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10/05/2023 | FRANCE | N°21/03837

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 10 mai 2023, 21/03837


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



PAR DEFAUT



DU 10 MAI 2023



N° RG 21/03837

N° Portalis: DBV3-V-B7F-U5J6



AFFAIRE :



S.A.R.L. A [N]



C/



[W] [D]









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 2 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : C

N° RG : 17/02139



Copies exécutoires

et certifiées conformes délivrées à :



Me Isabelle SAMAMA-SAMUEL











le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre : ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

PAR DEFAUT

DU 10 MAI 2023

N° RG 21/03837

N° Portalis: DBV3-V-B7F-U5J6

AFFAIRE :

S.A.R.L. A [N]

C/

[W] [D]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 2 Juin 2020 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de NANTERRE

Section : C

N° RG : 17/02139

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Isabelle SAMAMA-SAMUEL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. A [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Isabelle SAMAMA-SAMUEL, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 196

APPELANTE

****************

Monsieur [W] [D]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

non comparant

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 8 Mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET,

EXPOSE DU LITIGE

M. [W] [D] a été embauché à compter du 22 octobre 2012 selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chauffeur déménageur par la société A. [N], employant habituellement moins de onze salariés.

Par lettre du 24 novembre 2016, la société A. [N] a notifié un avertissement à M. [D].

Par lettre du 23 juin 2017, la société A. [N] a convoqué M. [D] à un entretien préalable à un éventuel licenciement.

Par lettre du 13 juillet 2017, la société A. [N] a notifié à M. [D] son licenciement pour faute grave.

Le 31 juillet 2017, M. [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Nanterre pour contester le bien-fondé de son licenciement et demander la condamnation de la société A. [N] à lui payer des indemnités de rupture.

Par jugement réputé contradictoire du 2 juin 2020, le conseil de prud'hommes (section commerce) a :

- dit que le licenciement de M. [D] est sans cause réelle et sérieuse ;

- condamné la société A. [N] à payer à M. [D] les sommes suivantes :

* 7 877,60 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;

* 2 302,25 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

* 6 604,25 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 660,42 euros au titre des congés payés afférents ;

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [D] du surplus de ses demandes ;

- mis les dépens à la charge de la société A. [N].

Le 24 décembre 2021, la société A. [N] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 17 mars 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société A. [N] demande à la cour d'infirmer le jugement attaqué et, statuant à nouveau, de :

- débouter M. [D] de l'ensemble de ses demandes ;

- à titre subsidiaire, limiter le montant de l'indemnité de préavis à la somme de 3 692 euros et le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à trois mois de salaire ;

- en tout état de cause, condamner M. [D] à lui payer une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

M. [D], auxquelles la déclaration d'appel et les conclusions d'appel ont été signifiées à domicile conformément à l'article 656 du code de procédure civile, ne s'est pas constitué.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 28 février 2023.

SUR CE :

Considérant qu'au préalable, il y a lieu de rappeler qu'aux termes de l'article 954 du code de procédure civile : 'Les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé./ Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte./ La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion./ Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées. / La partie qui conclut à l'infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu'elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance. /La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs' ;

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

Considérant que la lettre de licenciement pour faute grave notifiée à M. [D], qui fixe les limites du litige, est ainsi rédigée :

' (...) Nos griefs portent sur votre attitude récurrente d'insubordination et de violence, et cela depuis plusieurs mois :

- le 27 septembre 2016 vous avez eu un comportement agressif, et de violences verbales à l'égard de vos collègues en présence de notre client [...] lors d'un déménagement à son domicile.

- Nous vous avons signifié le 24 novembre 2016 par lettre recommandée votre attitude agressive envers vos collègues et le contrôle routier dont vous avez fait l'objet, avec constatation par la gendarmerie de prise de stupéfiants. Lors de votre interpellation le véhicule a dû être immobilisé, perturbant fortement les tâches des autres salariés.

En dépit de cette action inadmissible de votre part, nous avons tenté de maintenir notre relation contractuelle espérant un changement d'attitude. Bien au contraire :

- fin février 2017 vous avez insulté une cliente Mme [B] [X] en la traitant de vieille folle, cliente qui nous a adressé un courrier de récrimination mettant en cause notre relation commerciale.

- Le 22 juin 2017 vous avez refusé d'effectuer une tache prévue à votre contrat de travail, alléguant des prétextes fallacieux, contredits par le prestataire auquel nous avons dû avoir recours afin d'éviter un clash avec notre client qui attendait une livraison.

- Nos différents avertissements verbaux relatifs aux agressions verbales envers vos collègues de travail.

Des explications recueillies auprès de vous, au cours de l'entretien du 5 juillet, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à votre sujet.

Cette attitude d'agressivité et d'insubordination détériore considérablement l'image de la société A. [N] au travers des appréciations négatives des clients. De plus, elle nous place dans l'obligation de protéger l'intégrité physique de vos collègues (et clients) régulièrement insultés et agressés par vous.

En conséquence, devant la persistance et la récurrence de ces situations désormais dangereuses, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.(...)' ;

Considérant que la société A. [N] soutient que l'attitude d'agressivité et d'insubordination de M. [D] a persisté au-delà de l'avertissement prononcé à son encontre et que la faute grave qui lui a été reprochée est ainsi constituée ; qu'elle conclut donc à titre principal au débouté des demandes formées en première instance par M. [D] et à titre subsidiaire à une limitation du montant de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Considérant que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise; que la charge de la preuve de cette faute incombe à l'employeur qui l'invoque ;

Qu'en l'espèce, s'agissant du grief tiré d'insultes à une cliente à la fin du mois de février 2017, la société A. [N] se borne à verser un courrier dactylographié, censé émaner, selon l'en tête et la signature, de Mme '[V]', et qui est accompagné d'une copie de carte d'identité au nom distinct de Mme '[V]' ; que cette pièce est donc dépourvue de toute fiabilité ; que le grief n'est donc pas établi ;

Que s'agissant du deuxième grief afférent à la journée du 22 juin 2017, la cour constate l'imprécision intrinsèque du motif, tirée d'un refus d'effectuer une tâche prévue par le contrat de travail, sans qu'il ne soit expliqué en quoi consiste le refus allégué ; que de plus, la société A.[N] se borne à verser sur ce point un simple courrier dactylographié attribué à un M. [P], sans même être accompagné d'une carte d'identité ainsi qu'un autre courrier dactylographié intitulé 'attestation sur l'honneur' signé par un dénommé [O] [U], dépourvu des mentions prévues par l'article 202 du code de procédure civile ; que ces pièces sont donc également dépourvues de toute fiabilité ; que le grief sera donc écarté ;

Que s'agissant du grief tiré d'agression verbale envers les collègues de travail, la société A. [N] se réfère à un courrier manuscrit attribué à Mademoiselle [E] [N], dépourvu des mentions prévues par l'article 202 du code de procédure civile et non accompagné d'un quelconque justificatif d'identité ; que cette pièce est dénuée de valeur probante ; que ce grief n'est donc pas établi ;

Que par ailleurs, la société A. [N] invoque un courrier dactylographié daté du 15 mai 2017, attribué à Mme [G] [K], mentionnant le 'comportement déplorable' de M. [D], qui est dépourvu des mentions prévues par l'article 202 du code de procédure civile, qui n'est accompagné d'aucun justificatif d'identité et qui ne se rattache de surcroît à aucun des griefs mentionnés dans la lettre de licenciement ;

Qu'en outre, le jugement mentionne que M. [D] a contesté la réalité des griefs formulés à son encontre ;

Qu'il résulte de ce qui précède que les faits reprochés à M. [D] ne sont pas établis et que son licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le jugement sera confirmé sur ce point ;

Que M. [D] est donc fondé à réclamer tout d'abord une indemnité compensatrice de préavis ; qu'à ce titre, la société A. [N] fait justement valoir que la rémunération moyenne mensuelle de M. [D] s'élève, au vu de ces bulletins de salaire, à 1 846 euros brut ; qu'il lui sera donc alloué à ce titre une somme de 3 692 euros, outre les congés payés afférents ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Que M. [D] est également fondé à réclamer une indemnité légale de licenciement ; que son montant n'étant pas discuté en appel par la société A. [N], il y a lieu de confirmer l'allocation d'une somme de 2 302,25 euros à ce titre ;

Qu'enfin, M. [D] est fondé, eu égard à l'effectif de moins de onze salariés de l'entreprise au moment de la rupture, à réclamer des dommages-intérêts pour rupture abusive, calculés en fonction du préjudice subi, en application des dispositions de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable au litige ; qu'eu égard à son âge (né en 1976), à son ancienneté (environ 4,5 ans), à sa rémunération, à sa situation postérieure au licenciement (458 jours de chômage selon le jugement non contesté sur ce point), il y a lieu d'allouer à M. [D] une somme de 6 500 euros à ce titre ; que le jugement sera infirmé sur ce chef ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; qu'en outre, la société A. [N], qui succombe majoritairement en son appel, sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel et sera condamnée aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt rendu par défaut,

Confirme le jugement attaqué, sauf en ce qu'il statue sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et sur les dommages-intérêts pour rupture abusive,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Condamne la société A. [N] à payer à M. [D] les sommes suivantes :

- 6 500 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;

- 3 692 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 369,20 euros au titre des congés payés afférents,

Y ajoutant,

Déboute la société A. [N] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société A. [N] aux dépens d'appel,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03837
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;21.03837 ?
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