COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
17e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 31 MAI 2023
N° RG 21/02182 - N° Portalis DBV3-V-B7F-UT3P
AFFAIRE :
Société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY
C/
Madame [H] [E] [O]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 mai 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE
Section : AD
N° RG : F 18/02066
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Franck LAFON
Me Valérie OBADIA
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE TRENTE ET UN MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :
Société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY
N° SIRET : 381 162 197
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Sébastien-pierre TOMI de la SELAFA FIDUCIAL, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 706, substitué à l'audience par Me KHRIS-FERTIKH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1479 - Représentant : Me Franck LAFON, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618
APPELANTE
****************
Madame [H] [E] [O]
née le 26 Mars 1986 à [Localité 5]
de nationalité Ivoirienne
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Valérie OBADIA, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 49
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 29 mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET,
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
Mme [O] a été engagée en qualité d'agent des services de sécurité incendie par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 25 avril 2013, par la société Fiducial Private Security.
Cette société est spécialisée dans la prévention et la sécurité. L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 10 salariés. Elle applique la convention collective nationale des entreprises de prévention et sécurité.
Par avenant du 9 mars 2016, la salariée a été promue chef d'équipe des services de sécurité incendie.
La salariée a été placée en arrêt de travail pour maladie, du 1er au 12 octobre 2016 puis en congé maternité du 13 octobre 2016 au 16 février 2017. Elle a été en congé parental d'éducation à temps partiel du 2 mars 2017 au 1er septembre 2017.
Convoquée par lettre du 8 septembre 2017 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé le 19 septembre 2017, la salariée a été licenciée par lettre du 29 septembre 2017 pour faute grave dans les termes suivants :
« Consécutivement à votre entretien disciplinaire du 19 Septembre 2017 au cours duquel vous vous êtes présentée seule et après réexamen de votre dossier, nous informons que nous avons décidé de vous licencier pour le motif suivant :
Vous n'avez pas respecté les consignes en vigueur chez notre client « [Localité 6] », afférentes au Système de Sécurité Incendie (SSI).
Le 29 août 2017 à 19h20 soit 20 minutes après la prise de votre poste, vous vous rendez compte que le Système de Détection Incendie du parking et des infrastructures des Tours A et B sont en défaut secteur se traduisant par le fait qu'il n'y avait plus aucune alimentation électrique. Dans ces conditions, le SDI et le Centralisateur de Mise en Sécurité Incendie (CMSI) fonctionnaient sur leurs batteries d'une autonomie ne dépassant pas plus d'une heure. En votre qualité de Chef d'équipe des Services de Sécurité Incendie, vous n'étiez pas sans ignorer que cette situation était très grave et qu'il y avait urgence à réagir avant qu'une panne généralisée des installations de sécurité ne survienne au risque de ne plus avoir aucune alarme incendie et plus aucune mise en sécurité de l'établissement.
Or, devant cette situation à risques, vous n'avez pris aucune mesure conservatoire avec des renforcements de rondes afin de lever toutes anomalies ou début d'incendie qui ne pouvait plus être décelés par ces installations. Vous vous êtes juste contentée d'envoyer un texto à 23h30 au Chef d'équipe qui vous avait précédée en journée afin de savoir s'il avait lui-même rencontré cet incident. Ce dernier vous a répondu à 4h30 qu'il n'avait pas détecté ce problème mais qu'en revanche la situation était très critique et très grave et que vous deviez prévenir le Chef de Service de Sécurité Incendie. Ce n'est qu'à 04h18 que vous avez prévenu ce dernier par texto l'informant que le système était en défaut, message dont il a pris connaissance à 06h00 du matin.
Vous avez gravement failli à vos obligations en tant que Chef d'équipe car, de par vos manquements, une panne généralisée des installations de sécurité est intervenue sur les bâtiments et qui plus est, en période de travaux !
Par ailleurs, il a également été constaté que vous n'avez pas pris soin de noter correctement dans la main courante les différents dysfonctionnements intervenus puisqu'ils ont été notés dans la marge.
Ces faits sont particulièrement graves, ils reflètent un manque certain de rigueur dans le respect des procédures en vigueur et de professionnalisme dans votre travail.
Lors de votre entretien disciplinaire vous avez reconnu l'ensemble des faits qui vous sont reprochés et avez admis n'avoir pas su et pris les dispositions nécessaires afin de gérer une telle situation d'urgence. Nous ne pouvons pas accepter un tel comportement car en votre qualité de Chef d'équipe des Services de Sécurité Incendie, il vous incombe de veiller au bon fonctionnement de tout le matériel de protection contre l'incendie, conformément à l'Arrêté du 30 décembre 2011 portant règlement de sécurité pour la construction des immeubles de grande hauteur et leur protection contre les risques d'incendie et de panique, et plus spécifiquement l'article GH 62.
De plus, vous n'êtes pas sans ignorer la consigne n°18 spécifique à la [Localité 6] qui précise les responsabilités du chef d'équipe.
Or clairement, à la vue de ces faits, il s'avère que vous avez failli à vos obligations. Tout d'abord en ne respectant pas les consignes et les missions inhérentes à vos fonctions sur le site sur lequel vous êtes régulièrement planifié, vous vous êtes mis en porte-à-faux avec vos obligations contractuelles mais, pire encore, vous avez mis en danger la sécurité du site avec toutes les conséquences que cela a eu à l'égard de notre cliente et notamment, l'intervention du fabricant sur le SSI pour la bonne remise en marche des installations.
Ces constats sont graves, ils soulignent un manque de rigueur certain dans l'application des procédures en place. Il est évident que vous ne prenez pas toute la mesure de votre poste et par conséquent de vos responsabilités.
Compte tenu des faits reprochés précédemment cités, nous nous voyons contraints de vous notifier par la présente, votre licenciement pour faute grave, sans indemnités de préavis et de licenciement.
La rupture prendra donc effet à compter de la date d'expédition de ce courrier, date à laquelle vous ne faite plus partie de nos effectifs. »
Le 31 juillet 2018, Mme [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre aux fins de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes de nature indemnitaire.
Par jugement du 14 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Nanterre (section activités diverses) a :
- dit et jugé le licenciement pour faute grave, prononcé par la société Fiducial Private Security, à l'encontre de Mme [O], dénué de cause réelle et sérieuse,
- condamné en conséquence la société Fiducial Private Security à payer à Mme [O] les sommes suivantes :
. 3 291,48 euros bruts à titre d'indemnité de préavis, avec adjonction des intérêts au taux légal, à compter du 12 septembre 2018,
. 329,14 euros bruts à titre de congés payés y afférents, avec adjonction des intérêts au taux légal, à compter du 12 septembre 2018,
. 1 885,74 euros à titre d'indemnité de licenciement avec adjonction des intérêts au taux légal, à compter du 12 septembre 2018,
. 7 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, avec adjonction des intérêts au taux légal, à compter du 14 mai 2021,
. 950 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles de procédure, avec adjonction des intérêts au taux légal, à compter du 14 mai 2021,
- ordonné la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an à compter du 12 septembre 2018,
- rappelé l'exécution de droit à titre provisoire des condamnations ordonnant le paiement des sommes accordées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de l'indemnité de licenciement et des congés payés y afférents, dans la limite de 14 811,66 euros
- condamné la société Fiducial Private Security à porter, à Mme [O], l'attestation de fin de contrat destinée à Pôle emploi et le certificat de travail, conformes au dispositif du présent jugement,
- dit et juge n'y avoir lieu à prononcer d'une astreinte,
- rappelé l'exécution de droit de la condamnation à porter l'attestation de fin de contrat destinée à Pôle emploi et le certificat de travail,
- débouté Mme [O] de ses demandes plus amples ou contraires,
- débouté la société Fiducial Private Security de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles,
- condamné la société Fiducial Private Security aux entiers dépens comprenant notamment les frais éventuels de signification et d'exécution forcée du présent jugement, par voie d'huissier.
Par déclaration adressée au greffe le 6 juillet 2021, la société Fiducial Private Security a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 14 février 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 janvier 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Fiducial Private Security demande à la cour de :
sur le bien fondé du licenciement en date du 29 septembre 2017,
- réformer le jugement dont appel,
- juger que le licenciement notifié par courrier recommandé avec AR daté du 29 septembre 2017 procède d'une faute grave,
- juger, en conséquence, bien fondé le licenciement notifié,
- débouter, en conséquence, Mme [O] de l'intégralité des réclamations qu'elle formule dans le cadre de la présente instance,
- débouter, plus généralement, l'intéressée de l'intégralité des réclamations qu'elle formule,
- condamner Mme [O] à lui restituer la somme de 4 413,19 euros qu'elle a perçue dans le cadre de l'exécution de droit de la décision déférée,
sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- juger que cette demande ne repose sur aucun fondement,
- débouter, en conséquence, Mme [O] de la demande qu'elle a formulée à ce titre,
en tout état de cause,
- condamner Mme [O] à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la même aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles Mme [O] demande à la cour de :
- déclarer recevable mais mal fondée la société Fiducial Private Security en son appel du jugement sus énoncé,
- l'en débouter ainsi que de toutes demandes, fins et conclusions comme infondées et en tout cas injustifiées,
- la recevoir en son appel incident, du jugement sus énoncé,
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident,
en conséquence,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 14 mai 2021, en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement pour faute grave est dénué de cause réelle et sérieuse,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre du 14 mai 2021, en ce qu'il a condamné la société Fiducial Private Security au paiement des sommes :
. 1 885,74euros à titre d'indemnité de licenciement,
. 3 291,48euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis (2 mois),
. 329,14 euros au titre des congés payés sur préavis,
- l'infirmer en ce qu'il a limité l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 7 800 euros, et l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
et statuant à nouveau,
- condamner la société Fiducial Private Security au paiement des sommes suivantes :
. 8 228,70 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (5 mois),
. 5 000 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral,
. outre les intérêts au taux légal, à compter de la saisine,
- ordonner à la société Fiducial Private Security la remise du bulletin de salaire correspondant à la période de préavis et des documents de rupture : soit attestation Pôle emploi, certificat de travail et solde de tout compte, conformes avec la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour et par document,
- condamner la société Fiducial Private Security à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société enfin aux entiers dépens.
MOTIFS
Sur la faute grave
A l'appui de son appel, l'employeur expose que les faits sont établis, que les attestations produites sont recevables, et que la gravité de la faute doit être mesurée à l'aune des responsabilités de la salariée.
La salariée réplique que la quasi totalité des installations était hors service, qu'elle ne disposait d'aucune consigne écrite sur le SSI depuis le début des travaux du site, que plusieurs mains courantes ont été remplies par ses collègues de travail les jours précédents, que contrairement à ce qu'énonce la lettre de licenciement, elle a contesté les griefs.
***
Il résulte de l'article L.1232-1 du code du travail que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Le motif inhérent à la personne du salarié doit reposer sur des faits objectifs, matériellement vérifiables et qui lui sont imputables.
L'article L.1235-1 du code du travail prévoit qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Enfin, la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et qui justifie la rupture immédiate de son contrat de travail, sans préavis ; la charge de la preuve pèse sur l'employeur.
En l'espèce, la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, reproche à la salariée :
- de ne pas avoir réagi, le 29 août 2017, à un défaut secteur du SDI (système de détection incendie) du parking et des infrastructures des Tours A et B se traduisant par une absence d'alimentation électrique, et avoir seulement adressé un texto au responsable, cette absence de réaction étant à l'origine de la panne du système, qui plus est pendant des travaux,
- de ne pas avoir pris soin de noter correctement dans la main courante les différents dysfonctionnements intervenus puisqu'ils ont été notés dans la marge.
Pour établir ces faits, l'employeur produit les pièces suivantes :
- le planning de la salariée qui indique qu'elle est planifiée sur la '[Localité 6] 03-CDP SSIAP2 NUIT' de 7h à 19h le 29 août 2017
- les consignes du Chef d'équipe, qui indiquent qu'il a comme responsabilité le 'matériel en dotation PCSI et son bon fonctionnement : SSI (...) Toutes anomalies devront être signalées sans délai.' et de remplir les 'CAT qu'il devra remplir chaque fois que nécessaire, elles permettent d'analyser les interventions (...) Les défauts rencontrés sur le SSI devront être signalés sans délais à la maintenance technique (...) De son équipe devant le chargé de sécurité, il informera ce dernier de tout problème sortant du cadre de compétence.'
- la demande de sanction établie par la responsable d'agence, Mme [D] [Y], indique 'durant sa vacation du 29 au 30/08 de 19h à 7h pendant laquelle elle assurait le poste de Chef d'équipe, Mme [O] se rend compte à 19h20 d'un défaut de secteur sur le SDI du PC (plus d'alimentation électrique). Lors de cet événement le relais est pris par des batteries qui n'ont qu'une durée de fonctionnement d'une heure (...) Ceci a eu pour effet qu'aucun dispositif d'alerte ne fonctionnait depuis 20h20 puisqu'il y avait une panne généralisée des installations de sécurité, sur des bâtiments qui sont actuellement en travaux'
- la lettre de M. [F] (chef de service sécurité [Localité 6] FPS) du 31 août 2017, dont les termes sont repris dans son attestation, laquelle indique que 'de plus la main courante n'a pas été remplie au fil de l'eau pour noter ces dysfonctionnements avec des horaires précis'
- la lettre d'un salarié faisant partie de l'équipe cette nuit-là, M. [L], du 12 septembre 2017 dont les termes sont repris dans son attestation, indiquant que Mme [O] a demandé dès le début de sa prise de poste les coordonnées de M. [P], précédent chef d'équipe, mais ne lui a envoyé un texto que dans la nuit, et indiquant que le signal sonore a retenti toute la nuit.
- la lettre manuscrite de M. [K], chef d'équipe qui a assuré la relève de Mme [O], le 30 août 2017 à 7h, et qui indique que le système n'a pu se remettre à son état normal car il avait perdu ses données lors de la nuit précédente et a dû faire l'objet d'une intervention du fabricant, ces propos étant repris dans son attestation.
- la main courante de la nuit du 29 août, renseignée par la salariée, qui indique dans un cadre en haut à droite : 'CMSI pkg : défaut de liaison ; SDI Pkg : défaut secteur système ; CMSI A/B : à l'arrêt', et, dans les consignes qu'elle a passé à son successeur : 'CMSI Infrastructure Défaut système Hors service' / 'SDI Parking : Défaut système Hors service'.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que la défaillance du SDI et du CMSI (Centralisateur de Mise en Sécurité Incendie) a été notée par la salariée dans le cadre du haut de la fiche ainsi que dans le cadre correspondant aux 'consignes' c'est-à-dire aux informations transmises à son supérieur et à l'équipe prenant le relais.
Le second grief n'est dès lors pas établi, l'employeur n'explicitant pas en quoi les mentions portées par la salariée sur la main courante n'étaient pas suffisantes ou conformes aux règles.
S'agissant du premier grief, lui reprochant de ne pas avoir réagi à un défaut secteur du SDI du parking et des infrastructures des Tours A et B se traduisant par une absence d'alimentation électrique, la salariée objecte que ces défauts préexistaient à la vacation qu'elle a assurée dans la nuit du 29 août 2017, et produit les éléments suivants:
- la main courante de la journée du 28 août 2017 (assurée par la salariée, selon son planning) indiquant dans le cadre en haut à droite 'CMSI A/B : à l'arrêt ; CMSI pkg : défaut de liaison (...)'
- la main courante de la journée du 29 août 2017 (assurée par un autre salarié, M. [P]), soit juste avant la prise de poste de la salariée, indiquant 'CMSI A/B : HS ; CMSI Pkg défaut liaison (...) DAD en défaut', le cadre en dessous indiquant 'défaut manque tension surpresseur SPKB2"
- le texto de la salariée à M. [F] le 30 août 2017 à 04h17 lui indiquant que le 'SDI parking est en dérangement (défaut secteur, hors service) et le CMSI infra vient de s'arrêter'
Il en résulte que les allégations de la salariée selon lesquelles la quasi-totalité des installations étant hors service, et le site n'étant pas en danger, elle n'a donc pas alerté immédiatement son chef de service de l'incident, au cours de sa garde de nuit, sont établies, excepté pour le SDI du parking qui n'avait pas fait l'objet d'un signalement préalable selon les mains courantes produites.
Sur ce point, la cour relève que l'employeur n'apporte aucun élément en réponse au moyen de la salariée selon lequel il n'existait plus aucune consigne écrite en ce qui concerne le système de sécurité incendie depuis le début des travaux, les chefs d'équipe pouvant contacter une société
technique (Bouygues) mais pas le service de maintenance qui avait disparu.
Enfin, exceptées les attestations de ses subordonnés, l'employeur ne produit pas d'éléments émanant du fabricant ou du mainteneur des installations de sécurité incendie établissant que la panne d'alimentation électrique du SDI durant la nuit du 29 août a entraîné une panne généralisée des installations de sécurité, invoquée par l'employeur au titre du premier grief.
Au surplus, la salariée établit qu'elle était planifiée sur la période du 20 septembre 2017 au 30 novembre 2017 (cf planning édité le 19 septembre 2017 à 17h37), et qu'à compter du 1er janvier 2018 il était prévu de diminuer l'effectif affecté à ce site de 5 à 6 agents, une note de M. [F] indiquant 'pour ceux qui veulent être affecté ailleurs en faire la demande auprès de M. [F]'.
Au regard de l'ensemble de ces constatations, il apparaît ainsi que si l'absence de réaction immédiate de la salariée au défaut d'alimentation du SDI du parking le 29 août 2017 est établie, ce fait, au regard de ces éléments de contexte, ne revêt pas le caractère d'une faute de nature à justifier un licenciement pour faute grave, ni une cause sérieuse de licenciement.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse
En application des dispositions de l'article L. 1235-3, dans sa rédaction applicable au litige, issue de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, qui octroient au salarié, en cas de licenciement injustifié, une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux variant en fonction du montant du salaire mensuel et de l'ancienneté du salarié, Mme [O] ayant acquis une ancienneté de quatre années complètes au moment de la rupture dans la société employant habituellement au moins onze salariés, le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est compris entre 3 mois et 5 mois de salaire.
Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée (1 758,30 euros bruts), de son âge (31 ans), de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un nouvel emploi, et du fait qu'elle était toujours sans emploi au 5 juin 2020, il y a lieu de condamner l'employeur à lui payer, dans les limites de la demande, la somme de 8 228,70 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera par ailleurs confirmé en ce qu'il a condamné la société Fiducial Private Security au paiement des sommes de 1 885,74euros à titre d'indemnité de licenciement, 3 291,48 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis (2 mois), et 329,14 euros au titre des congés payés afférents.
Il sera également confirmé en ce qu'il a condamné la société Fiducial Private Security à remettre à Mme [O], l'attestation de fin de contrat destinée à Pôle emploi et le certificat de travail, et, y ajoutant, le solde de tout compte, ces documents devant être conformes au dispositif du jugement, confirmé par le présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette remise d'une astreinte.
Sur le préjudice moral
La salariée fait valoir qu'elle a été particulièrement choquée de l'attitude de la société qui l'a licenciée du jour au lendemain, que cette attitude est d'autant plus critiquable que son passif disciplinaire est vierge, qu'elle a toujours eu un comportement professionnel exemplaire, qu'elle a été très affectée par les griefs qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement, que cette situation a, en plus, eu de lourdes conséquences pour elle, qui s'est retrouvée sans emploi avec un jeune nourrisson à charge.
L'employeur objecte que la salariée n'établit nullement une faute émanant de la concluante, un préjudice autre que celui en lien avec la rupture des relations contractuelles, et, enfin, un lien de
causalité entre la faute alléguée et le préjudice revendiqué.
***
Cette demande s'analyse en une demande de dommages-intérêts au titre des circonstances vexatoires de la rupture du contrat de travail.
Les seuls éléments produits par la salariée (attestation Pôle emploi) ne caractérisent pas une rupture intervenue dans des circonstances vexatoires qui justifieraient l'existence d'un préjudice distinct de celui réparé par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse allouée par la cour.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de ce chef de demande.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
Il y a lieu de condamner la société Fiducial Private Security aux dépens de l'instance d'appel.
Il y a lieu de condamner la société Fiducial Private Security à payer à la salariée la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter sa demande fondée sur ce texte.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe :
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il condamne la société Fiducial Private Security à payer à Mme [O] la somme de 7 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
Statuant à nouveau du seul chef infirmé, et y ajoutant,
CONDAMNE la société Fiducial Private Security à payer à Mme [O] la somme de 8 228,70 euros bruts à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
ORDONNE à la société Fiducial Private Security de remettre à Mme [O] le solde de tout compte conforme au présent arrêt,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
CONDAMNE la société Fiducial Private Security à payer à Mme [O] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Fiducial Private Security aux dépens.
. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
. signé par Mme Aurélie Prache, Présidente et par Mme Marine MOURET, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente