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25/05/2023 | FRANCE | N°20/01986

France | France, Cour d'appel de Versailles, 3e chambre, 25 mai 2023, 20/01986


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 88K



3e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 25 MAI 2023



N° RG 20/01986



N° Portalis DBV3-V-B7E-T23N



AFFAIRE :



[S] [K]

...



C/



POLE EMPLOI









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2020 par le TJ de NANTERRE

N° Chambre : pole civil contentieux social

N° RG : 17/01137




r>Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Paul COUTURE



Me Claire RICARD





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS prorogé du 20 AVRIL 2023

La cour d'appel de Versailles a rendu l'...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 88K

3e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 25 MAI 2023

N° RG 20/01986

N° Portalis DBV3-V-B7E-T23N

AFFAIRE :

[S] [K]

...

C/

POLE EMPLOI

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 14 Janvier 2020 par le TJ de NANTERRE

N° Chambre : pole civil contentieux social

N° RG : 17/01137

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Paul COUTURE

Me Claire RICARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT CINQ MAI DEUX MILLE VINGT TROIS prorogé du 20 AVRIL 2023

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

1/ Monsieur [S] [K]

né le 06 Septembre 1946 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

2/ Madame [M] [Y] veuve [O]

née le 09 Septembre 1951 à [Localité 7] (VIETNAM)

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Représentant : Me Paul COUTURE de l'AARPI ABC ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 292

Représentant : Me COUSIN, Plaidant, avocat

APPELANTS

****************

POLE EMPLOI

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 - N° du dossier 2201104

Représentant : Me Alain CIEOL, Plaidant, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 3

INTIME

**************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 06 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Gwenael COUGARD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Madame Odile CRIQ, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme FOULON,

FAITS ET PROCEDURE :

M. [S] [K] et Mme [M] [Y] divorcée [O] ont obtenu des allocations chômage, notamment sur la période respectivement pour M. [K] allant du 1er novembre 2006 au 30 avril 2010 et pour Mme [O] du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010.

A la suite de contrôles, notamment de l'accès par Pôle Emploi à des renseignements fiscaux, Pôle Emploi a constaté qu'au cours de la période 2006 à 2011, M. [K] et Mme [O] avaient déclaré aux services fiscaux résider d'abord en Belgique puis au Luxembourg à partir du 1er janvier 2011, tandis qu'ils étaient inscrits comme demandeurs d'emploi avec une résidence déclarée en France.

Le 22 avril 2013, Pôle Emploi a déposé plainte auprès du procureur de la République de Nanterre. Un jugement a été rendu par le tribunal correctionnel de Nanterre, confirmé en appel s'agissant de la culpabilité pour les faits reprochés entre mai 2010 et septembre 2011 et les intérêts civils et infirmé pour ceux visant Mme [O] qui a été relaxée par la cour d'appel des faits de la prévention (de mai 2010 à octobre 2010) au motif que les déclarations mensongères n'avaient pas été fournies pour la période de prévention.

Par acte du 28 décembre 2016, Pôle Emploi a fait assigner M. [K] et Mme [O] devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de sursis à statuer, de restitution des allocations chômages indûment perçues et d'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 14 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

- sursis à statuer sur la demande envers M. [K], tendant au remboursement des allocations chômage perçues pour la période allant du 1er mai 2010 au 30 septembre 2011 et pour un montant de 63 414,55 euros, jusqu'à justification d'une décision définitive statuant sur l'action publique envers M. [K],

- condamné M. [K] à verser à Pôle Emploi la somme de 147 360, 68 euros d'allocations indûment perçues sur la période du 1er décembre 2006 au 30 avril 2010, outre intérêts légaux à compter de l'assignation,

- ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- condamné M. [K] à verser à Pôle Emploi la somme de 15 000 euros de dommages intérêts avec intérêts légaux à compter du prononcé du jugement et celle de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné Mme [O] à verser à Pôle Emploi la somme de 85 541,12 euros d'allocations indûment perçues sur la période du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010, outre intérêts légaux à compter de l'assignation,

- ordonné la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,

- condamné Mme [O] à verser à Pôle Emploi la somme de 6 000 euros de dommages intérêts avec intérêts légaux à compter du prononcé du jugement et celle de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les autres demandes,

- condamné M. [K] et Mme [O] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Par acte du 14 avril 2020, M. [K] et Mme [O] ont interjeté appel et prient la cour, par dernières écritures du 24 janvier 2023, de :

- juger recevable et bien fondée M. [S] [K] ainsi que Mme [O] en leur appel et en leurs demandes, fins et conclusions,

Y faisant droit,

In limine litis,

- juger que les demandes de Pôle Emploi sont prescrites,

- constater en outre que la relaxe de Mme [O] par le juge pénal a l'autorité de la chose jugée, et interdit au juge civil de retenir l'existence d'une fraude ou de fausses déclarations,

- constater l'absence de fraude ou de fausses déclarations de la part des appelants,

En conséquence,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- débouter Pôle Emploi de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- ordonner le remboursement avec intérêts au taux légal des sommes qui aurait été versées au titre de l'éxécution provisoire,

- condamner Pôle Emploi à payer à M. [K] et à Mme [O] :

au titre du préjudice morale subi, chacun................................................3 000 euros,

au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

chacun.......................................................................................................2 000 euros,

ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel.

Par dernières écritures du 15 février 2023, Pôle Emploi prie la cour de :

- adjuger à Pôle Emploi le bénéfice de ses écritures,

- confirmer la décision déférée, sauf en ce qu'elle a sursis à statuer s'agissant des allocations chômage perçues par M. [K] pour la période allant du 1er mai 2010 au 30 septembre 2011 et pour un montant de 63 414,55 euros, une décision statuant sur l'action publique envers M. [K] étant aujourd'hui intervenue,

En conséquence,

- condamner M. [K] à rembourser à Pôle Emploi, la somme de 147 360,68 euros à titre de dommages intérêts correspondant aux allocations chômage indûment perçues par lui, pour la période allant du 1er décembre 2006 au 30 avril 2010, outre intérêts légaux à compter de l'assignation,

- dire y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

- le condamner à verser à Pôle Emploi la somme de 15 000 euros à titre de dommages intérêts complémentaires correspondant aux préjudices moral et financier subis par Pôle Emploi,

- dire que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamner M. [K] à verser à Pôle Emploi la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [O] à rembourser à Pôle Emploi la somme de 85 541,12 euros, à titre de dommages intérêts correspondant aux allocations chômage indûment perçues par elle, au titre de la période allant du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010, outre intérêts légaux à compter de l'assignation,

- dire y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

- la condamner à verser à Pôle Emploi la somme de 6 000 euros à titre de dommages intérêts complémentaires correspondant aux préjudices moral et financier subis par Pôle Emploi,

- dire que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du jugement,

- condamner Mme [O] à verser à Pôle Emploi la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, y ajoutant,

- dire que Mme [O] sera solidairement tenue de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de M. [K], et que M. [K] sera solidairement tenu de l'ensemble des condamnations prononcées à l'encontre de Mme [O],

- condamner M. [K] à verser à Pôle Emploi la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [O] à verser à Pôle Emploi la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les défendeurs aux entiers dépens.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mars 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Le tribunal a ordonné le sursis à statuer concernant la demande de remboursement de la somme de 63 414,55 euros formée par Pôle Emploi pour la période allant du 1er mai 2010 au 30 septembre 2011 compte tenu de la procédure pénale alors pendante devant la cour de cassation concernant les faits objet de la prévention concernant M. [K].

Le tribunal a ensuite considéré que Pôle Emploi rapportait la preuve que sur la période concernée par la demande de remboursement des allocations chômage, les défendeurs ont déclaré faussement résider en France alors qu'il est démontré qu'ils résidaient en Belgique. Il a en conséquence condamné M. [K] à rembourser les sommes indûment perçues pour la période allant du 1er décembre 2006 au 30 avril 2010 pour un montant de 147 360,68 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation, et Mme [O] pour la période du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010 pour un montant de 85 541,12 euros, outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation.

Le tribunal a enfin estimé que les agissements frauduleux des défendeurs ont privé Pôle Emploi de liquidités justifiant l'octroi de dommages-intérêts.

Mme [Y] veuve [O] et M. [K] font valoir au soutien de leur appel que :

- au sujet de Mme [O], elle a, entre novembre 2007 et mars 2009, été contrainte de passer une partie de son temps seule en Belgique, uniquement au titre de son activité salariale, mais est revenue très régulièrement en France, passant plus de la moitié d'une semaine sur le territoire français ; dans les faits elle n'a jamais cessé d'être une résidente fiscale française pour toute la période objet du litige ; elle est revenue en urgence en France à compter du 31 mars 2009, en raison de la découverte d'un cancer du côlon très avancé, de sorte qu'elle a occupé avec M. [K] pendant la quasi totalité de la période objet du litige, l'appartement de [Localité 4]; elle affirme en conséquence que sa présence en France est ainsi démontrée par les pièces qu'elle produit,

- elle soutient que l'action est prescrite, que la prescription décennale ne peut s'appliquer en l'absence de fraude ou de fausses déclarations ; il est établi qu'elle a résidé en France pour raisons de santé de mars 2009 à décembre 2011 ; elle est fondée à se prévaloir de l'autorité de la chose jugée quant à l'absence de fraude ou de fausse déclaration et il résulte de l'arrêt définitif qu'elle n'a commis aucune fraude ou fausse déclaration ; que Pôle Emploi ne pouvait réclamer un rappel d'allocations chômage afférentes à la période du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010 ; selon elle, c'est Pôle Emploi qui doit établir l'existence de la fraude alléguée, avant d'affirmer que la période de prévention coïncide avec celle à laquelle elle résidait en France pour être soignée de son cancer ; elle prétend avoir seulement omis de se radier des registres de population de la commune en quittant la Belgique, en raison de son départ précipité, et non pour bénéficier d'une fiscalité plus favorable ; elle n'a jamais perçu de salaires pendant les 20 ans au cours desquels elle a géré sa société.

- au sujet de M. [K], il réfute être un exilé fiscal, mais affirme avoir été contraint d'accepter pour un temps limité un emploi franco-belge, et est revenu naturellement en France fin 2006 début 2007 jusqu'en 2011 dans l'appartement dont il est propriétaire à [Localité 8]. Il dit ne pas être salarié des sociétés dont il est associé-gérant, et prétend que la France est le centre de ses intérêts économiques, de sorte qu'il a la qualité de résident français. Il réfute toute déclaration mensongère et estime que sa présence en France est patente, au vu des pièces produites. Il conteste avoir cumulé une activité professionnelle et des allocations chômage.

- il sollicite l'application de la prescription triennale en l'absence de fausse déclaration ou de fraude de sa part ; il n'est pas établi par les premiers juges en quoi Pôle Emploi apportait la preuve d'une résidence à l'étranger, le fait qu'il ait déclaré ses impôts en Belgique n'établissant pas qu'il y ait eu sa résidence effective.

- la convention de février 2009 n'est applicable qu'à compter du 1er avril 2009 jusqu'au 31 mai 2011, et seule la convention Unedic en date du 18 janvier 2006 leur est applicable ; il n'y a jamais eu de cumul d'exercice professionnel et des allocations chômage ; Pôle Emploi doit établir que leur résidence était fictive et inopérante, or il les a contraints à justifier de leur résidence en France et a inversé ainsi la charge de la preuve. Il ajoute que les textes Unedic exigent la résidence en France et non le domicile, et les premiers juges ont opéré une confusion, soulignant que le fait que les déclarations d'impôts aient été faites en France ou en Belgique est sans objet, seule la question de la résidence effective en France étant à considérer.

En réponse, Pôle Emploi oppose que :

- la prescription applicable en l'espèce est décennale, les appelants ayant versé à l'occasion des procédures civiles et pénales de faux documents et ayant multiplié les fausses déclarations, M. [K] déclarant être fiscalement domicilié en France, ce qui a conduit d'ailleurs à sa condamnation pénale définitive ; Mme [O] a quant à elle également déclaré être fiscalement domiciliée en France à plusieurs reprises.

- ils ont de plus conservé une activité professionnelle qu'ils n'ont pas déclarée à ses services alors qu'ils bénéficiaient des allocations chômage et ne peuvent se retrancher derrière le fait qu'ils n'étaient pas salariés des sociétés et qu'ils n'auraient pas perçu de revenus, alors seulement qu'ils étaient tenus de déclarer cette activité, peu important qu'elle soit salariée ou non, rémunérée ou non ; le défaut de déclaration par un chômeur indemnisé de sa situation réelle caractérise la fraude

- l'article L5422-5 du code du travail n'exige pas l'intervention préalable d'une condamnation pénale et la prescription décennale ne s'appliquant que devant une juridiction civile,

- Mme [O] a perçu une somme indûment du 23 mars 2007 au 30 avril 2010 et doit la rembourser ; M. [K] a perçu indûment une somme pour la période du 1er décembre 2006 au 30 avril 2010, la décision de première instance sera confirmée pour cette période pour chacun des appelants ; pour la période du 1er mai 2010 au 30 septembre 2011, M. [K] sera condamné à restituer la somme visée par la prévention pénale et ayant fait l'objet d'une condamnation désormais définitive, le sursis à statuer ne se justifiant plus.

- l'argumentation de Mme [O] selon laquelle sa relaxe exclurait sa condamnation civile est inopérante, puisque la relaxe est intervenue parce que les déclarations annuelles remplies au cours de la période de prévention n'étaient pas produites aux débats,

- les conventions visées s'appliquent successivement et comportent des dispositions similaires, faisant chacune de la condition de résidence sur le territoire national une condition à l'ouverture de droit comme à l'indemnisation des demandeurs d'emploi, et comportent également des dispositions relatives à l'absence de cumul entre l'exercice d'une activité professionnelle et la perception d'allocations chômage ; le fait de passer les week-ends en France ne suffit pas à conférer la qualité de résident français, d'autant que le choix a été fait d'être résident belge par M. [K] et Mme [O], choix revendiqué auprès des services fiscaux français avec insistance ; la distinction faite par les appelants entre la résidence et la domiciliation fiscale n'est pas pertinente, alors qu'ils avaient fait le choix d'établir leur domicile fiscal à l'étranger, donc leur résidence principale ; l'obligation de résider sur le territoire national est conforme au droit européen et communautaire fixé par les règlements CE 883/2004 du 29 avril 2004 et CE n°987/2009 du 16 septembre 2009 ; les fausses déclarations privent de fondement les ouvertures de droit leur ayant été consenties.

Sur ce,

Il sera en premier lieu rappelé que M. [K] a été définitivement condamné pour des faits de déclarations mensongères à une administration publique en vue d'obtenir un avantage indu, l'arrêt de la chambre criminelle de la cour de cassation rendu le 19 mars 2019 ayant cassé sans renvoi l'arrêt seulement en ses dispositions sur la peine, ramené l'amende au maximum encouru.

Le sursis à statuer ordonné par les premiers juges ne se justifie plus en conséquence.

Le jugement entrepris est fondé sur l'article L5422-5 du code du travail, qui énonce que 'L'action en remboursement de l'allocation d'assurance indûment versée se prescrit par trois ans. En cas de fraude ou de fausse déclaration, elle se prescrit par dix ans. Ces délais courent à compter du jour de versement de ces sommes.'

Les appelants critiquent les éléments invoqués par Pôle Emploi pour établir la fraude. Pourtant, l'ensemble des faits mis en avant par cet organisme sont de nature à caractériser l'existence de déclarations frauduleuses de la part de M. [K] et Mme [O] quant à leur situation sur deux points, d'une part le lieu de leur résidence, d'autre part l'absence de déclaration de leur situation professionnelle.

Ils ne peuvent sérieusement prétendre avoir été domiciliés sur le plan fiscal en Belgique tout en résidant de façon effective sur le territoire français, le fait qu'ils soient propriétaires de biens en France et suivis médicalement sur le territoire français étant indifférents. Ils ont choisi à plusieurs reprises de se domicilier en Belgique sur le plan fiscal, peu important de ce point de vue que ce soit à la demande d'un employeur, et cette situation n'est pas compatible avec une résidence prétendument effective en France, ce dans le but de pouvoir bénéficier du régime des allocations chômage servies par Pôle Emploi.

La fraude est établie de façon définitive pour ce qui concerne M. [K], qui a été condamné de ce chef pour la période concernée par les indus.

Mme [O] ne peut, quant à elle, prétendre s'exonérer de ses obligations, au seul motif qu'elle a été définitivement relaxée par la cour d'appel. En effet, il résulte bien de la décision pénale que la relaxe a été rendue en l'absence de pièces établissant la prévention, et non pas parce qu'il n'y avait pas d'infraction.

Or il est certain qu'elle s'est domiciliée sur le plan fiscal en Belgique, de sorte qu'elle ne peut prétendre résider en France de façon effective.

Les digressions des appelants à ce sujet ne remettent nullement en cause les motifs du jugement qui sont adoptés par la cour. En effet, les arguments développés par Pôle Emploi, et les pièces invoquées au soutien de cette argumentation, caractérisent sans doute possible la volonté de M. [K] et Mme [O] de dissimuler leur situation réelle, à plusieurs reprises, dans les différentes déclarations adressées à Pôle Emploi, puis dans les propos tenus au cours de l'enquête pénale.

Ils ne sont pas plus fondés à arguer de la succession de plusieurs conventions applicables en la matière, alors que comme le fait observer à raison Pôle Emploi, les trois conventions successivement applicables comportent des dispositions similaires prévoyant d'une part la condition de résidence en France pour pouvoir bénéficier des allocations chômage, d'autre part la condition de l'absence d'exercice d'une activité salariée. Il appartenait ainsi aux appelants de déclarer leur situation réelle, et il résulte de façon certaine des pièces versées, qu'ils n'ont pas fait état de leurs différents mandats sociaux ou activités professionnelles, peu important qu'ils soient salariés ou non.

En conséquence, la prescription décennale est bien applicable et le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté, du fait de la fraude, l'application de la prescription triennale invoquée par M. [K] et Mme [O]

Sur le fond, Pôle Emploi est bien fondé à solliciter la condamnation de M. [K] à lui rembourser les sommes de 147 360,68 euros pour la période du 1er décembre 2006 au 30 avril 2010 et le jugement est confirmé de ce chef. Le dispositif des conclusions qui seul saisit la cour ne présente pas d'autre demande au titre d'un indu perçu par M. [K].

Il est également fondé à solliciter la condamnation de Mme [O] à lui rembourser, pour la période allant du 23 mars 2007 au 12 novembre 2010, la somme de 85 541,12 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation. Le jugement est également confirmé de ce chef.

La capitalisation des intérêts ordonnée par le jugement est confirmée à hauteur de cour.

La demande de dommages-intérêts présentée par Pôle Emploi est justifiée, et sera confirmée, pour un montant de 15 000 euros à la charge de M. [K] et de 6 000 euros pour Mme [O], compte tenu de l'attitude particulièrement dolosive de la part des appelants.

Pôle Emploi prétend demander par ailleurs que les condamnations prononcées le soient in solidum, sans justifier légalement cette prétention, qui sera en conséquence rejetée.

Les dispositions du jugement sur les dépens et l'indemnité de procédure sont confirmées et en appel, M. [K] et Mme [O] sont condamnés chacun à payer à Pôle Emploi une somme de 5 000 euros et aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a ordonné le sursis à statuer,

Statuant à nouveau

Rejette la demande de condamnation in solidum,

Condamne M. [K] et Mme [O] à payer chacun à Pôle Emploi la somme de 5 000 euros d'indemnité de procédure,

Condamne M. [K] et Mme [O] aux dépens exposés en appel.

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme PERRET, Président, et par Mme FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 20/01986
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;20.01986 ?
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