL GOLDMANN

SELARL SIMON ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE TRENTE ET UN MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.E.L.A.S. MJS PARTNERS Maître [U] [E] es qualité de Mandataire liquidateur de la Société MORY GLOBAL

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentant : Me Anne NACHBAR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

S.E.L.A.F.A. MJA Maître [M] [X], Es qualité de Mandataire liquidateur de la Société MORY GLOBAL

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentant : Me Anne NACHBAR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS

APPELANTES

****************

Madame [S] [B] épouse [O]

[Adresse 5]

[Localité 6]

Assistée de Me Juliette GOLDMANN de la SELARL GOLDMANN, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de MARSEILLE - N° du dossier 617049 substitué par Me Shirly COHEN, avocat au barreau de PARIS

S.E.L.A.R.L. MMJ prise en la personne de Maître [V] [J] es qualité de liquidateur de la Société MORY DUCROS

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentant : Me Hubert MARTIN DE FREMONT de la SELARL SIMON ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0411 - N° du dossier 22444

INTIMEES

****************

L'AGS CGEA IDF EST

[Adresse 2]

[Localité 7]

non constitué

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 14 Avril 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [S] [O] a été engagée par la société Mory Ducros suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 28 août 1987 en qualité d'opératrice de saisie.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Mme [O] a exercé plusieurs mandats de représentant du personnel.

Par jugement en date du 26 novembre 2013 du tribunal de commerce de Pontoise, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'encontre de la société Mory Ducros. Maître [J] a été désigné en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement en date du 6 février 2014 du tribunal de commerce de Pontoise, un plan de redressement de la société Mory Ducros a été arrêté par voie de cession au profit de la société Arcole Industries devant constituer une nouvelle société dénommée Mory Global.

Le site de [Localité 10] [Localité 11] sur lequel travaillait Mme [O], n'a pas été repris par le groupe Arcole Industries.

Le 7 février 2014, la salariée a été dispensée d'activité dans le cadre d'une procédure de licenciement collectif.

Le 3 avril 2014, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à éventuel licenciement fixé au 15 avril 2014.

Le 24 juillet 2014, l'inspection du travail a refusé la demande d'autorisation de licenciement de la salariée.

Le 24 juillet 2014, l'administrateur judiciaire de la société Mory Ducros a informé Mme [O] suite au refus d'autorisation de procéder à son licenciement, du transfert de plein droit de son contrat de travail à la société Mory Global, cessionnaire des activités de son ancien employeur.

Le 5 septembre 2014, les co-administrateurs judiciaires de la société Mory Ducros et de la société Mory Global ont formé un recours hiérarchique auprès du ministre du travail concernant le refus d'autorisation du licenciement de Mme [O].

Le 5 janvier 2015, le ministre du travail a refusé le licenciement de Mme [O].

Par jugement du 10 février 2015, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Mory Global.

Par jugement du 31 mars 2015, le tribunal de commerce de Bobigny a prononcé la liquidation judiciaire de la société Mory Global. Maître [W] et Maître [E] ont été nommés mandataires liquidateurs.

Par jugements des 5 mai 2015 et 29 juillet 2015, le tribunal de commerce de Bobigny a ordonné la poursuite d'activité de la société Mory Global pour les seuls besoins de la liquidation judiciaire jusqu'au 30 octobre 2015.

Le 21 avril 2015, la DIRECCTE a validé l'accord collectif fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Mory Global.

Le 24 juillet 2015, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de Mme [O] pour motif économique.

Par lettre du 28 juillet 2015, l'employeur a licencié la salariée pour motif économique.

Le 13 juillet 2017, Mme [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency afin d'obtenir la fixation de créances de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi, et d'indemnités de repas.

Par ordonnance du 31 décembre 2017, le président du tribunal de commerce de Bobigny a désigné la Selafa MJA, prise en la personne de Maître [X], en qualité de co-mandataire liquidateur de la société Mory Global, au lieu et place de Maître [W].

Par jugement en date du 6 décembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Montmorency a :

- fixé les créances de Mme [O] au passif de la société Mory Global, en liquidation judiciaire, aux sommes suivantes :

* 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi,

* 833,30 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- fixé la créance de Mme [O] au passif de la société Mory Ducros, en liquidation judiciaire, à la somme de 333,32 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- l'a déboutée du surplus de ses demandes,

- déclaré le présent jugement opposable à l'Unédic, Ags Cgea Ile-de-France Est dans la limite de sa garantie légale.

Le 27 janvier 2022, Maître [U] [E] et la société Selafa Mja, prise en la personne de Maître [M] [X], en qualité de co-mandataires liquidateurs de la société Mory Global, ont interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 octobre 2022, Maître [U] [E] et la société Selafa Mja, prise en la personne de Maître [M] [X], en qualité de co-mandataires liquidateurs de la société Mory Global, demandent à la cour de :

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Mory Global la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- statuant à nouveau, débouter Mme [O] de cette demande,

- subsidiairement, réduire le montant à de plus justes proportions,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Mory Global la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi

- statuant à nouveau, débouter Mme [O] de cette demande,

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société Mory Global la somme de 833,30 euros à titre de prime de repas,

- statuant à nouveau, débouter Mme [O] de cette demande,

- débouter Mme [O] de toutes ses demandes,

- dire et juger que toute condamnation prononcée au profit de Mme [O] ne pourra que tendre à la fixation d'une créance au passif de la société Mory Global,

- dire et juger que l'arrêt à intervenir sera opposable à l'Unédic, Ags, Cgea Ile-de-France Est.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 14 octobre 2022, Mme [O] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- fixé ses créances au passif de la société Mory Global, en liquidation judiciaire, aux sommes suivantes :

* 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi,

* 833,30 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- fixé sa créance au passif de la société Mory Ducros, en liquidation judiciaire, à la somme de 333,32 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- déclaré le présent jugement opposable à l'Unédic, Ags Cgea Ile-de-France Est dans la limite de sa garantie légale,

d'infirmer le jugement en ce qu'il a fixé ses créances au passif de la société Mory Global, en liquidation judiciaire, à la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, débouté Mme [O] du surplus de ses demandes, et statuant à nouveau :

- fixer ses créances au passif de la société Mory Global, en liquidation judiciaire, aux sommes suivantes :

* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 4 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi,

* 833,30 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- fixer sa créance au passif de la société Mory Ducros, en liquidation judiciaire, à la somme de 333,32 euros au titre de la prime de repas non perçue,

- dire et juger que cette somme sera garantie par l'Unédic Ags Cgea Ile-de-France Est.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 19 juillet 2022, Maître [V] [J], en qualité de mandataire liquidateur de la société Mory Ducros, demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la société Mory Ducros la somme de 333,32 euros à titre d'indemnité de repas et de débouter Mme [O] de toute demande à l'encontre de la liquidation.

L'Unédic Ags Cgea Ile-de-France Est n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel, les conclusions des appelants et de Mme [O] ont été signifiées à l'AGS par remise à personne morale.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 28 mars 2023.

MOTIVATION

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail. Elle indique qu'elle a été placée en dispense d'activité pendant un an et cinq mois, que l'employeur n'a pas cherché à la reclasser pendant cette période en ne lui proposant aucun poste de reclassement. Elle soutient qu'un poste aurait pu lui être proposé sur l'agence de [Localité 9]. Elle conclut que cette dispense de travail caractérise un manquement fautif de l'employeur dans son obligation de lui fournir du travail, que cette situation l'a isolée et écartée du monde professionnel.

Les mandataires liquidateurs de la société Mory Global soulignent qu'aucun manquement ne peut leur être imputé avant le 29 juillet 2014, date du transfert du contrat de travail de la salariée. Ils distinguent une première période pendant laquelle le contrat de travail de la salariée était transféré de façon provisoire, dans l'attente de la décision de l'administration sur le sort de son contrat de travail et qui ne saurait s'analyser en une exécution fautive du contrat de travail. Ils ajoutent que pendant la deuxième période, des recherches de reclassement ont été entreprises de façon sérieuse et loyale, qui n'ont permis de proposer à la salariée qu'un seul poste, lequel a été refusé par cette dernière. Subsidiairement, ils demandent à la cour de ramener le montant indemnitaire à de plus justes proportions, la salariée n'ayant subi aucune perte de rémunération durant sa dispense d'activité et fondant sa demande sur une période antérieure au transfert de son contrat de travail.

Sur la période du 7 février au 24 juillet 2014

La salariée était dispensée d'activité par la société Mory Ducros, dans le cadre d'une procédure de licenciement collectif.

La demande de dommages et intérêts de la salariée étant formée à l'encontre de la société Mory Global et la salariée n'invoquant pas de fondement juridique pour imputer une créance de dommages et intérêts à l'encontre de cette société sur cette période, elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour cette période, celle-ci n'étant pas justifiée.

Sur la période de transfert provisoire du contrat de travail du 25 juillet 2014 au 5 janvier 2015

A compter du 25 juillet 2014, le contrat de la salariée a été transféré de plein droit à la société Mory Global après refus de l'inspection du travail d'autoriser son licenciement.

Le recours hiérarchique mis en oeuvre n'étant pas suspensif, l'employeur ne pouvait procéder à un licenciement puisque l'autorisation avait été refusée.

Le site dans lequel travaillait la salariée n'ayant pas été repris, l'employeur était dans l'impossibilité de la maintenir à son poste.

Au vu de la lettre recommandée du 9 septembre 2014 de la société Mory Global, la salariée a été reçue en entretien le 5 août 2014, l'employeur ayant évoqué la possibilité de la réaffecter sur l'une des agences géographiquement la plus proche de l'agence où elle exerçait, ou sur l'une quelconque des autres agences de la société Mory Global et ayant évoqué, en cas de refus de cette dernière, la possibilité d'une dispense d'activité dans l'attente de la décision administrative la concernant en réponse au recours hiérarchique déposé ; la salariée a fait part de son refus d'accepter la modification de son contrat de travail en conséquence d'une modification de son lieu de travail.

Par conséquent, l'employeur a usé de la faculté de dispenser la salariée de travail et de maintenir son salaire dans l'attente de la décision du ministre du travail, ce qui était conforme au souhait de la salariée de ne pas accepter de modification de son contrat de travail en conséquence d'une modification de son lieu de travail. Aucun manquement n'est donc caractérisé à l'encontre de l'employeur pendant cette période.

La demande de dommages et intérêts formée par la salariée relativement à cette période doit donc être rejetée.

Sur la période postérieure au 6 janvier 2015

En l'espèce, la décision de rejet du recours hiérarchique du ministre du travail constitue une confirmation de la décision de l'inspecteur du travail, le transfert du contrat de travail de la salariée auprès de la société Mory Global est donc devenu définitif.

A compter de la date du 6 janvier 2015, la société Mory Global était donc tenue de rechercher une affectation à la salariée.

L'employeur qui a ensuite fait l'objet le 10 février 2015 de l'ouverture d'une procédure collective, puis a mis en oeuvre une procédure de licenciement économique à l'encontre de la salariée était tenu d'une obligation de reclassement à l'encontre de celle-ci.

Les mandataires judiciaires indiquent que l'employeur a contacté les responsables ressources humaines de l'ensemble des sociétés du groupe Arcole Industries en France et à l'étranger et produisent des lettres de recherches de reclassement à compter du 9 mars 2015 et une lettre du 14 avril 2015 de proposition de poste d'assistant d'agence adressée à Mme [O] par lettre recommandée.

Cependant, ils n'allèguent, ni n'établissent de recherche d'affectation pour la période à compter du 6 janvier 2015 et jusqu'au 9 mars 2015 antérieure au licenciement.

Mme [O] conteste avoir refusé une proposition de poste et indique qu'un poste aurait pu lui être proposé sur l'agence de [Localité 9] distante de 15 kilomètres de son agence d'origine, laquelle a d'ailleurs repris une dizaine de salariés de son ancienne agence. Les mandataires judiciaires ne rapportent pas la preuve qu'aucune affectation n'était disponible dans cette agence à la période litigieuse correspondant au parcours et aux compétences de la salariée.

Il s'en déduit que l'employeur n'a pas sérieusement recherché de proposition d'affectation au bénéfice de la salariée pour la période à compter du 6 janvier 2015 et jusqu'au 9 mars 2015 antérieure au licenciement alors que cette dernière était dispensée d'activité depuis le 7 février 2014 et se trouvait donc dépourvue de travail depuis de nombreux mois.

Par conséquent, il sera fait droit à la demande de Mme [O] d'allocation d'une créance de dommages et intérêts à hauteur de 6 000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur le dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi

La salariée sollicite des dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi, dont le budget était de 4 000 euros par salarié concerné et dont elle n'a pu bénéficier.

Les mandataires liquidateurs concluent au rejet de la demande, faisant valoir que le dispositif s'est vu attribuer un budget pour son fonctionnement, ce qui ne signifie pas que les salariés devaient se voir octroyer cette somme, une indemnité complémentaire ayant d'ailleurs été versée à chaque salarié.

En l'espèce, la salariée ne justifie pas avoir sollicité son inscription au dispositif d'accompagnement dont elle était informée par lettre du 5 mai 2015 de proposition du contrat de sécurisation professionnelle, et ne pas avoir pu effectivement en bénéficier.

Elle doit donc être déboutée de sa demande de dommages et intérêts à ce titre, celle-ci étant infondée en l'absence de manquement de l'employeur.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur l'indemnité de repas

La salariée sollicite un rappel d'indemnité de repas d'un montant de 333,32 euros à la société Mory Ducros et d'un montant de 833,3 euros à la société Mory Global. Elle indique que sa prime de repas a été indûment supprimée pendant la dispense d'activité imposée par l'employeur alors que celle-ci n'aurait dû avoir aucune incidence sur sa rémunération.

Le mandataire liquidateur de la société Mory Ducros indique que l'indemnité de repas vient compenser une sujétion liée à la prise d'un repas sur le lieu de travail et non pas à domicile, qu'il ne s'agit pas d'une rémunération mais de frais professionnels. Il précise que pendant la période contestée la salariée était en dispense d'activité, qu'elle n'avait donc aucune contrainte liée à la prise d'un repas sur le lieu de travail et donc aucun droit à la compensation de cette sujétion par le versement de l'indemnité repas.

Les mandataires liquidateurs de la société Mory Global font valoir que les demandes de la salariée se situent pendant la période durant laquelle elle était en dispense d'activité. Ils soutiennent que l'indemnité repas n'est pas automatique dès lors que les repas ne sont pas pris par le salarié sur l'amplitude repas habituelle, qu'il ne s'agit pas d'un élément de salaire et que la prime de repas n'a jamais été intégrée dans la rémunération de la salariée.

L'article 3 du protocole du 30 avril 1974 relatif aux frais de déplacement des ouvriers, annexé à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950, dispose que: 'Le personnel ouvrier qui se trouve, en raison d'un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un ou plusieurs repas hors de son lieu de travail, perçoit pour chacun des repas une indemnité de repas dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole.

Est réputé obligé de prendre son repas hors du lieu de travail le personnel qui effectue un service dont l'amplitude couvre entièrement les périodes comprises soit entre 11 h 45 et 14 h 15, soit entre 18 h 45 et 21 h 15.'

Il s'en déduit que l'indemnité de repas litigieuse ne constitue pas un élément de salaire mais doit être qualifiée de frais professionnel.

Par conséquent, pendant la période de dispense d'activité, la salariée n'ayant pas de sujétion particulière au titre du repas, n'est pas fondée à solliciter une indemnité de repas. Mme [O] doit donc être déboutée de ses demandes de créances à ce titre.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur la garantie de l'AGS

Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA Ile de France Est qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Maître [U] [E] et la société Selafa Mja, prise en la personne de Maître [M] [X], en qualité de co-mandataires liquidateurs de la société Mory Global, succombant à la présente instance, en supporteront les dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a été déclaré opposable à l'Unédic Ags Cgea Ile-de-France Est dans la limite de sa garantie légale,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Fixe la créance suivante au passif de la liquidation judiciaire de la société Mory Global au bénéfice de Mme [S] [O] :

6 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Déboute Mme [S] [O] de sa demande de fixation de créance au titre de dommages et intérêts pour non-respect du dispositif d'accompagnement prévu dans le plan de sauvegarde de l'emploi,

Déboute Mme [S] [O] de sa demande de fixation de créances au titre de primes de repas,

Condamne Maître [U] [E] et la société Selafa Mja, prise en la personne de Maître [M] [X], en qualité de co-mandataires liquidateurs de la société Mory Global aux dépens de première instance et d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 22/00279
Date de la décision : 31/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-31;22.00279 ?
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