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17/05/2023 | FRANCE | N°22/00948

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 17 mai 2023, 22/00948


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 17 MAI 2023



N° RG 22/00948

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCVY



AFFAIRE :



[Y] [M]





C/

Association HEVEA









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Février 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CERGY PONTOISE

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG :

F21/00182



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



SELARL ALTILEX AVOCATS



Me Karine HISEL







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX SEPT MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versa...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 MAI 2023

N° RG 22/00948

N° Portalis DBV3-V-B7G-VCVY

AFFAIRE :

[Y] [M]

C/

Association HEVEA

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 25 Février 2022 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CERGY PONTOISE

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG : F21/00182

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

SELARL ALTILEX AVOCATS

Me Karine HISEL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [Y] [M]

né le 28 Avril 1991 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Stefan RIBEIRO de la SELARL ALTILEX AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VAL D'OISE, vestiaire : 80 - N° du dossier 20201457

APPELANT

****************

Association HEVEA

N° SIRET : 319 086 781

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentant : Me Karine HISEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2408 - N° du dossier 3317

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 04 Avril 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle MONTAGNE, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

[Y] [M] a été engagé par l'association Habiter et Vivre Ensemble Autrement (Hevea) suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 20 octobre 2014 en qualité d'ouvrier qualifié.

En dernier lieu, il exerçait les fonctions de moniteur atelier, classe 2, échelon 5, coefficient 365, en référence aux dispositions de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

Par lettre datée du 11 mars 2020, l'employeur a convoqué le salarié à un entretien préalable à un éventuel licenciement et l'a mis à pied à titre conservatoire. En raison du confinement national, l'entretien préalable initialement fixé au 26 mars suivant a été repoussé au 5 mai 2020.

Par lettre datée du 13 mai 2020, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Le 23 mars 2021, [Y] [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Cergy-Pontoise afin de faire juger que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et d'obtenir la condamnation de l'association Hevea au paiement de diverses indemnités et rappel de salaire au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement mis à disposition le 25 février 2022, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, les premiers juges ont dit que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, ont débouté [Y] [M] de l'intégralité de ses demandes et l'ont condamné à verser à l'association Hevea la somme de 1 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Le 22 mars 2022, [Y] [M] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Réseau Privé Virtuel des Avocats (Rpva) le 4 avril 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, [Y] [M] demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de condamner l'association Hevea à lui verser les sommes de :

* 11 501,04 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 669,19 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 3 833,68 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 383,36 euros au titre des congés payés,

* 3 091,03 euros au titre des retenues de salaires effectuées au mois de mai 2020, outre 309,10 euros au titre des congés payés,

* 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens, avec intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes dues à caractère salarial et capitalisation des intérêts.

Par conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 23 juin 2022 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens, l'association Hevea demande à la cour de juger que le licenciement repose sur une faute grave, de confirmer intégralement le jugement, de débouter [Y] [M] de ses demandes et de le condamner à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 21 mars 2023.

MOTIVATION

Sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement pour faute grave notifié à [Y] [M] est rédigée dans les termes qui suivent :

'(...) Je vous rappelle les faits qui nous ont conduits à engager cette procédure :

Mercredi 11 mars 2020 après-midi, vous vous êtes rendu avec un véhicule de l'établissement à la déchetterie de la ville, accompagné de 2 travailleurs en situation de handicap de votre atelier. Vous étiez le conducteur du véhicule. Ce déplacement en lien avec l'atelier menuiserie entre dans le cadre de vos prérogatives professionnelles.

Lors de ce déplacement, des policiers vous ont arrêté pour un banal contrôle routier.

Vers 14h30, nous avons été contactés par le commissariat de [Localité 5] nous demandant de venir vous chercher ainsi que les 2 travailleurs handicapés que vous accompagniez, car vous veniez d'être testé positif au cannabis et faisiez l'objet d'un retrait de permis.

Monsieur [Z], chef d'atelier et votre supérieur hiérarchique direct, est venu vous chercher, accompagné de Monsieur [N], chef d'atelier à l'ESAT qui vous a ramené. Monsieur [Z] quant à lui, a pris le véhicule que vous conduisiez au départ et a ramené les 2 travailleurs à l'établissement. Vous étiez très énervé, à l'instar de l'agacement voire de l'agressivité dont vous avez fait preuve dans le commissariat, devant Monsieur [Z] et devant les 2 travailleurs handicapés que vous étiez censé accompagner avec professionnalisme. Le téléphone sans fil de votre bureau a d'ailleurs été retrouvé brisé au sol et totalement inutilisable peu après votre départ.

En effet, compte tenu de la gravité des faits, je vous ai signifié immédiatement votre mise à pied conservatoire et vous avez quitté l'ESAT aussitôt vers 15h30.

Suite à l'exposition des faits qui vous sont reprochés, lors de l'entretien du 5 mai vous avez commencé par présenter vos excuses pour votre attitude, tout en expliquant que vous n'aviez absolument pas consommé de cannabis, que vous vous étiez retrouvé dans un environnement confiné avec un ami très récemment, qui lui-même avait fumé en votre présence et cette proximité expliquait votre positivité au test pratiqué par la police. Vous avez expliqué que si le téléphone sans fil de votre bureau était inutilisable, c'est qu'il était tombé de nombreuses fois au sol, mais en aucun cas son état n'était le résultat d'un geste d'énervement de votre part. Vous avez reconnu avoir été très énervé au commissariat car vous avez eu le sentiment qu'un des policiers avait fait preuve d'acharnement à votre égard. Vous avez également expliqué que vous regrettiez avoir ouvert très brutalement la porte de la menuiserie en arrivant du commissariat en justifiant le geste par un énervement difficilement contenu. Vous nous avez de plus expliqué que vous étiez conscient des dangers inhérents à la consommation de cannabis, raison pour laquelle vous aviez abandonné cette pratique voici 10 ans (...)'.

Le salarié conclut à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement au motif qu'il conteste la consommation de cannabis et que l'employeur ne rapporte pas la preuve d'une consommation sur son lieu de travail, indiquant qu'il a formé opposition à l'ordonnance pénale.

L'association conclut au bien fondé du licenciement pour faute grave et au débouté des demandes du salarié en relevant que celui-ci, en violation du règlement intérieur, a mis en danger sa sécurité et celle des travailleurs en situation de handicap qu'il transportait dans le véhicule.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque.

Au soutien de la faute grave, l'association produit une attestation datée du 1er juillet 2021 rédigée manuscritement par M. [Z], responsable hiérarchique du salarié qui relate précisément et de manière détaillée les faits du 11 mars 2020 tels qu'exposés dans la lettre de licenciement, ainsi qu'une ordonnance pénale datée du 17 septembre 2020 rendue par le président du tribunal judiciaire de Pontoise ayant condamné [Y] [M] pour avoir le 11 mars 2020 conduit un véhicule en ayant fait usage, établi par une analyse sanguine ou une analyse salivaire, de cannabis, substance ou plante classée comme stupéfiant, à une amende de 600 euros et à une peine complémentaire de suspension du permis de conduire pendant six mois.

L'association produit encore son règlement intérieur aux termes duquel il est indiqué à l'article 6 du titre II notamment que les conducteurs doivent se conformer scrupuleusement aux prescriptions du code de la route et aux règles de sécurité relatives aux personnes transportées et que toute infraction commise par un salarié dans la conduite d'un véhicule de service se verra sanctionner proportionnellement à la faute commise et à l'article 14 du titre III notamment que l'arrivée sur les lieux de travail en état d'imprégnation de drogue est interdite et que la consommation de drogue en dehors des lieux de travail doit rester compatible avec l'exercice en toute lucidité et en toute sécurité d'une activité professionnelle.

Le salarié a été l'objet, après un contrôle routier des forces de police, d'un test de dépistage positif au cannabis alors que conduisant un véhicule de l'association dans le cadre de son activité professionnelle, il transportait deux travailleurs en situation de handicap de son atelier.

Ces faits portés à la connaissance de l'employeur, tenu à une obligation de sécurité des salariés, rendaient impossibles la poursuite du contrat de travail.

Le licenciement de [Y] [M] est par conséquent motivé par une faute grave.

Il sera débouté de l'ensemble de ses demandes et le jugement sera confirmé sur ces points.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement sera confirmé en ce qu'il statue sur les dépens et les frais irrépétibles.

[Y] [M] sera condamné aux dépens d'appel et à payer à l'association la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE [Y] [M] aux dépens d'appel,

CONDAMNE [Y] [M] à payer à l'association Habiter et Vivre Ensemble Autrement (Hevea) la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE les parties des autres demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 22/00948
Date de la décision : 17/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-17;22.00948 ?
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