COUR D'APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80C
17e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 17 MAI 2023
N° RG 21/01150
N° Portalis DBV3-V-B7F-UOIF
AFFAIRE :
[Y] [F] [W]
C/
Société TRANS VAL D'OISE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 8 mars 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MONTMORENCY
Section : C
N° RG : F 19/00680
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Jean-louis MARY
Me Oriane DONTOT
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX-SEPT MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant, dont la mise à disposition a été fixée au 10 mai 2023 puis prorogée au 17 mai 2023, dans l'affaire entre :
Monsieur [Y] [F] [W]
né le 20 mai 1976 à [Localité 3] (Algérie)
de nationalité française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentant : Me Jean-Louis MARY, Plaidant/ Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1539
APPELANT
****************
Société TRANS VAL D'OISE
N° SIRET : 328 660 493
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentant : Me Oriane DONTOT de l'AARPI JRF AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 et Me Arnaud BLANC DE LA NAULTE de l'AARPI NMCG AARPI, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0007 substitué à l'audience par Me CURTIUS Maureen, avocat au barreau de Paris
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 2 mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Aurélie PRACHE, Président,
Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [W] a été engagé par la société Trans Val d'Oise, en qualité de conducteur receveur, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 23 mai 2011, avec une reprise d'ancienneté au 21 février 2011.
Cette société est spécialisée dans le transport de voyageurs. L'effectif de la société était, au jour de la rupture, de plus de 50 salariés. Elle applique la convention collective nationale des transports publics urbains de voyageurs.
Le 4 octobre 2019, M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Montmorency aux fins de contester l'application de l'abattement de 20% pour frais professionnels et d'obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la minoration de 20% sur ses cotisations de retraite.
Par jugement du 8 mars 2021, le conseil de prud'hommes de Montmorency (section commerce) a :
- dit que les conditions de mise en place de l'abattement pour frais professionnels au sein de la société Trans Val d'Oise ont été respectées,
- débouté M. [W] de l'intégralité de ses demandes de réparation en tant qu'elles sont mal fondées,
- dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire,
- dit n'y avoir lieu à condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile et déboute les parties de leurs demandes formulées à ce titre,
- condamné M. [W] aux dépens,
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires au présent dispositif.
Par déclaration adressée au greffe le 16 avril 2021, M. [W] a interjeté appel de ce jugement.
Une ordonnance de clôture a été prononcée le 31 janvier 2023.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles M. [W] demande à la cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions
statuant à nouveau,
- juger qu'en appliquant un abattement de 20 % pour frais professionnels, la société Trans Val d'Oise a commis une faute de nature contractuelle.
- ordonner à la société Trans Val d'Oise de supprimer cet abattement et d'augmenter en conséquence son salaire brut de base de 10 % sauf à parfaire afin de lui assurer une rémunération nette équivalente et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard commençant à courir 8 jours après la notification du jugement à intervenir,
- condamner la société Trans Val d'Oise à lui payer les sommes de :
. 30 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la minoration de 20 % sur ses cotisations de retraite de base et complémentaire,
subsidiairement,
- 5 000 euros sauf à parfaire en remboursement des cotisations retraite salariales et patronales non versées du fait de l'existence de l'abattement de 20 %,
. 2 000 euros, sauf à parfaire à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la minoration de 20 % sur ses cotisations de maladie et d'accident du travail sur la période du 29 octobre 2017 au 29 janvier 2018 et du 18 au 28 octobre 2018, [note de la Cour: selon les déclarations de l'avocat à l'audience, ces demandes correspondent en réalité à celles faites dans le dossier de M. [H] RG 21/1151]
. 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le défendeur en tous les dépens.
Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 octobre 2021, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens et prétentions conformément à l'article 455 du code de procédure civile et aux termes desquelles la société Trans Val d'Oise demande à la cour de :
a titre principal :
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Montmorency du 8 mars 2021, en ce qu'il a :
. dit que les conditions de mise en place de l'abattement pour frais professionnels au sein de la société ont été respectées,
. débouté M. [W] de l'intégralité de ses demandes de réparation en tant qu'elles sont mal fondées,
. dit n'y avoir d'ordonner l'exécution provisoire,
. condamné M. [W] aux dépens,
à titre subsidiaire,
- dire et juger mal fondées les demandes de M. [W] compte tenu de ce que - si litige il y a - il devait être porté devant le Pôle social du Tribunal judiciaire (ancien TASS), seul à même de connaître des relations entre l'administration et la société,
- dire et juger que les demandes de M. [W] ne peuvent remonter au-delà d'octobre 2014 compte tenu de la prescription,
- dire et juger que les conditions de mise en place de l'abattement pour frais professionnels au sein de la société ont été respectées,
- débouter M. [W] de toutes ses demandes, fins et prétentions,
en tout état de cause,
- condamner M. [W] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [W] en tous les dépens qui seront recouvrés par Me Dontot, JRF & Associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
MOTIFS
Le salarié expose que l'employeur applique un abattement de 20% pour frais professionnels sur la rémunération brute des salariés avant le calcul des charges sociales salariales et patronales, ce qui revient à procéder au calcul des cotisations sur une assiette égale à 80% du salaire brut.
Il demande qu'il soit mis fin à cette pratique imposée par l'employeur et qui ne correspond à aucune réalité, sans conséquence en termes de perte de salaire mais qui lui occasionne un préjudice en raison de la minoration de ses cotisations de retraite depuis son embauche.
L'employeur réplique que la déduction forfaitaire de 20% pour frais professionnels est appliquée depuis le commencement de l'activité de la société à destination des chauffeurs de transports conformément aux dispositions légales.
Sur la compétence de la juridiction prud'homale
A titre liminaire dans la partie ' Discussion' de ses conclusions puis subsidiairement dans le dispositif, l'employeur soutient que si le système mis en place dans la société depuis plus de trente-cinq années devait être remis en cause, les sommes dues devraient alors être versées à l'administration à la suite d'une régularisation pour le calcul de la retraite du salarié au titre du régime de base ou du régime complémentaire. Il affirme que le débat doit donc être porté devant le Pôle social du tribunal judiciaire et non le conseil de prud'hommes, le salarié ne communiquant d'ailleurs que des décisions de la chambre civile de la Cour de cassation.
Le salarié ne réplique pas sur l'exception de compétence invoquée par l'employeur, de sorte qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle est réputée s'approprier les motifs du jugement qui a écarté cette exception, étant toutefois relevé que cela n'est pas repris dans le dispositif.
**
Selon les termes de l'article L.1411-1 et suivants du code du travail, le conseil de prud'hommes règle les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs, ou leur représentants, et les salariés qu'ils emploient.
Aux termes de l'article L.1411-4, le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour connaître des litiges attribués à une autre juridiction par la loi, notamment par le code de la sécurité sociale en matière d'accidents du travail et maladies professionnelles.
C'est l'analyse des demandes formées par les parties qui permet de déterminer la juridiction compétente.
Au cas présent, le litige ne porte pas sur une question de redressement relatif à la déduction forfaitaire spécifique pour les conducteurs de la société Trans Val d'Oise dans l'assiette des cotisations mais sur l'exécution du contrat de travail. Il n'existe donc aucun différend portant sur l'abattement pour frais professionnels entre l'employeur et l'Urssaf justifiant la saisine de la juridiction du Pôle social.
Aussi, seul le conseil de prud'hommes est compétent pour connaître de la demande formée par le salarié de dommages-intérêts résultant de l'application des modalités contestées de l'abattement pour déduction des frais professionnels, soit directement sur l'exécution du contrat de travail.
En conséquence, il convient de rejeter l'exception d'incompétence de la juridiction prud'homale et le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur la prescription
A titre liminaire subsidiairement, l'employeur objecte que la prescription quinquennale est opposable au salarié qui a toujours été informé de cet abattement mentionné sur ses bulletins de paye et qu'il ne peut pas contourner les règles de prescription applicables en réclamant des prétendus dommages-intérêts.Il fait valoir que les demandes du salarié ne peuvent donc pas remonter au-delà du mois d'octobre 2014 en application de l'article 2224 du code civil.
Le salarié n'a pas davantage répliqué à ce moyen,de sorte qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, il est réputé s'approprier les motifs des premiers juges qui ont dit prescrites les demandes du salarié en application de l'article 2224 du code civil, étant toutefois relevé que cela n'est pas davantage repris dans le dispositif.
La demande du salarié ne consiste pas en un rappel de salaire mais en une indemnisation de son préjudice résultant d'une difficulté d'exécution du contrat de travail par employeur, étant ici rappelé qu'il forme une demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la minoration des cotisations de retraite et de la retraite complémentaire depuis son embauche.
La durée de la prescription est déterminée par la nature de la créance invoquée. (Ch. mixte., 26 mai 2006, pourvoi n° 03-16.800, Chambre mixte, 26 mai 2006, Bull. 2006, Ch. mixte, n° 3- Soc., 30 juin 2021, pourvoi n° 18-23.932).
Aux termes de l'article L.1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.
C'est donc le délai de prescription de deux ans instauré par la loi du 14 juin 2013 qui trouve ici à s'appliquer.
Le salarié a introduit son action le 30 octobre 2019 de sorte que son action est prescrite pour la période antérieure au 30 octobre 2017.
Sur le bien-fondé de l'abattement
Le salarié explique que le contrat de travail ne fait pas mention de cette déduction forfaitaire et qu'en réalité, il n'expose aucun frais de repas ou d'hébergement dans le cadre de son activité professionnelle puisqu'il bénéficie de tickets restaurant, de primes de coupure et de repas décalé. Il indique qu'il n'est pas sérieux de soutenir que les frais qu'il expose sont supérieurs à la somme de 7,5 euros.
Il ajoute qu'aucune disposition de la convention collective applicable ne prévoit explicitement le recours à la déduction forfaitaire et que l'employeur ne justifie pas que les délégués du personnel avaient donné leur accord pour l'application de cette déduction.
L'employeur objecte que l'abattement revêt un caractère licite en application de l'arrêté du 20 décembre 2002 et que le salarié expose des frais spécifiques de nourriture en sa qualité de conductrice de bus.
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Selon l'alinéa 3 de l'article L 242'1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable en l'espèce, 'il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations de sécurité sociale, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.'
Aux termes de l'article 9 de l'arrêté du 20 décembre 2002 relatif à la déduction forfaitaire spécifique des frais professionnels , dans sa rédaction issue de l'article 6 de l'arrêté du 25 juillet 2005, ' les professions, prévues à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2000, qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif prévu aux articles précédents peuvent bénéficier d'une déduction forfaitaire spécifique. Cette déduction est, dans la limite de 7 600 € par année civile, calculée selon les taux prévus à l'article 5 de l'annexe IV du code précité.
L'employeur peut opter pour la déduction forfaitaire spécifique lorsqu'une convention ou un accord collectif du travail l'a explicitement prévu ou lorsque le comité d'entreprise ou les délégués du personnel ont donné leur accord.
À défaut, il appartiendra à chaque salarié d'accepter ou non cette option. Celle-ci peut alors figurer soit dans le contrat de travail ou un avenant au contrat de travail, soit faire l'objet d'une procédure mise en oeuvre par l'employeur consistant à informer chaque salarié individuellement par lettre recommandée avec accusé de réception de ce dispositif et de ses conséquences sur la validation de ses droits, accompagné d'un coupon-réponse d'accord ou de refus à retourner par le salarié. Lorsque le travailleur salarié ou assimilé ne répond pas à cette consultation, son silence vaut accord définitif.'.
Aux termes de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, auquel se réfère l'article 9 précité,' Pour la détermination des traitements et salaires à retenir pour le calcul de l'impôt sur le revenu, les contribuables exerçant les professions désignées dans le tableau ci-dessous, ont droit à une déduction supplémentaire pour frais professionnels, calculée d'après les taux indiqués audit tableau.
Désignation des professions : ...Chauffeurs et receveurs convoyeurs de cars services réguliers ou occasionnels...: 20%'.
Ainsi, en application de ces différents textes, il appartient à l'employeur, s'il souhaite bénéficier de ce dispositif dérogatoire au droit commun que constitue la déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels (Civ2, 14 février 2013 12'13.656 Bull civII n°30), de rapporter la preuve :
-que le salarié auquel il applique cette déduction forfaitaire spécifique exerce bien l'une des fonctions prévues au tableau annexé à l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts, précité ;
-que le salarié en cause expose 'des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant du dispositif prévu aux articles' précédant l'article 9 de l'arrêté 20 décembre 2002 (2e Civ., 30 novembre 2017, pourvoi n° 16-20.473 ) ;
- et que la convention collective applicable, un accord d'entreprise, un accord du comité d'entreprise ou des délégués du personnel prévoit l'application de cette déduction forfaitaire spécifique, ou qu'à défaut les salariés concernés y ont donné leur accord, exprès ou tacite (2e Civ.,20 septembre 2012, pourvoi n°11-26.763).
Au cas présent, la société Trans Val d'Oise applique depuis le recrutement du salarié un abattement de 20% pour frais professionnels sur sa rémunération brute avant le calcul des charges sociales salariales et patronales.
Toutefois, cette déduction forfaitaire n'est pas mentionnée dans le contrat de travail du salarié et il n'est pas justifié qu'il a été informé de sa mise en oeuvre ni qu'il a accepté cette option.
En revanche, l'article 37 de la convention collective applicable aux relations contractuelles évoque l'abattement pour frais professionnels en cause et l'accord-cadre du 25 décembre 1998 attaché à la convention collective prévoit que l'employeur a la possibilité d'appliquer cet abattement.
Au surplus, l'employeur communique le compte rendu de la réunion du personnel du mercredi 24 septembre 2003 qui mentionne que ' messieurs [O] et [N], délégués du personnel Trans Val d'Oise, souhaitent conserver le système actuel de l'abattement sur charges sociales des 20%'. Ce compte rendu est signé par l'une des personnes présentes à la réunion, Mme [G] et il revêt donc un caractère probant quand bien même messieurs [O] et [N] ne l'ont également pas signé.
Il s'ensuit que les délégués du personnel ont donné leur accord au maintien de l'abattement forfaitaire conformément aux dispositions de l'article 9 précité, sans qu'il soit nécessaire d'adjoindre l'accord des délégués syndicaux, comme le soutient à tort le salarié.
Les conditions légales et conventionnelles ont donc été respectées par l'employeur.
Il convient donc d'examiner si le salarié a exposé des frais de nature professionnelle avant son licenciement.
Il ressort des bulletins de paye que le salarié a perçu des primes de transport, de coupure et de repas décalé tout en bénéficiant de tickets restaurant.
Selon les dispositions de l'article 10 du chapitre IV décret du 14 février 2000 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport public de voyageurs annexé à la convention collective, qui définit notamment le principe de la coupure et les dispositions de l'article 9 du décret n° 2006-925 du 19 juillet 2006, une contrepartie est versée en l'absence d'une coupure repas du midi d'au moins 45 minutes entre 11h30 et 14 heures, la contrepartie étant déterminée par accord collectif de branche ou accord d'entreprise.
Ces primes sont donc impérativement versées par l'employeur lors de la prise de repas décalés des salariés chauffeurs.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que ' la société Trans Val d'Oise exploite des lignes de transports de voyageurs qui figurent sur le plan départemental des transports et M. [Y] [F] [W] est chauffeur sur une ligne régulière'.
Le salarié, qui n'a pas effectué des déplacements limités, ne conteste pas qu'il a été amené régulièrement à décaler l'heure de sa prise de repas en raison de ses fonctions et qu'il a ainsi dû exposer des frais de repas décalés justifiant le versement d'indemnités correspondant à des frais professionnels dont le paiement est alors imposé à l'employeur.
Pas davantage, il n'est établi que le montant d'un repas est inférieur à 7,5 euros, somme à partir de laquelle le système d'abattement peut être mise en oeuvre, et les dispositions de l'article 9 trouvent donc ici encore à s'appliquer.
Par ailleurs, l'employeur produit un document établi par l'Urssaf le 3 février 2020 dont il ressort qu'au titre de l'articulation entre le remboursement de frais et les avantages en nature, le cumul des frais professionnels est admis avec la contribution patronale à l'acquisition des titres-restaurant dans la limite de 5,55 euros et lorsque le montant de la participation est compris entre 50 et 60 % de la valeur du titre.
Sur le bulletin de paye de novembre 2017 du salarié, l'employeur a appliqué ces calculs, la contribution patronale s'élevant à 5,33 euros par titre restaurant d'une valeur de 9 euros, ce qui correspond à une participation de 59,22 %.
Enfin, l'employeur justifie de la vérification par l'Urssaf entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2013 de l'application des législations de sécurité sociale et qui a donné lieu uniquement en février 2015 à des observations portant notamment sur les frais professionnels relatifs à la fourniture de vêtements de travail et non sur le calcul de l'abattement.
A titre subsidiaire, le salarié sollicite la condamnation de l'employeur au paiement de la somme de 2 000 euros, sauf à parfaire, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la minoration de 20 % sur ses cotisations de maladie et d'accident du travail sur la période du 29 octobre 2017 au 29 janvier 2018 et du 18 au 28 octobre 2018.
Toutefois, ces dates ne correspondent pas à la situation de ce salarié et il ne justifie au dossier d'aucun arrêt de travail consécutif à un accident du travail, les pièces mentionnées dans ses conclusions (pièces 9 à 12) n'ayant pas trait à cette question et visent en réalité les pièces du dossier d'un autre salarié.
Dès lors, toutes les conditions d'application du dispositif d'abattement par l'employeur sont réunies et il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes de suppression de l'abattement, de dommages-intérêts et de remboursement des cotisations retraites salariales et patronales au titre de l'application indue de l'abattement spécifique de 20% pour frais professionnels.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le salarié qui succombe, doit supporter la charge des dépens et ne saurait bénéficier de l'article 700 du code de procédure civile ; toutefois, pour des raisons d'équité, il n'y a pas lieu de faire application à son encontre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
Statuant publiquement et contradictoirement, en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant
DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [W] aux dépens qui seront recouvrés par Me Dontot, JRF & Associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
. prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
. signé par Madame Aurélie Prache, Président et par Madame Dorothée Marcinek, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente