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10/05/2023 | FRANCE | N°21/03659

France | France, Cour d'appel de Versailles, 19e chambre, 10 mai 2023, 21/03659


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 80A



19e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 10 MAI 2023



N° RG 21/03659

N° Portalis: DBV3-V-B7F-U4OH



AFFAIRE :



[D] [M]



C/



Société IDEMIA FRANCE









Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE

N° Section : E

N° RG : F20/0021

3



Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :



l'AARPI JASPER AVOCATS



SELEURL MONTECRISTO







le :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versail...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

19e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 10 MAI 2023

N° RG 21/03659

N° Portalis: DBV3-V-B7F-U4OH

AFFAIRE :

[D] [M]

C/

Société IDEMIA FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 novembre 2021 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE

N° Section : E

N° RG : F20/00213

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

l'AARPI JASPER AVOCATS

SELEURL MONTECRISTO

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [D] [M]

né le 21 Juillet 1966 à AGEN (47000)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Frédéric SICARD de l'AARPI JASPER AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P82

APPELANT

****************

Société IDEMIA FRANCE

N° SIRET : 340 70 9 5 34

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Frédéric ZUNZ de la SELEURL MONTECRISTO, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : J153

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 8 mars 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Isabelle MONTAGNE, Président,,

Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,

Madame Laure TOUTENU, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Marine MOURET,

EXPOSE DU LITIGE

M. [D] [M] a été embauché, à compter du 2 janvier 2007, selon contrat de travail à durée indéterminée en qualité de directeur marketing produit par la société Oberthur.

Par avenant du 19 octobre 2017, la société IDEMIA FRANCE est devenue l'employeur de M. [M] et ce dernier a été nommé dans le poste de 'responsable équipe produit et portfolio d'offre', au sein de la 'business unit connected objects' sous l'autorité hiérarchique de M. [L], et avec application du statut de cadre dirigeant.

Par lettre du 2 mars 2020, la société IDEMIA FRANCE a notifié à M. [M] son licenciement pour motif économique et impossibilité de reclassement.

Au moment de la rupture du contrat de travail, la société IDEMIA FRANCE employait habituellement au moins onze salariés et la rémunération moyenne mensuelle de M. [M] s'élevait à 11 989,16 euros brut.

Le 8 juillet 2020, M. [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Germain-en-Laye pour contester la validité et, subsidiairement, le bien-fondé de son licenciement et pour demander la condamnation de la société IDEMIA FRANCE à lui payer des dommages-intérêts à ce titre ainsi que diverses sommes.

Par un jugement du 15 novembre 2021, le conseil de prud'hommes (section encadrement) a :

- dit que le licenciement pour motif économique de M. [M] est justifié ;

- condamné la société IDEMIA FRANCE à payer à M. [M] les sommes suivantes :

* 35 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauche ;

* 10 000 euros à titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que les intérêts légaux sont dus à compter du jour du prononcé du jugement ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné M. [M] aux dépens.

Le 15 décembre 2021, M. [M] a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions du 5 juillet 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, M. [M] demande à la cour de :

1°) infirmer le jugement attaqué et :

- condamner la société IDEMIA FRANCE à lui payer les sommes suivantes :

* 13 178,73 euros à titre de rappel de trente-cinq jours au titre de la réduction du temps de travail, avec intérêts de droit à compter de l'introduction de l'instance ;

* 71 934,99 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

* 137 875 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul ou subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* subsidiairement, 137 875 euros à titre de dommages-intérêts pour violation des critères d'ordre de licenciement ;

* 137 875 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauche ;

- 'dire et juger qu'il reste actionnaire du 'fonds Manco' tant au titre de 50 actions gratuites Idemia Group de classe E qu'au titre des actions de la société IDEMIA FRANCE Galaxy Manco SAS qu'il a souscrites pour une valeur initiale de 50 000 euros, ce sauf à pouvoir les céder à son seul gré, sans que ces droits aient pu être impactés par son licenciement, et ce jusqu'à la sortie collective' ;

- ordonner à la société IDEMIA FRANCE de lui remettre un bulletin de salaire conforme à l'arrêt à intervenir ;

2°) confirmer le jugement sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et y ajoutant condamner la société IDEMIA FRANCE à lui payer une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions du 14 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, la société IDEMIA FRANCE demande à la cour de :

- confirmer le jugement attaqué sur le débouté des demandes de M. [M] ;

- infirmer le jugement attaqué sur les dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauche et sur l'application de l'article 700 du code de procédure civile et statuant à nouveau, débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes et condamner ce dernier à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 28 février 2023.

SUR CE :

Sur la demande relative aux jours au titre de la réduction du temps de travail (JRTT) :

Considérant que M. [M] soutient que le statut de cadre dirigeant ne pouvait lui être appliqué et qu'il était donc en droit de bénéficier de jours au titre de la réduction du temps de travail ; qu'il réclame en conséquence une somme de 13 178,73 euros correspondant à 35 jours au titre de cette réduction ;

Que la société IDEMIA FRANCE soutient que le statut de cadre dirigeant a été à bon droit appliqué à M. [M] et qu'il ne pouvait donc prétendre à des jours au titre de la réduction du temps de travail ; qu'elle conclut donc au débouté de la demande ;

Considérant qu'en application de l'article L. 3111-2 du code du travail, sont considérés comme cadres dirigeants les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l'importance implique une grande indépendance dans l'organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement ; que ces critères cumulatifs impliquent que seuls relèvent de cette catégorie les cadres participant à la direction de l'entreprise ; qu'à défaut d'un accord collectif prévoyant une indemnisation, l'absence de prise des jours de repos au titre de la réduction du temps de travail n'ouvre droit à une indemnité que si cette situation est imputable à l'employeur ;

Qu'en l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats, et notamment d'un organigramme de la société IDEMIA FRANCE, que M. [M] a été hiérarchiquement rattaché à M. [L], directeur de la business unit connected objects, ce dernier étant lui-même rattaché au dirigeant de la société IDEMIA FRANCE, et que cette 'business unit' s'assimile à une simple direction au sein de la société IDEMIA FRANCE ; que M. [M] était ainsi placé à deux niveaux sous le dirigeant de la société IDEMIA FRANCE ;

Que par ailleurs, la société IDEMIA FRANCE ne démontre en rien que M. [M] disposait d'une grande indépendance dans l'organisation de son emploi du temps et qu'il était habilité à prendre des décisions de façon largement autonome ;

Que la société IDEMIA FRANCE se borne en outre à soutenir que M. [M] percevait une rémunération variable spécifique à la catégorie des cadres dirigeants, sans démontrer que sa rémunération se situait dans les niveaux les plus élevées des systèmes de rémunération pratiqués dans l'entreprise ;

Qu'il résulte de ce qui précède que la société IDEMIA FRANCE ne démontre pas que M. [M] pouvait légalement se voir appliquer le statut de cadre dirigeant ;

Que M. [M] est donc fondé à soutenir qu'il pouvait bénéficier de jours au titre de la réduction du temps de travail ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de lui allouer une somme de 13 178,73 euros à titre de dommages-intérêts pour l'absence de prise de jours au titre de la réduction du temps de travail imputable à l'employeur, étant précisé que ce montant n'est pas discuté par ce dernier ;

Que s'agissant d'une créance de nature indemnitaire, il y a lieu de rappeler que les intérêts légaux sur cette somme courent à compter du présent arrêt ;

Que le jugement sera donc infirmé sur ce chef ;

Sur l'indemnité pour travail dissimulé :

Considérant qu'aux termes de l'article L.8221-5 du code du travail, 'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales' ;

Qu'en l'espèce, M. [M] soutient à ce titre que la société IDEMIA FRANCE a 'contourné les dispositions légales' en matière d'allocation de jours au titre de la réduction du temps de travail en lui appliquant indûment le statut de cadre dirigeant ; que ce faisant, il n'allègue toutefois aucun des faits énumérés à l'article L. 8221-5 du code du travail et propres à caractériser une dissimulation d'emploi salarié ; qu'il y a donc lieu de confirmer le débouté de la demande d'indemnité pour travail dissimulé ;

Sur la demande au titre des actions :

Considérant qu'en appel, M. [M] demande à la cour de dire qu'il ' reste actionnaire du fonds Manco tant au titre de 50 actions gratuites Idemia Group de classe E qu'au titre des actions de la société IDEMIA FRANCE Galaxy Manco SAS' ;

Que cette qualité d'actionnaire n'est toutefois pas contestée par la société IDEMIA FRANCE ;

Qu'en l'absence donc de litige sur ce point, la cour ne peut que constater que cette prétention est sans objet ;

Sur la validité du licenciement et ses conséquences :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail : 'Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif local, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français' ; qu'en application de l'article L. 1134-1 du même code, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l'employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;

Qu'en l'espèce, M. [M] soutient que son licenciement est nul au motif que cette mesure est en réalité fondée sur son âge et qu'elle est donc discriminatoire ;

Que toutefois, il se borne à alléguer qu'il était 'le deuxième plus âgé du service', sans verser le moindre élément sur ce point ;

Que dans ces conditions, M. [M] ne présente pas des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte liée à l'âge ;

Qu'il y a donc lieu de le débouter de sa demande de nullité du licenciement et de sa demande d'indemnité afférente ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;

Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : 'Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :

1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l'évolution significative d'au moins un indicateur économique tel qu'une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires, des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés (...)

2° A des mutations technologiques ;

3° A une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

4° A la cessation d'activité de l'entreprise.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat de travail s'apprécie au niveau de l'entreprise.

Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise s'apprécient au niveau de cette entreprise si elle n'appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d'activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Le secteur d'activité permettant d'apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.

Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées au présent article, à l'exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants et de la rupture d'un commun accord dans le cadre d'un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 et suivants' ;

Qu'en l'espèce, au soutien du licenciement pour motif économique de M. [M], la lettre de licenciement invoque une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;

Que toutefois, dans ses conclusions, la société IDEMIA FRANCE invoque un motif distinct tiré de difficultés économiques, appréciées de surcroît non pas au niveau de l'entreprise mais de la seule 'business unit' dans laquelle était affectée M. [M], cet anglicisme recouvrant une simple direction commerciale de l'entreprise se consacrant à une clientèle spécifique ;

Qu'elle ne justifie par aucune pièce du motif de réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité mentionné dans la lettre de rupture ;

Qu'il s'ensuit que le licenciement de M. [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse contrairement ce qu'ont estimé les premiers juges et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de la méconnaissance de l'obligation de reclassement ; que le jugement sera donc infirmé sur ce point ;

Qu'en conséquence, M. [M] est fondé à réclamer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse d'un montant compris, eu égard à son ancienneté de treize années complètes, entre 3 et 11,5 mois de salaire brut en application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail ; qu'eu égard à son âge (né en 1966), à sa rémunération, à sa situation postérieure au licenciement (chômage justifié jusqu'en octobre 2021), il y a lieu d'allouer une somme de 120 000 euros à ce titre ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Sur les dommages-intérêts pour violation de la priorité de réembauche :

Considérant qu'en application de l'article L. 1233-45 du code du travail lorsque le salarié demande à bénéficier de la priorité de réembauche durant un délai d'un an à compter de la date de la rupture de son contrat de travail l'employeur l'informe de tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification ; qu'en application de l'article L. 1235-13 du même code, en cas de non-respect de la priorité de réembauche prévue à l'article L. 1233-45, le juge accorde au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ; qu'en cas de litige, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a satisfait à ses obligations, soit en établissant qu'il a proposé les postes disponibles, soit en justifiant de l'absence de tels postes ;

Qu'en l'espèce, il est constant que M. [M] a demandé à bénéficier de la priorité de réembauche dans les conditions prévues par les dispositions du code du travail mentionnées ci-dessus, que la société IDEMIA FRANCE lui a proposé un poste à ce titre le 28 avril 2020 et que l'appelant a manifesté son intérêt pour cet emploi ;

Qu'il ressort des débats que la société IDEMIA FRANCE ne justifie d'aucune suite à cette proposition de réembauche, ni même du sort de ce poste ; que la société IDEMIA FRANCE n'établit donc pas avoir satisfait à son obligation de priorité de réembauche ;

Qu'en conséquence, M. [M] est fondé à réclamer l'allocation d'une somme de 11 989,16 euros, correspondant à un mois de salaire, à titre d'indemnité pour violation de la priorité de réembauche, l'appelant ne justifiant pas d'un plus ample préjudice ; que le jugement sera infirmé sur ce point ;

Sur la remise d'un bulletin de salaire conforme à l'arrêt :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu d'ordonner à la société IDEMIA FRANCE de remettre à M. [M] un bulletin de salaire conforme au présent arrêt ;

Sur le remboursement des indemnités de chômage par l'employeur :

Considérant qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par la société IDEMIA FRANCE, aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [M] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Considérant qu'eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il statue sur ces deux points ; qu'en outre, la société IDEMIA FRANCE, qui succombe majoritairement en appel, sera condamnée à payer à M. [M] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel ainsi qu'aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement attaqué en ce qu'il statue sur le bien-fondé du licenciement pour motif économique, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, les dommages-intérêts pour non-respect de la priorité de réembauche, la demande relative aux jours au titre de la réduction du temps de travail et les intérêts légaux afférents,

Confirme le jugement attaqué pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Dit que le licenciement de M. [D] [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société IDEMIA FRANCE à payer à M. [D] [M] les sommes suivantes :

- 13 178,73 euros à titre de dommages-intérêts pour l'absence de prise de jours au titre de la réduction du temps de travail, avec intérêts légaux à compter du présent arrêt,

- 120 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 11 989,16 euros à titre d'indemnité pour violation de la priorité de réembauche,

Ordonne à la société IDEMIA FRANCE de remettre à M. [D] [M] un bulletin de salaire conforme au présent arrêt,

Ordonne le remboursement par la société IDEMIA FRANCE aux organismes concernés, des indemnités de chômage qu'ils ont versées le cas échéant à M. [D] [M] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt et ce dans la limite de six mois d'indemnités,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société IDEMIA FRANCE à payer à M. [D] [M] une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,

Condamne la société IDEMIA FRANCE aux dépens d'appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Dévi POUNIANDY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 19e chambre
Numéro d'arrêt : 21/03659
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;21.03659 ?
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