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24/05/2023 | FRANCE | N°22/00825

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 24 mai 2023, 22/00825


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 MAI 2023



N° RG 22/00825

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCAY



AFFAIRE :



[H] [C] épouse [V]





C/

S.A.S.U. ODIGO









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : 19/0071

9



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



la SELEURL CABINET A-P



la SELEURL MONTECRISTO







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 MAI 2023

N° RG 22/00825

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCAY

AFFAIRE :

[H] [C] épouse [V]

C/

S.A.S.U. ODIGO

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

N° Section : E

N° RG : 19/00719

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

la SELEURL CABINET A-P

la SELEURL MONTECRISTO

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame [H] [C] épouse [V]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Alina PARAGYIOS de la SELEURL CABINET A-P, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0374 substitué par Me Anthony STEINITZ, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

S.A.S.U. ODIGO venant aux droits de la société PROSODIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J153 substitué par Me Fanny COMBAUD avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 07 avril 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

Mme [H] [C] épouse [V] a été engagée par la société Prosodie, suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 octobre 2017 en qualité de responsable produit/marché, position 2.3, coefficient 150, avec le statut de cadre.

Par lettre du 1er février 2018, la période d'essai de la salariée a été renouvelée pour une durée de trois mois.

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, cabinets d'ingénieurs conseils, sociétés de conseil, dite Syntec.

Le 14 novembre 2018, la salariée a fait l'objet d'un avertissement.

Par lettre du 31 décembre 2018, Mme [C] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 15 janvier 2019.

Par lettre du 21 janvier 2019, l'employeur a licencié la salariée pour cause réelle et sérieuse motivée par une insuffisance professionnelle.

Contestant son licenciement, le 21 mai 2019, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin d'obtenir la condamnation de la société Prosodie au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de diverses indemnités et sommes au titre de l'exécution et la rupture du contrat de travail.

Par jugement en date du 10 février 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a dit que le licenciement de Mme [C] était justifié et que son contrat de travail avait été exécuté loyalement, débouté Mme [C] de toutes ses demandes, débouté la société Odigo, venant aux droits de la société Prosodie, de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, laissé à Mme [C] la charge des éventuels dépens.

Le 14 mars 2022, Mme [C] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 14 juin 2022, Mme [C] demande à la cour d'infirmer le jugement et statuant à nouveau de :

- requalifier son licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- constater l'exécution déloyale du contrat de travail de la société Prosodie,

- en conséquence, condamner la société Prosodie à lui verser les sommes suivantes :

* 22 039,6 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 33 059,4 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

* 5 000 euros au titre la rémunération variable non versée,

* 500 euros au titre des congés payés afférents,

* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Prosodie aux entiers dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 21 juin 2022, la société Odigo, venant aux droits de la société Prosodie, demande à la cour de confirmer le jugement et de condamner Mme [C] au versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 21 mars 2023.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La salariée indique qu'elle a donné entièrement satisfaction à l'issue de sa période d'essai, mais qu'elle a ensuite été affectée à une nouvelle direction et une nouvelle supérieure hiérarchique, sans repères et objectifs, son rôle n'étant pas clairement défini. Elle conteste les différents reproches qui lui sont faits, son licenciement étant dénué de cause réelle et sérieuse. Elle note que les formations invoquées par l'employeur ont toutes été sollicitées auprès de son ancien responsable hiérarchique, et que plusieurs sont devenues inutiles suite au changement d'organisation.

L'employeur fait valoir que la période d'essai de la salariée a dû être renouvelée puisqu'elle ne donnait pas entière satisfaction, que la salariée a ensuite été rattachée à une nouvelle entité suite à une réorganisation, mais sans modification de son contrat de travail, ses missions restant identiques. L'employeur soutient que le licenciement est fondé sur une insuffisance professionnelle au vu de plusieurs griefs caractérisés.

Sur le bien fondé du licenciement, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué.

L'insuffisance professionnelle qui se manifeste par la difficulté du salarié à exercer correctement sa prestation de travail, quelle que soit sa bonne volonté, constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié.

L'insuffisance professionnelle, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée du salarié, ne constitue pas une faute.

La lettre de licenciement reproche en substance à la salariée :

des interventions en dehors de son périmètre d'activité et des priorités qui lui ont été définies,

des insuffisances dans l'exécution de ses missions,

des connaissances insuffisantes sur l'exécution de ses missions,

une coordination insuffisante avec les différents acteurs des sujets traités.

Il ressort du dossier que la salariée a été embauchée en qualité de responsable produit/marché et qu'elle a connu un nouveau rattachement à l'équipe 'marketing du produit' sous la responsabilité de Mme [S]. Ses missions ont bien été définies dans le cadre d'une réunion du 4 mai 2018, la nature de ses fonctions n'ayant pas connu de modification substantielle et sa supérieure hiérarchique lui ayant rappelé dans plusieurs courriels certains aspects de ses fonctions.

A l'appui du grief 2), l'employeur produit trois courriels du 12 septembre et des 15 et 23 novembre 2018 de la supérieure hiérarchique de la salariée reprenant plusieurs points sur la formalisation insuffisante du reporting et faisant référence à des remarques déjà faites oralement le lundi 12 novembre 2018, procédant à des rappels et relevant des insuffisances.

L'employeur verse également aux débats un courriel du 15 novembre 2018 de la supérieure hiérarchique de la salariée lui faisant part d'un petit-déjeuner avec'Verint' et lui confiant une mission précise, un courriel du 21 novembre 2018 lui demandant d'approfondir plusieurs sujets montrant des éléments insuffisamment préparés par la salariée.

Le courriel du 18 décembre 2018 de la supérieure hiérarchique de la salariée démontre également des insuffisances dans la préparation d'une présentation.

La salariée se prévaut d'une information et d'une formation insuffisante, d'objectifs peu clairs, ce qui est démenti par les échanges produits au dossier dans lesquels sa responsable hiérarchique fait oeuvre de pédagogie et ce, de façon réitérée.

Il se déduit de ces échanges que la salariée a présenté des insuffisances dans l'accomplissement de missions qui lui étaient confiées, notamment en terme de présentation du reporting ou encore dans des dossiers ponctuels alors même qu'elle avait des instructions précises sur la nature des missions à réaliser.

S'agissant du grief 4), il ressort de plusieurs courriels de la responsable hiérarchique de la salariée que cette dernière, à plusieurs reprises, n'a pas suffisamment informé sa hiérarchie de ses échanges, de ses réunions, des sujets en cours et n'a pas suffisamment partagé son travail avec les autres membres de l'équipe, notamment ceux ayant en charge le lien avec les équipes internationales. Elle a donc fait preuve d'une insuffisance en terme de coordination.

Au vu des éléments produits par chacune des parties, le licenciement de la salariée est fondé sur une insuffisance professionnelle résultant d'une insuffisance dans l'accomplissement de ses missions et d'une insuffisance dans la coordination au sein de l'entreprise, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les deux autres griefs invoqués.

La salariée doit donc être déboutée de sa demande subséquente en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

La salariée sollicite des dommages et intérêts à hauteur de six mois de salaire pour exécution déloyale du contrat de travail. Elle invoque un défaut de formation après mise en place d'une nouvelle organisation, reprochant à l'employeur de ne pas l'avoir informée et accompagnée. Elle souligne qu'elle a fait l'objet de reproches injustifiés de la part de Mme [S], sa supérieure hiérarchique, et a été confrontée au quotidien à toute la déloyauté de son employeur.

L'employeur fait valoir que l'entité dans laquelle se trouvait la salariée a connu un nouveau rattachement suite à la mise en place d'une nouvelle organisation, mais que le contenu des fonctions de la salariée est resté le même. Il note que la salariée a bénéficié de quatre formations pendant son année de travail au sein de la société. L'employeur indique également que la supérieure hiérarchique de la salariée a agi dans le cadre de son pouvoir de direction en rappelant à la salariée quelles étaient ses obligations.

En l'espèce, il ressort du dossier que la salariée a bénéficié de quatre formations pendant son année de travail au sein de l'entreprise. En outre, de nombreux échanges précisant ses missions ont eu lieu avec sa nouvelle responsable hiérarchique après son nouveau rattachement. Aucun manquement n'est donc établi à l'égard de l'employeur en matière d'information et de formation.

En outre, l'analyse des courriels litigieux versés aux débats, rédigés en des termes factuels précis et professionnels par la supérieure hiérarchique de la salariée, ne permet pas d'établir de reproches injustifiés de sa part, celle-ci intervenant dans le cadre du pouvoir de direction de l'employeur.

Par conséquent, en l'absence de manquements de l'employeur à son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail, la salariée doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts sur ce fondement.

Le jugement attaqué sera confirmé sur ce point.

Sur la rémunération variable

La salariée sollicite une somme de 5 000 euros à titre de rémunération variable, outre 500 euros au titre des congés payés afférents. Elle indique qu'elle a perçu la quasi-totalité de sa rémunération variable en 2017 mais que pour l'année 2018, ses objectifs ne lui ont pas été fixés, de sorte que l'employeur doit lui payer l'intégralité de la rémunération variable prévue au contrat de travail.

L'employeur fait valoir que la salariée a été reçue en entretien pour la fixation de ses nouveaux objectifs puis qu'elle a reçu une lettre de rémunération. Il ajoute que la salariée n'a pas su mener à bien les objectifs fixés et qu'aucun variable ne lui était dû. Il précise qu'en 2017, la salariée a perçu un variable conformément à la clause du contrat de travail prévoyant qu'il serait acquis durant les six premiers mois travaillés.

Le contrat de travail de la salariée prévoit une part fixe de rémunération ainsi qu'une part variable, associée à la réalisation d'objectifs annuels dont le montant nominal est de 5 000 euros, les objectifs, conditions de calcul et de versement de la partie variable de la rémunération étant précisés dans un plan d'objectifs remis chaque année.

La salariée qui a terminé sa période d'essai le 12 mai 2018, et qui avait reçu une fiche de debriefing de période d'essai le 12 février 2018 comprenant des objectifs fixés par l'employeur à fin avril 2018, s'est vue remettre le 12 juin 2018 une lettre concernant la fixation des objectifs par l'employeur pour le reste de l'année 2018.

La salariée doit, par conséquent, être déboutée de sa demande en paiement d'une part variable au titre de l'année 2018, des objectifs lui ayant été communiqués en temps utile contrairement à ses allégations et la salariée ne démontrant pas qu'une part variable lui reste due en application de ces objectifs, alors qu'elle a été évaluée à la note 4 pour l'année 2018 par son employeur.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes

Le jugement attaqué sera confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Mme [C] succombant à la présente instance, en supportera les dépens d'appel. L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement,

Et y ajoutant :

Condamne Mme [H] [C] épouse [V] aux dépens d'appel,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 22/00825
Date de la décision : 24/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-24;22.00825 ?
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