COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
6e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 25 MAI 2023
N° RG 20/02160 -
N° Portalis DBV3-V-B7E-UCRG
AFFAIRE :
[R] [W]
C/
S.A.R.L. SECURITAS FRANCE SARL
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Août 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT
N° Section : AD
N° RG : 19/01072
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Nicolas BORDACAHAR
Me Sophie ELIAS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, devant initialement être rendu le 20 avril 2023 et prorogé au 25 mai 2023, les parties en ayant été avisées, dans l'affaire entre :
Monsieur [R] [W]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Nicolas BORDACAHAR, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1833
APPELANT
****************
S.A.R.L. SECURITAS FRANCE
N° SIRET : 304 497 852
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Sophie ELIAS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C0074
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 28 février 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,
Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,
Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,
Greffier en pré-affectation lors des débats : Domitille GOSSELIN,
Vu le jugement rendu le 25 août 2020 par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt,
Vu la déclaration d'appel de M. [R] [W] du 2 octobre 2020,
Vu les conclusions de M. [R] [W] du 11 février 2021,
Vu les conclusions de la société Securitas France du 10 janvier 2023,
Vu l'ordonnance de clôture du 11 janvier 2023,
Vu les conclusions aux fins de rabat de clôture du 16 janvier 2023,
Vu l'ordonnance de révocation de la clôture du 19 janvier 2023,
Vu les conclusions de M. [R] [W] du 31 janvier 2023,
Vu les conclusions de la société Sécuritas France du 7 février 2023,
Vu l'ordonnance de clôture du 8 février 2023.
EXPOSE DU LITIGE
La société Securitas France, dont le siège se situe [Adresse 1] à [Localité 5] est une société qui propose aux entreprises des solutions de sécurité intégrant des services de surveillance humaine, de sécurité mobile, de télésurveillance, de sûreté aéroportuaire, de formation, de risk management, de conseil et d'audit, de télé vidéo surveillance et d'accueil en entreprise. Elle emploie plus de dix salariés.
La convention collective applicable est celle des entreprises de prévention et de sécurité du 15 février 1985.
M. [R] [W], né le 11 décembre 1962, a été engagé à l'origine par la société ACDS par contrat à durée indéterminée à effet au 10 mai 1991 en qualité d'agent d'exploitation.
Il a été transféré au sein de la société Group 4 Securicor et affecté sur le site de TF1 le 1er mai 2005 ; il a été ensuite transféré au sein de la société Brink's avec la même affectation.
M. [W] a été enfin repris par la société Securitas France reprenant l'exploitation du site TF1, par contrat à durée indéterminée, à temps complet à compter du 30 novembre 2009, en qualité d'agent d'intervention sécurité incendie.
Le 20 janvier 2018, M. [W] a été muté sur un nouveau site.
En dernier lieu, M. [W] a été repris par la société Fiducial à compter du mois de juillet 2022 suite à la perte du marché pour le site sur lequel le salarié était affecté par la société intimée.
Par requête reçue le 1er août 2019, M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt aux fins de voir constater que l'employeur a modi'é unilatéralement son contrat de travail et de condamner la société Securitas France au paiement de diverses sommes au titre de rappel de primes et congés payés afférents et dommages-intérêts pour 'inexécution de bonne foi du contrat de travail'.
La société Securitas France avait, quant à elle, conclu au débouté des demandes du salarié et à sa condamnation au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement rendu le 25 août 2020, la section activités diverses du conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a :
- dit que la société Securitas France a modifié unilatéralement le contrat de travail de M. [W],
- condamné la société Securitas France à payer à M. [W] les sommes suivantes :
- 3 000 euros à titre de rappel de prime de polyvalence,
- 1 708 euros à titre de rappel de prime « performance »,
- 170,80 euros au titre des congés payés afférents au rappel de prime « performance »,
- 2 306,96 euros à titre de prime complémentaire de panier,
- 659,15 euros à titre de rappel de prime transport,
- 686,10 euros à titre de rappel de prime « entretien » ou « reprise »,
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que ces condamnations sont assorties de l'exécution provisoire de droit avec intérêt au taux légal à compter de la date de saisine du conseil de prud`hommes,
- dit que les astreintes demandées par M. [W] pour le paiement des sommes dues ne sont pas jugées nécessaires,
- ordonné à la société Securitas France de remettre à M. [W] un bulletin de salaire récapitulatif conforme au présent jugement, sans astreinte, celle-ci n'ayant pas été jugée nécessaire,
- débouté M. [W] du surplus de ses demandes,
- débouté la société Securitas France de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mis les dépens à la charge de la société Securitas France.
Par déclaration du 2 octobre 2020, M. [R] [W] a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 31 janvier 2023, M. [R] [W] demande à la cour de :
- confirmer le jugement dont il est fait appel en ce qu'il a constaté que la société Securitas France a modifié unilatéralement le contrat de travail de M. [W],
- confirmer le jugement dont il est fait appel en ce qu'il a condamné la société Securitas France à verser à M. [W] les rappels de salaire au titre des primes mais uniquement en son principe et pas en son quantum,
- confirmer le jugement dont il est fait appel en ce qu'il a condamné la société Securitas France à verser à M. [W] : article 700 du code de procédure civile 1 000 euros,
- infirmer le jugement pour le surplus,
Et statuant à nouveau sur les chefs incriminés,
- condamner la société Securitas France à verser à M. [W] les sommes suivantes qui seront à parfaire :
- rappel de prime « polyvalence » : 6 700 euros,
- rappel de prime « performance » : 3 233 euros,
- congés payés afférents : 323,30 euros,
- rappel de prime complémentaire panier : 4 711,47 euros,
- rappel de prime transport : 1 376,81 euros,
- rappel de prime « entretien» ou «reprise» : 2 469,96 euros,
- ordonner à la société Securitas France de maintenir le paiement des primes de polyvalence, panier, transport et rendement à l'égard du salarié,
- constater la perte de chance du salarié d'avoir pu être maintenu dans ses fonctions sur le site TF1 et être repris par la société entrante,
- condamner la société Securitas France à verser à M. [W] les sommes suivantes :
- dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat : 15 000 euros,
- article 700 du code de procédure civile : 2 000 euros,
- débouter la société Securitas France de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions formulées à l'encontre de M. [W].
M. [W] sollicite, en outre, que soit ordonnée la remise d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme à l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8e jour suivant la notification de la décision ainsi que la prise en charge des éventuels dépens de l'instance par la société appelante.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 7 février 2023, la société Securitas France demande à la cour de :
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes en ce que le conseil a partiellement fait droit aux demandes de M. [W],
- juger à nouveau, et débouter M. [W] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner M. [W] à payer à la société Securitas France la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1- sur la modification du contrat de travail ou des conditions de travail
L'appelant soutient que l'employeur a modifié son contrat de travail en le retirant du site TF1 sans explication pour le muter sur un nouveau site, ce qui lui a fait perdre le bénéfice des primes liées à son emploi sur le site TF1 ; que la modification du contrat de travail doit être distinguée du changement des conditions de travail, la première nécessitant un accord du salarié ; que la rémunération est un élément essentiel du contrat qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié.
L'intimée fait valoir au contraire que le nouveau lieu de travail était situé à moins de 3 kms du précédent ; que la clause de mobilité autorisait la modification du lieu de travail ; que le contrat de travail fixe la rémunération forfaitaire brute, seul l'avenant signé le même jour liste les éléments de rémunération liés au contrat TF1 et prévoit que ces éléments de rémunération s'annulent en cas de changement d'affectation ; qu'un salarié ne peut exiger le maintien d'une prime lorsqu'il ne remplit plus les conditions pour en bénéficier.
Le changement d'affectation d'un salarié en présence d'une clause de mobilité stipulée dans le contrat de travail est licite et s'analyse en un changement des conditions de travail relevant du pouvoir d'administration et de direction de l'employeur, et non en une modification du contrat de travail qui nécessiterait l'accord du salarié.
La décision de mettre en oeuvre une clause de mobilité doit être dictée par l'intérêt légitime de l'entreprise et c'est au salarié qu'il incombe de démontrer que cette décision a été, en réalité, prise pour des raisons étrangères à cet intérêt, ou bien qu'elle a été mise en oeuvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.
En l'espèce, le contrat de travail en date du 30 novembre 2009 liant les parties a été conclu en application des dispositions du protocole d'accord du 5 mars 2002 concernant la reprise du personnel rendu obligatoire à toutes les entreprises relevant de la convention collective des entreprises de prévention et de sécurité, avec reprise des engagements du précédent employeur de M. [W] et notamment la reprise d'ancienneté au 10 mai 1991.
Le contrat conclu entre la société Securitas et M. [W] mentionne ainsi la classification et l'emploi du salarié soit 'agent d'intervention sécurité incendie, niveau 3 échelon 3 coefficient 150" et sa 'rémunération forfaitaire brute mensuelle fixée à 1 469,38 euros'.
L'article 1.3 'définition de la mission' précise : 'l'activité de la surveillance exigeant une polyvalence tant sur la nature des fonctions que sur le lieu d'affectation, il est expressément entendu que cette mission pourra être modifiée en fonction des nécessités ou des possibilités d'affectation par rapport à l'évolution des sites et des contrats clients, sans constituer une modification substantielle du présent contrat.'
En outre, l'article 1.5 'lieu de travail et mobilité géographique' stipule : 'vos lieux de travail sont ceux des clients de la société tels qu'ils résultent de votre planning prévisionnel ou modifié. Ces sites pourront être ceux d'un ou plusieurs clients et vous pourrez être affecté indifféremment successivement ou alternativement sur l'un quelconque de ces sites en fonction des nécessités, urgences et priorités de service et d'organisation justifiés par la vocation et la nature des prestations de la société.'
Un avenant également du 30 novembre 2009 a été signé entre les parties ayant pour objet d'intégrer des éléments de rémunération liés au contrat TF1 perçus par le salarié du fait de son affectation sur ce site :
- prime de panier (vacations minimum de 7 heures) de 2,30 euros net par vacation et une indemnité complémentaire de 0,45 euros brute par heure travaillée par rapport à la prime de panier prévue par la convention collective,
- prime d'entretien sur justificatifs,
- prime de transport complémentaire de 0,20 euros brute par heure travaillée s'ajoutant à la prime prévue par la convention collective (50% carte orange),
- prime de rendement dite prime de performance d'un montant de 183 euros brut par trimestre, attribuable après une présence sur le site de 2 ans révolus,
- prime de polyvalence pour le titulaire du poste spécifique client 'intervenant mixte' de 1 500 euros par an payable en deux fois en juin et décembre.
Il est en outre stipulé à l'avenant que les primes sont liées au contrat TF1 et qu'en cas de changement d'affectation elles 's'annuleront de plein droit.'
Il résulte des contrats et avenants successifs produits aux débats que, par avenant au contrat de travail conclu entre le salarié et la société Group 4 securicor, à compter du 1er mai 2005, M. [W], affecté sur le site TF1, percevait des avantages liés à cette affectation (prime de transport, prime de panier, prime mensuelle d'entretien, prime de rendement).
Il était indiqué à l'avenant que 'ces primes sont accordées uniquement en cas d'affectation sur le site TF1. En cas de changement d'affectation pour quelque raison que ce soit, la société Groupe 4 securicor ne sera plus redevable de ces primes spécifiquement liées audit site. Les éventuelles primes du nouveau site d'affectation seront alors applicables à leurs propres conditions et montants.'
Le contrat de travail a été transféré à la société Brink's security services par un avenant n°1 du 8 janvier 2007, également en application de l'accord de reprise de personnel du 5 mars 2002. L'avenant n°1 prévoit que M. [W] est engagé en qualité d'agent de surveillance niveau 3 échelon 2 coefficient 140, et comporte également une clause de mobilité, avec la mention que le site de TF1 à [Localité 4] ne constitue pas un élément essentiel de l'engagement, le salarié pouvant être amené à assurer ses fonctions selon les besoins dans un autre centre d'exploitation de la société.
Une annexe à cet avenant indique que l'accord du 5 mars 2002 prévoit la reprise des éléments de salaire suivants : reprise du salaire de base, reprise des primes constantes soumises à cotisations sociales (primes brutes mensuelles habituelles à l'exclusion des primes trimestrielles, reprise des éléments de salaire non soumis à cotisations sociales mais prévus par la convention collective).
L'annexe à l'avenant rappelle que les avantages exclusivement accordés par le précédent employeur lors de l'affectation sur le site TF1 sont maintenus et énumère les primes telles que rappelées ci-dessus sauf la prime annuelle de 1500 euros, en précisant 'ces primes sont accordées uniquement en cas d'affectation sur le site TF1. En cas de changement d'affectation pour quelque raison que ce soit, la société Brink's security services ne sera plus redevable de ces primes spécifiquement liées audit site. Les éventuelles primes du nouveau site d'affectation seront alors applicables à leurs propres conditions et montants.'
Un avenant du 24 mars 2009 stipule que le salarié devient agent intervenant mixte sécurité-sûreté niveau 3 échelon 3 coefficient 150 sur la base d'un salaire brut mensuel de 1 469,38 euros. S'ajoute une prime annuelle de 1 500 euros brut versée en deux fois 'accordée uniquement en cas d'affectation sur le site de TF1 et pour le poste considéré.'
Il résulte de l'ensemble de ces pièces que la société Securitas n'a fait que reprendre le paiement des primes versées uniquement lorsque le salarié est affecté sur le site TF1, du fait du transfert du contrat de travail en application de l'accord du 5 mars 2002 alors applicable - modifié par l'avenant du 28 janvier 2011- sur la reprise du personnel en cas de perte et de reprise d'un marché.
L'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction était en droit d'affecter M. [W] sur un autre site que TF1 conformément à la clause de mobilité insérée à son contrat depuis l'origine de son affectation sur ce site, étant observé que la modification du lieu n'était pas significative s'agissant d'un site situé à [Localité 6] au lieu de [Localité 4].
Le salarié qui ne produit aucun courrier de contestation suite à ce changement d'affectation avant la saisine du conseil de prud'hommes en août 2019, soit plus de 18 mois après sa nouvelle affectation, ne démontre pas que la décision a été prise pour des raisons étrangères à l'intérêt légitime de l'entreprise, la société Securitas affirmant quant à elle que la société TF1 a fait état de besoins moindres en termes de personnel de sécurité et que dans le même temps l'ouverture d'un site sur lequel M. [W] a été affecté, a justifié de la nécessité de personnel supplémentaire.
Selon les bulletins de salaire produits, le salaire de base du salarié n'a pas été modifié, auquel s'ajoutent les primes et avantages prévus par la convention collective applicable (prime de panier, prime d'habillage/déshabillage, prime de reprise).
Les primes dont M. [W] réclame le paiement au motif que la modification de sa rémunération ne pouvait s'opérer sans son accord, n'étaient prévues que pour des sujétions présentes uniquement sur le site TF1, ce dont le salarié était parfaitement informé par les avenants au contrat de travail signés avec les différents employeurs assurant les prestations sur ce site.
Le salarié ne pouvait donc bénéficier de primes et avantages liés aux sujétions particulières du site TF1 - prime de panier complémentaire [vacations minimum de 7 heures], prime d'entretien, prime de transport supplémentaire , prime de rendement dite prime de performance et prime de polyvalence -, sur le nouveau site sur lequel il était affecté conformément à la clause de mobilité, les salariés présents sur ce site ne bénéficiant pas du versement des primes liées au site TF1.
Le jugement sera infirmé en ce que le conseil de prud'hommes a alloué à M. [W] des rappels de salaires au titre des primes de polyvalence, primes de performance, primes complémentaires de panier et de transport, prime d'entretien et des congés payés afférents.
Le salarié sera débouté de ses demandes à ces différents titres.
2- sur la perte de chance
L'appelant soutient que du fait de son affectation sur un autre site que TF1 en janvier 2018, il a subi un préjudice du fait de la perte de chance de voir son contrat de travail transféré à l'entreprise entrante suite à la perte par la société Securitas du marché que constituait le site TF1 au profit de la société Goron en juin 2019. De même, sa mutation lui a fait perdre la chance de bénéficier d'une revalorisation salariale et d'un coefficient plus élevé.
L'intimée affirme au contraire que même si le salarié était resté sur le site TF1, rien ne prouve qu'il aurait vu son contrat de travail transféré au nouveau prestataire.
La réparation de la perte de chance suppose que celle-ci soit réelle et sérieuse.
En l'espèce, sauf à établir un manquement de la société Securitas lors du changement d'affectation, le salarié ne peut prétendre que ce changement a eu pour conséquence de lui faire perdre une chance d'être transféré à la société entrante. En effet, dans ce cas la perte de chance n'est ni réelle ni sérieuse puisqu'elle remettrait en cause le pouvoir de l'employeur de changer l'affectation du salarié.
S'agissant de la revalorisation salariale, M. [W] verse aux débats une attestation de M. [L], salarié de la société Securitas affecté sur le site TF1 en tant qu'agent de sécurité incendie en même temps que M. [W], qui indique qu'en 2018, les personnels qualifiés SSIAP1 (formation diplomante 'service de Sécurité Incendie et d'Assistance à Personnes') sont passés d'un coefficient 150 à un coefficient 175 ce qui représentait une revalorisation salariale de 226 euros brut mensuelle dont aurait pu bénéficier M. [W].
Cette affirmation n'est cependant étayée par aucun document, notamment un écrit de l'employeur ou les bulletins de salaire de M. [L] confirmant ses dires.
Le jugement sera confirmé en ce que les premiers juges ont débouté M. [W] de sa demande de dommages-intérêts pour perte de chance.
3- sur l'exécution de bonne foi du contrat
Le salarié fait valoir que l'employeur a manqué à son obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail en le mutant sur un autre site lui faisant perdre le bénéfice de ses primes sans accord préalable de sa part ce qui lui cause un préjudice financier.
L'employeur soutient que le salarié ne justifie pas de cette demande ni en fait ni en droit en l'absence de violations contractuelles commises.
En l'espèce, le salarié ne justifie pas de manquements commis par l'employeur lequel, dans son pouvoir de direction, a changé l'affectation du salarié et ce, conformément aux termes du contrat de travail contenant une clause de mobilité dont il n'est pas établi qu'elle a été mise en oeuvre de mauvaise foi.
Le jugement sera confirmé en ce que le conseil de prud'hommes a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour 'inexécution de bonne foi du contrat de travail'.
4- sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
Au regard de l'équité et de la situation économique des parties, il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Les parties seront déboutées de leurs demandes respectives à ce titre.
M. [W] sera condamné aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt en date du 25 août 2020 sauf en ce qu'il a débouté M. [R] [W] de ses demandes de dommages-intérêts pour perte de chance et 'inexécution de bonne foi du contrat de travail',
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [R] [W] de ses demandes de rappels de salaires au titre des primes liées à l'affectation sur le site TF1 et des congés payés afférents,
Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [R] [W] aux dépens de première instance et d'appel.
Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,