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24/05/2023 | FRANCE | N°21/03581

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 24 mai 2023, 21/03581


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 24 MAI 2023



N° RG 21/03581



N° Portalis DBV3-V-B7F-U4B2



AFFAIRE :



S.A. POMONA





C/

[J] [N] [P]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT

N° Section : C

N° RG : 19/00727




Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Ludovic BOUCHET



Me Sandrine ROLLIN







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a r...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 24 MAI 2023

N° RG 21/03581

N° Portalis DBV3-V-B7F-U4B2

AFFAIRE :

S.A. POMONA

C/

[J] [N] [P]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 13 Octobre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT

N° Section : C

N° RG : 19/00727

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Ludovic BOUCHET

Me Sandrine ROLLIN

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A. POMONA

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Ludovic BOUCHET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de TOURS

APPELANTE

****************

Monsieur [J] [N] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Sandrine ROLLIN, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1822

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 11 Avril 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

[J] [N] [P] a été engagé par la société Pomona suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 30 juin 2011 en qualité d'adjoint au responsable de préparation, statut technicien, niveau 5, échelon 1, en référence aux dispositions de la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.

Par lettre datée du 30 avril 2018, le salarié a été convoqué à un entretien préalable à une éventuelle sanction, fixé au 14 mai suivant, puis par lettre datée du 28 mai 2018, l'employeur lui a notifié un avertissement.

Par lettre datée du 14 septembre 2018, le salarié a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, puis par lettre datée du 1er octobre 2018, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Le 3 juin 2019, [J] [N] [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt afin de faire juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de la société Pomona au paiement de diverses indemnités et rappel de salaire au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement mis à disposition le 13 octobre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, ont condamné la société Pomona à verser à [J] [N] [P] les sommes suivantes :

* 22 778,32 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 5 160,71 à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 5 694,58 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 569,46 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 065,46 euros à titre de rappel de salaire sur la mise à pied du 14 septembre 2018 au 1er octobre 2018,

* 106,54 euros au titre des congés payés afférents,

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ont débouté [J] [N] [P] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire, ont dit n'y avoir lieu à exécution provisoire et ont laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Le 8 décembre 2021, la société Pomona a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 4 mars 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société Pomona demande à la cour de réformer le jugement, à titre principal, de dire que le licenciement repose bien sur une faute grave, subsidiairement, sur une cause réelle et sérieuse, en tout état de cause, de condamner [J] [N] [P] à lui payer une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et en tous les dépens.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 24 mai 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, [J] [N] [P] demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ses condamnations à paiement de sommes pour les montants et chefs retenus, de l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau, de condamner la société Pomona à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire ainsi que la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 28 mars 2023.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement pour faute grave notifié au salarié lui reproche en substance d'avoir le 12 septembre 2018 à 20 heures à sa prise de poste fait preuve d'insubordination quant au travail à accomplir et d'avoir tenu des propos injurieux à son supérieur hiérarchique, alors qu'il avait été précédemment averti pour un comportement de même nature.

La société conclut au débouté de toutes les demandes du salarié et à l'infirmation du jugement en ce qu'il a jugé le licenciement pour faute grave infondé, faisant valoir que les faits sont établis par des attestations de témoins qu'elle produit aux débats et que le salarié avait déjà été averti.

Contestant les faits qui lui sont reprochés et la valeur probante des attestations de la société, le salarié conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et en ses condamnations à paiement des sommes retenues.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque.

Au soutien de la faute grave, la société produit une attestation émanant de [D] [R], supérieur hiérarchique du salarié, qui indique avoir été contacté téléphoniquement à son domicile par M. [G] le 12 septembre 2018 à 20h15 pour se plaindre du comportement du salarié qui criait, en faisant le tour des préparateurs, qu'il y avait trop de travail et qu'il ne fallait pas compter terminer à l'heure, qu'il avait contacté le salarié qui n'avait pas été capable de lui dire combien de lignes son équipe pouvait faire, qu'il lui avait demandé d'arrêter immédiatement son comportement et lui avait signalé qu'il serait convoqué à ce sujet et que celui-ci lui avait répondu : 'd'aller me faire foutre' et l'avait menacé de l'attendre : 'devant l'entrepôt pour régler ça'.

La société produit en outre en cause d'appel trois attestations de salariés :

- l'attestation dont la rédaction est prêtée à [Z] [T] n'est pas accompagnée d'un document officiel justifiant de l'identité de l'auteur et comportant sa signature, de sorte que celle-ci sera écartée ;

- l'attestation dont la rédaction est prêtée à [A] [V] ne rapporte pas de fait mettant en cause le salarié dont l'attestant aurait été directement témoin le 12 septembre 2018 aux alentours de 20 heures, de sorte que cette pièce n'est pas utile à la solution du litige ;

- l'attestation dont la rédaction est prêtée à [F] [G] est datée du 12 septembre 2018 correspondant à la date des faits reprochés au salarié, sans que la société fournisse de raison objective à l'absence de production de cette pièce devant les premiers juges ; en effet, son allégation selon laquelle le salarié aurait produit deux témoignages aux débats 'au dernier moment' ce qui ne l'aurait pas mise en mesure d'y répondre en produisant d'autres pièces dont elle disposait, n'est corroborée par aucun élément alors que le salarié justifie avoir communiqué ses conclusions et pièces le 10 octobre 2019 et que l'audience du bureau de jugement s'est tenue le 24 juin 2020, soit plus de huit mois plus tard ; la force probante de cette attestation est par conséquent fortement sujette à caution et elle sera écartée.

En définitive, face aux dénégations du salarié, le seul témoignage de [D] [R], supérieur hiérarchique direct du salarié, ne permet pas d'établir la matérialité des faits qui lui sont reprochés eu égard au lien de subordination hiérarchique existant avec la société.

Le licenciement n'est justifié ni par une faute grave, ni même par une cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé sur ce point ainsi qu'en ses condamnations de la société au paiement des sommes retenues au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement dont les montants sont exacts et non discutés.

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, eu égard à l'ancienneté de sept années complètes du salarié, celui-ci a droit à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre trois mois et huit mois de salaire brut.

Eu égard à son âge au moment du licenciement (57 ans), à son salaire moyen de 2 847,29 euros bruts, au fait qu'il n'a pas retrouvé d'emploi et est bénéficiaire de l'allocation de solidarité spécifique, il sera alloué au salarié à la charge de la société la somme de 22 778,32 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur le caractère brutal et vexatoire de la rupture

Le salarié conclut à l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture brutale et vexatoire.

Il ne fournit cependant aucun élément pour justifier du préjudice qu'il invoque.

Il sera débouté de sa demande de ce chef et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur l'application de l'article L. 1235-4 du code du travail

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner le remboursement par la société aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées au salarié du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer au salarié la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

ORDONNE le remboursement par la société Pomona aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées à [J] [N] [P] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce, dans la limite de six mois d'indemnités,

CONDAMNE la société Pomona aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société Pomona à payer à [J] [N] [P] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03581
Date de la décision : 24/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-24;21.03581 ?
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