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10/05/2023 | FRANCE | N°22/00175

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 10 mai 2023, 22/00175


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 10 MAI 2023



N° RG 22/00175 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6NK



AFFAIRE :



[W] [N] [S]





C/

[I] [G] [Z]



Association AGS CGEA IDF OUEST





Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section

: AD

N° RG : F18/02516



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



Me Aurélie BOUSQUET



la SCP LEURENT & PASQUET



Copies certifiées conformes délivrées à :



SCP HADENGUE & ASSOCIES







le :





RÉPUBLIQUE FRA...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2023

N° RG 22/00175 - N° Portalis DBV3-V-B7G-U6NK

AFFAIRE :

[W] [N] [S]

C/

[I] [G] [Z]

Association AGS CGEA IDF OUEST

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 16 Décembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section : AD

N° RG : F18/02516

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Aurélie BOUSQUET

la SCP LEURENT & PASQUET

Copies certifiées conformes délivrées à :

SCP HADENGUE & ASSOCIES

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [W] [N] [S]

de nationalité

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Aurélie BOUSQUET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 214 substitué par Me Anne-Lise HERRY

APPELANT

****************

Maître [I] [G] [Z] es qualités de liquidateur judiciaire de la société FRANCE SECURITE EUROPEENNE

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Antoine PASQUET de la SCP LEURENT & PASQUET, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K117

INTIME

****************

Association AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 substitué par Me Jeanne-Marie DELAUNAY

PARTIE INTERVENANTE

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 24 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laure TOUTENU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Dévi POUNIANDY,

EXPOSE DU LITIGE

M. [W] [S] se prévaut de l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée verbal avec la société France Sécurité Européenne à compter d'avril 2014 en qualité d'agent de sécurité et de la convention collective nationale des entreprises de prévention et de sécurité.

Par lettre du 26 octobre 2015, M. [S] a demandé à la société France Sécurité Européenne de lui adresser ses fiches de paye, ses contrats de travail ainsi que son solde de tout compte.

Par jugement en date du 4 novembre 2015, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de la société France Sécurité Européenne, et a désigné Maître [G] [Z] en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 30 janvier 2017, M. [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre afin d'obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail ainsi que la condamnation de la société France Sécurité Européenne au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour travail dissimulé et de diverses indemnités et sommes au titre de la rupture du contrat de travail.

Par jugement de départage en date du 16 décembre 2021, auquel il est renvoyé pour exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, cette juridiction a constaté l'absence de lien de subordination et de contrat de travail entre M. [S] et la société France Sécurité Européenne, dit n'y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire, débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes, laissé les dépens à la charge de M. [S].

Le 14 janvier 2022, M. [S] a interjeté appel à l'encontre de ce jugement.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 7 mars 2023, M. [S] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il a constaté l'absence de lien de subordination et de contrat de travail avec la société France Sécurité Européenne et l'a débouté de toutes ses demandes, et statuant à nouveau :

- constater l'existence d'un contrat de travail avec la société France Sécurité Européenne, constater l'absence de prescription de ses demandes,

- en conséquence, fixer au passif de la liquidation de la société France Sécurité Européenne, représentée par Maître [G] [Z], mandataire liquidateur, les sommes suivantes :

* 8 635,80 à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 878,60 à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 287, 86 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 431,79 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

* 8 635,80 à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

* 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Unédic, délégation Ags Cgea d'Ile de France Ouest à garantir lesdites sommes, à l'exception de la somme fixée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner la délivrance d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle emploi et des bulletins de salaire d'août 2012 à octobre 2015 sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision à intervenir,

- fixer au passif de la liquidation de la société France Sécurité Européenne les dépens de l'instance.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 13 mars 2023, Maître [G] [Z], en qualité de liquidateur judiciaire de la société France Sécurité Européenne, demande à la cour de confirmer en toutes ses dispositions le jugement, de débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner aux dépens.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 7 juillet 2022, l'Unédic, délégation Ags Cgea d'Ile de France Ouest, demande à la cour de :

- juger que M. [S] ne démontre pas avoir la qualité de salarié de la société France Sécurité Européenne, en conséquence, confirmer en toutes ses dispositions le jugement, débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes,

- à titre subsidiaire, juger prescrite l'action de M. [S], en conséquence, débouter M. [S] de ses demandes,

- plus subsidiairement, juger que le contrat de M. [S] n'a fait l'objet d'aucune rupture, juger que la résiliation ne pourra produire ses effets qu'au jour de la décision à intervenir,

- en conséquence, constater son absence de garantie et le mettre hors de cause au titre des créances de rupture, débouter M. [S] de ses demandes,

- en tout état de cause, le mettre hors de cause s'agissant des frais irrépétibles de la procédure,

- juger que la demande qui tend à assortir les intérêts au taux légal ne saurait prospérer postérieurement à l'ouverture de la procédure collective en vertu des dispositions de l'article L. 622-28 du code du commerce,

- juger qu'il ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19 à 21 et L. 3253-17 du code du travail, selon les plafonds légaux,

- condamner M. [S] à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le condamner aux entiers dépens, y compris les éventuels frais d'exécution forcée.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 14 mars 2023.

MOTIVATION

Sur l'existence du contrat de travail

Le salarié indique qu'il travaillait en tant qu'agent de sécurité, qu'il était sous lien de subordination de la société, recevant des plannings de travail sur son téléphone portable. Il précise qu'il verse aux débats les éléments établissant l'existence du contrat de travail.

Le mandataire liquidateur fait valoir que le salarié ne rapporte la preuve ni de la prestation de travail, ni de la rémunération, ni d'un lien de subordination. Il soutient que le salarié travaillait en réalité pour la société Gamma Sécurité Privée et qu'il ne pouvait être également salarié à temps plein de la société France Sécurité Européenne.

L'AGS conclut à l'absence de relation de travail salariée en l'absence de contrat de travail écrit, de bulletin de paie et de justification d'un lien de subordination.

Le contrat de travail à durée indéterminée peut être verbal.

C'est à la personne qui entend se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail d'en apporter la preuve. En présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d'en rapporter la preuve.

En application des dispositions de l'article 109 du code du commerce, la preuve du contrat de travail peut être faite par tous moyens.

En l'espèce, le salarié verse aux débats :

- ses relevés bancaires où apparaissent les virements suivants : 916 euros le 9/05/2014, 590,75 euros le 18/06/2014, 806 euros le 12/09/2014, 270 euros le 17/03/2015, 1 400 euros le 20/05/2015, 1 404 euros le 25/06/2015, 198 euros le 23/07/2015, le détail des virements reçus à partir du 9/5/2014 reprenant bien le nom de la société en totalité 'France Sécurité Européenne' et l'intitulé 'salaire mois X' correspondant au salaire du mois précédent,

- la lettre du 26 octobre 2015 de demande de documents, mentionnant l'absence de plannings de travail reçus.

Au vu de ces éléments, à compter du 9/5/2014, les virements reçus correspondent effectivement à des salaires versés par la société France Sécurité Européenne pour le mois précédant le versement, soit à compter du mois d'avril 2014 conformément à leur libellé et au détail des opérations en virement reçu figurant aux relevés bancaires du salarié.

Il se déduit des salaires reçus ainsi que de la demande de documents envoyée à l'adresse de la société, que M. [S] démontre l'existence d'un contrat de travail apparent verbal, à durée indéterminée à compter d'avril 2014 avec la société France Sécurité Européenne en qualité d'agent de sécurité.

Le mandataire liquidateur ne rapporte pas la preuve du caractère fictif de ce contrat, alors que le salarié était en droit de cumuler deux emplois salariés avec deux employeurs distincts.

Par conséquent, M. [S] était salarié de la société France Sécurité Européenne dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur la prescription des demandes du salarié

L'AGS soulève la prescription de la demande de M. [S], ce dernier ayant attendu plus de trois ans après la date à laquelle il souhaite que soit fixée la rupture de son contrat de travail pour saisir le conseil de prud'hommes.

Le salarié indique qu'il a saisi le conseil de prud'hommes dans le délai légal de deux ans, que ses demandes découlant de la rupture du contrat de travail ne sont pas prescrites.

Le mandataire liquidateur ne conclut pas sur ce point.

Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.

En l'espèce, le salarié, dans sa demande de résiliation, se prévaut d'une date de prononcé au 26 octobre 2015.

Le salarié ayant saisi le conseil de prud'hommes le 30 janvier 2017, soit dans le délai légal de deux ans à compter de la date de rupture du contrat de travail revendiquée, ses demandes découlant de la rupture du contrat de travail ne sont pas prescrites. La fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par l'AGS doit donc être rejetée.

Sur la demande de résiliation

Le salarié demande à la cour de constater qu'une rupture du contrat de travail est intervenue par lettre du 26 octobre 2015, date à laquelle l'employeur n'a pas répondu à ses demandes légitimes. Il conclut que la demande de résiliation est justifiée par les manquements de l'employeur qui a cessé de le payer et de lui fournir du travail, la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le mandataire liquidateur soutient que la rupture du contrat de travail résulte de la démission du salarié, lequel n'a jamais réclamé de travail et fait de demande de rappel de salaire puisqu'il travaillait pour une autre société. Il conclut que le salarié ayant demandé son solde de tout compte, il doit être considéré comme démissionnaire.

L'AGS fait valoir que la demande du salarié s'analyse comme une demande de résiliation judiciaire, que le salarié ne démontre pas avoir travaillé pendant la période alléguée, que la demande de résiliation ne pourrait produire ses effets qu'au jour de la décision à intervenir.

La démission ne se présume pas, elle doit procéder d'une volonté claire et non équivoque du salarié de rompre le contrat de travail.

En l'espèce, il ne ressort d'aucun élément du dossier que le salarié ait remis sa démission de manière claire et non équivoque. La demande du mandataire judiciaire aux fins de voir qualifier la rupture du contrat de travail en démission doit donc être rejetée.

Un salarié est fondé à poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur en cas de manquement, par ce dernier, à ses obligations.

Il appartient au juge de rechercher s'il existe à la charge de l'employeur des manquements d'une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail afin de prononcer cette résiliation, lesquels s'apprécient à la date à laquelle il se prononce.

La résiliation judiciaire peut être prononcée à la date à partir de laquelle le collaborateur n'est plus à la disposition de son employeur.

En l'espèce, l'employeur a manqué à ses obligations en ne fournissant plus de travail à son salarié depuis juin 2015 et en ne lui réglant plus son salaire. Ces manquements sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur à la date du 26 octobre 2015, date à laquelle le salarié a sollicité son solde de tout compte, correspondant au moment où il ne s'est plus tenu à disposition de son employeur.

Ce n'est pas au salarié de rapporter la preuve qu'il est resté à la disposition de l'employeur pour la période antérieure au 26 octobre 2015 comme invoqué par l'AGS.

Par conséquent, il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur au 26 octobre 2015, et de dire qu'elle produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail, dans sa version applicable au litige, le salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté peut prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité correspondant au préjudice subi.

Le salarié justifiant de moins de deux ans d'ancienneté et étant âgé de 40 ans à la date de la rupture du contrat de travail, il a droit à des dommages et intérêts pour licenciement abusif qui seront fixés à la somme de 1 500 euros.

En application des dispositions de l'article R. 1234-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, le salarié a droit à une indemnité légale de licenciement égale à 1/5ème de mois de salaire par année d'ancienneté, soit une somme de 287,86 euros, quantum non contesté par les parties intimées.

Le salarié ayant plus d'un an d'ancienneté a droit en application des dispositions de l'article L. 1234-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, à une indemnité compensatrice de préavis d'une durée d'un mois qu'il convient de fixer à la somme de 1 439,3 euros, outre 143,9 euros au titre des congés payés afférents, quantum non contesté par les parties intimées.

Il convient d'ordonner la délivrance d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle emploi et de bulletins de paie d'avril 2014 à octobre 2015 inclus par le mandataire liquidateur au salarié, sans que le prononcé d'une astreinte soit nécessaire.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ces points sauf en son débouté de l'astreinte.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

En l'espèce, l'absence de remise de bulletin de paie au salarié suffit à établir le travail dissimulé, le caractère intentionnel du travail dissimulé résultant de la durée de cette omission par l'employeur.

Il sera donc alloué au salarié une somme de 8 635,8 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé.

Le jugement attaqué sera infirmé sur ce point.

Sur la garantie de l'AGS

Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA Ile de France Ouest qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et de déclarer que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

Des demandes étant formées à l'encontre de l'AGS et sa garantie étant mise en oeuvre, il n'y a pas lieu à le mettre hors de cause.

Sur les autres demandes

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

Le mandataire liquidateur succombant à la présente instance, en supportera les dépens de première instance et d'appel.

Il devra régler à M. [S] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement sauf en son débouté de l'astreinte,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :

Constate l'existence d'un contrat de travail verbal à durée indéterminée à compter d'avril 2014 entre M. [W] [S] et la société France Sécurité Européenne en qualité d'agent de sécurité,

Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription soulevée par l'AGS CGEA d'Ile de France Ouest,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [W] [S] aux torts de l'employeur à la date du 26 octobre 2015,

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société France Sécurité Européenne la créance de M. [W] [S] aux sommes suivantes:

1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

287,86 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

1 439,3 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

143,9 euros au titre des congés payés afférents

8 635,8 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

Rappelle que les créances ne produisent pas intérêts postérieurement à l'ouverture de la procédure collective,

Ordonne à Maître [I] [G] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société France Sécurité Européenne, de remettre à M. [W] [S] les bulletins de salaire d'avril 2014 à octobre 2015, une attestation pour Pôle emploi et un certificat de travail conformes au présent arrêt,

Déclare le présent arrêt opposable à l'AGS CGEA d'Ile de France Ouest qui ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-17 et L. 3253-19 à 21 du code du travail et déclare que l'obligation de l'AGS de faire l'avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,

Condamne Maître [I] [G] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société France Sécurité Européenne, aux dépens de première instance et d'appel,

Condamne Maître [I] [G] [Z], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société France Sécurité Européenne, à payer à M. [W] [S] une somme de 1 500 euros l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 22/00175
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;22.00175 ?
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